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13/01/2005 | LUXEMBOURG | N°18477C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 13 janvier 2005, 18477C


+GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 18477 C Inscrit le 29 juillet 2004

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 13 JANVIER 2005 Recours formé par la société anonyme … …, … contre le directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu des collectivités Appel (Jugement entrepris du 21 juin 2004, n° 17075 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le ...

+GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 18477 C Inscrit le 29 juillet 2004

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 13 JANVIER 2005 Recours formé par la société anonyme … …, … contre le directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu des collectivités Appel (Jugement entrepris du 21 juin 2004, n° 17075 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 29 juillet 2004 par Maître André Elvinger, avocat à la Cour, au nom de la société anonyme … …, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, contre un jugement rendu en matière d’impôt sur le revenu des collectivités par le tribunal administratif à la date du 21 juin 2004.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative par le délégué du Gouvernement Jean-Marie Klein la date du 24 novembre 2004.

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 30 novembre 2004 par Maître André Elvinger pour compte de la partie appelante.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le premier conseiller en son rapport et Maître André Elvinger ainsi que le délégué du Gouvernement Jean-Marie Klein en leurs observations orales.

Par requête inscrite sous le numéro 17075 du rôle, déposée le 21 octobre 2003 au greffe du tribunal administratif, Maître Marc Elvinger, avocat à la Cour, au nom de la société anonyme … …, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, a demandé la réformation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 10 avril 2003 déclarant irrecevables ses réclamations contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités pour les années 1997, 1998 et 1999, émis le 16 mai 2002.

Par jugement rendu à la date du 21 juin 2004, le tribunal administratif a déclaré la demande de relevé de forclusion irrecevable et le recours irrecevable, avec condamnation de la société demanderesse aux frais.

Maître André Elvinger, avocat à la Cour, a déposé le 29 juillet 2004 une requête d’appel au nom de la partie préqualifiée contre le prédit jugement.

La partie appelante reproche aux premiers juges d’avoir déclaré irrecevable pour tardiveté son recours, alors que la décision attaquée du directeur des Contributions ne lui est parvenue à aucun moment par voie de notification, ni autrement, jusqu’à la date du 22 juillet 2003, et que la notification d’une décision directoriale sur réclamation doit, pour faire courir le délai, se faire dans les formes prévues par l’article 13 (1) de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ensemble les articles 153 et suivants, ou 170 et 102 du Nouveau Code de procédure civile, dispositions applicables également en matière fiscale, et la notification pour faire courir le délai aurait donc dû intervenir, au moins, par lettre recommandée avec avis de réception, au vœu du prédit article 102 (2).

L’envoi de la décision attaquée du directeur des Contributions sous simple pli fermé recommandé n’a pas constitué une notification au sens des dispositions antérieurement énoncées, de sorte que ce prétendu envoi n’a pas pu faire courir le délai de trois mois.

C’est par conséquent à tort que le jugement attaqué, se fondant sur les dispositions du paragraphe 88 de la loi générale des impôts, a considéré que l’envoi d’un pli recommandé simple le 10 avril 2003 a fait courir le délai contre la requérante, alors que l’article 88 de la loi générale des impôts est inapplicable à la notification d’une décision directoriale sur réclamation, et que subsidiairement, à le supposer applicable, ses dispositions ne peuvent conférer à un envoi sous pli fermé simplement recommandé la valeur d’une notification au sens de l’article 13 (1) de la loi du 21 juin 1999.

La solution retenue par les premiers juges compromettrait gravement les droits de la défense du contribuable en le privant d’un recours effectif et la preuve de la régularité de la procédure fiscale incombe à l’administration.

En ordre subsidiaire, l’appelante offre de prouver par témoins les faits suivants :

1) qu’à aucun moment, aucun administrateur, directeur, employé, agent ou mandataire de l’appelante ne s’est vu remettre par un agent des postes un pli recommandé fermé qui aurait porté la date postale du 10 avril 2003, qui aurait été enregistré sous le numéro RR 001423617 LU, ou tout autre envoi recommandé qui aurait contenu la décision directoriale du 22 juillet 2003 ;

2) que, s’inquiétant du défaut apparent de suite donnée à la réclamation introduite par son mandataire … contre les bulletins d’impôt pour les années 1997 à 1998, la requérante, en la personne de M. …, a demandé à … de se renseigner auprès de la direction de l’administration des contributions du sort qui allait être réservé à cette réclamation ;

3) qu’en exécution de cette demande, sur instruction de M. Georges … de …, son collaborateur M. … s’est enquis du sort de la réclamation auprès du service du contentieux ;

4) qu’à la a suite de cette demande, M. …, fonctionnaire au service du contentieux de l’administration des contributions directes, a informé M. … qu’une décision du directeur des contributions serait intervenue et lui a promis de lui en envoyer la copie ;

5) que sur ce … a reçu le 22 juillet 2003 un message-fax de la part de l’administration des contributions directes auquel était jointe une copie de la décision directoriale du 10 avril 2004.

