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03/05/2005 | LUXEMBOURG | N°17740C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 03 mai 2005, 17740C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 17740 C Inscrit le 12 mars 2004

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Audience publique du 3 mai 2005 Recours formé par la société anonyme … contre une décision du bourgmestre de la commune de … en matière de permis de construire - Appel -

(jugement entrepris du 2 février 2004, n° 16191 du rôle)

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u l’arrêt rendu par la Cour administrative en date du 15 juillet 2004 par laquelle elle a r...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 17740 C Inscrit le 12 mars 2004

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Audience publique du 3 mai 2005 Recours formé par la société anonyme … contre une décision du bourgmestre de la commune de … en matière de permis de construire - Appel -

(jugement entrepris du 2 février 2004, n° 16191 du rôle)

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Vu l’arrêt rendu par la Cour administrative en date du 15 juillet 2004 par laquelle elle a reçu les appels dirigés contre les jugements n° du rôle 16191 et n° du rôle 16273 en la forme, a joint des affaires introduites sous les numéros du rôle 17740C et 17741C , a dit l’appel contre le jugement n° du rôle 16273 non fondé et en a débouté avec charge des frais pour les parties appelantes; avant de statuer sur le mérite de l’appel dirigé contre le jugement n° du rôle 16191, a prononcé la rupture du délibéré pour permettre à la partie la plus diligente de verser les pièces relatives à la continuation de la procédure relative au projet de modification de l’article 4 de la partie écrite du PAG de la commune de … et a invité les parties à conclure sur la question de recevabilité des contestations telle que formulée dans le dit arrêt, en considération du stade d’avancement de la procédure au moment de la décision litigieuse ; a dit que, sous les conditions de délai posées par l’art 46 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions de l’ordre administratif, chaque partie, appelante et intimée, avait droit au dépôt de deux mémoires, le premier mémoire étant à fournir par la partie la plus diligente avant le vendredi, 15 octobre 2004, en ce qui concernait les mémoires subséquents, a dit que pour le dépôt du mémoire en réponse, le délai expirait le lundi 15 novembre 2004, pour le dépôt du mémoire en réplique, le délai expirait le mercredi 15 décembre 2004, pour le dépôt du mémoire en duplique, le délai expirait le 15 janvier 2005 et a refixé l’affaire à l’audience du mardi, 25 janvier 2005 pour continuation, sauf aux parties de demander la fixation à une date plus rapprochée.

Vu le mémoire déposé au greffe de la Cour administrative le 24 septembre 2004 par Maître Georges Pierret, pour compte de l’administration communale de … ainsi que sa notification par télécopie à Maître Jean Medernach le 23 septembre 2004.

Vu le mémoire déposé au greffe de la Cour administrative le 6 octobre 2004 par Maître Jean Medernach, au nom de la société … ainsi que sa notification par télécopie à Maître Pierret à la même date.

Vu le mémoire déposé au greffe de la Cour administrative le 2 décembre 2004 par Maître Georges Pierret, pour compte de l’administration communale de … ainsi que sa notification par télécopie à Maître Jean Medernach le 1er décembre 2004.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le vice-président en son rapport complémentaire et Maître Gilles Dauphin, en remplacement de Maître Jean Medernach ainsi que Maître Gabrielle Eynard, en remplacement de Maître Georges Pierret en en leurs observations orales.

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A la suite de la rupture du délibéré prononcée par arrêt du 15 juillet 2004 qui par ailleurs a déclaré non fondé l’appel en tant que dirigé contre le jugement n° 16273C du rôle, les parties, en ce qui concerne l’appel contre le jugement n° 16191C du rôle ont déposé les mémoires suivants :

En date du 24 septembre 2004, l’administration communale de … a déposé un mémoire dans lequel elle conclut à l’irrecevabilité du recours alors qu’il aurait appartenu à la partie réclamante de faire la procédure de réclamation auprès du ministre, la décision prise par la commune sur base de l’article 12 de la loi du 12 juin 1937 étant par ailleurs régulière.

… et … ont fait déposer un mémoire supplémentaire le 6 octobre 2004.

Il est conclu à voir déclarer l’appel recevable et fondé.

Les appelants soutiennent ne pas avoir connaissance d’une poursuite de la procédure d’adoption de la modification du PAG suite à l’objection formulée par …. Elles soutiennent par ailleurs qu’il n’y aurait pas lieu à application de la procédure de l’article 12.2 de la loi du 12 juin 1937, les parties ayant soulevé un problème de droit, soit l’illégalité de l’article 4c du PAG. Elles font plaider par ailleurs que l’exception d’illégalité soulevée contre une disposition provisoirement adoptée serait recevable sur base de l’article 95 de la Constitution.

L’administration communale de … a déposé un nouveau mémoire le 2 décembre 2004.

