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27/03/2012 | LUXEMBOURG | N°29616C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 27 mars 2012, 29616C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro 29616C du rôle Inscrit le 15 décembre 2011

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Audience publique du 27 mars 2012 Requête en nomination d'un commissaire spécial introduite par Monsieur … …, …, en matière de fonction publique Vu la requête en nomination d'un commissaire spécial, inscrite sous le numéro 29616C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 15 décembre 2011 par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au ta

bleau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … …, commissaire h...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro 29616C du rôle Inscrit le 15 décembre 2011

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Audience publique du 27 mars 2012 Requête en nomination d'un commissaire spécial introduite par Monsieur … …, …, en matière de fonction publique Vu la requête en nomination d'un commissaire spécial, inscrite sous le numéro 29616C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 15 décembre 2011 par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … …, commissaire hors cadre affecté au service …, demeurant à L-…, aux fins de prendre en lieu de place du ministre de l'Intérieur et à la Grande Région, sinon du directeur général de la police, "les mesures nécessaires à l'exécution du jugement [du tribunal administratif] du 26 janvier 2011, confirmé par arrêt du 5 juillet 2011";

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 13 janvier 2012 par le délégué du gouvernement;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 13 février 2012 par Maître Jean-Marie BAULER au nom de la partie demanderesse;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 23 février 2012 par le délégué du gouvernement;

Vu les pièces versées au dossier;

Le rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Jonathan HOLLER, en remplacement de Maître Jean-Marie BAULER, et Madame la déléguée du gouvernement Jacqueline GUILLOU-JACQUES en leurs plaidoiries à l’audience publique du 20 mars 2012.

En application de l'article 24 du règlement grand-ducal du 27 avril 2007 déterminant les conditions de recrutement, d'instruction et d'avancement du personnel policier, prévoyant qu'aucun commissaire de police ne peut accéder au grade de commissaire en chef s'il n'a pas accepté, et ceci selon la priorité établie par le directeur général de la Police grand-ducale en fonction des besoins du service, un des emplois énumérés à ladite disposition, le directeur général de la Police établit, le 21 décembre 2007, la note de service n° 105/2007 établissant le tableau énumérant les postes permettant d'accéder au grade P7 de commissaire en chef.

Le 6 janvier 2009, le directeur général de la Police prit à l'égard de Monsieur … …, commissaire hors cadre affecté au service …, une décision de refus de le faire bénéficier de la promotion au poste de commissaire en chef. – Un recours hiérarchique auprès du ministre de la Justice fut rejeté par décision du 8 avril 2009.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 20 juillet 2009, Monsieur … fit introduire un recours contentieux contre les décisions du directeur général de la Police du 6 janvier 2009 et de la décision ministérielle confirmative du 8 avril 2009 et par jugement du 26 janvier 2011, le tribunal rejeta son recours comme n'étant pas fondé.

En instance d'appel, la Cour administrative retint qu'il se dégage des articles 23 et 24 du règlement grand-ducal du 27 avril 2007, précité, qu'en principe, la promotion des commissaires au grade de commissaire en chef a lieu à l'ancienneté; qu'il peut être dérogé à cette règle par le directeur général de la Police qui peut établir des critères différents d'avancement pour les catégories d'agents occupant des emplois visés par les dispositions de l'article 24 et que le directeur peut ainsi, par exemple, assurer une répartition géographique équilibrée des personnes occupant des postes à responsabilité. Elle ajouta que la contrepartie de ce pouvoir de fixer des critères d'avancement dérogeant à la règle de l'ancienneté consiste dans l'obligation du directeur de la Police de respecter ces critères et de ne pas y déroger au cas par cas, sous peine de verser dans l'arbitraire. Elle constata d'autre part que le règlement grand-ducal du 27 avril 2007, précité, ne prévoit pas de règles spécifiques pour les agents placés hors cadre, que la note de service n° 105/2007 ne vise pas, de manière particulière, les agents placés hors cadre et qu'il ne se dégageait pas non plus des pièces versées ou des renseignements fournis que les agents ayant bénéficié d'avancements au grade P7 sans correspondre aux critères fixés par ladite note de service aient été des agents placés hors cadre. Elle en conclut qu'en accordant à des agents ne répondant pas aux critères établis par la note de service n° 105/2007 une promotion au grade de commissaire en chef, alors que ceux-ci bénéficiaient d'une ancienneté inférieure à celle de Monsieur …, le directeur général de la Police et, sur recours hiérarchique, le ministre de la Justice, avaient violé les articles 23 et 24 du règlement grand-ducal du 27 avril 2007, de sorte que leurs décisions afférentes étaient illégales.

Par conséquent, la Cour annula la décision du directeur général de la Police du 6 janvier 2009 et celle, confirmative, du ministre de la Justice du 8 avril 2009 portant refus de faire bénéficier Monsieur … d'une mesure transitoire en vue d'accéder au grade de commissaire en chef.