Plus subsidiairement, l’appelante demande à la Cour de dire la demande de relevé de forclusion formulée dans la requête introductive recevable et fondée.

Quant au fond, l’appelante soutient que les bulletins sont nuls pour être établis à un nom inexact et à un domicile inexact, subsidiairement, leur envoi à ce nom inexact et à cette adresse inexacte, et non au mandataire désigné, n’a pu faire courir le délai de réclamation, que la connaissance de l’existence de ces bulletins n’a pas pu couvrir la nullité des bulletins, ni faire courir le délai, et en ordre plus subsidiaire que le délai de réclamation est prolongé de trois mois en sa qualité de non-résidente et qu’enfin elle était à admettre au bénéfice du paragraphe 86 AO.

L’appelante fait valoir que sa réclamation, en ce qui concerne l’année d’imposition 1996, identique dans son fondement, a été reconnue fondée par jugement du tribunal administratif du 21 juin 2004 sous le numéro 17074 du rôle, bien que ce dernier ait cru devoir rejeter la déductibilité des frais de gestion, ce rejet étant cependant sans incidence, en l’espèce, et en ordre subsidiaire que la demande de remise gracieuse est recevable et fondée, aucun délai n’ayant couru par l’introduction de la prédite demande.

Elle conclut en demandant à la Cour de dire que la réclamation est fondée et justifiée, que les bulletins d’impôt avaient à prendre en considération au titre des dépenses déductibles les intérêts débiteurs et les frais de gestion encourus, et de renvoyer devant le bureau d’imposition pour l’établissement de nouveaux bulletins.

Dans un mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 24 novembre 2004, le délégué du Gouvernement Jean-Marie Klein conclut au rejet de l’appel, en reprenant son argumentation développée en première instance.

Maître André Elvinger a répliqué en date du 30 novembre 2004 pour prendre position sur les différents points de l’argumentation exposée par le délégué du Gouvernement dans son mémoire en réponse.

L’acte d’appel est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

En vertu de l’article 46(1) de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, la partie intimée est tenue de fournir sa réponse dans le délai d’un mois à partir de la signification de la requête d’appel, délais étant fixés à peine de forclusion.

La requête d’appel ayant été notifiée, par les soins du greffe, au délégué du Gouvernement le 29 juillet 2004, il s’ensuit que le mémoire du délégué du Gouvernement déposé au greffe de la Cour le 24 novembre 2004 a été déposé tardivement et est à écarter, compte tenu de ce que les délais prévus à l’article 46 (1) de la prédite loi du 21 juin 1999, et fixés à peine de forclusion, sont suspendus entre le 16 juillet et le 15 septembre en vertu de l’article 46(3).

Le mémoire en réplique déposé par la partie appelante, et ne constituant que la prise de position par rapport au mémoire en réponse, doit être également écarté.

A l’audience, la Cour a convenu avec les parties de limiter les débats à la question de la recevabilité du recours, et de réserver le fond du litige.

Par requête déposée le 21 octobre 2003, la société … … S.A. a fait introduire un recours contentieux tendant à la réformation de la décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 10 avril 2003 relevant que la requête datée du 5 février 2003 et entrée le 11 février 2003, n’a pas été introduite dans le délai légal de réclamation ayant expiré le 23 janvier 2003, qu’aux termes du paragraphe 83 AO ce délai est un délai de forclusion, et qu’en l’absence de circonstance susceptible de justifier un relevé de forclusion, la réclamation tardive est irrecevable.

La partie appelante soutient que la décision attaquée ne lui est à aucun moment parvenue par voie de notification, ni autrement jusqu’au 22 juillet 2003, date à laquelle une copie de cette décision a été transmise par un message facsimilé émanant d’un agent du service contentieux de l’administration des Contributions, et ce non pas à elle-même, mais à son conseiller, … …, après que ce dernier se fut enquis auprès de l’administration du sort de la réclamation.

