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24/02/2005 | LUXEMBOURG | N°18324C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 24 février 2005, 18324C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 18324 C Inscrit le 2 juillet 2004

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Audience publique du 24 février 2005 Recours formé par la société à responsabilité limitée XXX contre une décision du collège des bourgmestre et échevins de la commune de Luxembourg en présence de la société anonyme XXX en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire - Appel -

(jugement entrepris du 26 mai 2004, n° 17275 du rôle)

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GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 18324 C Inscrit le 2 juillet 2004

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Audience publique du 24 février 2005 Recours formé par la société à responsabilité limitée XXX contre une décision du collège des bourgmestre et échevins de la commune de Luxembourg en présence de la société anonyme XXX en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire - Appel -

(jugement entrepris du 26 mai 2004, n° 17275 du rôle)

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Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 18324C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 2 juillet 2004 par Maître Nicolas Bannasch, avocat à la Cour, au nom de la société à responsabilité limitée XXX, établie et ayant son siège social à L-XXX, représentée par son gérant actuellement en fonction, dirigée contre un jugement rendu par le tribunal administratif en date du 26 mai 2004, par lequel il s’est déclaré incompétent pour connaître du recours principal en réformation et a déclaré irrecevable le recours subsidiaire en annulation introduit contre un permis de construire n° xxx délivré le 9 septembre 2003 par le collège des bourgmestre et échevins de la Ville de Luxembourg à la société anonyme XXX et portant modification du permis de construire n° XXX délivré le 7 mars 2003, ainsi que, pour autant que de besoin, contre « toutes autorisations préliminaires, préparatoires, autorisations de principe et tous autres actes et décisions préparatoires, dont plus particulièrement une décision d’autorisation de construire du 7 mars 2003 » ;

Vu la signification de ladite requête d’appel par acte d’huissier Carlos Calvo à la date du 5 juillet 2004 ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 1er septembre 2004 par Maître Jean Medernach, avocat à la Cour, en nom et pour compte de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

Vu la notification dudit mémoire en réponse par télécopieur à la date du 1er septembre 2004 ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 16 septembre 2004 par Maître Gaston Stein, avocat à la Cour, en nom et pour compte de la société anonyme XXX, établie et ayant son siège social à L-XXX, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonction ;

Vu la notification dudit mémoire en réponse par télécopieur à la date du 15 septembre 2004 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 14 octobre 2004 par Maître Nicolas Bannasch en nom et pour compte de la société à responsabilité limitée XXX , préqualifiée ;

Vu la signification dudit mémoire en réplique par acte d’huissier Patrick Kurdyban, huissier de justice suppléant, en remplacement de Carlos Calvo, huissier de justice, à la date du 15 octobre 2004 ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 29 octobre 2004 par Maître Jean Medernach en nom et pour compte de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

Vu la notification dudit mémoire en duplique par télécopieur à la date du 29 octobre 2004 ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 10 novembre 2004 par Maître Gaston Stein, en nom et pour compte de la société anonyme XXX, préqualifiée ;

Vu le notification dudit mémoire en duplique par télécopieur à la date du 9 novembre 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;

Ouï le conseiller en son rapport, Maître Eyal Grumberg, en remplacement de Maître Nicolas Bannasch, Maître Christian Point, en remplacement de Maître Jean Medernach, et Maître Astrid Bugatto, en remplacement de Maître Gaston Stein, en leurs plaidoiries respectives.

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Par requête, inscrite sous le numéro 17275 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 10 décembre 2003, la société à responsabilité limitée XXX a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’un permis de construire n° XXX délivré le 9 septembre 2003 par le collège des bourgmestre et échevins de la Ville de Luxembourg à la société anonyme XXX et portant modification du permis de construire n° XXX délivré le 7 mars 2003, ainsi que, pour autant que de besoin, de « toutes autorisations préliminaires, préparatoires, autorisations de principe et tous autres actes et décisions préparatoires, dont plus particulièrement une décision d’autorisation de construire du 7 mars 2003 ».

Par jugement rendu le 26 mai 2004, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties, s’est déclaré incompétent pour connaître du recours principal en réformation et a déclaré irrecevable le recours subsidiaire en annulation.

