N° 69 / 2011 pénal.
du 24.6.2011 Not. 11125/00/CD Numéro 2824 du registre.
La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg, formée conformément à la loi du 7 mars 1980 sur l'organisation judiciaire, a rendu en son audience publique extraordinaire du vendredi vingt-quatre juin deux mille onze, dans la poursuite pénale dirigée contre :
X.), né le (…) à Luxembourg, demeurant à L-(…), (…), actuellement détenu au Centre pénitentiaire de Luxembourg, demandeur en cassation, comparant par Maître Philippe PENNING, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, en présence du MINISTERE PUBLIC et de la partie civile :
A.) , demeurant à A-(…), (…), défendeur en cassation, comparant par Maître Arsène KRONSHAGEN, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, l’arrêt qui suit :
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LA COUR DE CASSATION :
Sur le rapport de la présidente Marie-Paule ENGEL et sur les conclusions de l’avocat général Jean ENGELS ;Vu l’arrêt attaqué rendu le 21 avril 2010 par la Cour d’appel, dixième chambre, sous le n° 170/10 X. ;
Vu la déclaration de pourvoi faite le 20 mai 2010 au greffe de la Cour supérieure de justice par Maître Philippe PENNING au nom et pour compte de X.) ;
Vu le mémoire en cassation signifié le 17 juin 2010 par X.) à A.) et déposé le 21 juin 2010 au greffe de la Cour ;
Vu le mémoire en réponse signifié le 14 juillet 2010 par A.) à X.) et déposé le 15 juillet 2010 au greffe de la Cour ;
Sur les moyens d’irrecevabilité et de déchéance du pourvoi opposés par A.) :
Attendu que A.) se rapporte à prudence de justice quant à l’observation des formalités et des délais à respecter par le demandeur en cassation et quant à la régularité de la signification du mémoire en cassation ;
Attendu que le mémoire en cassation, signifié le 17 juin 2010 à la partie civile, a été déposé le 21 juin 2010 ; que le demandeur en cassation a donc observé la prescription de l’article 43, alinéa 2, de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, l’alinéa 3 de l’article 388 du Code d’instruction criminelle disposant que celui qui doit avoir signifié un acte de procédure dans un délai déterminé est réputé l’avoir fait dans ce délai si la remise de la lettre recommandée au bureau des postes a eu lieu avant son expiration.
Attendu qu’il résulte des indications de l’exploit de signification et du récépissé de dépôt que l’huissier instrumentant a transmis copie de l’exploit avec le mémoire en cassation et une traduction en langue allemande, en double exemplaire, sous pli recommandé avec demande d’avis de réception au bureau des postes à Luxembourg ;
Que le mémoire a donc été signifié conformément aux articles 381 et 388 du Code d’instruction criminelle ;
Attendu que le dépôt du mémoire en cassation a été fait par X.) le 21 juin 2010 ; que le 20 juin 2010 ayant été un dimanche, il a été fait dans le délai prévu par la loi du 30 mai 1984 portant 1) approbation de la convention européenne sur la computation des délais signée à Bâle le 16 mai 1972 2) modification de la législation sur la computation des délais ;
D’où il suit que les moyens de la partie civile sont à rejeter ;
Sur les faits :
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que X.) avait été condamné par le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière correctionnelle, du chef d’abus de confiance à une peine d’emprisonnement et à une amende ainsi qu’au paiement d’un montant indemnitaire à la partie civile A.) ; que sur appel au pénal et au civil du prévenu et appel au pénal du ministère public, la Cour d’appel confirma au pénal le jugement entrepris ; qu’elle maintint encore la fixation du préjudice de la partie civile à laquelle avaient procédé les juges de première instance mais tint compte dans la condamnation civile d’une somme se trouvant bloquée à la banque BQUE2.) Suisse suite à une saisie pratiquée sur le compte du prévenu par les autorités suisses ;
Sur le premier moyen de cassation :
tiré « de la violation de l’article 491 du Code pénal, pour insuffisance de motifs valant absence de base légale, et de l’article 6§1, §2 et §3 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme ;
en ce que l’arrêt attaqué a déclaré les appels non fondés et partant ;
aux motifs que Cour étant en mesure de statuer sur la prévention libellée à charge de X.) sans devoir prendre en considération les documents argués de faux par X.) .
(…) … c’est à bon droit que les juges de première instance ont retenu X.) dans les liens de la prévention d’infraction d’abus de confiance » alors que la défense avait critiqué les premiers juges ayant refusé de faire expertiser avant tout autre progrès en cause plusieurs documents, plus amplement spécifiés dans l’arrêt entrepris, que le prévenu suspectait d’être des blancs seings ou antidatés, alors que ces pièces étaient indispensables pour déterminer la propriété des fonds apparemment détournés par le prévenu ;
et que la partie civile se basait sur ces documents pour faire étayer son préjudice ;
et que méconnaît les droits de la défense, l’arrêt attaqué qui refuse à l’inculpé sa 3 demande à voir ordonner une expertise afin de déterminer la fausseté de documents soumis aux débats et qui auraient dû permettre à la défense de définir la réelle étendue des relations entre l’inculpé et la soi-disant victime et de déterminer les obligations contractuelles réciproques dans le cadre de l’infraction d’abus de confiance reprochée au prévenu;
et que l’existence d’un contrat est un élément constitutif de l’infraction d’abus de confiance ;
et qu’ en déclarant le prévenu coupable de l’infraction d’abus de confiance tout en refusant de faire droit à la demande d’expertise des documents suspectés par la défense comme étant des blancs seings ou antidatés et permettant de déterminer l’étendue des relations contractuelles et des obligations réciproques entre le prévenu et la prétendue victime, la Cour d’appel a violé les droits de la défense et la présomption d’innocence du prévenu, ainsi que l’article 491 du Code pénal, tout en ne motivant pas à suffisance de droit les éléments constitutifs de l’infraction retenue » ;
Mais attendu que sous le couvert du grief de défaut de base légale et de violation de l’article 6, paragraphes 1er, 2 et 3, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales le moyen ne tend qu’à remettre en discussion l’utilité de l’institution d’une expertise pour examiner certains documents suspectés par le prévenu d’être des blancs-seings ou d’être antidatés ;
que l’utilité de cette mesure d’instruction pour la manifestation de la vérité a été souverainement appréciée par les juges du fond qui ont par des motifs suffisants rejeté la demande du prévenu tendant à voir ordonner une expertise ;
Que le moyen ne saurait dès lors être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation :
tiré « de la violation de l’article 491 du Code pénal, pour insuffisance de motifs valant absence de base légale, et de l’article 6§1, §2 et §3 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme ;
en ce que l’arrêt attaqué a déclaré les appels non fondés et partant ;
aux motifs que lorsque celle-ci tend à faire prononcer une condamnation en vertu d’un préjudice fondé sur une créance certaine et liquide, pour attendre la liquidation d’une créance encore incertaine et indéterminée que le prévenu entend opposer en compensation.
