GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 31155C Inscrit le 7 août 2012
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Audience publique du 14 mars 2013 Appel formé par M. … …, …, contre un jugement du tribunal administratif du 27 juin 2012 (n° 28850 du rôle) dans un litige l’opposant à une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu
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Vu l’acte d’appel, inscrit sous le numéro 31155C du rôle, déposé au greffe de la Cour administrative le 7 août 2012 par Maître Christian ROLLMANN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … …, retraité, demeurant à L-…, dirigé contre un jugement rendu par le tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg le 27 juin 2012, l’ayant débouté de son recours tendant à la réformation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 13 avril 2011 (n° C 16423 du rôle) rejetant comme non fondée sa réclamation introduite en date du 19 janvier 2011 contre le bulletin de l’impôt sur le revenu des personnes physiques de l’année 2008, émis à son égard en date du 22 décembre 2010 ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe de la Cour administrative le 4 octobre 2012 ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 5 novembre 2012 par Maître Christian ROLLMANN pour compte de Monsieur … … ;
Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe de la Cour administrative le 14 novembre 2012 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;
Le rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Christian ROLLMANN et Madame le délégué du gouvernement Monique ADAMS en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 13 décembre 2012.
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En vertu d’une transaction extrajudiciaire signée en date du 13 juin 2008 entre Monsieur … … et son ancien employeur, la société …S.A., ci-après désignée par la « société …», suite au licenciement de Monsieur … par courrier du 22 novembre 2007, ce dernier se vit accorder, entre autres à travers l’article 5 de ladite transaction, la somme de … euros en contrepartie à une extension de la clause de non-concurrence prévue dans son contrat de travail.
Par courrier de son mandataire du 27 juin 2008, Monsieur … demanda au bureau de … du service de la retenue d’impôts sur les traitements et salaires de l’administration des Contributions directes de lui confirmer que le montant préindiqué est imposable comme rémunération extraordinaire en vertu des articles 11 et 132 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, ci-après désignée par « LIR ».
Par courrier du 10 septembre 2008, le préposé du bureau RTS de …, ci-après désigné par le « bureau RTS », communiqua au mandataire de l’époque de Monsieur … le mode d’imposition des différents montants alloués suivant la convention transactionnelle précitée, et qualifia plus particulièrement le montant susvisé de … euros comme imposable à titre de rémunération non périodique pour l’année 2008. Ladite position fut confirmée par un courrier du préposé du bureau RTS du 25 novembre 2008.
En date du 22 décembre 2010, le bureau d’imposition … de la section des personnes physiques du service d’imposition de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par le « bureau d’imposition », émit à l’égard de Monsieur … , imposé collectivement avec son épouse, un bulletin rectificatif de l’impôt sur le revenu pour l’année 2008, ci-après désigné par « le bulletin », après y avoir été invité par la direction de l’administration des Contributions directes ayant constaté que Monsieur … avait été imposé pour l’année 2008, sans qu’il ait été tenu compte notamment de la somme précitée de … euros.
Contre ce bulletin, Monsieur … fit introduire, par courrier de son mandataire du 17 janvier 2011, une réclamation auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après dénommé le « directeur ».
Par une décision datée du 13 avril 2011, référencée sous le n° C 16423, le directeur rejeta cette réclamation comme non fondée. Le volet de la décision ayant trait à l’imposition du montant précité de … euros, qui est seul critiqué devant les juridictions administratives, est motivé comme suit :
« Vu les deux requêtes introduites le 19 janvier 2011 par Maître Claude Bleser, au nom du sieur … …, […], pour réclamer, d'une part, contre la rectification du bulletin de l'impôt sur le revenu des personnes physiques de l'année 2008, émis le 22 décembre 2010, et, d'autre part, pour autant que de besoin contre le courrier du préposé du bureau d'imposition …, émis le 30 décembre 2010 ;
Vu les §§ 228, 234 et 301 de la loi générale des impôts (AO) ;
Vu le dossier fiscal ;
Considérant qu'il est loisible au directeur des contributions de joindre des affaires en vertu de son pouvoir discrétionnaire, si elles lui paraissent suffisamment connexes (Conseil d'État, 06 février 1996, n° 8925 du rôle) ;
qu'il échet en l'espèce, dans l'intérêt d'une bonne administration de la loi, de joindre les réclamations pour y statuer en une seule et même décision ;
I.