Les premiers juges ont justifié leur décision par le défaut d’intérêt à agir dans le chef de la société à responsabilité limitée XXX , en retenant que la question du droit de propriété dont elle a déclaré être titulaire sur les lots visés par l’autorisation de construire déférée, voire sur des lots voisins reste entièrement litigieuse à défaut de tout indice concernant le prononcé des décisions judiciaires y afférentes portant reconnaissance d’un droit de propriété dans son chef. Dans ce contexte, le tribunal a encore relevé que le compromis d’échange du 18 septembre 2003, censé résoudre les problèmes entre le groupe XXX, auquel l’actuelle appelante déclare appartenir, et l’Etat et relatif entre autres aux lots plus particulièrement en cause en l’espèce, ne produit, d’après les indications de l’actuelle partie appelante elle-même, aucun effet à défaut de réalisation des conditions y stipulées. En ce qui concerne par ailleurs la qualité alléguée par l’actuelle appelante de propriétaire d’un immeuble sis au n° 19 de la route d’Arlon, les premiers juges ont constaté que l’actuelle appelante ne leur a soumis aucun élément de preuve concret de nature à établir sa propriété dudit immeuble, étant entendu que la question de savoir si la qualité de propriétaire de l’immeuble en question est suffisante pour conférer un intérêt à agir dans le chef de l’actuelle appelante n’a pas été résolue par le tribunal.

Enfin, le tribunal administratif a retenu que la simple participation de l’actuelle appelante en tant que société du groupe XXX, à divers titres, à l’élaboration et à la réalisation du plan d’aménagement particulier de la XXX et ses tentatives passées d’obtenir des autorisations de principe pour certains projets immobiliers ne sont pas de nature à lui conférer un intérêt à agir contre un permis de construire délivré à une tierce personne à défaut de la preuve de l’existence de droits individuels, et plus particulièrement un droit de propriété, dans son chef, qui seraient susceptibles d’être affectés par l’exécution du permis de construire critiqué.

En date du 2 juillet 2004, Maître Nicolas Bannasch, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel en nom et pour compte de la société à responsabilité limitée XXX, inscrite sous le numéro 18324C du rôle, par laquelle la partie appelante sollicite la réformation du premier jugement.

A l’appui de sa requête d’appel, l’appelante réitère sa qualité de propriétaire d’un immeuble sis à Luxembourg, XXX et fait état d’autres droits de propriété dont elle disposerait en vertu d’une offre du 1er octobre 1998 formulée par l’Etat du Grand-

Duché de Luxembourg et d’une acceptation du 2 décembre 1998, ayant eu pour conséquence que le groupe XXX, et plus particulièrement elle-même, seraient devenus propriétaires d’un certain nombre de terrains situés dans le périmètre du plan d’aménagement particulier de la XXX, dont ferait notamment partie le terrain sur lequel la société anonyme XXX projetterait de réaliser des constructions telles qu’autorisées par la décision litigieuse. Elle estime être devenue propriétaire de terrains voisins et attenants au terrain devant accueillir la construction litigieuse envisagée par la société anonyme XXX. Elle fait encore valoir que l’offre précitée du 1er octobre 1998 aurait été concrétisée par la signature d’un compromis d’échange en date du 18 septembre 2003, qui porterait sur des terrains adjacents au terrain concerné par l’autorisation de construire litigieuse, ledit compromis n’ayant toutefois pas pu produire les effets souhaités pour des raisons qui ne lui seraient pas imputables. Toutefois, à la suite de négociations ultérieures entre le groupe XXX et l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, un nouvel accord aurait pu être trouvé, qui aurait été formalisé par la conclusion de plusieurs actes d’échange signés en date du 21 mai 2004 et qui porteraient sur des immeubles situés XXX,XXX et XXX, dont elle serait actuellement propriétaire. Il s’ensuivrait qu’elle serait actuellement propriétaire d’un certain nombre de terrains concernés par l’exécution du plan d’aménagement particulier de la XXX, avoisinant directement le terrain litigieux.

Elle conteste que la société anonyme XXX serait propriétaire du terrain au sujet duquel le permis de construire litigieux lui a été délivré, en faisant état de différentes procédures judiciaires qui n’auraient pas encore abouti à l’heure actuelle, et qui viseraient entre autres le terrain litigieux, dans le cadre desquelles serait discutée notamment la question de la propriété du terrain en question.