4 La demande d’un sursis à statuer en attendant que le volet pendant au cabinet d’instruction relatif à la relation professionnelle ayant existé entre A.) et X.) soit définitivement instruit est partant à écarter.
(…) … c’est à bon droit que les juges de première instance ont retenu X.) dans les liens de la prévention d’infraction d’abus de confiance » alors qu’ Il est constant en cause qu’une instruction pénale est toujours en cours au cabinet d’instruction (réf. Parquet 1319/99/CD, réf Cabinet d’instruction 1218/99 E.N.), portant notamment sur la détermination du ou des propriétaires de sociétés appartenant au prévenu et à la prétendue victime et relative à et encore sur l’identité du bénéficiaire économique de la société SOC1.) international (Panama) destinataire supposé des fonds prétendument détournés ;
et que méconnaît les droits de la défense, ainsi que les textes sus-visés, l’arrêt attaqué qui refuse à l’inculpé sa demande en surseoir à statuer dans l’attente d’une décision dans une autre affaire toujours en phase d’instruction et de nature à influencer la qualification et l’étendue des obligations réciproques liant le prévenu à la prétendue victime ;
et que l’existence d’un contrat est un élément constitutif de l’infraction d’abus de confiance et en n’admettant pas l’issue de l’instruction pénale de nature à influencer sur la qualification et l’étendue des obligations contractuelles réciproques entre le prévenu et la prétendue victime, la Cour d’appel a insuffisamment motivé son arrêt ;
et qu’ en déclarant le prévenu coupable de l’infraction d’abus de confiance tout en refusant de faire droit à la demande de la défense de surseoir à statuer dans l’attente de la clôture de l’instruction pénale susceptible d’avoir une influence sur la détermination de la relation contractuelle entre le prévenu et la prétendue victime, la Cour d’appel a violé les droits de la défense et la présomption d’innocence du prévenu, ainsi que l’article 491 du Code pénal, en ne motivant pas à suffisance de droit un des éléments constitutifs de l’infraction retenue » ;
Attendu que les juges du fond déterminent librement les éléments de fait qui sont nécessaires pour former leur conviction et apprécient souverainement la pertinence d’une demande en sursis en attendant l’issue d’une autre affaire pénale aux fins de recueillir des éléments de fait supplémentaires ;
Qu’en retenant, sur base des déclarations du prévenu, l’existence d’un contrat liant celui-ci à A.) avec remise à titre précaire de la somme que le ministèrepublic reproche au prévenu d’avoir dissipée, et en considérant que le préjudice causé était réel, les conditions de la compensation n’étant pas remplies, les juges du fond ont suffisamment motivé leur décision quant au refus d’ordonner un sursis à statuer, sans encourir les griefs visés au moyen ;
Que le moyen ne saurait dès lors être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation :
tiré « de la violation de l’article 458 du Code pénal et de l’article 35 de la loi modifiée du 10 août 1991 sur la profession d’avocat et du principe de la loyauté de la preuve en matière pénale visée par les articles 6§1, 6§2 et 6§3 de la Convention Européenne des droits de l’homme ;
en ce que l’arrêt attaqué a déclaré les appels non fondés et partant ;
aux motifs que appartenait à B.) seul de faire valoir une impossibilité de témoigner en se retranchant derrière son secret professionnel» ;
alors que l’avocat est soumis au respect du secret professionnel, donc du devoir de ne divulguer aucune information relative à son client, dont le non-respect est sanctionné pénalement ;
et que la déclaration d’un témoin tenu au secret professionnel entraîne la nullité du procès-verbal de déposition lorsqu’elle comporte la révélation d’une information protégée ;
et qu’ aucune distinction n’est faite entre les activités de défense et les activités de conseil d’un avocat ;
et que seul le client peut délier son avocat du secret professionnel ;
et que Même en cas de cessation des relations entre le client et son avocat, ce dernier demeure tenu au secret professionnel et qu’ il se dégage de l’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, qu’il est interdit d’administrer des preuves obtenues en violation des 6 droits de la défense ainsi que des preuves déloyales ou illégales ;
et que la Cour d’Appel n’a pas infirmé que le témoin B.) était l’avocat du prévenu et de la partie civile ;
et qu’ en admettant le témoignage d’un avocat qui déposait sous la foi du serment dans une affaire pénale poursuivie à l’encontre de son client et en présence de la partie civile qui est également son client, sans pour autant rechercher si les clients avaient préalablement délié leur avocat du respect du secret professionnel, mais en admettant qu’il appartenait à l’avocat seul de faire valoir une impossibilité de témoigner en se retranchant derrière son secret professionnel, la Cour a admis l’administration d’une preuve illégale ou déloyale, de sorte qu’elle a violé les textes sus-visés » ;
Attendu que la Cour d’appel a retenu correctement qu’il appartenait à B.) seul de faire valoir une impossibilité de témoigner en se retranchant derrière son secret professionnel ;
Qu’il est fait exception par l’article 458 du Code pénal à l’interdiction de révéler des secrets confiés aux dépositaires des secrets par profession au cas où ceux-ci sont appelés à rendre témoignage en justice ; que l’article 35 de la loi sur la profession d’avocat n’est, en ce qui concerne la déposition de l’avocat en justice, qu’une application de ce texte ;
Que le témoignage de l’avocat ne peut dès lors être considéré comme obtenu en violation des droits de la défense ou comme preuve illégale ou déloyale ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen de cassation :
tiré « de la violation de l’article 61 du Nouveau code de procédure civile ;
