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08/11/2005 | LUXEMBOURG | N°20172C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 08 novembre 2005, 20172C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 20172 C Inscrit le 27 juillet 2005

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Audience publique du 8 novembre 2005 Recours formé par les époux … et consorts contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 27 juin 2005, n° 19549 du rôle)

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Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 20172C du rôle et déposée au greffe d...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 20172 C Inscrit le 27 juillet 2005

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Audience publique du 8 novembre 2005 Recours formé par les époux … et consorts contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 27 juin 2005, n° 19549 du rôle)

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Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 20172C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 27 juillet 2005 par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, au nom de …, né le … à … (Albanie), et de son épouse, …, née le … (Albanie), agissant tant en leur nom personnel qu’en celui de leurs enfants mineurs … et …, tous de nationalité albanaise, demeurant actuellement ensemble à L-…, dirigée contre un jugement rendu par le tribunal administratif le 27 juin 2005, par lequel il a déclaré non fondé le recours en réformation introduit contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 29 décembre 2004, rejetant leur demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, telle que cette décision a été confirmée par le même ministre le 21 février 2005, suite à un recours gracieux ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe de la Cour administrative le 9 août 2005 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;

Ouï le conseiller en son rapport, Maître Ardavan Fatholahzadeh et Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles Roth en leurs plaidoiries respectives.

Par requête, inscrite sous le numéro 19549 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 24 mars 2005, … et son épouse, …, agissant tant en leur nom personnel qu’en celui de leurs enfants mineurs … et …, ont fait introduire un recours tendant à la réformation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 29 décembre 2004, rejetant leur demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, telle que cette décision a été confirmée par ledit ministre le 21 février 2005, suite à un recours gracieux des actuels appelants.

Par jugement rendu le 27 juin 2005, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties, a reçu le recours en réformation en la forme et, au fond, l’a déclaré non justifié et en a débouté les consorts ….

Les premiers juges ont justifié leur décision en retenant que les actuels appelants, déclarant être originaires d’un village situé près de la ville de Shkoder en Albanie, que … aurait fait l’objet d’une tentative d’assassinat après avoir découvert que le camion dont il était le chauffeur aurait été chargé par des personnes masquées ainsi que par des policiers qui y auraient déposé de la drogue, ainsi que quatre filles, qu’à la suite de cet incident, sa maison aurait été détruite à l’explosif pendant la nuit, que de ce fait, son père aurait trouvé la mort et que son frère aurait été trouvé assassiné dans un canal, ont certes fait état d’événements crédibles, mais que ceux-ci s’inscrivent dans le cadre d’une criminalité de droit commun, sans qu’ils n’aient établi à suffisance de droit que les autorités chargées de la sécurité publique ne soient pas capables de leur assurer un niveau de protection suffisant. Le tribunal a encore constaté que les risques allégués par les actuels appelants se limitent essentiellement à leur ville d’origine, sans qu’ils n’aient établi être en mesure de trouver refuge à l’heure actuelle dans une autre partie de l’Albanie.

En date du 27 juillet 2005, Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel en nom et pour compte de … et de son épouse, …, agissant tant en leur nom personnel qu’en celui de leurs enfants mineurs … et …, inscrite sous le numéro 20172C du rôle, par laquelle les parties appelantes sollicitent la réformation du premier jugement.

A l’appui de leur requête d’appel, les appelants reprochent aux premiers juges de ne pas avoir fait droit à leurs moyens développés à l’appui de leur requête introductive d’instance qui auraient dû aboutir à la reconnaissance dans leur chef du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève.