Elle estime encore que l’administration communale de la Ville de Luxembourg aurait violé, en émettant le permis de construire litigieux, sa politique antérieurement manifestée, par laquelle elle aurait refusé l’émission d’autorisations de construire préalables en application du plan d’aménagement particulier relatif à la XXX tant que les questions relatives au remembrement et aux problèmes d’infrastructure n’auraient pas été résolues. Elle fait à cet égard état de ce qu’elle se serait vue adresser dans le passé différentes lettres de refus de délivrance de permis de construire pour les motifs ci-avant énoncés. Elle estime par ailleurs dans ce contexte que tant qu’une nouvelle organisation cadastrale ainsi qu’un morcellement avec attribution de nouveaux terrains n’auraient pas été accomplis pour les terrains visés par le plan d’aménagement particulier XXX, avec notamment la détermination des zones et surfaces réservées aux infrastructures publiques, un permis de construire ne pourrait pas être délivré pour l’un des terrains ainsi visés.

L’appelante soutient que le comportement de l’administration communale de la Ville de Luxembourg violerait le principe de sécurité juridique, en traitant différemment des administrés se trouvant dans la même situation de fait. Elle aurait en effet favorisé un constructeur individuel au détriment des autres, en ne prenant pas en considération les contraintes qui résulteraient de l’opération immobilière de grande envergure concernée par la réalisation du plan d’aménagement particulier litigieux.

En ce qui concerne plus particulièrement son intérêt à agir, l’appelante se réfère à sa qualité de propriétaire de terrains avoisinants directement la parcelle devant accueillir la construction telle qu’autorisée par la décision litigieuse du 9 septembre 2003, en vertu de l’acte d’échange précité du 21 mai 2004, et elle soutient qu’en cette qualité de voisin, elle risquerait de subir un grief du fait de l’autorisation de construire litigieuse. Elle estime en effet dans ce contexte que dans la mesure où elle serait directement concernée par la réalisation du plan d’aménagement particulier, elle aurait intérêt à faire vérifier que l’exécution dudit plan d’aménagement particulier se fait conformément à la loi et à la réglementation applicable. Elle invoque dans ce contexte non seulement les investissements auxquels elle a procédé en vue de la réalisation de ses projets situés à l’intérieur du plan d’aménagement particulier, mais également les nombreuses décisions de refus de délivrance de permis de construire au sujet des terrains dont elle déclare être propriétaire au sein dudit plan d’aménagement particulier.

Quant au fond, l’appelante conteste la légalité de la décision litigieuse, en reprochant à l’autorité qui l’a prise l’absence d’un acte d’acquisition des terrains concernés par ledit permis de construire permettant d’établir la qualité de propriétaire de la société anonyme XXX, l’absence dès lors d’un titre de propriété dans le chef de celle-ci, l’absence de toutes procédures, engagements et mesures préalables au remembrement, l’absence de tout remembrement, l’absence d’un plan de morcellement, ainsi que l’absence d’une autorisation de morcellement. Elle rappelle dans ce contexte qu’en ce qui la concerne directement, elle se serait vue opposer, au cours des années 1991 à 2000, différents refus d’autorisations de bâtir préalables concernant des terrains dont elle serait propriétaire à l’intérieur du plan d’aménagement particulier XXX, de sorte qu’elle souhaite voir traiter de la même manière la société anonyme XXX, en estimant que l’administration communale de la Ville de Luxembourg aurait dû lui refuser le permis de construire sollicité par elle pour les mêmes motifs que ceux qui auraient été à la base des différents refus dont elle aurait fait l’objet au cours des années précitées.

Elle fait encore état de ce que la situation foncière aurait été très incertaine à la date de la délivrance de l’autorisation litigieuse et qu’elle resterait d’ailleurs incertaine jusqu’à l’exécution du remembrement, de sorte qu’il serait possible que les droits de propriété de la société anonyme XXX sur le terrain litigieux seraient susceptibles d’être remis en question.