Considérant que la réclamation contre la rectification du bulletin de l'impôt sur le revenu des personnes physiques de l'année 2008 a été introduite par qui de droit dans les forme et délai de la loi, qu'elle est partant recevable ;
Considérant que le bulletin originaire, émis en date du 30 septembre 2009, n'avait pas encore acquis force de chose décidée dans la mesure où le bulletin rectificatif a été émis dans le délai dans lequel une réclamation aurait pu être adressée au directeur ; qu'en conséquence la réclamation interjetée contre le bulletin rectificatif remet en question l'imposition dans son intégralité conformément au paragraphe 243 AO, sans que la limitation résultant du paragraphe 234 AO ne soit à prendre en considération ;
Considérant que le réclamant fait grief au bureau d'imposition d'avoir fixé l'impôt sur le revenu pour l'année 2008 à un montant de … euros, sans reconnaître son indemnité de licenciement comme rémunération extraordinaire ;
[…] Considérant qu'en vertu du § 243 AO, une réclamation régulièrement introduite déclenche d'office un réexamen intégral de la cause, la loi d'impôt étant d'ordre public ;
qu'à cet égard le contrôle de la légalité externe de l'acte doit précéder celui du bien-
fondé, qu'en l'espèce la forme suivie par le bureau d'imposition ne prête pas à critique ;
Considérant qu'en l'année 2008 a été mise à la disposition du contribuable, à l'âge de 56 ans, une indemnité de départ légale d'un montant de … euros, une indemnité transactionnelle de l'ordre de … euros et un montant de … euros, qualifié de « bonus divers (indemnité, vente voiture) » ;
que le bureau RTS y compétent a scindé en un premier temps l'indemnité brute totale de … euros en les montants exempts, en vertu de l'article 115, alinéa 9 L.I.R., d'une part pour l'indemnité de départ légale de … euros, et d'autre part pour l'indemnité transactionnelle à concurrence de … euros, conformément aux dispositions légales telles qu'en vigueur en 2008, le montant restant de l'ordre de … euros devenant imposable d'après le barème de la retenue d'impôt sur les rémunérations non-périodiques ;
qu'il résulte donc que ce sont ces … euros que la requête introductive entend par revenus extraordinaires, pour être censés se rapporter à plus d'une année, au sens de l'article 132 (1) 2. a) L.I.R., à imposer selon les taux de l'article 131 (1) litt. b) L.I.R. ;
que cependant en un deuxième temps, le bureau R.T.S. a ramené l'indemnité de … euros précitée à … euros par un recalcul de l'avantage résultant de la voiture rétrocédée ;
Considérant que l'article 132 (1) 2. litt. a) L.I.R. qualifie de revenus extraordinaires imposables par application de l'article 131 (1) litt. b) L.I.R. «les revenus extraordinaires provenant de l'exercice d'une occupation salariée au sens du numéro 4 de l'article 10 qui se rattachent du point de vue économique à une période de plus d'une année et qui, pour des raisons indépendantes de la volonté du bénéficiaire et de celle du débiteur des revenus, deviennent imposables au titre d'une seule année d'imposition » ;
Considérant que le premier problème dans l'application de cette disposition consiste ainsi dans l'étendue de la condition que l'imposabilité au cours d'une seule année d'imposition soit indépendante des volontés du débiteur et du bénéficiaire des revenus ;
Considérant que les travaux parlementaires justifient cette exigence du fait que « cette disposition a pour but d'empêcher qu'il ne soit fait un usage abusif de la faveur de l'article 157 (correspondant à l'article 131 du texte promulgué) » et que « d'une façon générale les payements de suppléments de salaires et de traitements pour le passé ne sont pas à considérer comme indépendants de la volonté de l'employeur toutes les fois que ces paiements ne sont pas imposés par une décision judiciaire ou une disposition légale ou réglementaire » (doc. parl. 5714, ad art. 158, p. 276; cf. également trib. adm. 22 juillet 1998, n° 10486 du rôle) ;
Considérant que le but affiché du législateur est ainsi de limiter strictement la notion des raisons indépendantes de la volonté du débiteur des revenus à celles qui sont étrangères à la propre sphère d'action et de décision de celui-ci ;
Considérant qu'en l'espèce, l'indemnité transactionnelle a été contractée par les parties à leur convenance et d'un commun accord, de sorte qu'elle ne saurait être qualifiée d'indépendante de la volonté des débiteur et bénéficiaire ;
qu'il s'ensuit que l'indemnité, sans préjudice des exemptions accordées en vertu de l'article 115 (9) L.I.R., ne saurait être qualifiée de revenu extraordinaire au sens de l'article 132 (1) 2. a) L.I.R. ;
Considérant d'ailleurs que le montant total de l'indemnité transactionnelle de départ accordée au contribuable correspond aux montants usuels en la matière, sans qu'il n'y ait besoin de la scinder en « bonus divers », redéfinis encore comme « indemnité » et, d'ailleurs « voiture » ;
Considérant enfin qu'une clause de non-concurrence contractuellement définie dès le départ suffit à tous les égards et ne saurait engendrer au départ ni une autre « indemnité » ni un « bonus divers » ;
[…] Par ces motifs dit la réclamation dirigée contre l'avis du bureau R.T.S. irrecevable ;
reçoit la réclamation contre le bulletin de l'impôt sur le revenu de l'année 2008 en la forme ;
la rejette comme non fondée ».
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 13 juillet 2011, Monsieur … fit introduire un recours tendant à la réformation de la décision directoriale précitée du 13 avril 2011.