en ce que l’arrêt attaqué a déclaré les appels non fondés et partant «confirm(é) le jugement entrepris au pénal »;
aux motifs que dans sa rédaction actuelle, analogue à celle du Code civil français, l’article 491 du Code pénal ne contient aucune référence à la qualification du contrat servant de support à la remise de la chose» et que dans la mesure où ce type de contrat n’est pas déterminant dans la preuve de l’abus de confiance mais que seule importe l’existence même d’un contrat, le prévenu soutenant par ailleurs lui-même avoir été lié à A.) par un contrat, en l’occurrence de dépôt, la qualification du contrat est sans pertinence à ce stade de l’examen des éléments constitutifs de l’infraction»;
7 et que La Cour, n’a dès lors pas à examiner davantage le moyen d’irrecevabilité soulevé qui est à écarter;
alors que l’article 61 du Nouveau code de procédure civile dispose que:
tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables. Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée. Toutefois, il ne peut changer la dénomination ou le fondement juridique lorsque les parties, en vertu d’un accord exprès et pour les droits dont elles ont la libre disposition, l’ont lié par les qualifications et points de droit auxquels elles entendent limiter le débat» ;
et que dans ses conclusions notifiées le 28 octobre 2008, le mandataire de Monsieur X.) souligne qu’il n’est pas prouvé à quel titre l’argent [lui] a été remis » ;
et qu’ il précise également qu’il appartient au parquet et à la partie civile de rapporter la preuve du type de contrat gisant à la base du virement 4,4 millions d’USD et des modalités d’utilisation de cet argent »;
et qu’ en l’espèce et en tout état de cause, la Cour d’appel a jugé pertinence » de qualifier juridiquement la relation contractuelle au stade des moyens de procédures soulevés;
et que la Cour d’appel ne s’est que bornée à constater péremptoirement l’existence d’un contrat » sans même le qualifier;
et que la Cour d’appel est même allée jusqu’à se retrancher derrière la qualification du contrat retenue par une partie à l’instance, en exposant que le prévenu avait indiqué être lié à A.) par ;
et qu’ ainsi, en ne qualifiant pas le contrat au stade de la procédure, la Cour d’appel a violé les dispositions de l’article 61 du Nouveau code de procédure civile;
et qu’ en outre, en s’arrêtant à la dénomination du contrat que l’une des parties en avait proposé, tout en refusant d’analyser la pertinence d’une telle qualification, et ainsi de restituer l’exacte qualification du contrat entre parties, la Cour d’appel a de nouveau violé les dispositions de l’article 61 du Nouveau code de procédure 8 civile » ;
Mais attendu que les juges du fond ont suffisamment caractérisé, au regard de l’article 491 du Code pénal, l’élément matériel de l’abus de confiance en constatant, sur le fondement des déclarations du prévenu, l’existence d’un contrat, la remise matérielle des fonds à titre précaire dans le cadre de cette relation contractuelle et l’obligation du prévenu de restituer les fonds ;
Que l’article 61 du Nouveau code de procédure civile est étranger au grief ;
D’où il suit que le moyen est à rejeter ;
Sur le cinquième moyen de cassation :
tiré « de la violation de l’article 6§1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales et de l’article 491 du Code pénal, pour insuffisance de motifs valant absence de base légale, en ce que l’arrêt attaqué a déclaré les appels non fondés et partant confirm(é) le jugement entrepris au pénal »;
au motif que l’article 491 du Code pénal ne contient aucune référence à la qualification du con trat servant de support à la remise de la chose » et que déterminant dans la preuve de l’abus de confiance mais que seule importe l’existence même d’un contrat, le prévenu soutenant par ailleurs lui-même avoir été lié à A.) par un contrat, en l’occurrence de dépôt, la qualification du contrat est sans pertinence à ce stade de l’examen des éléments constitutifs de l’infraction»;
et que La Cour, n’a dès lors pas à examiner davantage le moyen d’irrecevabilité soulevé qui est à écarter » et a tenu compte du témoignage d’T1.) ;
alors que la Cour d’Appel n’a pas répondu à tous les moyens invoqués par la partie X.) en cause d’appel et plus particulièrement, au moyen selon lequel la preuve de l’existence d’un contrat d’un montant supérieur au montant repris dans les dispositions de l’article 1341 du Code civil doit être rapportée par écrit;
et que dans ses conclusions notifiées le 28 octobre 2008, le mandataire de Monsieur X.) souligne qu’il n’est pas prouvé à quel titre l’argent a été remis » à son mandant ;
et qu’ il précise également qu’il appartient au parquet et à la partie civile de 9 rapporter la preuve du type de contrat gisant à la base du virement 4,4 millions d’USD et des modalités d’utilisation de cet argent »;
et qu’ il expose enfin que cette preuve doit être rapportée, selon les modalités du droit civil [… ] » et qu’ en vertu des dispositions de l’article 1341 du Code civil, la preuve d’une convention portant sur un montant d’une telle importance doit revêtir un caractère écrit» ;
et qu’ en l’espèce, la Cour d’appel a lacunairement mais en tout cas insuffisamment répondu à ce moyen soulevé par la défense et n’a de cette sorte pas motivé sa décision à suffisance de droit, en jugeant « sans pertinence » de qualifier juridiquement la relation contractuelle au stade des moyens de procédures soulevés;
et que pourtant, un arrêt n° 1/99 (pénal) de la Cour de cassation du 14 janvier 1999 rappelle que les juridictions doivent répondre aux conclusions présentées devant elles;
et que cette exigence découle notamment du principe du droit à un procès équitable garanti par l’article 6 §1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales, et que s’agissant de l’obligation du juge de répondre aux moyens et arguments des parties, la Cour européenne a eu l’occasion d’en rappeler l’importance dans plusieurs décisions.
