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17/02/2005 | LUXEMBOURG | N°19266C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 17 février 2005, 19266C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 19266C Inscrit le 7 février 2005

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 17 FEVRIER 2005 Recours formé par le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration contre XXX XXX en matière de rétention administrative Appel (jugement entrepris du 2 février 2005, no 19219 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 7 févr...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 19266C Inscrit le 7 février 2005

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 17 FEVRIER 2005 Recours formé par le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration contre XXX XXX en matière de rétention administrative Appel (jugement entrepris du 2 février 2005, no 19219 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 7 février 2005, en vertu d’un mandat exprès du ministre délégué des Affaires étrangères et de l’Immigration du 4 février 2005, par le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter, au nom du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration, contre un jugement rendu en matière de rétention administrative par le tribunal administratif à la date du 2 février 2005, à la requête de XXX XXX, de nationalité capverdienne, actuellement placé au Centre de séjour priovisoire pour étrangers en situation irrégulière, contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 15 février 2005 par Maître Patrick Goergen, avocat à la Cour, au nom de XXX XXX préqualifié.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le premier conseiller en son rapport et le délégué du Gouvernement Guy Schleder ainsi que Maître Patrick Goergen en leurs observations orales.

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Par requête déposée le 25 janvier 2005 au greffe du tribunal administratif, Maître Patrick Goergen, avocat à la Cour, au nom de XXX XXX, de nationalité capverdienne, placé au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière, a demandé la réformation, sinon l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 11 janvier 2005 ordonnant son placement au Centre provisoire pour étrangers en situation irrégulière pour une durée maximum d’un mois à partir de la notification de la décision, et de la décision implicite ainsi désignée du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration l’expulsant du territoire luxembourgeois.

Par jugement rendu à la date du 2 février 2005, le tribunal administratif a reçu le recours en réformation en la forme pour autant que dirigé contre la décision de rétention, au fond l’a déclaré justifié dans cette mesure, partant, par réformation, a ordonné la mise en liberté immédiate du requérant, a reçu en la forme le recours en annulation introduit à titre subsidiaire contre la décision implicite de refoulement, au fond l’a déclaré justifié, partant a annulé la décision implicite de refoulement, et a renvoyé le dossier au ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration.

Fort d’un mandat du ministre délégué des Affaires étrangères et de l’Immigration daté du 4 février 2005, le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter, par requête déposée en date du 7 février 2005 au greffe de la Cour administrative, a relevé appel du prédit jugement.

Le représentant étatique reproche aux premiers juges d’avoir estimé que la décision de rétention serait fondée sur une décision de refoulement, laquelle n’aurait pas été légalement prise conformément à l’article 12 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l’entrée et le séjour des étrangers, alors que l’intimé tombe clairement sous le coup du paragraphe 2) de l’article 12 précité comme n’ayant pas de moyens d’existence personnels suffisants, et qu’en conséquence la décision de refoulement implicite à la base de la mesure de rétention était légalement prise.

A titre subsidiaire, le délégué du Gouvernement relève que le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration a pris un arrêté de refus d’entrée et de séjour en date du 3 février 2005, que, par voie de conséquence, la décision de refoulement a été prise conformément à l’article 12 paragraphe 3) de la loi du 28 mars 1972 précitée, de sorte que la condition sous-jacente à la prise d’une décision de rétention sur base de l’article 15 de la loi modifiée du 28 mars 1972 précitée est remplie en l’espèce.

Le délégué du Gouvernement, en se référant également à ses conclusions du 26 janvier 2005 déposées en première instance, demande à la Cour de déclarer l’appel recevable et fondé, et par réformation du jugement entrepris, de dire que c’est à tort que le tribunal administratif a déclaré justifié le recours contre la mesure de placement.

Dans un mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 15 février 2005, Maître Patrick Goergen, au nom de XXX XXX, conclut à l’irrecevabilité du grief concernant l’absence de moyens d’existence alors qu’il n’a pas été invoqué en première instance, sinon il demande à la Cour de déclarer le moyen non fondé, alors que l’intimé disposait d’un emploi salarié au Grand-Duché depuis 1999 et d’une situation de travail stable depuis le 1er juillet 2002 comme coffreur.

Il reproche à la décision de refoulement de constituer une ingérence intolérable dans la vie familiale de la partie intimée qui a des attaches suffisamment fortes dans le Grand-Duché et qui n’a aucun lien réel avec son pays d’origine.

Le grief subsidiaire concernant l’arrêté ministériel de refus d’entrée et de séjour du 3 février 2005 doit être déclaré irrecevable, sinon non fondé, comme ayant été pris postérieurement à la décision de rétention.

La partie intimée conclut à la confirmation du jugement entrepris et à l’octroi d’une indemnité de procédure de l’ordre de 1.500 euros.

L’acte d’appel est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Par jugement du tribunal d’arrondissement de Luxembourg, treizième chambre correctionnelle, du 20 octobre 2004, l’intimé a été condamné à une peine d’emprisonnement de trois mois avec sursis du chef d’usage d’un faux permis de conduire portugais.