Dans son jugement du 27 juin 2012, le tribunal administratif rejeta d’abord le moyen d’ordre procédural invoqué par le demandeur et fondé sur une violation, par le directeur, du § 204 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, dite « Abgabenordnung » (AO), en ce qu’il aurait omis d’examiner l’applicabilité éventuelle d’autres dispositions de l’article 132 LIR que celle invoquée dans la réclamation, le tribunal ayant décidé qu’il ne se dégageait pas des éléments du dossier que le directeur n’ait pas procédé à un tel réexamen tout en relevant que le directeur avait expressément fait référence au paragraphe 243 AO et qu’il n’aurait pas été obligé de prendre position dans sa décision par rapport à une disposition qu’il estimait ne pas être applicable et qui, par ailleurs, n’avait pas été clairement invoquée par le réclamant.
Après avoir précisé que les parties étaient d’accord pour retenir que les conditions de l’article 132 (1) 2. a) LIR examiné par le directeur n’étaient pas remplies, le tribunal déduisit des numéros 1 et 2 de l’article 11 LIR ainsi que de l’article 132 (1) numéro 4 LIR que tant l’indemnité au sens de l’article 11 numéro 1 LIR, que le dédit au sens de l’article 11 numéro 2 LIR constituent une recette de substitution versée en remplacement d’autres recettes. Il exclut alors la qualification de dédit pour l’abandon d’une participation aux bénéfices de la société …, au motif que les primes de performance antérieurement allouées au demandeur étaient fondées sur sa qualité de salarié. Par rapport à une éventuelle qualification comme dédit alloué pour l’abandon ou le non-exercice d’une activité, le tribunal considéra qu’il faudrait nécessairement qu’il existe une perspective raisonnable de toucher les recettes provenant de l’activité à laquelle le demandeur avait renoncé et qu’il lui appartenait d’établir à la fois que les sommes ainsi touchées par lui rentrent dans la qualification de la catégorie de revenus visée et qu’une relation économique réelle existe entre le montant alloué à titre de dédit et les recettes que le dédit est censé remplacer, en expliquant concrètement le quantum des recettes envisagées et à quel titre elles le sont.
En l’espèce, le tribunal estima que la relation économique entre la renonciation à une activité indépendante et le paiement litigieux n’avait pas été établie à suffisance de droit et de fait par le demandeur, au motif que celui-ci était resté en défaut d’expliquer et d’établir concrètement par rapport à quelle recette le dédit avait été déterminé et plus particulièrement de chiffrer ces recettes qu’il aurait pu obtenir à défaut de la clause de non-concurrence étendue souscrite par lui, le demandeur ayant fait tantôt référence à une participation aux bénéfices de son ancien employeur qu’il aurait pu toucher pendant les années 2007 à 2011, tantôt à la participation aux bénéfices qu’il aurait pu toucher dans sa propre entreprise.
D’après le tribunal, le demandeur n’avait pas non plus établi une perspective raisonnable de réaliser les recettes par rapport auxquelles le dédit aurait été payé, ceci compte tenu de l’affirmation de la partie étatique qu’en raison de son âge, le paiement de la somme en question à titre de dédit serait purement hypothétique. De même, le demandeur n’aurait pas davantage utilement ébranlé l’affirmation du délégué du gouvernement suivant laquelle sous le couvert d’une renonciation à une clause de non-concurrence, il se serait en réalité vu accorder une indemnité de rupture de son contrat de travail qui pourrait tout au plus être qualifiée d’avantage au sens de l’article 11 numéro 1 LIR et qui ne serait pas visée par l’article 132 (1) numéro 4 LIR.
Sur base de ces considérations, le tribunal conclut que le demandeur n’avait pas établi que la somme touchée par lui en vertu de l’article 5 de la convention transactionnelle du 13 juin 2008 rentre dans la catégorie des dédits visés à l’article 11 numéro 2 LIR auquel renvoie l’article 132 (1) numéro 4 LIR et rejeta en conséquence le recours comme non fondé.
Par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 7 août 2012, Monsieur … a fait régulièrement relever appel de ce jugement du 27 juin 2012.
A l’appui de son appel, Monsieur … expose avoir été engagé à durée indéterminée au service de la société …en tant que directeur du département mécanique en date du 2 mai 1995, son contrat de travail ayant contenu à l’époque une clause de non-concurrence liée à l’article 41 de la loi modifiée du 24 mai 1989 sur le contrat de travail, limitée dans le temps à raison de douze mois après la fin du contrat et dans l’espace au territoire du Grand-Duché de Luxembourg. Ce contrat aurait encore été modifié en sa faveur à deux reprises successivement le 17 novembre 1997 et le 25 janvier 2007 pour changer le treizième mois de salaire annuel en une prime proportionnelle, variable en fonction du bénéfice net avant impôts dégagé par l’atelier mécanique avec comme limite inférieure le montant dudit treizième mois de salaire.
Suite à son licenciement intervenu par courrier du 22 novembre 2007 avec un préavis de six mois et dispense de travail à partir du 1er décembre 2007, il aurait signé le 13 juin 2008 avec son ancien employeur une transaction, aux termes de laquelle il s’était vu allouer une indemnité brute forfaitaire pour licenciement litigieux de … euros, une indemnité de départ légale de … euros et une indemnité brute forfaitaire de l’ordre de … euros. Il précise que cette dernière indemnité forfaitaire unique lui aurait été allouée en contrepartie de son acceptation de renoncer à exercer toute activité indépendante, concurrente à celle de la société ……, et ceci de façon illimitée dans le temps et partout dans le monde, concrétisée à travers une extension afférente de la clause de non-concurrence contenue dans son contrat de travail.