Exposant que par courrier du 2 août 2011 (en réalité il s'agit d'un courrier du 18 juillet 2011), il avait interrogé le directeur général de la Police sur ses intentions et que celui-ci avait répondu, le 26 juillet 2011, qu'il avait demandé des instructions au ministre de l'Intérieur et à la Grande Région quant aux suites à donner à l'arrêt de la Cour du 5 juillet 2011 mais que, dans la suite, l'administration resta inactive à son égard tandis que le directeur général de la Police avait procédé, dans l'intervalle, à la nomination au poste de commissaire en chef, d'un autre commissaire bénéficiant d'une ancienneté inférieure à la sienne, Monsieur …, par requête déposée le 15 décembre 2011 au greffe de la Cour administrative, a sollicité la nomination d'un commissaire spécial avec la "mission de prendre en lieu et place du ministre de l'Intérieur et à la Grande Région sinon du directeur général de la Police les mesures nécessaires à l'exécution du jugement du 26 janvier 2011, confirmé par l'arrêt du 5 juillet 2011." Il y a lieu de mentionner d'emblée que l'arrêt du 5 juillet 2011 n'a pas confirmé, mais réformé le jugement du 26 janvier 2011.

Le délégué du gouvernement s'oppose à la demande au motif que l'arrêt en question ne prononce pas de renvoi devant le ministre de l'Intérieur et à la Grande Région ou le directeur général de la Police, alors que l'article 84 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif dispose qu'un commissaire spécial peut être nommé lorsque le juge administratif a renvoyé une affaire devant l'autorité compétente et que celle-ci omet de prendre une décision en se conformant au jugement ou à l'arrêt.

Ce moyen n'est pas fondé. En cas d'annulation d'une décision administrative, les parties sont remises dans la situation dans laquelle elles se trouvaient avant la prise de l'acte annulé. Au cas où l'administration avait été saisie d'une demande et que la décision prise suite à cette demande est annulée, elle est à nouveau saisie, par le seul effet de l'annulation, de ladite demande et elle doit y statuer à nouveau, sans que le juge administratif ne doive, formellement, lui renvoyer l'affaire, exception faite de l'hypothèse où le juge constate que, malgré l'annulation, l'affaire ne doit plus donner lieu à une nouvelle décision administrative ou de celle où il se dégage des circonstances qu'une telle décision ne doit plus être prise.

Il s'agit dès lors de savoir si, par l'effet de l'annulation du refus de nommer Monsieur … au poste de commissaire en chef, le directeur général de la Police, légalement obligé de se conformer à l'arrêt de la Cour, devait procéder à cette nomination.

Monsieur … estime qu'il n'y a aucun empêchement à ce qu'il profite désormais de la nomination au poste de commissaire en chef. Une telle nomination ne causerait aucun préjudice aux commissaires en chef d'ores et déjà nommés. Par ailleurs, l'administration n'aurait pas eu d'états d'âme pour procéder à des nominations d'autres agents que ceux qui, selon l'arrêt de la Cour, y avaient droit. Ceux-ci devraient partant bénéficier à leur tour d'une telle nomination, en quelque sorte a fortiori. Par ailleurs, la nomination, depuis l'arrêt du 5 juillet 2011, d'un autre agent bénéficiant d'une ancienneté inférieure à Monsieur …, témoignerait de ce qu'il n'existerait aucun empêchement légal à une promotion similaire de celui-ci.

La demande de Monsieur … ne prend pas en compte que, dans son arrêt du 5 juillet 2011, la Cour avait précisé non seulement que l'illégalité consistant dans le refus de la promotion de celui-ci au grade P7 de commissaire en chef en question ne pouvait en l'espèce entraîner que l'annulation dudit refus et non celle de la nomination des agents qui avaient à tort bénéficié d'une telle promotion, ces décisions n'ayant pas été attaquées, mais surtout que, pareillement, Monsieur … ne pouvait pas demander à la Cour de dire qu'il devait bénéficier de la promotion au grade P7, une telle mesure dépendant de la disponibilité globale de postes à responsabilité du niveau de commissaire en chef.

En l'absence d'une telle disponibilité – aucune des parties au litige n'ayant conclu à l'existence d'une telle disponibilité – le refus de nomination de Monsieur … est et reste illégal, comme l'a constaté la Cour dans son arrêt du 5 juillet 2011, mais la sanction de cette illégalité ne peut se résoudre qu'en des dommages et intérêts à lui allouer dans le cadre d'une action en responsabilité des pouvoirs publics, les juridictions administratives étant cependant incompétentes pour en connaître, par application de l'article 84 de la Constitution.

Il suit des considérations qui précèdent que la demande en nomination d'un commissaire spécial est à rejeter.

Eu égard à l'échec de la demande principale, la demande accessoire en allocation d'une indemnité de procédure de 1.500,- € à Monsieur … est également à rejeter.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant à l'égard de toutes les parties, reçoit la demande en la forme, au fond, la déclare non justifiée et en déboute, condamne le demandeur aux dépens de l'instance, rejette sa demande en allocation d'une indemnité de procédure.

Ainsi délibéré et jugé par :

Georges RAVARANI, président, Serge SCHROEDER, conseiller, Lynn SPIELMANN, conseiller, et lu par le président en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en-tête, en présence de la greffière de la Cour Anne-Marie WILTZIUS.

s. WILTZIUS s. RAVARANI Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 22 novembre 2016 Le greffier de la Cour administrative 5


Synthèse
Numéro d'arrêt : 29616C
Date de la décision : 27/03/2012

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2012-03-27;29616c ?

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