et qu’ainsi l’obligation de se livrer à un examen effectif des moyens, arguments et offres de preuve des parties » et que le contrat est un des éléments constitutifs de l’infraction d’abus de confiance;
et qu’ en jugeant de qualifier juridiquement la relation contractuelle entre le prévenu et la soi-disant victime, la Cour d’Appel a violé les dispositions de l’article 6§1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales, ainsi que l’article 491 du Code pénal, pour avoir procédé par insuffisance de motifs valant absence de base légale en ne motivant pas à suffisance de droit un élément constitutif de l’infraction retenue à charge du prévenu » ;
Attendu que la Cour d’appel qui a retenu que la qualification exacte du contrat servant de support à la remise de la chose était sans pertinence au stade de l’examen des éléments constitutifs de l’infraction, a constaté, dans sa motivation relative au moyen d’irrecevabilité tiré de l’article 1341 du Code civil, sur lefondement des déclarations du prévenu, l’existence d’un contrat liant celui-ci à A.) impliquant la remise précaire des fonds avec obligation de restitution ;
Que par ces motifs elle a écarté le moyen d’irrecevabilité soulevé par le prévenu sans encourir le grief de défaut de base légale ni celui d’une motivation insuffisante au regard de l’article 6, paragraphe 1er, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le sixième moyen de cassation :
tiré « de la violation des articles 1341 et 1347 du Code civil ensemble avec l’article 571 du Nouveau code de procédure civile ;
en ce que l’arrêt attaqué a déclaré les appels non fondés et partant confirm(é) le jugement entrepris au pénal »;
aux motifs que dans sa rédaction actuelle, analogue à celle du Code civil français, l’article 491 du Code pénal ne contient aucune référence à la qualification du contrat servant de support à la remise de la chose » et que dans la mesure où ce type de contrat n’est pas déterminant dans la preuve de l’abus de confiance mais que seule importe l’existence même d’un contrat, le prévenu soutenant par ailleurs lui-même avoir été lié à A.) par un contrat, en l’occurrence de dépôt, la qualification du contrat est sans pertinence à ce stade de l’examen des éléments constitutifs de l’infraction »;
et que La Cour, n’a dès lors pas à examiner davantage le moyen d’irrecevabilité soulevé qui est à écarter» et a tenu compte du témoignage d’T1.) , alors que Selon le principe de l’effet dévolutif de l’appel, le juge d’appel, auquel est déférée une décision qui a statué au fond se trouve de plein droit investi de la connaissance entière de la cause et que l’article 1341 du Code civil dispose que:
notaires ou sous signatures privées de tous actes juridiques portant sur une somme ou valeur excédant celle qui est fixée par règlement grand-ducal, même pour dépôts volontaires, et il n’est reçu aucune preuve par témoins contre et outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit avant, lors ou depuis les actes, encore qu’il s’agisse d’une somme ou valeur moindre»;
et que dans ses conclusions notifiées le 28 octobre 2008, le mandataire de la partie 11 X.) souligne qu’il n’est à son mandant;
et qu’ il précise également qu’il appartient rapporter la preuve du type de contrat gisant à la base du virement 4,4 millions d’USD et des modalités d’utilisation de cet argent »;
et qu’ il expose enfin que cette du droit civil […] » et qu’ ;
et que la Cour d’appel ne s’est que bornée à constater péremptoirement l’existence d’un en l’absence de tout écrit, violant ainsi les dispositions de l’article 1341 du Code civil ;
et qu’ en outre, en l’absence de tout écrit venant prouver l’existence d’un contrat au sens de l’article 1341 du Code civil, et en application des dispositions de l’article 1347 du Code civil, il appartenait à la Cour d’appel de rechercher s’il existait ou non un commencement de preuve par écrit admis par la loi ;
et qu’ à défaut de procéder ainsi, tout en entérinant les motifs des premiers juges, la Cour d’appel ne pouvait accueillir un témoignage ou recourir au mécanisme des présomptions dans la perspective de constater l’existence de quelque contrat que ce soit ;
et qu’ en l’espèce, la Cour d’appel n’a même pas recherché à caractériser l’existence de quelque commencement de preuve par écrit que ce soit;
et qu’ en admettant et en tenant compte du témoignage de T1.) pour motiver sa décision, la Cour d’appel, dans l’arrêt attaqué, a violé les articles 1341 et 1347 du Code civil ensemble l’article 571 du Nouveau code de procédure civile » ;
Attendu que pour retenir l’existence d’un contrat et l’obligation de restituer la somme remise à titre précaire au prévenu la Cour d’appel s’est fondée non pas sur la déposition du témoin T1.) mais sur les déclarations du prévenu ;
Que la déposition du témoin T1.) n’a été considérée que dans le cadre de l’examen de la mauvaise foi du prévenu ;
Que le moyen manque en fait et est dès lors inopérant ;
Sur le septième moyen de cassation :
tiré « de la violation de l’article 89 de la Constitution et de l’article 195 du Code d’instruction criminelle, en ce que l’arrêt attaqué a déclaré les appels non fondés et partant « confirm(é) le jugement entrepris au pénal »;
et aux motifs qu’ Il est acquis en cause que les fonds provenant de la commercialisation des pistolets A.) ont été investis dans le capital social de SOC1.) INTERNAT/ONAL » et que A.) était dès lors le bénéficiaire économique de SOC1.) INTERNA TIONAL(Panama) au moment où l’infraction a été commise »;
et que La demande en indemnisation de A.) est fondée en principe»;
alors que dans ses conclusions notifiées le 28 octobre 2008, le mandataire de Monsieur X.) a clairement indiqué que ;
Et qu’ il a dans ces mêmes conclusions été noté qu’ condamner X.) du chef d’abus de confiance dans le cadre de la présente procédure sans avoir d’abord déterminé la nature exacte des relations A.) et X.) notamment vis-à-vis des montants collectés sur les comptes SOC1.) » ;
et que la Cour d’appel en statuant de la sorte, a retenu pour acquis et sans motivation aucune des considérations factuelles dont la véracité judiciaire fait l’objet d’enquêtes par le juge d’instructions et la brigade financière depuis près de dix ans;
et qu’ ainsi, en omettant de motiver les raisons pour lesquelles elle retenait pour acquis des faits dont la véracité judiciaire fait par ailleurs l’objet d’enquêtes par le 13 juge d’instructions et la brigade financière depuis près de dix ans, la Cour d’appel a méconnu les dispositions de l’article 89 de la Constitution et de l’article 195 du Code d’instruction Criminelle » ;
Mais attendu que le moyen vise les articles 89 de la Constitution et 195 du Code d’instruction criminelle qui sanctionnent le vice de forme de l’absence de motifs ;
Que l’arrêt est motivé tant en ce qui concerne les éléments constitutifs du délit d’abus de confiance qu’en ce qui concerne la demande civile ;
D’où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le huitième moyen de cassation :
tiré « de la violation de l’article 54 du Nouveau code de procédure civile, en ce que le jugement attaqué a déclaré les appels non fondés et partant confirm(é) le jugement entrepris au pénal », et aux motifs qu’ des pistolets A.) ont été investis dans le capital social de SOC1.) INTERNATIONAL » et que A.) était dès lors le bénéficiaire économique de SOC1.) INTERNA TIONAL(Panama) au moment où l’infraction a été commise »;