Elle estime en outre qu’il serait à l’heure actuelle difficile de prévoir si les conditions attachées au permis de construire litigieux seraient susceptibles d’être réalisées à l’avenir en considération des problèmes qui resteraient encore à résoudre au niveau de l’exécution du plan d’aménagement particulier et des opérations de remembrement qui resteraient à être effectuées. Elle fait encore valoir que dans le passé, le bourgmestre de la Ville de Luxembourg aurait exigé comme condition à la base de la délivrance d’un permis de construire au sujet de l’un des terrains visés par le plan d’aménagement particulier XXX, que les plans de construction produits à l’appui d’une demande en autorisation de construire soient contresignés par tous les propriétaires « concernés », conformément à l’article 58.3 du règlement sur les bâtisses de la Ville de Luxembourg, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce.

Elle estime que la manière de procéder de la part des autorités communales aurait pour conséquence que la société anonyme XXX pourrait par la suite se soustraire aux obligations qui devraient normalement lui incomber en exécution du plan d’aménagement particulier, notamment dans le cadre des cessions de terrains pour la création des espaces verts et des espaces publics.

Enfin, elle fait affirmer que le permis de construire litigieux serait illégal dans la mesure où il ne serait pas possible de déceler à partir de sa lecture en exécution de quel plan d’aménagement particulier il a été délivré, de sorte qu’il devrait être conclu au défaut de base légale afférente.

En date du 1er septembre 2004, Maître Jean Medernach, avocat à la Cour, a déposé un mémoire en réponse en nom et pour compte de l’administration communale de la Ville de Luxembourg.

Elle réitère tout d’abord, dans le cadre d’un appel incident dirigé contre le jugement entrepris, les moyens soulevés in limine litis en première instance à savoir, d’une part, la caducité sinon la nullité du recours pour ne pas lui avoir été signifié et, d’autre part, l’irrecevabilité du recours pour défaut d’intérêt à agir dans le chef de la partie appelante. Quant à la question de l’intérêt à agir, elle estime que celui-ci devrait être analysé au jour du dépôt de la requête introductive d’instance et que même à supposer que la qualité de voisin de l’appelante soit établie en cause, elle n’aurait pas établi une incidence concrète sur sa situation de prétendu voisin du fait de la délivrance du permis de construire litigieux. Pour le surplus, elle conteste la qualité de propriétaire dans le chef de l’appelante de l’un des terrains avoisinant directement le terrain sur lequel doit être réalisée la construction telle qu’autorisée par le permis de construire litigieux, en relevant le caractère hypothétique des droits dont l’appelante déclare être titulaire, étant entendu qu’un intérêt futur ou purement éventuel ne saurait être suffisant pour justifier un intérêt à agir en justice au moment de l’introduction du recours. Elle rejette encore tout intérêt à agir dans le chef de l’appelante du fait qu’en sa qualité de membre d’un groupe XXX juridiquement inexistant, elle serait en droit de se plaindre d’une prétendue attitude antérieure de la part de la Ville de Luxembourg.

D’une manière générale, l’administration communale de la Ville de Luxembourg soutient que dans la mesure où le recours est dirigé « contre toutes autorisations de principe et toutes autres décisions préparatoires », il devrait être déclaré irrecevable, en ce qu’il manquerait de précision notamment en ce qui concerne l’identification des décisions et autorisations attaquées.

Quant au fond, elle relève que l’appelante serait en défaut d’indiquer quelles dispositions du plan d’aménagement particulier XXX auraient été violées en l’espèce, en se bornant à critiquer le fait que dans le passé, elle se serait vue opposer des refus de délivrance d’autorisations de construire au sujet de terrains dont elle serait propriétaire dans les limites du plan d’aménagement particulier litigieux. Elle lui reproche également de ne pas faire état d’une quelconque violation concrète du plan d’aménagement général et du règlement sur les bâtisses de la Ville de Luxembourg.

En ce qui concerne les problèmes ayant trait au morcellement de terrains, l’administration communale de la Ville de Luxembourg se réfère à la condition n° 23 de l’autorisation de bâtir litigieuse suivant laquelle une demande de morcellement devra être introduite, avant le commencement des travaux, afin de confirmer la configuration et les limites de la parcelle. A cet égard, elle relève qu’une telle autorisation de morcellement avait effectivement été délivrée le 9 septembre 2003 sous le numéro XXX, faisant actuellement l’objet d’une instance d’appel devant la Cour administrative.

