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29/11/2005 | LUXEMBOURG | N°20165C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 29 novembre 2005, 20165C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 20165C Inscrit le 27 juillet 2005

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 29 NOVEMBRE 2005 Recours formé par le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration contre Xxx xxx, Diekirch en matière de statut de réfugié politique Appel (jugement entrepris du 29 juin 2005, no 19295 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour adminis...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 20165C Inscrit le 27 juillet 2005

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 29 NOVEMBRE 2005 Recours formé par le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration contre Xxx xxx, Diekirch en matière de statut de réfugié politique Appel (jugement entrepris du 29 juin 2005, no 19295 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 27 juillet 2005, en vertu d’un mandat exprès du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 21 juillet 2005, par le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter, au nom du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration, contre un jugement rendu en matière de statut de réfugié politique par le tribunal administratif à la date du 29 juin 2005, à la requête de Xxx xxx, de nationalité rwandaise, demeurant actuellement à L-XXX, contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration.

Vu le mémoire en réponse, intitulé mémoire en réplique, déposé au greffe de la Cour administrative le 10 octobre 2005 par Maître Yvette Ngono Yah, avocate à la Cour, au nom de Xxx xxx.

Vu le mémoire en réplique, intitulé mémoire en duplique, déposé au greffe de la Cour administrative le 26 octobre 2005, par le délégué du Gouvernement Monsieur Jean-Paul Reiter, pour compte de la partie appelante Vu le mémoire en duplique, intitulé mémoire en réplique, déposé au greffe de la Cour administrative le 17 novembre 2005, par Maître Yvette Ngono Yah, avocate à la Cour, au nom de l’intimé.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le premier conseiller en son rapport et la déléguée du Gouvernement Jacqueline Jacques ainsi que Maître Yvette Ngono Yah en leurs observations orales.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 10 février 2005, Maître Yvette Ngono Yah, avocate à la Cour, au nom de Xxx xxx, de nationalité rwandaise, demeurant actuellement à L-xxx, a demandé la réformation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 18 octobre 2004 rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée.

Par jugement rendu à la date du 29 juin 2005, le tribunal administratif a reçu le recours en réformation en la forme, au fond, l’a déclaré justifié, partant, par réformation de la décision ministérielle entreprise, a accordé le statut de réfugié au sens de la Convention de Genève à Xxx xxx.

Fort d’un mandat du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration datée du 21 juillet 2005, le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter, par requête déposée le 27 juillet 2005 au greffe de la Cour administrative, a relevé appel du prédit jugement.

Le représentant étatique reproche aux juges de première instance d’avoir estimé que le demandeur remplit les conditions posées par la Convention de Genève en vue d’obtenir la reconnaissance du statut de réfugié et soutient que de simples attestations établies par les prétendues sœurs du requérant, respectivement la mère de celui-ci, sont totalement insuffisantes à prouver l’identité de l’appelant, et que même si l’intimé était le fils d’xxx xxx, le simple fait d’avoir un lien de parenté avec un soupçonné génocidaire ne saurait à lui seul constituer un motif valable de reconnaissance du statut de réfugié, la crainte de représailles relevant uniquement du droit commun.

Le délégué du Gouvernement fait encore valoir que les menaces reçues par l’intimé durant la période 1990 à 1993 en raison de ses activités de journalisme ont cessé lors de sa démission et qu’il n’est nullement établi que l’intimé craindrait avec raison d’être persécuté en raison de son ancienne activité professionnelle, et il conclut en demandant la réformation du jugement entrepris.

Dans un mémoire en réponse, intitulé mémoire en réplique, déposé au greffe de la Cour administrative le 10 octobre 2005, Maître Yvette Ngono Yah, avocate à la Cour, au nom de Xxx xxx, se rapporte à prudence de justice quant à la recevabilité de l’acte d’appel, prend position sur les moyens d’appel, et réaffirme que l’intimé est bien l’époux d’xxx xxx, admise au statut de réfugié politique au Luxembourg en 2001, qu’il a fourni un certain nombre de documents permettant d’établir son identité, et demande à la Cour, en cas de doute, d’ordonner une expertise graphologique.

De surplus, l’intimé verse au dossier une attestation de mariage et la cassette vidéo du mariage civil, un certificat de dot, la demande de regroupement familial, et fait valoir que depuis son arrivée au Luxembourg, il vit en foyer avec sa femme et ses enfants où il remplit son rôle d’époux et de père, et il demande à la Cour, au cas où elle aurait des doutes sur son identité, d’instituer une expertise ADN entre son père xxx xxx et lui-même.

L’intimé relève encore qu’aucun descendant d’une personne génocidaire ne vit actuellement au Rwanda, que de ce fait tous les descendants d’xxx xxx ont été contraints à l’exil aux États-

Unis, en Belgique et au Luxembourg, et qu’étant fils d’un hutu et d’une tutsi, qui plus est marié à une tutsi, il risque en cas de retour, des persécutions ethniques, et d’être considéré comme opposant au régime actuel à Kigali.

