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24/03/2005 | LUXEMBOURG | N°19420C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 24 mars 2005, 19420C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 19420 C Inscrit le 2 mars 2005

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Audience publique du 24 mars 2005 Recours formé par Monsieur XXX XXX contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 2 février 2005, n° 19142 du rôle)

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Vu la

requête d’appel, inscrite sous le numéro 19420C du rôle et déposée au greffe de la Cour ad...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 19420 C Inscrit le 2 mars 2005

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Audience publique du 24 mars 2005 Recours formé par Monsieur XXX XXX contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 2 février 2005, n° 19142 du rôle)

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Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 19420C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 2 mars 2005 par Maître Louis Tinti, avocat à la Cour, au nom de Monsieur XXX XXX, né le 9 mai 1974 à XXX (Mali), de nationalité malienne, demeurant actuellement à L-XXX, dirigée contre un jugement rendu par le tribunal administratif en date du 2 février 2005, par lequel il a déclaré non fondé le recours en annulation introduit contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 27 octobre 2004, portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme étant manifestement infondée, ainsi que contre une décision confirmative du même ministre du 8 décembre 2004 prise sur recours gracieux ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe de la Cour administrative le 15 mars 2005 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;

Ouï le conseiller en son rapport, Maître Louis Tinti et Madame la déléguée du Gouvernement Jacqueline Jacques en leurs plaidoiries respectives.

Par requête, inscrite sous le numéro 19142 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 10 janvier 2005, Monsieur XXX XXX a fait introduire un recours tendant à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 27 octobre 2004, portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme étant manifestement infondée, ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 8 décembre 2004 prise sur recours gracieux.

Par jugement rendu le 2 février 2005, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties, a reçu le recours en annulation en la forme et, au fond, l’a déclaré non justifié et en a débouté Monsieur XX.

Le tribunal a justifié sa décision en estimant qu’une demande d’asile basée exclusivement sur des motifs d’ordre personnel et familial ou sur un sentiment général d’insécurité, sans faire état d’un quelconque fait pouvant être considéré comme constituant une persécution ou une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève, est à considérer comme manifestement infondée. Il a retenu qu’en l’espèce, les craintes exprimées par l’actuel appelant à l’égard de son père et de ses cousins trouvent en substance leurs origines dans un différend relatif à sa vie privée et partant dans un problème d’ordre familial, lesquels sont étrangers aux motifs de persécution visés par la Convention de Genève. Les premiers juges ont encore relevé que les considérations d’ordre religieux invoquées par l’actuel appelant ne visent que des personnes qui ne sauraient être considérées comme des agents de persécution au sens de la Convention de Genève. Enfin, ils ont conclu que le fait par l’actuel appelant d’être recherché par la police à la suite de la mort de sa cousine doit être situé dans le cadre d’une enquête normale à la suite d’un crime de droit commun, de sorte à ne pas tomber sous le champ d’application de la Convention de Genève.

En date du 2 mars 2005, Maître Louis Tinti, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel en nom et pour compte de Monsieur XXX XXX, inscrite sous le numéro 19420C du rôle, par laquelle la partie appelante sollicite la réformation du premier jugement.

A l’appui de sa requête d’appel, l’appelant reproche aux premiers juges de ne pas avoir fait droit à ses conclusions telles qu’exposées en première instance, en soutenant qu’en tant que membre d’une « grande famille musulmane », il risquerait d’être persécuté du fait d’avoir violé des règles de conduite telles que fixées par la religion musulmane en raison de son projet de mariage avec une personne de religion différente. Il soutient plus particulièrement qu’une violation de ce précepte religieux risquerait d’être sanctionnée par la mort, une pratique qui serait d’ailleurs susceptible d’être appliquée par les autorités judiciaires, dans la mesure où la religion musulmane constituerait la religion de l’Etat de son pays d’origine, à savoir le Mali, et où lesdites autorités seraient « largement gouvernées dans leur attitude par les règles de conduite » telles que fixées par la religion musulmane. Il relève encore qu’il serait susceptible d’être tenu pour responsable, même si c’est de manière indirecte, du décès de sa cousine, qui pourrait être considéré par les autorités judiciaires de son pays d’origine comme ayant été causé par le fait de se marier avec une personne de confession chrétienne. En conclusion, il retient qu’il risquerait des persécutions soit de la part des autorités de son pays soit de la part des membres de sa famille, ce qui le mettrait dans l’impossibilité de retourner dans son pays.