Elle conteste encore que l’absence d’une opération de remembrement puisse valablement entraîner l’annulation du permis de construire litigieux, puisque le terrain en question serait situé « en limite intérieure du plan d’aménagement particulier de la XXX », de sorte qu’il ne serait pas concerné par une éventuelle opération de remembrement.

Enfin, la Ville de Luxembourg estime que le simple fait que la date du plan d’aménagement particulier applicable aux terrains litigieux ne figure pas dans la décision critiquée ne serait pas de nature à porter à conséquence et que ce fait à lui seul ne devrait pas être de nature à entraîner l’annulation de ladite décision.

En date du 16 septembre 2004, Maître Gaston Stein, avocat à la Cour, a déposé un mémoire en réponse en nom et pour compte de la société anonyme XXX, par lequel elle interjette tout d’abord appel incident, en invoquant les mêmes demandes et moyens que ceux se trouvant à la base de l’appel incident formé par l’administration communale de la Ville de Luxembourg, à savoir la caducité sinon la nullité du recours introductif. Quant à l’appel principal, elle conclut à l’irrecevabilité du recours pour défaut d’intérêt à agir dans le chef de la partie appelante, en sollicitant partant la confirmation du jugement entrepris. Quant au fond, elle estime que les moyens de l’appelante ne seraient pas fondés, en invoquant pour le surplus une autorisation de morcellement délivrée le 9 septembre 2003.

Un mémoire en réplique a été déposé au greffe de la Cour administrative le 14 octobre 2004 par la partie appelante.

Quant aux appels incidents, l’appelante sollicite dans cette mesure la confirmation pure et simple du jugement entrepris, en réitérant pour le surplus ses moyens invoqués en première instance.

Quant aux faits, elle donne encore des explications sur la composition du groupe XXX en énumérant les sociétés qui en feraient partie et qui agiraient, soit isolément, soit conjointement, ensemble avec le sieur XXX XXX qui en serait l’associé unique ou au moins l’un des associés, ainsi que « le bénéficiaire économique », dans le cadre de la réalisation du plan d’aménagement particulier de la XXX. Par ailleurs, elle expose l’historique de la mise en place du plan d’aménagement particulier de la XXX pour faire ressortir qu’il s’agit en l’espèce d’une initiative prise par les autorités publiques, confortée par la loi du 10 décembre 1998 ayant déclaré ledit plan d’aménagement particulier comme étant d’utilité publique. Dans ce cadre, elle fait état de ce que l’application pratique dudit plan d’aménagement particulier nécessiterait obligatoirement une opération de remembrement pour l’ensemble des terrains et parcelles formant ledit plan d’aménagement particulier, à laquelle il n’aurait toujours pas été procédé à l’heure actuelle. En l’absence toutefois d’un tel remembrement, il serait contraire à l’objectif d’harmonie générale du plan d’accorder pour une partie des terrains un permis de construire.

En ce qui concerne ses droits de propriété sur des terrains concernés directement par l’exécution du plan d’aménagement particulier, elle fait valoir que les droits de propriété allégués par elle depuis la fin de l’année 1998 se seraient vus confirmés par l’acte d’échange précité du 21 mai 2004. Elle serait partant directement concernée par la mise en œuvre légale du plan d’aménagement particulier, de sorte à disposer d’un intérêt à agir dans le cadre de la présente procédure.

Quant au fond, elle reproche en premier lieu à l’administration communale de la Ville de Luxembourg d’avoir émis le même jour un permis de construire, ainsi qu’une autorisation de morcellement, sans avoir attendu un remembrement général des terrains compris dans le périmètre du plan d’aménagement particulier, qui devrait nécessairement être préalable au morcellement des terrains ainsi visés.

