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28/10/2004 | LUXEMBOURG | N°44/04

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 28 octobre 2004, 44/04


N° 44 / 04.

du 28.10.2004.

Numéro 2101 du registre.

Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, vingt-huit octobre deux mille quatre.

Composition:

Marc THILL, président de la Cour, Marc SCHLUNGS, conseiller à la Cour de cassation, Jean JENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Irène FOLSCHEID, premier conseiller à la Cour d'appel, Monique BETZ, conseiller à la Cour d'appel, John PETRY, avocat général, Marie-Paule KURT, greffier à la Cour.

E n t r e :

la société à responsabilité limitée SOCI

ÉTÉ 1, établie et ayant son siège social à L-(…), (…), représentée par son gérant actuellement en fonction...

N° 44 / 04.

du 28.10.2004.

Numéro 2101 du registre.

Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, vingt-huit octobre deux mille quatre.

Composition:

Marc THILL, président de la Cour, Marc SCHLUNGS, conseiller à la Cour de cassation, Jean JENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Irène FOLSCHEID, premier conseiller à la Cour d'appel, Monique BETZ, conseiller à la Cour d'appel, John PETRY, avocat général, Marie-Paule KURT, greffier à la Cour.

E n t r e :

la société à responsabilité limitée SOCIÉTÉ 1, établie et ayant son siège social à L-(…), (…), représentée par son gérant actuellement en fonction, demanderesse en cassation, comparant par Maître Pierrot SCHILTZ, avocat à la Cour, en l'étude duquel domicile est élu, e t 1.X.), pensionné, demeurant à L-(…), (…), défendeur en cassation, 2.l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, pris en sa qualité de gestionnaire du Fonds pour l’Emploi, représenté par son Ministre d’Etat, avec siège à L-

1352 Luxembourg, 4, rue de la Congrégation, défendeur en cassation.

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2 LA COUR DE CASSATION :

Ouï Monsieur le président THILL en son rapport et sur les conclusions de Madame le premier avocat général ZIMMER;

Vu l’arrêt attaqué, rendu le 19 juin 2003 par la Cour d’appel, troisième chambre, siégeant en matière de droit du travail ;

Vu le mémoire en cassation, signifié le 29 janvier 2004 par la société à responsabilité limitée SOCIÉTÉ 1 et déposé au greffe de la Cour le 4 février 2004;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que le tribunal du travail d’Esch/Alzette, statuant sur une demande en indemnisation pour licenciement abusif dirigée par X.) contre la SOCIÉTÉ 1, avait dit cette demande fondée en principe et partiellement justifiée et condamné la défenderesse à payer à X.) divers montants du chef d’indemnité de préavis, d’indemnité de départ et de préjudice moral ; que sur appel, la Cour d’appel, par la décision attaquée, confirma le jugement de première instance, sauf à réduire la somme allouée pour préjudice moral ;