L’appelant précise ensuite qu’il aurait été régulièrement payé pour son travail effectué pour la société …et qu’à la date du 13 juin 2008, il n’aurait pas eu de « doléance de paiement de salaire pour son travail presté auparavant ». D’un autre côté, le respect par lui-
même de cette clause étendue lui imposant une obligation absolue de ne pas entrer en concurrence avec son ancien patron procurerait à ce dernier « une tranquillité en matière de prolifération de savoir-faire secret à partir de sa source, à savoir le sieur … … » en raison de l’interdiction pour celui-ci de s’établir à son propre compte et de concurrencer ainsi son ancien patron dans un secteur de mécanique peu commune, d’autant plus que le non-respect de cet engagement de non-concurrence pourrait coûter à l’appelant la somme de … euros convenue entre parties comme étant due dans cette hypothèse à son ancien patron.
L’appelant fait valoir que le revenu de … euros mis à sa disposition par la société … ne lui aurait pas été payé en vertu « d’un point de vue économique se rattachant à des périodes antérieures à 2007 » de manière à ne pas pouvoir être considéré comme ayant été mis à sa disposition avec retard puisque son obligation de non-concurrence se situerait postérieurement au 13 juin 2008, date de la transaction. Selon l’appelant, le même revenu de … euros lui aurait été alloué pour permettre le respect dans son chef d’une promesse de non-
concurrence dont la durée serait supérieure à 12 mois et partant également supérieure à un ou plusieurs exercices fiscaux. L’appelant estime que le caractère imposable au cours d’une année d’imposition indépendamment de la volonté du débiteur des revenus résulterait des dispositions combinées des articles 1134, 1142 et 1234 du Code civil, en ce qu’en contrepartie de la disposition de sa part à respecter son engagement de non-concurrence, la société …aurait été tenue d’éteindre son obligation de paiement et de payer le service ainsi acheté, tout comme parallèlement la société …aurait été titulaire d’une créance de dommages et intérêts à son encontre dans l’hypothèse où il n’exécuterait pas correctement son obligation de non-concurrence.
Par rapport à l’argumentation du délégué du gouvernement relative à la qualification du montant de … euros comme « golden handshake » ou « parachute doré », l’appelant se réfère à une étude enregistrée le 4 juillet 2007 à la présidence de l’Assemblée nationale française présentée par le député français Sébastien HUYGHE afin de délimiter la définition du parachute doré et de le distinguer de l’indemnité allouée en l’espèce à l’appelant. Ainsi, le parachute doré serait le prix connu d’avance à payer par une partie lorsqu’elle entendrait se défaire de son dirigeant. La clause ferait ainsi partie d’un mandat social ou d’un contrat de travail, mais serait en tout cas signée préalablement au fait qui déclenche le paiement, contrairement à la clause de l’indemnité transactionnelle qui ne serait convenue qu’après la rupture du contrat de travail. Les parachutes dorés se diviseraient en 4 grandes catégories, à savoir, premièrement, les montants forfaitaires sur base d’un nombre d’années de salaires, deuxièmement, le rachat à un prix prédéterminé d’actions dans les mains du dirigeant sortant, troisièmement, une pension complémentaire de retraite et, quatrièmement, enfin des avantages matériels ou en nature conférés au dirigeant sortant. Les indemnités en contrepartie des clauses de non-concurrence et les retraites conditionnées par des services particuliers rendus préalablement par le dirigeant ne feraient jamais partie du lot des parachutes dorés. L’appelant insiste sur le fait qu’il n’aurait jamais occupé un mandat social auprès de la société …, qu’il n’aurait pas non plus convenu à l’avance le montant et les conditions d’un parachute doré dans son contrat de travail et qu’il aurait consenti le 13 juin 2008, donc postérieurement à son licenciement, à une clause sévère de non-concurrence dont la contrepartie aurait été évaluée par les signataires à … euros et dont le non-respect serait grevé d’une pénalité de … euros.
En ce qui concerne l’évaluation et la preuve concrète de la potentialité de l’exercice d’une activité concurrente indépendante de sa part et plus particulièrement du potentiel de réalisation de revenus afférents, l’appelant se réfère au certificat de travail de son ancien employeur du 31 mai 2008 qui retracerait les efforts personnellement entrepris par lui en sa qualité de chef de la section mécanique de la société …. L’appelant renvoie également aux rémunérations non périodiques et aux participations aux bénéfices qui lui auraient été payées chaque année par la société …, les certificats et relevés par lui versés en cause prouvant ainsi des paiements de sommes supérieures à … euros par an sur les 12 années rapportées et ce au seul titre de participations aux bénéfices de la section mécanique dont il était le responsable.