En deuxième lieu, elle estime que les décisions prises par l’autorité communale et attaquées notamment dans le cadre du présent litige nuiraient aux droits des tiers, propriétaires de parcelles à l’intérieur du plan d’aménagement particulier, dans la mesure où ceux-ci seraient directement concernés par le remembrement auquel il y aurait lieu de procéder et qui pourrait avoir pour conséquence le transfert de leurs droits de propriété sur des parcelles se trouvant notamment à l’intérieur de l’îlot C dans lequel se trouve le terrain litigieux. Elle fait plus particulièrement valoir dans ce contexte que dans le cadre des opérations de remembrement auquel il faudrait procéder, il se pourrait qu’elle se trouve être propriétaire notamment de la parcelle actuellement détenue par la société anonyme XXX et visée par le permis de construire litigieux, de sorte qu’elle possèderait actuellement un intérêt à agir afin d’éviter qu’elle se retrouve être le propriétaire final de la parcelle litigieuse et liée par l’autorisation actuellement attaquée, alors qu’elle souhaiterait éventuellement y réaliser une construction différente de celle autorisée.

En troisième lieu, elle soutient qu’il serait inadmissible de créer une situation d’exception pour une partie des parcelles se trouvant à l’intérieur de l’îlot X du plan d’aménagement particulier, en lui réservant un traitement spécial avec un morcellement spécifique, en l’omettant ainsi du remembrement général de tous les terrains faisant partie dudit plan d’aménagement particulier.

Enfin, elle conteste que sa requête d’appel soit vague et imprécise.

En date du 29 octobre 2004, l’administration communale de la Ville de Luxembourg a fait déposer un mémoire en duplique au greffe de la Cour administrative. Elle maintient ses développements quant à la caducité du recours et au défaut d’intérêt à agir dans le chef de l’appelante.

Un mémoire en duplique a été déposé au greffe de la Cour le 10 novembre 2004 par la société anonyme XXX, dans lequel elle se rallie au mémoire en duplique de la Ville de Luxembourg.

Il y a tout d’abord lieu de rejeter une farde contenant deux pièces, déposée au greffe de la Cour administrative le 7 janvier 2005 après la prise en délibéré de l’affaire et surtout après le rapport du conseiller rapporteur, sans qu’une demande afférente n’ait été adressée à l’appelante par la Cour.

La requête d’appel est recevable pour avoir été introduite dans les formes et délai prévus par la loi. Il en est de même, en l’absence d’ailleurs de contestations afférentes, des appels incidents introduits tant par l’administration communale de la Ville de Luxembourg que par la société anonyme XXX dans le cadre de leurs mémoires en réponse respectifs.

Il s’agit tout d’abord de prendre position par rapport au bien-fondé des appels incidents, qui contiennent comme seul moyen dirigé contre le jugement entrepris celui déjà invoqué en première instance et tiré de la caducité, sinon de la nullité du recours en annulation, au motif que la requête introductive d’instance aurait été signifiée non pas à l’adresse personnelle de la Ville de Luxembourg, mais en l’étude de son mandataire.

En l’absence d’une prise de position de la part de l’appelante en instance d’appel par rapport à ce moyen, la Cour est amenée à constater, tel qu’il ressort du jugement entrepris, que la Ville de Luxembourg admet avoir élu domicile dans l’étude d’avocats ayant reçu la signification litigieuse de la requête introductive, dans le cadre de l’instruction du recours ayant abouti à un jugement du tribunal administratif du 19 février 2004 (n° 16516 du rôle, rendu entre les mêmes parties dans le cadre d’un recours contentieux introduit par l’actuelle appelante à l’encontre du permis de construire prévisé du 7 mars 2003, de l’accord de principe du 3 août 2001 et de la décision de modification de l’accord de principe du 3 août 2001, émise le 20 mars 2002).

Il échet encore de constater que suivant les pièces du dossier administratif, et tel qu’il a été relevé par les premiers juges, dont l’exploit de signification de l’huissier de justice Carlos Calvo du 15 décembre 2003, la signification de la requête introductive en cause a été opérée à l’administration communale de la Ville de Luxembourg en sa qualité de destinataire, mais remise en son domicile élu chez Maître Jean Medernach.

