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10/05/2005 | LUXEMBOURG | N°19635C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 10 mai 2005, 19635C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 19635 C Inscrit le 11 avril 2005

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Audience publique du 10 mai 2005 Recours formé par … et … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 9 mars 2005, n° 19289 du rôle)

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Vu la requête

d’appel, inscrite sous le numéro 19635C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 19635 C Inscrit le 11 avril 2005

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Audience publique du 10 mai 2005 Recours formé par … et … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 9 mars 2005, n° 19289 du rôle)

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Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 19635C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 11 avril 2005 par Maître Pascale Petoud, avocat à la Cour, au nom de …, né le … à …e (Etat de Serbie et Monténégro), et de …, née le … à … (Etat de Serbie et Monténégro), tous les deux de nationalité serbo-

monténégrine, demeurant actuellement ensemble à L-…, dirigée contre un jugement rendu par le tribunal administratif en date du 9 mars 2005, par lequel il a déclaré non fondé leur recours en annulation introduit contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 12 novembre 2004 déclarant manifestement infondée leur demande en obtention du statut de réfugié et contre celle confirmative, intervenue sur recours gracieux, du même ministre du 10 janvier 2005 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe de la Cour administrative le 15 avril 2005 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;

Ouï le conseiller en son rapport, et Monsieur le délégué du Gouvernement Guy Schleder en ses plaidoiries.

Par requête, inscrite sous le numéro 19289 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 10 février 2005, … et son épouse … ont fait introduire un recours tendant à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 12 novembre 2004, déclarant manifestement infondée leur demande en obtention du statut de réfugié et de celle confirmative, intervenue sur recours gracieux, du même ministre du 10 janvier 2005.

Par jugement rendu le 9 mars 2005, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, a reçu le recours en annulation en la forme et, au fond, l’a déclaré non justifié et en a débouté les actuels appelants.

Le tribunal a justifié sa décision en retenant que les actuels appelants, déclarant être originaires du Kosovo, avoir été des réfugiés au Monténégro pendant 5 ans et n’être pas en mesure de retourner au Kosovo en raison de ce que leur maison aurait été occupée après leur départ, en ajoutant craindre la vengeance des Albanais en raison de leur appartenance à la communauté bochniaque, n’ont manifestement pas établi des raisons personnelles de nature à établir dans leur chef l’existence d’une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève. Les premiers juges ont relevé que c’est à bon droit que le ministre compétent a retenu que les actuels appelants ont essentiellement quitté le Monténégro, où ils ont pu bénéficier pendant au moins 4 ans d’une possibilité de fuite interne, pour faire soigner leur fille malade et pour des raisons économiques. Or, d’après les premiers juges, de telles raisons purement personnelles, fondées notamment sur le désir de pouvoir bénéficier d’une meilleure prise en charge du point de vue médical et sur des raisons économiques avouées, ne sauraient constituer une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève. Ils ont encore insisté sur le fait que les actuels appelants ont quitté le Kosovo en 1999.

En date du 11 avril 2005, Maître Pascale Petoud, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel en nom et pour compte de … et de son épouse, …, inscrite sous le numéro 19635C du rôle, par laquelle la partie appelante sollicite la réformation du premier jugement.

A l’appui de leur requête d’appel, les appelants reprochent aux premiers juges de ne pas avoir fait droit à leurs conclusions telles qu’exposées en première instance, en soutenant qu’en tant que personnes originaires de l’ex-Yougoslavie et plus particulièrement en leur qualité de bosniaques du Kosovo, où ils auraient vécu jusqu’en 1999, ils risqueraient des persécutions de la part de membres de la communauté albanaise, en raison de ce que … aurait continué à travailler pendant la guerre pour une entreprise automobile en qualité de « gardien des lieux », et que lesdites persécutions auraient notamment commencé par des inscriptions hostiles qui auraient été peintes sur les murs de leur maison. Ils admettent toutefois avoir pu trouver un refuge au Monténégro, en soutenant que ledit refuge n’aurait dû avoir qu’une durée temporaire, mais qu’il aurait néanmoins duré pendant 5 ans. Ils estiment qu’un retour dans leur pays d’origine et plus particulièrement dans leur maison serait impossible du fait que leur maison serait occupée et que le désir de vengeances des Albanais ne serait pas éteint. Ils estiment enfin ne pas pouvoir bénéficier d’une possibilité de fuite interne à l’intérieur de la Serbie-Monténégro en tant que personnes originaires du Kosovo.