Sur le premier moyen, tiré « de l’absence de motifs qui constitue une violation de l’article 89 de la Constitution, sinon tiré de l’insuffisance de motifs valant absence de base légale, en ce que la Cour d’appel a rejeté le moyen subsidiaire de l’employeur consistant à contester l’existence du licenciement et s’est contentée de retenir que : , en tirant de cet énoncé la conséquence qu’on serait en présence d’un licenciement avec effet immédiat, sans pour autant motiver en fait et en droit la qualification donnée à la lettre de l’employeur précitée alors qu’en vertu de de l’article 89 de la Constitution ; grief tiré de l’absence de motifs, alors qu’une décision de justice doit se suffire à elle-même et qu’il ne peut être supplée au défaut ou à l’absence de motifs par le seul visa des documents de la cause et la seule référence aux débats, n’ayant fait l’objet d’aucune analyse (Cass.Française, 2ème civ.3 mai 1985, Boré, la cassation en matière civile, éd Dalloz 1997, n° 1918, p.460 et n° 1925, p.462), alors qu’il est imposé aux juges du fond de produire une motivation suffisante et cohérente afin de permettre à la Cour de cassation le contrôle de l’application de la loi, le juge de la cassation ne pouvant vérifier si les faits, souverainement constatés par les juges du fond, ont reçu une exacte qualification juridique que si ces faits lui sont suffisamment connus par l’arrêt attaqué (Boré, op. cit. n° 1886 et 1887, 3 p.452), ce d’autant plus que l’interdiction faite à la Cour de cassation de juger le fond des affaires l’empêche de suppléer des motifs de fait d’après les pièces du dossier pour combler les lacunes de l’arrêt (Boré, op. cit. n° 1889, p.453), alors que les de l’arrêt attaqué devant justifier le rejet du moyen subsidiaire sont, au regard de ces principes fondamentaux, inexistants, voire manifestement insuffisants, dans la mesure où la motivation lapidaire d’une phrase constitue un simple visa de documents produits en la cause, sans la moindre analyse, alors que face au moyen présenté par l’appelant, à savoir le moyen selon lequel l’employeur n’a jamais manifesté sa volonté de rompre le contrat de travail le liant à son salarié, d’autant plus qu’il ne s’est jamais adressé directement à ce dernier, ni par voie écrite, ni par voie orale, il aurait appartenu à la Cour d’appel de motiver plus amplement en fait pourquoi le courrier du 28 février 2000 devait, contrairement à l’argumentation de l’employeur, s’interpréter en un licenciement avec effet immédiat, que la Cour d’appel s’est contentée à rejeter ainsi l’argumentation de l’appelante sans motivation réelle, qu’en ne procédant pas à une plus ample motivation, l’arrêt attaqué est vicié par absence de motivation violant ainsi l’article 89 de la Constitution ; grief tiré de l’insuffisance de motifs valant absence de base légale, alors que le manque de base légale se définit comme étant , cette lettre serait à qualifier de licenciement avec effet immédiat non basée sur des motifs réels et sérieux, qu’en se bornant à citer un passage d’une lettre adressée par le mandataire de l’appelant à l’(syndicat) dans un contexte tout à fait particulier et différent d’une procédure de licenciement, à savoir dans le cadre d’une question de réaffiliation rétroactive du salarié (après que le salarié a été désaffilié d’office par l’Association d’assurance contre les accidents à un certain moment conformément à la pratique administrative habituelle), l’arrêt attaqué manque de précision suffisante pour permettre à la Cour de 4 cassation de vérifier si le juge de fond a rempli son office et de contrôler la bonne application de la loi, alors qu’en l’espèce la Cour d’appel aurait dû examiner compte tenu d’éléments concrets et précis s’il y avait manifestation de volonté claire et non équivoque de rompre le contrat par l’employeur au vu du courrier adressé en date du 28 février 2000 par son mandataire à l’(syndicat), qu’en procédant par voie de simple affirmation sans donner à ses constatations de fait la précision suffisante pour permettre le contrôle à posteriori par la Cour de cassation l’arrêt attaqué doit entraîner cassation pour défaut de base légale » ;

Mais attendu, d’une part et dans la mesure où le moyen est tiré de l’absence de motifs au regard de l’article 89 de la Constitution, le grief vise un vice de forme ; que l’arrêt est motivé sur le point considéré ;

Que d’autre part et en ce qui concerne le défaut de base légale invoqué, le moyen procède d’une lecture incorrecte et incomplète de la décision attaquée dès lors que les juges d’appel ne se sont pas bornés à fonder leur décision sur la seule phrase extraite de la lettre du mandataire de la SOCIÉTÉ 1 adressée au conseil syndical de X.) , mais ont, après avoir analysé les conditions d’application de l’article 32 de la loi du 24 mai 1989 sur le contrat de travail, énoncé que et constaté , pour conclure à une résiliation non basée sur des motifs réels et sérieux ;

D’où il suit que le moyen manque en fait sous ce rapport ;