et que ;
alors que dans ses conclusions notifiées le 28 octobre 2008, le mandataire de Monsieur X.) a clairement indiqué que ;
et qu’ iI a dans ces mêmes conclusions été noté qu’ condamner X.) du chef d’abus de confiance dans le cadre de la présente procédure sans avoir d’abord déterminé la nature exacte des relations A.) et X.) notamment vis-à-vis des montants collectés sur les comptes SOC1.) » ;
et que la Cour d’appel, en statuant de la sorte, a retenu pour acquis des 14 considérations factuelles dont la véracité judiciaire fait l’objet d’enquêtes par le juge d’instructions et la brigade financière depuis près de dix ans ;
et que l’article 54 du Nouveau code de procédure civile dispose pourtant que le ;
et qu’ ainsi, à la fois en se prononçant sur des considérations factuelles dont la véracité judiciaire fait l’objet d’enquêtes par le juge d’instruction et la brigade financière depuis près de dix ans, et de surcroît en les retenant pour acquise en cause, la Cour d’appel a statué ultra petita, et a méconnu les dispositions de l’article 54 du nouveau code de procédure civile » ;
Attendu, d’une part, que l’article 54 du Nouveau code de procédure civile n’est pas applicable dans le cadre du volet pénal de l’affaire ;
Que, d’autre part, les juges d’appel statuant au civil, n’ont pas alloué plus qu’il n’avait été demandé par la partie civile, qu’ils ne se sont pas prononcés sur une chose non demandée ni n’ont dépassé les termes du litige fixés par les conclusions ;
D’où il suit que le moyen est à rejeter ;
Sur le neuvième moyen de cassation :
tiré « de la violation de l’article 491 du Code pénal ;
En ce que l’arrêt attaqué a déclaré que verser à A.) la somme de 3.303.689,61 USD » ;
aux motifs que Le détournement impliquant une volonté de se comporter en maître de la chose, c’est-à-dire supposant pour partie la preuve d’un élément intentionnel, la mise en demeure, restée sans effet, de restituer la chose peut contribuer à fournir cette preuve, mais elle n’est qu’un élément d’appréciation, non un élément du délit», alors que l’article 491 du Code pénal dispose que:
préjudice d’autrui, des effets, deniers, marchandises, billets, quittances, écrits de toute nature, contenant ou opérant obligation ou décharge et qui lui avaient été remis à la condition de les rendre ou d’en faire un usage déterminé, sera puni (…)» et qu’ en l’espèce, il n’est pas contesté que la remise des fonds ait été faite à titre précaire ;
et que la remise s’est faite dans le cadre d’un contrat de dépôt régulier ;
et que les effets remis consistaient en une somme d’argent ;
et que cette dernière est par nature fongible ;
et que partant le dépositaire n’est tenu que d’une obligation en restitution par équivalent ;
et que ledit contrat ne prévoyait aucun terme précis pour la restitution des fonds;
et que le dossier ne révèle aucune demande en restitution formulée par la partie civile;
et que seule la plainte avec constitution de partie civile formulait une quelconque revendication sur les fonds remis à titre précaire ;
et que c’est au moment où la plainte est déposée qu’il convient d’apprécier l’existence des éléments constitutifs de l’infraction visée ;
et qu’ en l’espèce, aucune demande en restitution n’avait été formulée au moment du dépôt de la plainte avec constitution de partie civile ;
et qu’ un des éléments constitutifs de l’infraction d’abus de confiance, à savoir l’élément intentionnel, n’était partant pas réuni ;
et qu’ en confirmant la décision de première instance et en déclaration le prévenu coupable de l’infraction d’abus de confiance, la Cour a violé les dispositions de l’article 491 du Code pénal » ;
Attendu que les juges du fond ont constaté et apprécié le comportement de X.) au moment du transfert des fonds depuis les Etats-Unis ainsi que sa conduite ultérieure pour en conclure qu’il a dissipé les fonds en connaissance du fait qu’ils ne lui appartenaient pas et qu’il n’avait pas l’intention de les restituer et ce, dès avant la plainte pour abus de confiance de la partie civile ; que par leurs constatations et appréciations de l’attitude du prévenu qui ressortissent au pouvoir souverain des juges du fond, ils ont caractérisé l’élément intentionnel du délit d’abus de confiance ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le dixième moyen de cassation :
tiré « de la violation de l’article 491 du Code pénal ;
en ce que l’arrêt attaqué a déclaré que partant con firme le jugement entrepris au pénal, (…) condamne X.) à verser à A.) la somme de 3.303.689,61 USD»;
aux motifs que la chose, c’est-à-dire supposant pour partie la preuve d’un élément intentionnel, la mise en demeure, restée sans effet, de restituer la chose peut contribuer à fournir cette preuve, mais elle n’est qu’un élément d’appréciation, non un élément du délit (Boré précité n°3574). La mise en demeure n’est ni nécessaire, le seul fait du détournement caractérisant le délit, ni suffisante, le défaut de restitution pouvant être dû à la négligence du possesseur ou motivé par l’exercice légitime d’un droit de rétention »;
et que précarité de sa possession et sa connaissance de ce que, en inversant la cause de sa possession, II empêche le propriétaire d’exercer ses droits et cause ou risque de causer préjudice à autrui. L’intention est ainsi définie comme la conscience du détournement opéré et la conscience du préjudice qui pouvait en résulter (Crim. 18 févr. 1937, D.H. 37. 189; 30 déc. 1973, B. n° 75) et comme la volonté de s’approprier la chose remise »;
et que l’assemblée générale extraordinaire des actionnaires de Réofin International s.a. du 17 août 1999 décidant la révocation de X.) de sa fonction de président Directeur. A ce moment au plus tard, X.) se trouvait en demeure de restituer la somme de 4,4 millions USD »;
alors que l’article 491 du Code pénal dispose que: Quiconque aura frauduleusement soit détourné, soit dissipé au préjudice d’autrui, des effets, deniers, marchandises, billets, quittances, écrits de toute nature, contenant ou opérant obligation ou décharge et qui lui avaient été remis à la condition de les rendre ou d’en faire un usage déterminé, sera puni (…) », et qu’ en l’espèce, il n’est pas contesté que la remise des fonds ait été faite à titre précaire ;
17 et que la Cour estime que l’assemblée générale extraordinaire des actionnaires de SOC1.) International s.a. constituait une mise en demeure à l’attention de X.) ;
et que ladite assemblée générale ne comportait aucune demande de restitution quelconque et ne formulait aucune demande en ce sens à Monsieur X.) ;
et qu’ il convient encore de préciser que cette assemblée générale n’avait fait l’objet d’aucune publication et n’avait pas été portée à l’attention de Monsieur X.) ;
et que la Cour ne précisant pas en quoi une telle assemblée générale pouvait constituer une mise en demeure, voire une demande en restitution suffisante pour constituer l’élément intentionnel de l’infraction d’abus de confiance, a violé les dispositions de l’article 491 du Code pénal » ;