L’appelant ajoute qu’il aurait bénéficié durant l’année 2008 d’une rémunération mensuelle de quelque … euros en moyenne et que la valeur moyenne gagnée annuellement en raison de son activité avoisinerait les … euros, de sorte qu’en cas d’exercice indépendant de son activité il serait en mesure de facturer pour 11 mois par an et 150 heures de travail par mois à un taux horaire de plus ou moins 100 euros.
En ce qui concerne la perspective du développement commercial d’une éventuelle activité indépendante future, l’appelant rappelle qu’il possèderait un diplôme d’ingénieur en mécanique délivré par l’Institut technique supérieur de Fribourg en Suisse, qu’il aurait occupé une position de direction et de contrôle au sein de la société …pour y avoir été responsable de 5 sections de production et que dans cette position, il aurait été sollicité à plus d’une reprise par de tierces sociétés pour donner son conseil ou son avis. Ainsi, la société … et la société tchèque … auraient conclu un accord pour monter une filiale commune tchèque appelée … active dans le secteur professionnel de l’appelant, orientée entre autres vers le marché russe et dont l’appelant aurait assuré la direction technique. En outre, l’appelant affirme avoir été impliqué dans le cadre d’un contrat de coopération technique dans le secteur de la mécanique de précision médicale dentaire avec la société luxembourgeoise … en tant que spécialiste délégué par son ex-employeur. Enfin, il rappelle qu’il aurait été nommé le 16 juin 2011 au conseil d’administration de la société anonyme luxembourgeoise … en raison de ses qualifications spécialisées, cette société étant active dans la conception et la construction de produits industriels mécaniques employés dans l’industrie énergétique au niveau international. L’appelant souligne qu’âgé de 56 ans au moment de son licenciement et disposant d’une forte expérience professionnelle, il aurait pu user de tous ces contacts établis pour démarcher des clients et des fournisseurs de son ex-employeur afin de leur expliquer les points forts et les faiblesses de son ancien employeur en vue de leur montrer les créneaux où ce dernier gagnait de l’argent et de leur divulguer l’évolution potentielle des produits et marques de son ancien employeur. Il aurait cependant renoncé à toutes ces prises de contact et à toute activité en ce sens en raison de son engagement de non-concurrence convenu dans la transaction du 13 juin 2008.
L’appelant rappelle encore que la somme indemnitaire unique de … euros prévue en sa faveur lui aurait été allouée en contrepartie de son obligation absolue de ne pas entrer en concurrence avec son ancien patron et que cette disposition serait protégée par l’article 1134 du Code civil, tout comme il aurait déjà été retenu en jurisprudence que la clause de non-
concurrence serait prévue pour le temps qui suit le départ du salarié licencié et non pas pour le passé. Relativement à la condition tenant à la mise à disposition du revenu pour des raisons indépendantes de la volonté du débiteur et du bénéficiaire de ce revenu, l’appelant considère que ces raisons d’indépendance découleraient de la combinaison des articles 1134 et 1234 du Code civil en ce qu’en contrepartie de sa disposition à respecter l’engagement de non-concurrence, l’ancien employeur aurait éteint son obligation par le paiement des … euros, mais qu’en contrepartie il se serait protégé sur base de l’article 1142 du Code civil en prévoyant une créance de dommages et intérêts de … euros en cas de défaut de respecter l’obligation de non-concurrence par l’appelant.
Quant à l’article 11 numéro 2 LIR, l’appelant estime que d’éventuels revenus futurs d’une entreprise personnelle auraient été imposables au Luxembourg au titre de bénéfice d’une profession libérale, que le revenu de … euros lui versé en raison de son engagement de non-concurrence serait proportionnel à la valeur marchande de son activité professionnelle annuelle sur une période de plusieurs exercices, de manière que par une juste application des textes fiscaux aux faits énoncés et prouvés, ledit revenu de … euros aurait dû être qualifié de revenu extraordinaire à imposer au quart du taux global.
Le délégué du gouvernement relève par contre que l’appelant avait tout simplement omis de mentionner dans sa déclaration d’impôt pour l’année 2008 toutes les indemnités transactionnelles lui allouées hormis l’indemnité légale de départ de … euros, par ailleurs entièrement exempte d’impôts, tout comme son ancien employeur, « pour des raisons qui ne sont pas claires », ne se serait pas non plus conformé à l’avis du préposé du bureau RTS en ce que le montant total dû en tant que retenue sur traitements et salaires n’aurait pas été viré comme de droit au receveur des contributions et en ce qu’il aurait établi un certificat de salaire manifestement incomplet au vu de l’absence de mention de l’indemnité transactionnelle de … euros. Ce serait suite à la découverte de cette irrégularité que le bureau d’imposition a procédé à l’établissement d’un bulletin d’impôt rectificatif prenant en compte l’intégralité des sommes allouées à l’appelant à travers la transaction du 13 juin 2008. Le représentant étatique en déduit que l’intention actuelle de l’appelant de faire qualifier la somme litigieuse de … euros en tant que revenu extraordinaire ne reflèterait pas son intention initiale et véritable de vouloir cacher cette somme au fisc pour la faire ainsi échapper à toute imposition, cette analyse se trouvant corroborée par le fait qu’une somme de … couronnes tchèques perçue de la part de société … n’avait pas non plus été déclarée par l’appelant mais seulement révélée par l’autorité compétente tchèque dans le cadre d’un échange de renseignements international.