Dans son mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 15 mars 2005, le délégué du Gouvernement conclut à la confirmation du jugement entrepris.

La requête d’appel est recevable pour avoir été introduite dans les formes et délai prévus par la loi.

Aux termes de l’article 9 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire « une demande d’asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsqu’elle ne répond à aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève et le Protocole de New York, si la crainte du demandeur d’asile d’être persécuté dans son propre pays est manifestement dénuée de tout fondement ou si la demande repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures en matière d’asile ».

En vertu de l’article 3, du règlement grand-ducal du 22 avril 1996 portant application des articles 8 et 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile pourra être considérée comme manifestement infondée lorsqu’un demandeur n’invoque pas de craintes de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques comme motif de sa demande.

Lorsque le demandeur invoque la crainte d’être persécuté dans son propre pays, mais qu’il résulte des éléments et des renseignements fournis que le demandeur n’a aucune raison objective de craindre des persécutions, sa demande peut être considérée comme manifestement infondée ».

Une demande d’asile basée exclusivement sur des motifs d’ordre personnel et familial ou sur un sentiment général d’insécurité, sans faire état d’un quelconque fait pouvant être considéré comme constituant une persécution ou une crainte de persécutions au sens de la Convention de Genève est à considérer comme manifestement infondée.

C’est à bon droit que les juges de première instance ont décidé qu’au regard des faits et motifs invoqués par l’appelant à l’appui de sa demande d’asile, tels qu’ils se dégagent des rapports d’audition de l’appelant par un agent du ministère de la Justice en date des 29 septembre et 13 octobre 2004, ainsi que de sa requête d’appel, force est de constater que l’appelant n’a manifestement pas établi, ni même allégué, des raisons personnelles suffisamment précises de nature à établir dans son chef l’existence d’une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève dans son pays de provenance. – En effet, il appert des explications fournies par l’appelant au cours de ses auditions précitées qu’il déclare avoir quitté son pays d’origine exclusivement pour des motifs ayant trait à un différend d’ordre privé et familial, en ce qu’il a voulu échapper à des actes de vengeance qui seraient susceptibles d’être commis à son encontre par des membres de sa famille du fait de son refus d’épouser sa cousine et du décès de celle-ci à la suite d’une bagarre qu’elle aurait eue avec la femme catholique qu’il aurait souhaité épouser. En outre, les allégations suivant lesquelles, d’une part, la police serait à sa recherche à la suite du décès de sa cousine et, d’autre part, il risquerait d’aller en prison « pour longtemps », ne sont pas crédibles en l’absence d’une quelconque indication précise quant au motif qui pourrait amener la police à l’emprisonner, dans la mesure où il prétend n’être en aucune façon responsable du décès de sa cousine et n’avoir été impliqué d’une quelconque façon dans la bagarre qui aurait eu lieu entre sa copine et sa cousine.

Il s’ensuit que dans ces circonstances, la Cour est amenée à constater que l’appelant a exclusivement fait état de motifs d’ordre personnel et familial, qui ne sauraient, à eux seuls, suffire pour faire tomber une demande d’asile dans le champ d’application de la Convention de Genève.

Il suit des éléments qui précèdent que la demande d’asile sous examen ne repose sur aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève, de sorte que c’est à bon droit que le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration a rejeté la demande d’asile de l’appelant comme étant manifestement infondée et que la requête d’appel sous analyse est à rejeter comme n’étant pas fondée.

Il suit enfin des considérations qui précèdent que le jugement entrepris du 2 février 2005 est à confirmer.

Par ces motifs, La Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit en la forme la requête d’appel du 2 mars 2005 ;

la dit cependant non fondée et en déboute ;

partant confirme le jugement entrepris du 2 février 2005 dans toute sa teneur;

condamne l’appelant aux frais et dépens de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par :

Marion Lanners, présidente, Marc Feyereisen, conseiller, Carlo Schockweiler, conseiller, rapporteur, et lu par la présidente en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en-tête, en présence du greffier en chef de la Cour Erny May.

le greffier en chef la présidente 5


Synthèse
Numéro d'arrêt : 19420C
Date de la décision : 24/03/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2005-03-24;19420c ?

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