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30/06/2005 | LUXEMBOURG | N°19473C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 30 juin 2005, 19473C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 19473 C Inscrit le 14 mars 2005

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Audience publique du 30 juin 2005 Recours formé par Monsieur XXX XXX contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 21 février 2005, n° 18853 du rôle)

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Vu

la requête d’appel, inscrite sous le numéro 19473C du rôle et déposée au greffe de la Cour ...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 19473 C Inscrit le 14 mars 2005

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Audience publique du 30 juin 2005 Recours formé par Monsieur XXX XXX contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 21 février 2005, n° 18853 du rôle)

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Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 19473C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 14 mars 2005 par Maître Gilles Plottké, avocat à la Cour, au nom de Monsieur XXX, né le 15 mai 1971 à XXX (Nigeria), de nationalité nigériane, demeurant actuellement à L-XXX, dirigée contre un jugement rendu par le tribunal administratif le 21 février 2005, par lequel il a déclaré non fondé le recours en réformation introduit contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 6 septembre 2004, rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, telle que cette décision a été confirmée par ledit ministre le 8 novembre 2004, a déclaré irrecevable le recours subsidiaire en annulation et a rejeté la demande en obtention de l’effet suspensif pendant le délai et l’instance d’appel ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe de la Cour administrative le 12 avril 2005 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;

Ouï le conseiller en son rapport, Maître Radu Duta, en remplacement de Maître Gilles Plottké, et Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter en leurs plaidoiries respectives.

Par requête, inscrite sous le numéro 18853 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 12 novembre 2004, Monsieur XXX XXX a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 6 septembre 2004, rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, telle que cette décision a été confirmée par ledit ministre le 8 novembre 2004, suite à un recours gracieux de l’actuel appelant.

Par jugement rendu le 21 février 2005, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties, a reçu le recours en réformation en la forme, au fond, l’a déclaré non justifié, a déclaré irrecevable le recours subsidiaire en annulation et a rejeté la demande en obtention de l’effet suspensif pendant le délai et l’instance d’appel.

Les premiers juges ont justifié leur décision en retenant que l’actuel appelant, déclarant être originaire de la région de Delta State au Nigeria, être de confession chrétienne, appartenir au groupe ethnique des « Isoko » et avoir quitté son pays d’origine en raison de son appartenance ethnique et des troubles politiques qui affecteraient son pays d’origine, leur a soumis des déclarations qui sont restées à l’état de simples allégations non confortées par un quelconque élément de preuve tangible, de sorte à être insuffisantes pour justifier qu’il risquait ou risque, individuellement et concrètement, de subir des persécutions au sens de la Convention de Genève dans son pays d’origine. Pour le surplus, les premiers juges ont décidé que le seul fait concret invoqué par l’actuel appelant, à savoir la destruction de son commerce, au cours de l’année 1996, s’inscrit plutôt dans le cadre d’une criminalité de droit commun. Par ailleurs, au vu des déclarations de l’actuel appelant lors de son audition par un agent du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration quant à ses motifs de persécution, le tribunal a relevé que les motifs véritables se trouvant à la base de sa demande d’asile ont trait à des considérations d’ordre matériel et économique qui ne sauraient toutefois justifier la reconnaissance du statut de réfugié.

Dans la mesure où les problèmes allégués par l’actuel appelant sont limités à sa ville ou région d’origine, le tribunal a encore retenu qu’il n’a pas établi une impossibilité dans son chef de trouver un refuge approprié dans une autre région de son pays d’origine.

Enfin, quant à la demande figurant au dispositif de la requête introductive d’instance et tendant à voir accorder, conformément à l’article 35 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives un « effet suspensif du recours contre un jugement confirmatif pendant le délai et l’instance d’appel, le tout au regard du préjudice grave et définitif que créerait l’exécution de la décision attaquée », le tribunal a rejeté cette demande non seulement au vu du résultat obtenu par le litige en première instance, dans la mesure où l’actuel appelant y a succombé en ses moyens et arguments, mais en outre en raison de ce qu’une telle demande est superflue, au vu de l’article 12, paragraphe (1) de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire, qui prévoit un effet suspensif pour tout recours en réformation introduit contre une décision de refus d’octroi du statut d’asile et au vu du paragraphe (2) du même article qui prévoit que l’appel susceptible d’être introduit contre une décision du tribunal administratif bénéficie également d’un effet suspensif.

En date du 14 mars 2005, Maître Gilles Plottké, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel en nom et pour compte de Monsieur Emmanuel Iteire, inscrite sous le numéro 19473C du rôle, par laquelle la partie appelante sollicite la réformation du premier jugement.