Le délégué du gouvernement estime que ce serait à juste titre que les premiers juges ont fait droit à l’argumentation étatique suivant laquelle l’indemnité litigieuse ne constituerait pas un revenu extraordinaire au sens de l’article 132 (1) numéro 2 a) LIR par confirmation des motifs déjà exposés dans la décision directoriale du 13 avril 2011. Il considère que les premiers juges auraient pareillement refusé à juste titre de qualifier l’indemnité litigieuse de revenu extraordinaire au sens de l’article 132 (1) numéro 4 LIR, au motif que l’appelant n’aurait pas établi que la somme ainsi touchée par lui en vertu de la transaction du 13 juin 2008 rentrerait dans la catégorie du dédit visé à l’article 11 numéro 2 LIR, les premiers juges ayant plus particulièrement constaté à bon droit l’absence d’explication concrète par rapport aux recettes auxquelles le prétendu dédit aurait été supposé se substituer et de la preuve d’une perspective raisonnable de réaliser les recettes par rapport auxquelles le dédit aurait été payé. De même, en instance d’appel, l’appelant resterait encore en défaut d’apporter les explications réclamées par les premiers juges et la preuve de ces affirmations. Le représentant étatique considère que la référence, par l’appelant, à la théorie générale des contrats, voire à l’article 1134 du Code civil, serait insuffisante à cet égard au vu du principe de l’autonomie du droit fiscal dont une caractéristique majeure serait l’application du principe de l’appréciation d’après des critères économiques. En l’espèce, l’indemnité litigieuse accordée à l’appelant se traduirait par un « golden handshake » ou « parachute doré » qui aurait été déguisée pour les besoins de la cause fiscale en une indemnité en contrepartie d’une extension de la clause de non-concurrence, de manière à s’analyser en un « Scheingeschäft » au sens du § 5 de la loi d’adaptation fiscale du 16 octobre 1934, dite « Steueranpassungsgesetz » (StAnpG). Tout en admettant qu’une telle clause de non-concurrence aurait eu toute sa justification lors de la signature du contrat de travail, le représentant étatique estime que son extension à une durée illimitée lors de la signature de la transaction serait dépourvue de toute signification réelle ou économique à un moment où l’appelant aurait été en fin de carrière et aurait pratiquement atteint l’âge de la retraite.
La partie étatique se prévaut encore du fait que l’appelant a bénéficié d’une mesure d’aide au réemploi et qu’il a travaillé pour la société … s.a. au cours des années 2008 à 2011 et que l’appelant a été nommé administrateur de la société … s.a. en date du 16 juillet 2012.
Elle considère ensuite que les affirmations de l’appelant concernant l’évaluation du potentiel monétaire et commercial d’une activité concurrente de sa part serait contredite par le fait qu’il aurait ainsi été obligé de s’adresser à l’Agence pour le développement de l’emploi afin de trouver une nouvelle occupation et d’obtenir une mesure d’aide au réemploi, la réalité des « éloges développées de manière extensive … au sujet des capacités professionnelles de la partie appelante » ayant plutôt impliqué que cette dernière « n’aurait dû avoir aucun mal à trouver de manière immédiate un poste prestigieux y correspondant » sans entrer en concurrence avec son ancien employeur. Ces éléments confirmeraient qu’en réalité l’appelant n’aurait présenté plus aucun risque concurrentiel pour son ancien employeur et que la clause de non-concurrence n’aurait eu aucun autre objet que de déguiser le « parachute doré » de … euros, l’étude française versée en cause par la partie appelante n’étant sans aucune utilité dans la présente cause.
Finalement, le délégué du gouvernement se réfère encore à l’article 95 LIR, lequel inclurait parmi les revenus d’une occupation salariée à la fois les émoluments et avantages obtenus avant la cessation de l’occupation et les allocations obtenues après ladite cessation par rappel d’appointement ou de salaire ou à titre d’indemnité de congédiement. L’indemnité litigieuse représenterait partant une prime ou un avantage dont le montant a été convenu dans le contrat de travail et dès lors une rémunération provenant directement d’une occupation salariée au sens de l’article 95 LIR qui serait imposable en tant que revenu salarié et non pas sous la qualification invoquée par l’appelant, une telle indemnité représentant une somme unique ne pouvant de manière évidente s’analyser en une recette au sens de l’article 11 LIR.
Le délégué du gouvernement relève enfin que l’article 95 (1) 2. LIR viserait par ailleurs également de manière explicite les indemnités de congédiement comme revenu salarié imposable.