Malgré le fait que la signification litigieuse ne s’est pas faite dans les bureaux de la Ville de Luxembourg et qu’une élection de domicile n’a d’effet que dans le cadre de la procédure pour laquelle elle a été prévue, la Cour se rallie toutefois aux raisonnement et conclusion retenus par les premiers juges dans le jugement entrepris, par référence aux articles 4, paragraphes 1) et 2) et 29 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, par lesquels ils ont rejeté le moyen tiré de la caducité, voire de la nullité du recours introductif, étant donné qu’une signification a effectivement été opérée en l’espèce, que le destinataire de ladite signification, à savoir la Ville de Luxembourg, a eu une connaissance de la signification de la requête introductive entraînant qu’elle était en mesure de se faire représenter par un avocat à la Cour au cours de l’instance ainsi initiée et qu’elle n’a pas avancé une quelconque atteinte concrète à ses droits de la défense.

Il s’ensuit que les deux appels incidents sont à rejeter pour ne pas être fondés.

Quant à l’appel principal, l’appelante critique le jugement entrepris en ce que celui-

ci a déclaré irrecevable son recours contentieux pour défaut d’intérêt à agir, en soumettant à la Cour administrative en substance les mêmes éléments de fait que ceux soumis aux premiers juges afin d’établir son intérêt à agir contre la ou les décisions litigieuses.

Le juge administratif est appelé à examiner si l’intérêt qu’un demandeur met en exergue pour justifier son action en justice lui confère une qualité suffisante pour ce faire. L’intérêt à agir qui conditionne ainsi la recevabilité d’un recours administratif ne doit pas seulement être né et actuel, effectif et légitime, mais encore personnel et direct. Ainsi, le demandeur doit justifier d’un intérêt personnel distinct de l’intérêt général. Par ailleurs, en ce qui concerne la condition relative au caractère né et actuel, c’est-à-dire au caractère suffisamment certain, il échet de relever qu’un intérêt simplement éventuel ne suffit pas pour que le recours contre un acte soit déclaré recevable.

En ce qui concerne la date d’appréciation de l’intérêt à agir d’un demandeur, il échet de retenir que cet intérêt à agir s’analyse au jour du dépôt de la requête introductive d’instance.

Afin d’établir son intérêt à agir, l’appelante fait état de ce qu’elle serait propriétaire d’un immeuble situé au n° XXX. Toutefois, comme l’a relevé à bon droit le tribunal administratif, l’appelante n’a soumis ni au tribunal ni par la suite à la Cour administrative, un quelconque élément de preuve de nature à établir sa qualité de propriétaire de l’immeuble en question, et, en outre, elle n’a à aucun stade de la procédure soumis aux juges administratifs un quelconque élément de nature à établir qu’en sa prétendue qualité de propriétaire d’un immeuble situé le long de XXX, elle puisse faire état d’un intérêt à agir contre un permis de construire portant sur des lots longeant XXX, de sorte que la Cour n’a pas été mise en mesure d’apprécier quel type de préjudice l’appelante craint subir du fait de l’émission du permis de construire litigieux.

En ce qui concerne un compromis d’échange avec clauses suspensives conclu en date du 18 septembre 2003 entre l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg et l’appelante, il échet de constater que d’après les indications de l’appelante elle-

même, déjà soumises aux premiers juges, ledit compromis n’a pas pu entrer en vigueur, étant donné que les conditions y prévues n’ont pas pu être réalisées dans le délai convenu.

L’appelante a encore déclaré dans sa requête d’appel, comme elle l’a déjà fait en première instance, se trouver dans une situation dans laquelle devrait s’appliquer un arrangement trouvé avec l’Etat suivant l’échange d’une offre de l’Etat du 1er octobre 1998 et une acceptation par elle en date du 2 décembre 1998, suivi d’une action judiciaire en passation d’acte diligentée contre l’Etat à défaut d’une exécution volontaire de sa part de l’arrangement ainsi convenu, qui devrait lui attribuer la propriété de plusieurs lots faisant partie du plan d’aménagement particulier de la XXX.

Il y a encore lieu de constater que cet arrangement intervenu entre parties a donné lieu à des litiges supplémentaires et notamment à des mises en demeure et actions en expropriation forcée, diligentées par l’appelante dans le but de devenir propriétaire d’une ou de plusieurs parcelles faisant partie du plan d’aménagement particulier de la XXX.

Cet arrangement ne saurait toutefois justifier un intérêt à agir, étant donné qu’un intérêt simplement éventuel et futur ne saurait être pris en considération afin de déterminer l’intérêt à agir au moment de l’introduction d’une requête introductive d’instance.