A l’appui de sa requête d’appel, l’appelant reproche aux premiers juges de ne pas avoir fait droit à ses conclusions telles que présentées en première instance qui auraient dû aboutir à la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef. Ainsi, il se réfère à la situation régnant actuellement dans son pays d’origine, à savoir le Nigeria, où de « graves troubles » secoueraient actuellement la région de Delta State et il insiste encore sur la situation politique et économique désastreuse de son pays où il serait « purement et simplement » impossible de vivre en raison des sévères troubles ethniques qui y séviraient. Quant à sa situation personnelle, il fait état de ce que son commerce aurait été brûlé par des membres d’ethnies adverses, sans toutefois fournir de plus amples renseignements à ce sujet. En résumé, il craint se retrouver dans une situation de dénuement total lors d’un retour dans son pays d’origine, ce qui pourrait avoir les pires conséquences pour son intégrité personnelle.

Dans le dispositif de sa requête d’appel, il conclut principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation des décisions ministérielles critiquées.

Dans son mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 12 avril 2005, le délégué du Gouvernement conclut à la confirmation du jugement entrepris.

La requête d’appel est recevable pour avoir été introduite dans les formes et délai prévus par la loi.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

En ce qui concerne la situation générale régnant actuellement au Nigeria, le pays d’origine de l’appelant, il échet de constater, à la lecture des documents soumis à la Cour par le mandataire de l’appelant, que la situation de sécurité générale dans ce pays est loin d’être satisfaisante. Les documents en question ne contiennent toutefois aucun élément de nature à établir qu’un résident du Nigeria risque de faire l’objet de persécutions, en sa seule qualité de membre d’un groupe ethnique, et plus particulièrement de celui des « Isoko », ou d’une communauté religieuse, à savoir celle des catholiques, que ce soit par les autorités gouvernementales ou par des membres d’un autre groupement.

Il échet encore de relever que la crainte de persécution mise en avant par l’appelant a essentiellement sinon exclusivement trait à l’incendie dont aurait fait l’objet son commerce et qui aurait été organisé par « des membres d’ethnies adverses », sans que l’appelant n’ait fourni le moindre élément de nature à faire croire à une motivation dudit acte de nature à tomber dans le champ d’application de la Convention de Genève.

Partant, il échet de constater que ce seul élément ayant trait à la situation personnelle de l’appelant dans son pays d’origine n’est pas de nature à établir des persécutions dont l’appelant aurait fait l’objet dans ce pays ou des craintes de persécution qu’il aurait à bon droit pu y ressentir. Il échet de relever à cet égard que ce seul fait est tout au plus de nature à être considéré comme une infraction de droit commun qui n’est pas de nature à justifier la reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève, en l’absence de tout autre élément apporté par l’appelant afin de soutenir son récit de manière crédible.

Par ailleurs, quant à la situation de dénuement dans laquelle l’appelant craint se retrouver en cas de retour au Nigeria, il y a lieu d’interpréter cette crainte comme se référant à des raisons d’ordre économique qui lui rendraient la vie difficile au Nigeria. Or, de tels motifs ne rentrent pas dans le champ d’application de la Convention de Genève, de sorte qu’ils ne sauraient justifier la reconnaissance du statut de réfugié.

Il suit de ce qui précède que c’est à bon droit que le tribunal administratif a déclaré non fondé le recours en réformation dirigé contre les décisions ministérielles incriminées.

En ce qui concerne la demande tendant à l’annulation desdites décisions, l’appelant n’a soumis à la Cour aucun moyen ou argument de nature à soutenir cette demande et à contredire la conclusion à laquelle le tribunal administratif a pu aboutir à bon droit en déclarant irrecevable le recours subsidiaire en annulation, sur base des articles 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire et 2 (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif. Cette demande est partant également à déclarer non fondée.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que la requête d’appel n’est pas fondée et que le jugement entrepris du 21 février 2005 est à confirmer.

Par ces motifs, La Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties à l’instance ;

reçoit la requête d’appel du 14 mars 2005 en la forme ;

la dit cependant non fondée et en déboute ;

partant confirme le jugement entrepris du 21 février 2005 dans toute sa teneur;

condamne l’appelant aux frais et dépens de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par :

Marion Lanners, présidente, Christiane Diederich-Tournay, premier conseiller, Carlo Schockweiler, conseiller, rapporteur, et lu par la présidente en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en-tête, en présence du greffier en chef de la Cour Erny May.

le greffier en chef la présidente 5


Synthèse
Numéro d'arrêt : 19473C
Date de la décision : 30/06/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2005-06-30;19473c ?

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