Sur le second moyen, tiré « de la violation de la loi, par fausse application, in specie violation des articles 18 et 27 de la loi du 24 mai 1989 sur le contrat de travail combiné avec l’article 23 de la prédite loi visant l’indemnité compensatrice de préavis, l’article 24 de la prédite loi sur l’indemnité de départ et l’article 28 de la prédite loi sur la résiliation abusive, en ce que la Cour d’appel a qualifié la lettre du 28 février 2000 précitée comme constituant un licenciement avec effet immédiat, alors que l’article 18 de la loi du 24 mai 1989 dispose que et alors que l’article 27 de la loi du 24 mai 1989 dispose que 5 du termes, pour un ou plusieurs motifs graves procédant du fait ou de la faute de l’autre partie, avec dommages et intérêts à charge de la partie dont la faute a occasionné la résiliation immédiate», de sorte que l’application des dispositions des articles 18 et 27 (et par voie de conséquence l’application des articles 23, 24 et 28 de la même loi) présuppose la recherche de l’existence de l’initiative d’une des parties contractantes de résilier le contrat, c’est-à-dire la manifestation d’une volonté claire et non équivoque de mettre fin au contrat, alors qu’en l’espèce la Cour d’appel n’a pas recherché l’existence d’une volonté de rompre le contrat par l’employeur, alors qu’en l’occurrence il résulte au contraire clairement de la lettre du 28 février 2000 adressé par le mandataire de l’appelant à l’(syndicat) que l’intention de l’employeur n’était nullement de rompre le contrat de travail le liant à son salarié mais simplement de constater une situation juridique à la base de son refus de procéder à la réaffiliation rétroactive de son salarié ;

grief de la violation de la loi, alors qu’il résulte des dispositions précitées de la loi de 1989 sur le contrat de travail qu’il ne peut y avoir de licenciement qu’en présence d’une manifestation claire et non équivoque d’une des parties de vouloir rompre le contrat de travail, que d’autre part une intention de licencier de la part de l’employeur ne saurait se présumer ( de même qu’il est unanimement admis en jurisprudence qu’une intention de démissionner de la part du salarié ne peut se présumer), qu’en l’occurrence on ne saurait déduire de la lettre du 28 février 2000 une quelconque intention ou volonté de l’employeur de procéder au licenciement de son salarié, que cette absence de volonté est encore corroborée par le fait que ledit courrier n’a pas été envoyé spontanément au salarié, mais constitue une simple réponse à une lettre adressé au mandataire de l’appelant par l’(syndicat) dans un tout autre contexte, qu’à cela s’ajoute un élément qui doit écarter tout doute quant à la volonté de licencier de l’employeur, à savoir le fait que le courrier du 28 février 2000 a été adressé à l’(syndicat), et non pas au salarié, alors que s’il avait eu volonté de licenciement, l’employeur aurait manifesté son intention au salarié, qu’en l’espèce l’initiative spontanée de l’employeur, telle qu’exigée par les textes précités, fait dès lors défaut, par conséquent l’employeur n’a jamais manifesté sa volonté de rompre le contrat de travail le liant au sieur X.), que dès lors la Cour d’appel aurait dû constater que les conditions d’application des articles 18,27,23,24 et 28 de la loi sur le contrat de travail ne sont pas remplies, et, en conséquence, dire que la lettre du 28 février 2000 n’est pas à qualifier de licenciement avec effet immédiat, qu’en qualifiant la lettre du 28 février 2000 de lettre de licenciement et en appliquant les articles 18,27,23,24 et 28 de la loi sur le contrat de travail à une situation de fait qu’ils ne sont pas amenés à régir, la Cour d’appel à violé lesdites dispositions par fausse application de la loi » ;

Mais attendu que sous le couvert du grief de violation de la loi par fausse interprétation, le moyen ne tend qu’à remettre en discussion devant la Cour de cassation des faits et éléments de preuve qui ont été souverainement appréciés par les juges du fond ;

D’où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

6 P a r c e s m o t i f s :

rejette le pourvoi;

condamne la société à responsabilité limitée SOCIÉTÉ 1 aux frais de l’instance en cassation.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par Monsieur le président Marc THILL, en présence de Monsieur John PETRY, avocat général et Madame Marie-Paule KURT, greffier à la Cour.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 44/04
Date de la décision : 28/10/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 09/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2004-10-28;44.04 ?

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