Le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter a répliqué en date du 26 octobre 2005 pour rétorquer que le mariage de l’intimé avec Madame xxx n’est pas contesté, mais son identité, que des doutes subsistent quant à la réelle filiation de l’intimé avec xxx xxx, alors que probablement, l’intimé, en tant que neveu, aurait usurpé l’identité du fils d’xxx xxx, et que ce n’est qu’après l’examen de la demande d’asile qu’il s’est avéré que l’identité de xxx xxx n’était pas établie, et qu’enfin, la crainte de l’intimé ne repose sur aucun des critères de fond requis par la Convention de Genève.

Maître Yvette Ngono Yah a dupliqué en date du 17 novembre 2005 pour réaffirmer l’identité de xxx xxx.

L’acte d’appel est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Les premiers juges ont estimé que le demandeur remplit les conditions posées par la Convention de Genève en vue d’obtenir la reconnaissance du statut de réfugié, alors qu’il craint avec raison d’être persécuté en cas de retour dans son pays d’origine au sens des dispositions de la Convention de Genève d’une part, du fait des poursuites lancées contre son père, xxx xxx, du chef de génocide ou de complicité dans le génocide perpétré au Rwanda en 1994, et d’autre part du fait de ses activités professionnelles de journaliste.

Le représentant étatique fait valoir qu’il a un doute concernant l’identité de l’intimé qui serait un neveu d’xxx xxx et non son fils, et cela à cause de certaines contradictions entre le récit du requérant et les déclarations de son épouse, les attestations établies par la famille de l’intimé étant insuffisantes pour prouver son identité.

La Cour relève en premier lieu que l’épouse de l’intimé, xxx xxx, s’est vue octroyer le statut de réfugié politique en 2001, qu’elle a donné des explications quant à ses omissions et inexactitudes en cours de procédure, et qu’elle vit en couple depuis l’arrivée de xxx xxx au Luxembourg, en compagnie de leurs enfants.

D’autre part, la mandataire de l’intimé a expliqué, dans son mémoire en réponse, la contradiction sur le lieu de naissance indiqué par l’intimé et sa mère.

La Cour, au vu du dossier, a la conviction que l’intimé est le fils d’xxx xxx et l’époux d’xxx xxx, en particulier la signature est la même sur le certificat de dot en 1992, juste au-dessus de celle d’xxx xxx, et sur un bulletin scolaire du 19 juillet 2005 de sa fille xxx xxx.

Le représentant étatique fait ensuite valoir que même si le demandeur est bien le fils d’xxx xxx, la crainte de se faire tuer par vengeance pour des actes commis par son père ne correspondrait à aucun critère de fond de la Convention de Genève, la crainte de représailles relevant du droit commun, et qu’il n’est pas établi que l’intimé craindrait avec raison d’être persécuté en raison de son ancienne activité professionnelle de journaliste.

Sur le vu des faits de la cause qui sont les mêmes que ceux soumis aux juges de première instance, la Cour estime que ceux-ci ont, dans un examen complet et minutieux de tous les éléments recueillis, apprécié ces derniers à leur juste valeur et en ont tiré des conclusions juridiques exactes.

Il ont notamment souligné à juste titre que le requérant craint avec raison d’être persécuté en cas de retour dans son pays d’origine en raison des liens familiaux qui l’unissent à son père, lieutenant-colonel des forces armées au Rwanda, accusé d’avoir participé au génocide rwandais des tutsis, poursuivi devant le tribunal pénal international pour le Rwanda d’xxx et compte tenu du fait que son épouse, xxx xxx a été citée comme « témoin protégé » de la défense devant ledit tribunal.

L’intimé peut craindre également d’être persécuté pour des raisons ethniques, étant le fils d’un hutu et d’une tutsi, lui-même marié à une tutsi, et pour ses activités de journaliste durant la période 1990 à 1993 à Radio Rwanda, connue pour avoir sa part dans le génocide rwandais.

L’intimé remplissant les conditions posées par la Convention de Genève pour l’octroi du statut de réfugié politique, l’acte d’appel n’est pas fondé et le jugement entrepris est à confirmer.

Par ces motifs la Cour, statuant contradictoirement, reçoit l’acte d’appel du 27 juillet 2005, le dit non fondé et en déboute, parlant confirme le jugement entrepris du 29 juin 2005 dans toute sa teneur, condamne l’État aux frais et dépens de l’instance d’appel.

Ainsi délibéré et jugé par Marion Lanners, présidente Christiane Diederich-Tournay, premier conseiller, rapporteur Carlo Schockweiler, conseiller et lu par la présidente Marion Lanners en l’audience publique au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête en présence du greffier en chef de la Cour Erny May.

le greffier en chef la présidente 4


Synthèse
Numéro d'arrêt : 20165C
Date de la décision : 29/11/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2005-11-29;20165c ?

Source

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