Dans son mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 15 avril 2005, le délégué du Gouvernement conclut à la confirmation du jugement entrepris.

La requête d’appel est recevable pour avoir été introduite dans les formes et délai prévus par la loi.

Aux termes de l’article 9 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire « une demande d’asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsqu’elle ne répond à aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève et le Protocole de New York, si la crainte du demandeur d’asile d’être persécuté dans son propre pays est manifestement dénuée de tout fondement ou si la demande repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures en matière d’asile ».

En vertu de l’article 3 du règlement grand-ducal du 22 avril 1996 portant application des articles 8 et 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile pourra être considérée comme manifestement infondée lorsqu’un demandeur n’invoque pas de craintes de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques comme motif de sa demande.

Lorsque le demandeur invoque la crainte d’être persécuté dans son propre pays, mais qu’il résulte des éléments et des renseignements fournis que le demandeur n’a aucune raison objective de craindre des persécutions, sa demande peut être considérée comme manifestement infondée ».

Une demande d’asile basée exclusivement sur des motifs d’ordre personnel et familial ou sur un sentiment général d’insécurité, sans faire état d’un quelconque fait pouvant être considéré comme constituant une persécution ou une crainte de persécutions au sens de la Convention de Genève est à considérer comme manifestement infondée.

C’est à bon droit que tant le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration que les juges de première instance ont insisté sur le fait que les appelants ont pu bénéficier d’un refuge au Monténégro, pendant une durée de 5 ans, et que par rapport à ce pays, ils n’ont apporté la moindre explication en quoi ils risqueraient d’y subir des persécutions au sens de la Convention de Genève.

A la lecture des procès-verbaux des auditions respectives des époux c-Ramdedovic des 28 octobre et 11 novembre 2004, il échet de constater que les appelants sollicitent la reconnaissance du statut de réfugié au Luxembourg en raison de la maladie de l’un de leurs enfants, en espérant y trouver de meilleurs soins médicaux que ceux disponibles tant au Monténégro qu’au Kosovo et en raison de leur situation économique. Or, de telles raisons ne tombent pas sous le champ d’application de la Convention de Genève.

Par ailleurs, en ce qui concerne leurs allégations quant à leur éventuelle situation une fois de retour au Kosovo, après plus de 6 années d’absence de ce pays, il y a lieu de constater que leurs craintes de persécutions se résument exclusivement en des hypothétiques persécutions dont ils risqueraient de faire l’objet de la part des Albanais du Kosovo en raison de ce qu’il serait reproché à … d’avoir collaboré avec les autorités serbes pendant la guerre du Kosovo. Or, de telles craintes hypothétiques constituent en réalité l’expression d’un sentiment général d’insécurité qui, en tant que tel, ne peut être considéré comme constituant une persécution ou une crainte de persécutions au sens de la Convention de Genève.

Il s’ensuit que dans ces circonstances, la Cour est amenée à constater que les appelants ont exclusivement fait état de motifs d’ordre personnel et familial, qui ne sauraient, à eux seuls, suffire pour faire tomber une demande d’asile dans le champ d’application de la Convention de Genève.

Il suit des éléments qui précèdent que la demande d’asile sous examen ne repose sur aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève, de sorte que c’est à bon droit que le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration a rejeté la demande d’asile des appelants comme étant manifestement infondée et que la requête d’appel sous analyse est à rejeter comme n’étant pas fondée.

Il suit enfin des considérations qui précèdent que le jugement entrepris du 9 mars 2005 est à confirmer.

L’arrêt à intervenir statue à l’égard de toutes les parties à l’instance, nonobstant l’absence du mandataire de l’appelante à l’audience des plaidoiries, étant donné que la procédure devant les juridictions administratives est essentiellement écrite et que l’appelante a fait déposer une requête d’appel.

Par ces motifs, La Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit en la forme la requête d’appel du 11 avril 2005 ;

la dit cependant non fondée et en déboute ;

partant confirme le jugement entrepris du 9 mars 2005 dans toute sa teneur;

condamne les appelants aux frais et dépens de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par :

Jean-Mathias Goerens, vice-président Marc Feyereisen, conseiller, Carlo Schockweiler, conseiller, rapporteur, et lu par le vice-président en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en-tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier le vice-président 5


Synthèse
Numéro d'arrêt : 19635C
Date de la décision : 10/05/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2005-05-10;19635c ?

Source

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