Cependant, cet argument est formellement contredit par le récépissé de dépôt d’un envoi recommandé portant le tampon postal daté du 10 avril 2003 et enregistré sous le numéro RR0014 23617 LU, qui indique comme expéditeur la direction des Contributions, division Contentieux de l’Impôt, et comme destinataire la société appelante sous l’adresse …, L-…, adresse exacte depuis que la requérante a transféré son siège des British Virgin Islands à Luxembourg en août 2001.

Il n’y a pas lieu de douter de la remise à la poste de la décision entreprise en date du 10 avril 2003, fait qui est formellement mentionné dans une communication du 10 avril 2003 de l’inspecteur de direction 1er en rang …, de la division « Contentieux » de la direction de l’administration des Contributions dans les termes suivants : « Brm.- Soit l’expédition annexée de la décision directoriale du 10 avril 2003 vidant la réclamation introduite pour … … S.A. transmise au bureau d’imposition Sociétés V avec prière de classer la copie de la décision directoriale au dossier fiscal joint de l’intéressée. La notification a été faite directement par la voie du secrétariat. » D’autre part, l’enveloppe expédiée le 10 avril 2003 n’est pas revenue à l’expéditeur.

Concernant les formalités à observer par l’administration des Contributions pour notifier une décision directoriale, la Cour se rallie à l’analyse exhaustive faite par le tribunal administratif aux pages 4 et 5 du jugement des différents moyens soulevés et reproduits en instance d’appel pour conclure que la décision du directeur est régie par la loi générale des impôts, que les dispositions du paragraphe 88 AO doivent trouver pleine application en l’espèce et permettent de remplacer la signification formelle dans tous les cas où elle est prescrite, par la notification par lettre recommandée simple, que la signification est censée accomplie le troisième jour après la remise à la poste, et qu’un avis de réception n’est point requis au vu de la dispense de la preuve d’une réception effective par le destinataire, suite à l’instauration formelle de la présomption de réception, la seule preuve à charge de l’autorité étant celle de la remise de l’acte à la poste sous forme de pli fermé expédié en tant que lettre recommandée.

Même s’il résulte des termes du paragraphe 88 (3) phrase 2 AO que le délai de trois jours y prévu constitue une fiction à laquelle le législateur n’a accordé que la valeur d’une présomption qui ne vaut que jusqu’à preuve contraire, l’offre de preuve par témoin formulée en ordre subsidiaire, pour être recevable en la forme, est à écarter comme non pertinente car étant d’ores et déjà contredite par les éléments sus-visés du dossier administratif versé en cause.

La seule preuve admissible et pertinente aurait été de verser un relevé de la poste attestant ou non la réception de la lettre en cause moyennant une signature sur le relevé, ce qui n’a pas été fait par la partie appelante malgré la suggestion du tribunal administratif.

Même si le mandataire de la partie appelante a relevé en termes de plaidoiries qu’il lui aurait été impossible de se procurer un tel relevé, il aurait pu faire fruit des dispositions de l’article 284 du Nouveau Code de Procédure Civile qui énonce que si, dans le cours d’une instance, une partie entend faire état d’un acte authentique ou sous seing privé auquel elle n’a pas été partie ou d’une pièce détenue par un tiers, elle peut demander au juge saisi de l’affaire d’ordonner la délivrance d’une expédition ou la production de l’acte ou de la pièce.

Quant à la demande subsidiaire en relevé de forclusion, c’est pour de justes motifs auxquels la Cour se rallie, que les premiers juges l’ont déclaré irrecevable.

Il s’ensuite que le recours introduit le 21 octobre 2003 doit être déclaré irrecevable pour cause de tardiveté.

L’acte d’appel n’étant pas fondé, le jugement entrepris est à confirmer dans toute sa teneur.

Par ces motifs la Cour, statuant contradictoirement, reçoit l’acte d’appel du 29 juillet 2004 en la forme.

écarte le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement pour tardiveté, et subséquemment le mémoire en réplique de la partie appelante, dit l’offre de preuve par témoins non pertinente et l’écarte, dit l’appel non fondé et en déboute, partant, confirme le jugement entrepris du 21 juin 2004 dans toute sa teneur, condamne la partie appelante aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi délibéré et jugé par Marion Lanners, présidente Christiane Diederich-Tournay, premier conseiller, rapporteur Marc Feyereisen, conseiller et lu par la présidente Marion Lanners en l’audience publique au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête en présence du greffier en chef de la Cour Erny May.

le greffier en chef la présidente 6


Synthèse
Numéro d'arrêt : 18477C
Date de la décision : 13/01/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2005-01-13;18477c ?

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