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05/10/2004 | LUXEMBOURG | N°18207C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 05 octobre 2004, 18207C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 18207 C Inscrit le 11 juin 2004

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Audience publique du 5 octobre 2004 Recours formé par … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 10 mai 2004, n° 17325 du rôle)

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Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 18

207C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 11 juin 2004 par Maître Louis...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 18207 C Inscrit le 11 juin 2004

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Audience publique du 5 octobre 2004 Recours formé par … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 10 mai 2004, n° 17325 du rôle)

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Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 18207C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 11 juin 2004 par Maître Louis Tinti, avocat à la Cour, au nom de …, né le … à … (Albanie), de nationalité albanaise, demeurant actuellement à L-…, dirigée contre un jugement rendu par le tribunal administratif le 10 mai 2004, par lequel il a déclaré non fondé le recours en réformation introduit contre une décision du ministre de la Justice du 4 septembre 2003, rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, ainsi que contre une décision confirmative du même ministre du 28 octobre 2003, rendue sur recours gracieux ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe de la Cour administrative le 25 juin 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;

Ouï le conseiller en son rapport, Maître Ardavan Fatholahzadeh, en remplacement de Maître Louis Tinti, et Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter en leurs plaidoiries respectives.

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Par requête, inscrite sous le numéro 17325 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 17 décembre 2003, … a fait introduire un recours tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 4 septembre 2003, rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 28 octobre 2003, suite à un recours gracieux du 13 octobre 2003.

Par jugement rendu le 10 mai 2004, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, a reçu le recours en réformation en la forme et au fond, l’a déclaré non justifié et en a débouté ….

Les premiers juges ont justifié leur décision en constatant que les faits invoqués par l’actuel appelant à la base de sa demande d’asile relèvent de la délinquance de droit commun et que les risques invoqués par lui, ayant trait à sa crainte de subir des représailles de la part des voleurs de son matériel de pêche contre lesquels il aurait déposé plainte, ne peuvent pas être considérés comme persécutions ou évènements justifiant une crainte de persécution pour l’un des motifs prévus par la Convention de Genève. Tout en retenant, sur base des déclarations de l’actuel appelant soumises à l’agent du ministère de la Justice chargé de procéder à son audition, qu’il n’a fait l’objet d’aucune menace expresse ni d’aucune persécution, les juges de première instance ont relevé que l’appelant n’a pas concrètement entrepris la moindre démarche en vue d’obtenir la protection des autorités de son pays d’origine, à savoir l’Albanie.

En date du 11 juin 2004, Maître Louis Tinti, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel en nom et pour compte de …, inscrite sous le numéro 18207C du rôle, par laquelle la partie appelante sollicite la réformation du premier jugement.

A l’appui de sa requête d’appel, l’appelant estime que ce serait à tort que les juges de première instance n’ont pas fait droit à sa demande tendant à se voir reconnaître le statut de réfugié au sens de la Convention de Genève. Il fait valoir plus particulièrement que dans la mesure où il existerait une connivence entre les autorités de police albanaises et certains groupes mafieux, il serait inutile de demander de la protection aux autorités en place dans son pays d’origine, puisque celles-ci lui paraîtraient comme étant manifestement corrompues, de sorte qu’il n’aurait eu pour seul choix que de quitter son pays d’origine afin d’échapper aux risques d’atteinte à sa vie de la part des personnes contre lesquelles il aurait déposé plainte à la suite du vol de son matériel de pêche.

Dans son mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 25 juin 2004, le délégué du Gouvernement conclut à la confirmation du jugement entrepris.

La requête d’appel est recevable pour avoir été introduite dans les formes et délai prévus par la loi.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

C’est à bon droit, après avoir analysé les faits de l’espèce, ayant trait, d’une part, à une tentative de vol du matériel de pêche appartenant à … par des hommes armés non identifiés, contre lesquels il aurait déposé une plainte auprès de la police locale après avoir noté le numéro d’immatriculation de la barque à moteur utilisée par ces individus, et, d’autre part, au risque de subir des menaces de la part desdits individus, voire à un risque d’atteinte à sa vie, que les juges de première instance ont décidé, après avoir constaté que l’actuel appelant n’a fait l’objet d’aucune menace expresse et qu’il n’a subi aucune persécution, que les allégations de l’appelant ont trait à des infractions relevant de la délinquance de droit commun et sont partant insuffisantes pour établir un état de persécution dans son pays d’origine.

Par ailleurs, les allégations de l’appelant suivant lesquelles lesdits voleurs qui appartiendraient à des groupes mafieux, seraient liés aux autorités de police albanaises, de sorte à ce que toute plainte à déposer auprès desdites autorités de police serait vouée à l’échec, demeurent à l’état de simples hypothèses, non autrement établies en cause, de sorte à manquer de crédibilité et surtout à ne pas établir un défaut de la part des autorités albanaises d’être en mesure de lui fournir une protection appropriée contre les éventuelles menaces qu’il risquerait de subir de la part desdits voleurs.

Il s’ensuit qu’à défaut par l’appelant d’avoir établi un lien entre les actes invoqués par lui et l’un des motifs prévus par la Convention de Genève en vue de la reconnaissance du statut de réfugié, il y a lieu d’en conclure que ces prétendus actes sont tout au plus susceptibles d’avoir trait à une activité criminelle, insusceptible de tomber sous le champ d’application de la Convention de Genève.

Il suit des éléments qui précèdent qu’il y a lieu de déclarer la requête d’appel non fondée et de confirmer le jugement entrepris du 10 mai 2004.

Par ces motifs, La Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties à l’instance ;

reçoit la requête d’appel du 11 juin 2004 en la forme ;

la dit cependant non fondée et en déboute ;

partant confirme le jugement entrepris du 10 mai 2004 dans toute sa teneur;

condamne l’appelant aux frais et dépens de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par :

Jean-Mathias Goerens, vice-président, Marc Feyereisen, conseiller, Carlo Schockweiler, conseiller, rapporteur, et lu par le vice-président en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en-tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier le vice-président 4


Synthèse
Numéro d'arrêt : 18207C
Date de la décision : 05/10/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2004-10-05;18207c ?

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