La commune y renseigne que la nouvelle disposition de l’article 4 du PAG n’a pas encore fait l’objet d’un vote définitif. Elle conclut encore à l’irrecevabilité du recours, celui ne pouvant être, notamment au vu de l’article 2 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, dirigé contre une décision provisoire.

Considérant qu’il résulte du dossier tel que constitué à la suite de l’arrêt d’avant dire droit du 15 juillet 2004 que la procédure de modification de la partie écrite du PAG, portant introduction de la clause litigieuse à l’article 4c : « Das Errichten von zusätzlichen Tankstellen auf dem Gebiet der Gemeinde … ist untersagt. Maximal sind 9 Tankstelle zugelassen » n’a pas connu de suite au-delà du vote provisoire du 16 novembre 2000;

que dès lors la situation régie par le texte nouveau se trouve réglée par la disposition de l’article 12 de la loi du 12 juin 1937 sur l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes qui dispose comme suit : « A partir du jour où le projet d’aménagement est déposé à la maison communale, tout morcellement des terrains, toutes construction ou réparation confortative, ainsi que tous travaux généralement quelconques, en tant que ces morcellements, constructions, réparations ou travaux seraient contraires aux dispositions du plan, sont interdits. Cette servitude frappe les propriétés sans conférer le droit à indemnité.

En cas de contestation de la part des intéressés, il y est statué par le « Ministre de l’Intérieur ». Dans les huit jours de la notification de la décision, les intéressés pourront former un recours au « tribunal administratif », qui statuera avec juridiction directe. » Considérant qu’il est admis en jurisprudence que l’application de la disposition du 2e alinéa de l’article 12 qui prévoit « en cas de contestation de la part des intéressés » une décision du ministre avec recours en pleine juridiction devant la juridiction administrative se limite aux situations où il y a des difficultés d’interprétation d’un plan d’aménagement, soit dans sa partie graphique, soit dans sa partie écrite, cette procédure ne s’appliquant notamment pas lorsque la légalité du plan est contestée (CE 20 juillet 1977 P.23.505 et CE 30 juillet 1978 P.24.149) ;

Considérant que la Cour se rallie à cette jurisprudence bien établie et, le reproche opposé à l’adoption de l’article 4c du règlement communal visant sa légalité, comme relevé ci-dessus et à l’arrêt précité du 15 juillet 2004, il y a lieu de dire que les appelantes n’étaient pas en situation de faire la procédure de l’article 12 alinéa 2 de la loi du 12 juin 1937, le moyen d’irrecevabilité du recours omisso medio étant dès lors à écarter ;

Considérant que la commune intimée soutient encore que le recours serait irrecevable sur base de l’article 2 de la loi du 7 novembre 1996 portant création des juridictions de l’ordre administratif alors que la décision du vote provisoire ne constituerait pas une décision définitive ;

Considérant que le recours dirigé par les appelantes par requête du 26 mars 2003 était dirigé non de façon directe contre la disposition modificative du PAG, mais contre la décision du bourgmestre du 27 janvier 2003 qui a refusé, sur base de la décision litigieuse du PAG provisoirement adoptée par le Conseil communal, le permis de construire sollicité ;

que le recours était dès lors dirigé, contrairement à ce que semble vouloir faire admettre la commune en son mémoire du 2 décembre 2004 contre une décision définitive, soit le refus du bourgmestre, l’annulation de la décision ayant été demandée au motif de l’illégalité de la base de sa décision, soit la disposition modificative de l’article 4 de la partie écrite du PAG qui, celle n’a été, à l’époque comme à l’heure actuelle, adoptée que par le seul vote provisoire prévu à l’article 9 alinéa 2 de la loi précité du 12 juin 1937 ;

Considérant que, l’article 12 de la loi précitée disposant clairement qu’à partir du jour où, après le vote provisoire, un projet d’aménagement, auquel il y a lieu d’assimiler une disposition y apportant des modifications, est déposé à la maison communale, situation de fait non contestée en cause, toutes constructions…contraires aux dispositions du plan sont interdites, le bourgmestre peut légalement et a d’ailleurs l’obligation de refuser les demandes de permis de construire non compatibles avec les dispositions provisoirement adoptées, dans la mesure du moins où ces dispositions sont exemptes de vices, notamment en ce qui concerne leur légalité ;

Considérant qu’il en résulte que des dispositions qui ont fait l’objet du vote dit provisoire et du dépôt à la maison communale sont revêtues d’une force contraignante et d’un effet de droit direct, en vertu de la disposition spéciale de l’article 12 de la loi, ce de quoi doit découler leur soumission à l’article 95 de la Constitution ;

que le moyen des appelantes tendant à voir examiner de manière incidente la légalité de la disposition de l’article 4 c) du PAG qui gît à la base de la décision litigieuse est dès lors recevable, comme il a d’ailleurs été implicitement admis par le jugement dont appel ;