Il convient de préciser liminairement que, si les parties restent en désaccord sur la qualification à donner à la somme de … euros touchée par l’appelant en vertu de l’article 5 de la transaction signée avec son ancien employeur, l’appelant n’a plus maintenu en instance contentieuse son argumentation fondée sur l’article 132 (1) numéro 2 a) LIR et qu’il soutient en appel, tout comme devant le tribunal, que la somme en question ne proviendrait pas de l’exercice d’une occupation salariée, impliquant qu’elle ne tombe pas dans le champ d’application de l’article 132 (1) numéro 2 a) LIR, mais qu’elle serait à qualifier de dédit au sens de l’article 132 (1) numéro 4 LIR soit pour l’abandon ou le non-exercice d’une activité, soit pour l’abandon d’une participation aux bénéfices ou de la perspective de pareille participation.
L’article 132 (1) numéro 4 LIR qualifie de revenus extraordinaires imposables par application de l’article 131 (1) b) LIR « les indemnités et dédits visés respectivement aux numéros 1 et 2 de l’article 11 dans la mesure où ils remplacent des revenus se rapportant à une période autre que l’année d’imposition ».
L’article 11 LIR définit en ses numéros 1 et 2 les notions visées à l’article 132 (1) numéro 4 LIR comme « 1. les indemnités et avantages accordés pour perte ou en lieu et place de recettes, à condition qu’il s’agisse de recettes qui, en cas de réalisation, auraient fait partie d’un revenu net passible de l’impôt ; […] 2. le dédit alloué pour l’abandon ou le non-exercice d’une activité, ainsi que pour l’abandon d’une participation au bénéfice ou de la perspective de pareille participation, à condition qu’en cas de réalisation les recettes provenant de l’activité ou de la participation eussent fait partie d’un revenu net passible de l’impôt ».
Il résulte de l’économie des articles 11, numéros 1 et 2, ainsi que 132 (1) numéro 4 LIR que tant l’indemnité au sens de l’article 11, numéro 1 LIR, que le dédit au sens de l’article 11, numéro 2 LIR constituent une recette de substitution versée en remplacement d’autres recettes.
Le dédit au sens de l’article 11, numéro 2 LIR est destiné à compenser le dommage découlant de la non-perception des revenus qu’aurait produits dans le futur l’activité à l’abandon ou au non-exercice de laquelle le contribuable s’est engagé pour le futur, de manière à compenser des « pertes de recettes essuyées par la suppression de certaines sources de revenus » (projet de loi concernant l’impôt sur le revenu, commentaire des articles, doc. parl. 5714, ad article 14, p. 12) et à présenter ainsi un certain caractère indemnitaire.
Le non-exercice d’une activité en tant que cause à la base de l’allocation du dédit peut viser tant la renonciation à exercer durant un certain temps une activité déjà exercée que la renonciation à entamer dans le futur une activité même non encore exercée jusque lors (cf.
HERRMANN, HEUER, RAUPACH : EStG-Kommentar, § 24, Anm. 50, renvoyant à BFH 23 janvier 2001, XI R 7/00, BStBl. II 2001, 541).
En l’espèce, l’allocation à l’appelant de la somme de … euros est justifiée dans la transaction du 13 juin 2008 par l’acceptation, par l’appelant, d’une clause de non-
concurrence étendue, par rapport à celle convenue dans son contrat de travail initial du 15 décembre 1995, à la fois dans le temps, en passant d’une année à une durée non limitée, et dans l’espace du Grand-Duché au niveau mondial, à travers laquelle il s’est engagé à ne pas exercer une activité indépendante dans le domaine de la production de l’atelier mécanique dont il avait la responsabilité qui pourrait concurrencer la production de son ancien employeur.
Dès lors, dans la mesure où, d’après les stipulations de la transaction du 13 juin 2008, la somme de … euros a été payée à l’appelant en contrepartie de sa renonciation à exercer dans le futur une activité indépendante de nature à produire des revenus imposables, elle peut a priori rentrer dans la définition du dédit pour non-exercice d’une activité au sens de l’article 11 numéro 2 LIR.
Cependant, la reconnaissance de cette qualification et le traitement comme revenu extraordinaire prévu par l’article 132 (1) numéro 4 LIR sont subordonnés à la condition « que les contribuables aient eu la perspective bien fondée d’entrer en possession des revenus remplacés par l’indemnité » (projet de loi concernant l’impôt sur le revenu, commentaire des articles, doc. parl. 5714, ad article 158, p. 277), de manière que la Cour rejoint les premiers juges en ce qu’ils ont retenu comme prémisse l’existence d’une perspective raisonnable de toucher les recettes provenant de l’activité à laquelle il a été renoncé pour que le paiement d’une somme à titre de dédit puisse être mis en relation avec l’abandon ou le non-exercice d’une activité, la preuve afférente incombant au contribuable en ce qui concerne tant le principe du paiement d’un dédit que la relation économique réelle entre le montant alloué à titre de dédit et le quantum des recettes que le dédit est censé remplacer.