Les appelants font état de ce que …, en sa qualité de chauffeur dans une entreprise de transport, aurait assisté au chargement de son camion effectué par des personnes masquées, qui auraient été assistées par des policiers, et qu’à cette occasion, il aurait pu constater que « le chargement était probablement de la drogue ainsi que quatre filles à destination de l’Europe ». Ne souhaitant pas conduire le camion ainsi chargé, il aurait décidé de fuir. Lors de cette fuite, une des personnes présentes lors du chargement, aurait tiré sur lui à quatre reprises, sans toutefois l’atteindre. Au vu de ces événements, il se serait adressé à la police, non seulement pour porter plainte contre les auteurs de ces faits, mais également afin de solliciter une protection pour lui-même, ainsi que pour les membres de sa famille. La police, qui aurait été dans l’incapacité de le protéger, se serait bornée à lui recommander de se mettre « à l’abri », ce qu’il aurait fait en s’installant dans un hôtel de la ville de Durres. Au lendemain de ces événements, … aurait appris par l’intermédiaire de son beau-frère, que sa maison aurait été détruite à l’explosif pendant la nuit. Au cours de cet attentat, son père aurait trouvé la mort et son frère aurait été retrouvé par la suite assassiné dans un canal. Il estime que ces événements devraient être interprétés comme étant des actes de représailles dirigés contre lui au vu de son comportement au cours des opérations de chargement de son camion. Les appelants déclarent encore qu’ils se seraient vus obligé de quitter « rapidement » leur pays d’origine, afin d’échapper aux actes commis par des membres « des groupes mafieux ». Ils estiment ainsi risquer de faire l’objet de persécutions par des criminels de droit commun contre lesquels l’Etat albanais serait dans l’incapacité de les protéger. Ils contestent encore être en mesure de pouvoir bénéficier d’une possibilité de fuite interne à l’intérieur de l’Albanie.

Dans son mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 9 août 2005, le délégué du Gouvernement conclut à la confirmation du jugement entrepris.

La requête d’appel est recevable pour avoir été introduite dans les formes et délai prévus par la loi.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

C’est à bon droit que les premiers juges ont pu considérer les événements tels que relatés par les appelants comme pouvant être considérés comme crédibles au vu également des pièces versées au dossier. Il n’en demeure toutefois pas moins, tel que les premiers juges l’ont également constaté, que les événements en question s’inscrivent dans un cadre de criminalité de droit commun, en ce qu’ils émanent plus particulièrement de personnes appartenant à des milieux mafieux. Au vu de cette situation de fait, les appelants n’ont pas établi à suffisance de droit que les autorités chargées de la sécurité publique en Albanie ne soient pas capables de leur assurer un niveau de protection suffisant, étant relevé que la notion de protection des habitants d’un pays contre des agissements de groupes de la population n’implique pas une sécurité physique absolue des habitants contre la commission matérielle d’un acte criminel et qu’il y a lieu de prendre en compte une persécution commise par des tiers uniquement en cas de défaut de protection dont l’existence doit être mise suffisamment en évidence par les demandeurs d’asile, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. En effet, il ressort des propres déclarations des appelants qu’ils ont déposé plainte auprès des autorités policières locales et le fait que cette enquête policière n’a pas abouti avant leur départ d’Albanie, soit dans un laps de temps de 15 jours, ne démontre pas à lui seul un défaut de protection de la part des autorités en place.

C’est encore à bon droit que les premiers juges ont retenu que les appelants n’ont pas établi qu’ils seraient dans l’impossibilité de s’installer dans une autre région de leur pays d’origine et de profiter ainsi d’une possibilité de fuite interne.

Il suit de ce qui précède qu’il y a lieu de déclarer la requête d’appel non fondée et de confirmer le jugement entrepris du 27 juin 2005 dans toute sa teneur.

Par ces motifs, La Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties à l’instance ;

reçoit la requête d’appel du 27 juillet 2005 en la forme ;

la dit cependant non fondée et en déboute ;

partant confirme le jugement entrepris du 27 juin 2005 dans toute sa teneur ;

condamne les appelants aux frais et dépens de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par :

Jean-Mathias Goerens, vice-président, Marc Feyereisen, conseiller, Carlo Schockweiler, conseiller, rapporteur, et lu par le vice-président en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en-tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier le vice-président 4


Synthèse
Numéro d'arrêt : 20172C
Date de la décision : 08/11/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2005-11-08;20172c ?

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