L’appelante fait encore état de plusieurs actes d’échange signés en date du 21 mai 2004 entre l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg et un groupe « XXX » dont elle ferait partie, en date du 21 mai 2004, afin d’établir sa propriété de différents immeubles situés XXX, XXX et XXX. Il échet toutefois de constater que dans la mesure, où comme il a été retenu ci-avant, l’intérêt à agir d’un demandeur s’apprécie au jour de l’introduction du recours contentieux, à savoir, en l’espèce, le 10 décembre 2003, la Cour ne saurait prendre en considération lesdits actes datés postérieurement à la date introductive d’instance.

Par ailleurs, à la lecture d’un plan cadastral établi en date du 19 novembre 2003 versé par l’appelante, la Cour constate que les seules parcelles dont l’appelante semble avoir été propriétaire au moment du recours introductif, pour les avoir acquises par acte notarié du 17 juin 1999, qui n’est toutefois pas versé en cause, sont celles situées le long de XXX sous les numérotations XXX, XXX et XXX dont l’Etat semble avoir acquis les lots 10a et 10b par l’un des actes d’échange signés en date du 21 mai 2004, précités. Toutefois, l’appelante n’a fourni le moindre élément ou indice de nature à établir les préjudices qu’elle craint ou qu’elle craignait subir en sa qualité de propriétaire, au jour de l’introduction du recours contentieux, des parcelles en question, partant son intérêt à agir dans le cadre des présentes instances, de sorte qu’en l’absence d’informations plus précises, l’appelante n’a pas non plus, en ce qui concerne ces parcelles, établi son intérêt à agir, étant relevé pour le surplus que ces parcelles se trouvent à une distance assez importante de celles ayant fait l’objet du permis de construire litigieux.

Enfin, en ce qui concerne les références fréquemment faites par l’appelante à sa qualité de membre d’un « groupe XXX » dont feraient partie d’autres sociétés qui seraient propriétaires de certaines parcelles faisant l’objet du plan d’aménagement particulier de la XXX, il échet tout d’abord de constater que l’existence d’un tel « groupe XXX » n’a pas été établi en cause et que même à supposer que d’autres sociétés appartenant aux mêmes actionnaires que ceux détenant des parts dans le capital de l’appelante, soient propriétaires d’une ou de plusieurs parcelles faisant partie du plan d’aménagement particulier litigieux, ce fait n’est pas de nature à établir dans le chef de l’appelante un intérêt suffisant à agir dans le cadre de la présente instance.

Pour le surplus, dans le cadre de l’analyse de l’intérêt à agir de l’appelante, il n’y a pas lieu d’analyser plus en avant la question de savoir si la société anonyme XXX a été, au moment de la délivrance du permis de construire, ou est actuellement, propriétaire du terrain au sujet duquel le permis de construire a été délivré, puisque cette question n’est pas de nature à avoir une quelconque incidence sur la recevabilité du recours.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent, qu’à défaut d’avoir établi un intérêt à agir au jour de l’introduction de la requête introductive d’instance, la requête d’appel est à déclarer non fondée et le jugement entrepris du 26 mai 2004 est à confirmer.

Par ces motifs, La Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties à l’instance ;

rejette la farde de pièces déposée par l’appelante au greffe de la Cour le 7 janvier 2005 ;

déclare recevable la requête d’appel du 2 juillet 2004 ;

déclare recevables les appels incidents formés tant par l’administration communale de la Ville de Luxembourg que par la société anonyme XXX en date des 1er et 16 septembre 2004 ;

dit tant l’appel principal que les appels incidents non fondés et en déboute ;

partant confirme le jugement entrepris du 26 mai 2004 dans toute sa teneur ;

condamne l’appelante aux frais et dépens de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par :

Marion Lanners, présidente, Christiane Diederich-Tournay, premier conseiller, Carlo Schockweiler, conseiller, rapporteur, et lu par la présidente en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en-tête, en présence du greffier en chef de la Cour Erny May.

le greffier en chef la présidente 13


Synthèse
Numéro d'arrêt : 18324C
Date de la décision : 24/02/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2005-02-24;18324c ?

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