D’après les données constantes et concordantes du dossier soumis à la Cour, l’appelant, détenteur d’un diplôme d’ingénieur ITS, section des sciences industrielles appliquées, de l’Institut Technique Supérieur de Fribourg, avait été engagé le 2 mai 1995 par la société …et fut responsable de la division mécanique de la société …ayant comporté un effectif allant jusqu’à 80 personnes, tout comme il fut nommé fondé de pouvoir en décembre 1997. Il se dégage encore du certificat de travail du 31 mai 2008 émis par la société …que l’appelant a réussi à faire certifier la division sous sa responsabilité selon à la fois la norme de qualité DIN EN ISO 9002 et la norme environnementale EN ISO 14001, qu’il a poussé l’automation des différents volets de la production et que sous sa direction, le chiffre d’affaires a quadruplé et le rendement a pu être porté à plus de 20%, tandis que l’incidence du coût du personnel sur la profitabilité fut réduite de moitié. Le même certificat de travail fait encore état des capacités de négociations commerciales et de relations externes de l’appelant. Les éléments versés en cause documentent encore la participation de l’appelant à différentes négociations avec des partenaires étrangers et des participations de 2% puis 5% aux bénéfices dégagés par la division sous sa responsabilité lui accordées annuellement par son employeur en tant que primes de performance. Pour le surplus, il se dégage des explications fournies à l’audience des plaidoiries que Monsieur … a été licencié en raison de la volonté de l’actionnaire principal de la société …de faire entrer son fils à un poste de responsabilité dans l’entreprise et que la clause de non-concurrence et l’indemnité y relative ont été motivées par la crainte dudit actionnaire que Monsieur … pourrait accepter de communiquer son savoir-faire à certains concurrents étrangers qui seraient alors en mesure d’optimiser leur propre production et de concurrencer sérieusement la société … opérant dans un créneau spécifique. L’ensemble de ces éléments propres à l’espèce sous examen indiquent l’acquisition dans le chef de l’appelant d’une expérience et d’un savoir-faire importants qui lui auraient permis d’exercer une activité indépendante de conseil à des entreprises notamment étrangères dans son ancien domaine de compétences.
Cette conclusion ne se trouve pas utilement énervée par le renvoi, par le délégué du gouvernement, au fait que Monsieur … s’est apparemment adressé à l’Agence pour le développement de l’emploi et qu’il a bénéficié d’une aide au réemploi, ces éléments pouvant trouver une explication valable dans la spécificité de ses compétences lui ayant rendu difficile de trouver un emploi sans déplacement ou déménagement. En outre, ces faits sont la preuve de sa volonté de continuer à rester actif à l’âge de 56 ans.
Par voie de conséquence, il y a lieu d’admettre que, dans le chef de Monsieur … , l’existence, au moment de la conclusion de la transaction du 13 juin 2008, d’une perspective raisonnable de toucher dans le futur les recettes provenant d’une activité indépendante concurrente à celle de son ancien employeur à laquelle a renoncé en contrepartie de l’allocation du dédit conventionnellement fixé, découle à suffisance de l’ensemble des éléments soumis en cause.
En ce qui concerne le quantum du dédit à hauteur de … euros, l’appelant se réfère valablement à sa rémunération touchée durant les cinq premiers mois de l’année 2008 pour évaluer les revenus potentiels d’une activité indépendante. Or, même si le revenu annuel de 165.000 euros, sur lequel table l’appelant, paraît quelque peu élevé, le montant global de … euros à entrevoir jusqu’à la retraite de Monsieur … , étant rappelé qu’il était âgé de 56 au moment de son licenciement, ne paraît pas exagéré par rapport à la durée potentielle d’une activité indépendante dans son chef.
Il découle de l’ensemble de ces éléments que le montant de … euros alloué à l’appelant par la société …à travers la transaction du 13 juin 2008 est à qualifier comme dédit au sens de l’article 11 numéro 2 LIR, et non pas comme indemnité de congédiement tel qu’allégué par le délégué du gouvernement, et qu’il est partant à considérer comme revenu extraordinaire rentrant dans le champ d’application de l’article 132 (1) numéro 4 LIR.
L’appel sous examen est partant justifié et le jugement entrepris encourt dès lors la réformation dans ce sens.
PAR CES MOTIFS la Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties en cause, reçoit l’appel du 7 août 2012 en la forme, au fond, le déclare justifié, partant, par réformation du jugement entrepris du 27 juin 2012, déclare le recours en réformation justifié et réforme la décision directoriale du 13 avril 2011 en ce sens que le montant de … euros alloué à l’appelant à travers la transaction du 13 juin 2008 conclue avec la société …S.A. est à qualifier comme dédit au sens de l’article 11 numéro 2 LIR et partant comme revenu extraordinaire rentrant dans le champ d’application de l’article 132 (1) numéro 4 LIR, renvoie l’affaire devant le directeur de l’administration des Contributions directes pour exécution, condamne l’Etat aux dépens des deux instances.
Ainsi délibéré et jugé par:
Francis DELAPORTE, vice-président, Serge SCHROEDER, premier conseiller, Martine GILLARDIN, conseiller, et lu à l’audience publique du 14 mars 2013 au local ordinaire des audiences de la Cour par le vice-président, en présence du greffier en chef de la Cour Erny MAY.
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