Attendu que c’est dans l’exercice souverain de son pouvoir d’appréciation des faits, échappant au contrôle de la Cour de cassation, que la Cour d’appel, après avoir dit qu’une mise en demeure formelle n’était pas nécessaire, a constaté que les relations entre A.) et le prévenu s’étaient dégradées progressivement à partir de novembre 1998 et qu’après la tentative d’assassinat sur la personne de A.) , en juillet 1999, celui-ci avait retiré peu à peu tous les pouvoirs à X.) , puis cessé toute relation professionnelle avec lui, pour retenir que c’était à partir de l’assemblée générale extraordinaire des actionnaires de SOC1.) International du 17 août 1999 ayant décidé la révocation de X.) de sa fonction de président-directeur de la société que celui-ci se trouvait en demeure de restituer la somme de 4,4 millions USD ;
D’où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le onzième moyen de cassation :
tiré « de la violation de l’article 491 du Code pénal ;
en ce que l’arrêt attaqué a déclaré que:
verser à A.) la somme de 3.303.689,61 USD» ;
aux motifs que La dissipation est l’emploi à son profit d’une somme d’argent; elle implique le détournement (Crim. 10 nov. 1971, B. n°307) »;
et que La dissipation consiste à disposer d’une chose sans nécessairement faire 18 acte d’appropriation comme c’est le cas du détournement »;
et que Le détournement impliquant une volonté de se comporter en maître de la chose, c’est-à-dire supposant pour partie la preuve d’un élément intentionnel la mise en demeure, restée sans effet, de restituer la chose peut contribuer à fournir cette preuve, mais elle n’est qu’un élément d’appréciation, non un élément du délit (Boré précité n°3574). La mise en demeure n’est ni nécessaire, le seul fait du détournement caractérisant le délit, ni suffisante, le défaut de restitution pouvant être dû à la négligence du possesseur ou motivé par l’exercice légitime d’un droit de rétention. A la différence de la preuve du contrat dont il a été abusé, qui relève, tel qu’indiqué ci-dessus, des règles du droit civil régissant la preuve des actes, celle du détournement qui n’est qu’un fait extérieur au contrat, est soumise à la libre appréciation du juge répressif »;
et qu’ la possibilité de ce préjudice. Ainsi l’auteur du détournement ne peut faire valoir qu’il serait possible de rembourser et qu’il ne prévoyait pas sa prochaine faillite»;
alors que l’article 491 du Code pénal dispose que Quiconque aura frauduleusement soit détourné, soit dissipé au préjudice d’autrui, des effets, deniers, marchandises, billets, quittances, écrits de toute nature, contenant ou opérant obligation ou décharge et qui lui avaient été remis à la condition de les rendre ou d’en faire un usage déterminé, sera puni(…)»;
et qu’ en l’espèce, il n’est pas contesté que la remise des fonds ait été faite à titre précaire ;
et que l’utilisation de fonds, par nature fongibles, ne peut constituer à elle seule la preuve d’une dissipation ;
et que la jurisprudence luxembourgeoise confirme cette approche en estimant que n’est pas coupable d’abus de confiance, à défaut d’intention frauduleuse, le mandataire ayant dépensé pour ses propres besoins les fonds qu’il a encaissés pour le compte de son mandant, lorsqu’il a pu admettre qu’il serait en mesure de les lui remettre plus tard »;
et que les débats à hauteur d’appel ont aussi porté sur le fait que l’intention frauduleuse était à apprécier au moment de l’utilisation des fonds et que l’impossibilité de restituer les fonds postérieurement à cette utilisation n’était à ce moment-là pas prévisible;
et qu’ 19 ainsi, le prévenu a plaidé qu’il ne pouvait prévoir la situation future d’absence de liquidités due à toute une série d’évènements tels que la saisie de tous ses comptes bancaires;
et que la Cour a répondu à cet argument en estimant que volontairement dans la situation dont il se prévaut (suit un certain nombre de faits expliquant son impossibilité de rembourser les fonds) puis de la mise sous séquestre, à sa propre demande, des 35 millions usd détenus par SOC1.) BVI sur le compte 104040 auprès de la banque BQUE1.) (…)»;
et qu’ une demande de séquestre judiciaire d’une partie de son propre argent, dont la partie civile réclame la propriété dans le cadre d’autres procédures, ne peut être qualifiée comme l’affirme la Cour, de dissipation des fonds ou un détournement dans le chef du prévenu, de nature à constituer un des éléments de l’infraction d’abus de confiance ;
et qu’ en effet une telle action, surtout en l’absence de décision judiciaire tranchant la propriété desdits fonds, ne peut être reprochée sans autre motivation par la Cour ;
et qu’ en tout état de cause, la mise sous séquestre judiciaire d’une somme d’argent ne peut être qualifiée d’emploi à son propre profit valant dissipation ou détournement ;
et que cet élément constitutif de l’infraction d’abus de confiance n’est partant pas établi, de sorte qu’en confirmant la décision de première instance et en estimant pourtant que les éléments constitutifs de l’infraction sont réunis, la Cour, en retenant le prévenu dans les liens de l’infraction d’abus de confiance, a violé l’article 491 du Code pénal » ;
Attendu que le moyen est irrecevable dans la mesure où il reproche à la Cour d’appel une motivation des juges de première instance à laquelle la Cour ne s’est pas référée ;
Attendu que le moyen procède d’une lecture erronée de la motivation des juges d’appel; que ceux-ci ont considéré que le fait par le prévenu de faire mettre sous séquestre 35 millions USD, détenus par SOC1.) BVI sur un compte auprès de la banque BQUE1.) , mise sous séquestre suivie du blocage de tous les comptes du prévenu ainsi que d’une procédure de saisie-arrêt, ceci après la tentative d’assassinat sur la personne de A.) suivie du prélèvement de 35 millions USD par ce dernier sur un compte de SOC1.) International (Panama) auprès de la banque BQUE3.) , établit l’acceptation du risque par le prévenu de ne pas pouvoir restituer les fonds lui remis à titre précaire et confirme la réalité du détournement des fonds ;
D’où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le douzième moyen de cassation :
tiré « de la violation de l’article 89 de la Constitution et de l’article 195 du Code d’instruction Criminelle, pour contradiction de motifs valant absence de motifs ;
en ce que l’arrêt attaqué a déclaré les appels non fondés et partant confîrm(é) le jugement entrepris au pénal »;
et 3.030689,61 USD » aux motifs que X.) fait valoir que tant que la question de propriété des sociétés litigieuses, notamment de SOC2.) Holding et des deux sociétés SOC1.) (PANAMA et BVI) et par voie de conséquence celle de la clé de répartition applicable au partage de ces sociétés ne sera pas élucidée, la réalité d’un quelconque préjudice ne serait pas établie »;
et qu’ Il suffit pour que la victime entre dans les prévisions de l’article 491 du code pénal, de prouver que la propriété de la chose remise n’appartenait pas à l’auteur de l’acte de détournement »;
et que D’où la demande en surséance présentée en ordre subsidiaire par X.) en attendant une décision dans l’affaire toujours en phase d’instruction introduite sur une plainte de A.) pour faux usage de faux, et escroquerie et la demande encore plus subsidiaire en instauration d’une expertise par rapport aux documents produits par A.) »;
et que de première instance s’est déclarée compétente pour connaître de la demande civile de A.) au regard de la décision intervenue sur l’action publique et qu’elle a écarté le moyen tiré du défaut de qualité pour agir dans le chef de A.) , celui-ci affirmant avoir subi un dommage personnel, certain et directement causé par le délit.