Considérant au fond que les appelants concluent à la réformation du jugement en ce que ce serait à tort que leurs contestations sur la légalité de la disposition nouvelle de l’article 4 c) de la partie écrite du PAG relevant aussi du règlement des bâtisses avaient été rejetées ;

Considérant que le bourgmestre a refusé de faire droit à la demande en obtention du permis de construire sur base de la disposition incriminée reproduite ci-dessus qui interdit l’installation de plus de 9 stations-service sur le territoire de la commune, alors que, ce qui est constant en cause, neuf autres stations-service ont été déjà installées sinon autorisées sur le territoire communal ;

que dès lors la disposition réglementaire dont la légalité se trouve contestée est la seule base légale et le support nécessaire de la décision de refus contre laquelle le recours est dirigé ;

Considérant qu’aux termes de l’article 95 de la Constitution, les cours et tribunaux n’appliquent les règlements généraux et locaux que pour autant qu’ils sont conformes à la loi ;

qu’il s’ensuit que la Cour est amenée à examiner la disposition visée au regard de sa conformité et à sa légalité en général et, en un premier temps, de sa conformité à la loi de base, soit la loi précitée du 12 juin 1937 ;

Considérant que cette loi, à travers notamment ses articles 2, spécialement l’alinéa c), 52 et 54 définit le contenu de plans d’aménagement et règlements sur les bâtisses et par là le pouvoir réglementaire afférent de l’autorité communale ;

que l’article 54 dispose que le règlement spécifiera, entre autres, si des établissements industriels peuvent être admis « dans tel ou tel quartier », l’article 52 disposant que « le règlement portera sur la sécurité et la salubrité des différentes constructions et sur l’aménagement de l’agglomération dans son ensemble… » ;

Considérant qu’à l’examen de la disposition de l’article 4c) de la partie écrite du PAG, la Cour constate que cette disposition ne rencontre pas la finalité assignée au PAG et au règlement des bâtisses alors que, en édictant sommairement une limitation du nombre des stations-service à neuf sur l’ensemble du territoire communal, elle n’a ni comme but et comme effet de déterminer l’emplacement de ces établissements dans tel ou tel quartier, comme omettant d’en limiter l’autorisation dans des zones ou aires réservées aux exploitations industrielles ni ne peut être considérée comme règle de salubrité ou de sécurité alors que la référence au seul nombre des établissements et non à leur charge polluante totale ou à un impact global limité sur la circulation et par là sur les nuisances et la sécurité ;

Considérant qu’il s’ensuit que la disposition invoquée par le bourgmestre à l’appui de sa décision de refus ne saurait dès lors constituer, par référence à l’article 95 de la Constitution et à l’économie générale de la loi précitée du 12 juin 1937 une base réglementaire valable pour asseoir une décision de refus ;

qu’il échet dès lors, sans qu’il n’y ait lieu d’examiner les autres griefs invoqués à l’appui de l’appel, de dire que la décision entreprise est dépourvue de motif légal et qu’elle doit encourir l’annulation ;

Considérant qu’eu égard à l’issue du procès, la demande d’allocation d’une indemnité de procédure formulée par la commune de … dans son mémoire en réponse du 1er avril 2004 est à abjuger ;

Considérant que dans l’acte d’appel, les appelants maintiennent la demande en allocation d’une indemnité de procédure formulée en première instance ;

Considérant que ni en première instance, ni en instance d’appel, les parties ne justifient en quelle mesure il serait inéquitable de laisser à leur charge des sommes exposées non comprises dans les dépens, de sorte qu’il y a lieu de déclarer la demande non fondée.

Par ces motifs la Cour, statuant contradictoirement, à la suite de l’arrêt du 15 juillet 2004, dit l’appel dirigé contre le jugement du 2 février 2004 n° 16191 du rôle fondé ;

réformant, annule la décision du bourgmestre de la commune de … du 27 janvier 2003 par laquelle la demande en obtention du permis de construire présentée par la S.A. Luxempart a été rejetée ;

renvoie le dossier devant l’administration communale ;

dit les demandes en allocation d’indemnités de procédure non fondées ;

condamne l’administration communale de … aux frais et dépens des deux instances.

Ainsi délibéré et jugé par Jean Mathias Goerens, vice-président, rapporteur Christiane Diederich-Tournay, premier conseiller Marc Feyereisen, conseiller et lu par le vice-président Jean Mathias Goerens en l’audience publique au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête en présence du greffier de la Cour Anne-

Marie Wiltzius.

le greffier le vice-président 6


Synthèse
Numéro d'arrêt : 17740C
Date de la décision : 03/05/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2005-05-03;17740c ?

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