Il résulte d’autre part d’un rapport du service de police judiciaire du 28 décembre 2004 que la carte d’identité portugaise présentée par l’intimé en vue de l’obtention d’une carte d’identité d’étranger au Luxembourg constitue un faux.

En date du 11 janvier 2005, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration a pris un arrêté de mise à la disposition du Gouvernement, arrêté qui a été notifié à l’intimé en date du 20 janvier 2005.

La décision de placement était fondée sur les considérations et motifs suivants :

Vu l’article 15 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l’entrée et le séjour des étrangers ;

Vu le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 créant un Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière ;

Vu le rapport no 15/3162/2004/KL du 28 décembre 2004 établi par la Police grand-

ducale, Service de Police Judiciaire ;

Considérant que l’intéressé a fait usage d’une carte d’identité portugaise falsifiée ;

Considérant que l’intéressé se trouve en séjour irrégulier au pays ;

Considérant qu’en attendant le résultat des recherches quant à l’identité et à la situation de l’intéressé l’éloignement immédiat de l’intéressé n’est pas possible ;

Considérant qu’il existe un risque de fuite, alors que l’intéressé est susceptible de se soustraire à la mesure d’éloignement ;

Il s’ensuit que la décision déférée a été dûment motivée par une énonciation suffisante des éléments de droit et de fait se trouvant à sa base.

En cours d’instance contentieuse, et dans l’acte d’appel, le délégué du Gouvernement a invoqué de surplus l’absence de moyens d’existence personnels suffisants dans le chef de l’intimé, élément qui a été invoqué formellement en première instance dans le recours déposé par XXX XXX pour reprocher une erreur manifeste d’appréciation, moyen accompagné de pièces justificatives.

Il s’agit donc d’un moyen déjà évoqué en première instance, et au-delà de la motivation expressément fournie par l’administration à la base de la décision déférée, il lui est loisible de la compléter en cours d’instance, tout comme la partie demanderesse est admise à amplifier ses moyens en cours d’instance au-delà des développements déployés dans le cadre de la requête introductive d’instance, et, de toute manière, un moyen nouveau est admissible en instance d’appel aux termes de l’article 41(2) de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.

Il ressort de l’étude du dossier que l’intimé, qui est ressortissant capverdien, et non pas ressortissant portugais comme il le prétendait avec des papiers falsifiés et en séjour irrégulier au Luxembourg depuis 6 ans, aurait eu besoin d’un permis de travail, afin de prouver qu’il est en possession de moyens d’existence personnels légitimement acquis.

Etant donné qu’un tel permis de travail fait défaut, l’existence de moyens d’existence personnels suffisants n’est pas donnée et l’intimé tombe sous le coup, en plus de l’article 12.4, le fait de se présenter sous une fausse identité moyennant la production d’une carte d’identité falsifiée, de l’article 12.2 comme ne disposant pas de moyens personnels d’existence légitimement acquis.

Par conséquent, la décision de refoulement implicite à la base de la mesure de rétention était légalement prise.

Par ailleurs, aucune disposition législative ou réglementaire ne détermine la forme d’une décision de refoulement.

Il en découle que, contrairement à l’appréciation des premiers juges, la décision de refoulement a été prise conformément à l’article 12 de la loi modifiée du 28 mars 1972 précitée, de sorte que la condition sous-jacente à la prise d’une décision de rétention sur base de l’article 15 de la loi modifiée du 28 mars 1972 précitée de l’intimé est remplie en l’espèce.

Concernant la violation du droit protégeant la vie familiale, l’existence d’une telle vie familiale n’est pas prouvée, un prétendu projet de mariage reste à l’état de pures allégations, et même à supposer qu’une vie familiale ait existé au Luxembourg, une ingérence de la part des autorités luxembourgeoises dans l’exercice du droit à la vie privée et familiale est justifiée en l’espèce, l’intimé ayant fait l’objet d’une condamnation pénale au Luxembourg et ayant fait usage d’un faux document d’identité portugais afin de s’établir au Grand-Duché, ce qui démontre un comportement compromettant l’ordre public.

La décision de placement est légale, alors que les conditions pour un refoulement sont remplies.

Il en découle que l’acte d’appel est fondé, de sorte qu’il y a lieu à réformation du jugement entrepris, et au débouté de la demande.

Vu l’issue du litige, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande d’une indemnité de procédure d’un montant de 1.500 euros formulée par l’intimé.

Par ces motifs la Cour, statuant contradictoirement, dit l’acte d’appel du 7 février 2005 recevable en la forme, au fond le dit fondé, réformant, dit le recours introduit par requête du 25 janvier non fondé et en déboute, écarte l’octroi d’une indemnité de procédure, condamne la partie intimée XXX XXX aux frais des deux instances.

Ainsi délibéré et jugé par Marion Lanners, présidente Christiane Diederich-Tournay, premier conseiller, rapporteur Carlo Schockweiler, conseiller et lu par la présidente Marion Lanners en l’audience publique au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête en présence du greffier en chef de la Cour Erny May.

le greffier en chef la présidente 5


Synthèse
Numéro d'arrêt : 19266C
Date de la décision : 17/02/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2005-02-17;19266c ?

Source

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