L’action est justifiée lorsque la victime établit la réalité d’un préjudice causé par l’infraction. Est à considérer comme victime non seulement le propriétaire légitime des fonds détournés, mais également le détenteur auquel il y a lieu d’assimiler le bénéficiaire économique des fonds. »;
et que A.) était dès lors le bénéficiaire économique de SOC1.) international (Panama) au moment où l’infraction a été commise. II a par conséquent subi un préjudice personnel et direct ne se confondant pas avec celui de la société. Il s’ensuit que la demande en indemnisation de A.) est fondée en principe» alors que l’article 195 du Code d’instruction criminelle dispose tout jugement définitif de condamnation sera motivé . . . »;
et que le prévenu avait allégué l’absence de décision judiciaire sur la propriété de la société SOC1.) PANAMA destinataire alléguée des fonds pour demander le sursis à statuer ;
et que le prévenu avait allégué être bénéficiaire économique de SOC1.) PANAMA;
et que cette question est pendante devant le juge d’instruction ;
et que la Cour refuse de surseoir à statuer ;
et qu’ elle estime néanmoins qu’il est d’ores et déjà établi que A.) était bénéficiaire économique de SOC1.) PANAMA et que cela suffit à établir la recevabilité de la constitution de partie civile de A.) ;
et qu’ il y a contradiction de motifs à admettre:
-
d’une part, que la question des droits du prévenu sur la personne morale destinataire des fonds prétendument détournés serait sans incidence et ne serait dès lors pas de nature à justifier un surseoir à statuer, -
et d’autre part, considérer, sans autre examen qu’il serait établi que A.) serait aussi bénéficiaire économique de la même personne morale, et que partant son action serait dès lors recevable;
et qu’ en effet, un éventuel droit du prévenu sur les dividendes de SOC1.) PANAMA est de nature à établir l’absence de détournement sinon d’établir le caractère indirect de l’éventuel préjudice de A.) , sinon de nature à réduire le montant du préjudice allégué ;
et que doit être cassé, comme n’étant pas légalement motivé, l’arrêt dont les motifs sont contradictoires entre eux ;
et que la Cour aurait dû déclarer irrecevable la constitution de partie civile de A.) en constatant que seule la société SOC1.) PANAMA destinataire alléguée des fonds pouvait alléguer un préjudice personnel et direct de nature à justifier une 22 condamnation en paiement à l’encontre du prévenu ;
et qu’ en procédant de cette manière et en déclarant recevable la partie civile de A.) , la Cour d’appel a procédé par contradiction de motifs valant absence de motifs et a partant violé les textes sus-visés » ;
Attendu que la Cour d’appel, statuant au pénal, a, pour rejeter la demande en surséance du prévenu en attendant que le volet relatif à la relation professionnelle ayant existé entre A.) et X.) faisant, suivant le prévenu, l’objet d’une instruction dans une autre affaire pendante au cabinet d’instruction, considéré que le prévenu, compte tenu du fait qu’il avait reçu les 4,4 millions USD qui ne lui appartenaient pas et qu’il était obligé de restituer, ne pouvait opposer une créance incertaine et indéterminée en compensation à une créance certaine et liquide ;
qu’en déduisant ensuite, dans le cadre de l’examen de la demande civile de A.) , sur le fondement des déclarations du prévenu et des pièces versées, appréciées souverainement, que A.) était l’ayant-droit économique de la société SOC1.) International (Panama ) et en recevant la partie civile, la Cour d’appel n’encourt pas le grief de contradiction de motifs ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le treizième moyen de cassation :
tiré « de la violation de l’article 491 du Code pénal, pour insuffisance de motifs valant absence de base légale ;
en ce que l’arrêt attaqué a déclaré les appels non fondés et partant ;
et à verser à A.) la somme de 3.030.689,61 USD» aux motifs que C’est à bon droit et par des motifs que la Cour adopte que la juridiction de première instance s’est déclarée compétente pour connaître de la demande civile de A.) au regard de la décision intervenue sur l’action publique et qu’elle a écarté le moyen tiré du défaut de qualité pour agir dans le chef de A.) , celui-ci affirmant avoir subi un dommage personnel, certain et directement causé par le délit.
L’action est justifiée lorsque la victime établit la réalité d’un préjudice causé par l’infraction. Est à considérer comme victime non seulement le propriétaire légitime des fonds détournés, mais également le détenteur auquel il y a lieu d’assimiler le bénéficiaire économique des fonds.»;
et que A.) était dès lors le bénéficiaire économique de SOC1.) international (Panama) au moment où l’infraction a été commise. Il a par conséquent subi un préjudice personnel et direct ne se confondant pas avec celui de la société. Il s’ensuit que la demande en indemnisation de A.) est fondée en principe»;
alors que les fonds reçus par une personne morale n’accordent pas un droit direct et personnel dans le chef du bénéficiaire économique dont le patrimoine ne peut se confondre avec celui de la société, et que l’éventuel préjudice subi par la société ne peut se confondre avec les revendications du bénéficiaire économique, et que la Cour, en ne justifiant pas à suffisance en quoi le préjudice subi par une personne morale constitue un préjudice direct et personnel dans le chef du bénéficiaire économique, elle n’a pas motivé à suffisance de droit un des éléments constitutifs de l’infraction l’abus de confiance reprochée au prévenu et a dès lors violé l’article 491 du Code pénal » ;
Attendu, d’une part, que la Cour d’appel, statuant au pénal, a caractérisé à suffisance de droit le préjudice, élément constitutif du délit d’abus de confiance en retenant, sur le fondement des éléments de preuve recueillis, que les fonds de 4,4 millions USD qui ont été confiés à X.) à titre précaire en vertu d’un contrat le liant à A.) , avec obligation de les restituer, et en constatant qu’au lieu de verser les fonds sur un compte ouvert au nom de A.) , le prévenu les a fait verser sur un compte sur lequel A.) n’avait aucun pouvoir et les a affectés à sa dépense personnelle ;
Attendu, d’autre part, que le texte légal visé au moyen est étranger aux griefs invoqués par X.) pour autant qu’ils portent sur la demande civile de A.) , D’où il suit que le moyen est à rejeter .
Sur le quatorzième moyen de cassation :
tiré « de la violation de l’article 1832 du Code civil, ainsi que des articles 3, 183-1 et 194-1 du Code d’instruction criminelle;
en ce que l’arrêt attaqué a déclaré que:
en ce que l’arrêt attaqué a déclaré les appels non fondés et partant ;
et 24 aux motifs que C’est à bon droit et par des motifs que la Cour adopte que la juridiction de première instance s’est déclarée compétente pour connaître de la demande civile de A.) au regard de la décision intervenue sur l’action publique et qu’elle a écarté le moyen tiré du défaut de qualité pour agir dans le chef de A.) , celui-ci affirmant avoir subi un dommage personnel, certain et directement causé par le délit.
L’action est justifiée lorsque la victime établit la réalité d’un préjudice causé par l’infraction. Est à considérer comme victime non seulement le propriétaire légitime des fonds détournés, mais également le détenteur auquel il y a lieu d’assimiler le bénéficiaire économique des fonds. »;
et que A.) était dès lors le bénéficiaire économique de SOC1.) international (Panama) au moment où l’infraction a été commise. Il a par conséquent subi un préjudice personnel et direct ne se confondant pas avec celui de la société. Il s’ensuit que la demande en indemnisation de A.) est fondée en principe»;
alors que l’article 1832 du Code Civil qui établit la notion de personne morale dispose ce qui suit: Une société peut être constituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent de mettre en commun quelque chose en vue de partager le bénéfice qui pourra en résulter ou, dans les cas prévus par la loi, par acte de volonté d’une personne qui affecte des biens à l’exercice d’une activité déterminée»;
et que cet article consacre la notion de patrimoine distinct entre celui de la personne morale et celle de ses actionnaires ;
et qu’ une telle distinction s’applique à fortiori au patrimoine du bénéficiaire économique ;
et qu’ énonçant que le fait d’établir la qualité de bénéficiaire économique d’une société qui devait recevoir les fonds qualifiés de détournés suffit à établir la notion de préjudice personnel et direct ne se confondant pas avec celui de la société constitue nécessairement une confusion de patrimoine entre la partie civile et la personne morale ;
et qu’ en effet, les fonds reçus par une personne morale n’accordent pas un droit direct et personnel dans le chef du bénéficiaire économique dont le patrimoine ne peut se confondre avec celui de la société ;
et que l’éventuel préjudice subi par la société ne peut se confondre avec les 25 revendications du bénéficiaire économique ;
et qu’ une constitution de partie civile ne peut être déclarée recevable qu’à la condition que la partie civile démontre un préjudice certain et direct;
et qu’ en qu’en ne déclarant pas irrecevable la constitution de partie civile de A.) , alors que seule la société SOC1.) PANAMA destinataire alléguée des fonds pouvait alléguer un préjudice personnel et direct de nature à justifier une condamnation en payement de la part du prévenu, la Cour d’Appel a violé les textes sus-visés » ;
Attendu que le moyen est irrecevable dans la mesure où il est tiré des articles 183-1 et 194-1 du Code d’instruction criminelle, ces textes étant étrangers aux griefs invoqués ;
Attendu que la Cour d’appel, en adoptant la motivation des juges de première instance portant sur la recevabilité de la partie civile de A.) , a retenu, sans encourir le grief de la violation de l’article 3 du Code d’instruction criminelle, que « toute personne qui prétend qu’une atteinte a été portée à un droit lui appartenant et qui profitera personnellement de la mesure qu’elle réclame, a un intérêt personnel à agir en justice et donc qualité pour le faire. La question de savoir si ce droit existe dans le chef de la partie demanderesse étant dans ce cas une question de fond » ;
Attendu que l’article 1832 du Code civil n’exclut pas l’existence d’un préjudice direct, distinct de celui de la société dans le chef du bénéficiaire économique de cette société ;
Attendu qu’en constatant souverainement, au regard des éléments du dossier, que les fonds reçus à titre précaire avec l’obligation de les restituer, reconnue par le prévenu, ont été détournés par X.) pour financer des dépenses ou des investissement personnels, que A.) était le bénéficiaire économique de la société SOC1.) International (Panama) et en retenant que le préjudice de A.) s’élevait à 4,4 millions USD, la Cour d’appel a constaté le préjudice personnel et direct de A.) sans violer l’article 1832 du Code civil ;
D’où il suit que le moyen est à rejeter ;
Sur les frais :
Attendu que les frais de l’instance de cassation sont à charge du demandeur sauf ceux exposés par la partie civile pour la signification de son mémoire en réponse qui sont, en application de l’article 44 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, à supporter par le défendeur ;
Sur la demande en paiement d’une indemnité de procédure de A.) :
26 Attendu que la demande de A.) en paiement de la somme de 1.500.- euros du chef de sommes exposées et non compris dans les dépens est à rejeter à défaut de justification requise ;
Par ces motifs :
rejette le pourvoi ;
rejette la demande en paiement d’une indemnité de procédure de A.) ;
condamne X.) aux frais de l’instance en cassation, ceux exposés par le Ministère Public étant liquidés à 7,25 euros.
Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg en son audience publique extraordinaire du vendredi, vingt-quatre juin deux mille onze, à la Cité Judiciaire, Bâtiment CR, Plateau du St. Esprit, composée de :
Marie-Paule ENGEL, présidente de la Cour, Léa MOUSEL, conseillère à la Cour de cassation, Etienne SCHMIT, premier conseiller à la Cour d’appel, Françoise MANGEOT, première conseillère à la Cour d’appel, Ria LUTZ, conseillère à la Cour d’appel, Marie-Paule KURT, greffière à la Cour, qui ont signé le présent arrêt.
La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique extraordinaire par Madame la présidente Marie-Paule ENGEL, en présence de Monsieur John PETRY, premier avocat général et de Madame Marie-Paule KURT, greffière à la Cour.