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30/03/2004 | LUXEMBOURG | N°17222C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 30 mars 2004, 17222C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 17222C Inscrit le 1er décembre 2003 —————————————————————————————————————— Audience publique du 30 mars 2004 Recours formé par la société anonyme … S.A.

contre l’administration communale de Hesperange en présence de la société à responsabilité limitée MOWO COLLECTIVITES S.à r.l.

en matière de marchés publics - Appel et appel incident -

(jugement entrepris du 23 octobre 2003, n° 15346 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 1er d...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 17222C Inscrit le 1er décembre 2003 —————————————————————————————————————— Audience publique du 30 mars 2004 Recours formé par la société anonyme … S.A.

contre l’administration communale de Hesperange en présence de la société à responsabilité limitée MOWO COLLECTIVITES S.à r.l.

en matière de marchés publics - Appel et appel incident -

(jugement entrepris du 23 octobre 2003, n° 15346 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 1er décembre 2003 par Maître Anne-Marie Schmit, avocate à la Cour, au nom de la société anonyme … s.a. établie et ayant son siège social à … , inscrite au registre du Commerce et des Sociétés de et à Luxembourg sous le numéro B …, contre un jugement rendu en matière de marchés publics par le tribunal administratif à la date du 23 octobre 2003, à la requête de l’actuelle appelante contre une décision de l’administration communale de Hesperange, en présence de la société à responsabilité limitée … s.à r.l., établie et ayant son siège social à L-…, représentée par son gérant actuellement en fonctions.

Vu la signification dudit acte d’appel par exploît d’huissier Guy Engel en date du 17 décembre 2003 à la société à responsabilité limitée … s.à r.l. et à l’administration communale de Hesperange.

Vu le mémoire en réponse, intitulé mémoire en réplique et contenant appel incident, déposé au greffe de la Cour administrative le 14 janvier 2004 par Maître Guy Arendt, avocat à la Cour, pour compte de la société à responsabilité limitée … s.à r.l. préqualifiée.

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 13 février 2004 par Maître Anne-Marie Schmit, avocate à la Cour, au nom de la société anonyme … s.a..

Vu la signification dudit mémoire en réplique par exploît d’huissier Guy Engel en date du 17 février 2004 à l’administration communale de Hesperange et à la société à responsabilité limitée … s.à r.l..

Vu le mémoire en réponse, intitulé mémoire en duplique, déposé au greffe de la Cour administrative le 9 mars 2004 par Maître Thierry Reisch, avocat à la Cour, pour compte de l’administration communale de Hesperange.

Vu la signification dudit mémoire en « duplique » par exploit d’huissier Georges Nickts à la date du 12 mars 2004 à la société anonyme … et à la société à responsabilité limitée … S.à r.l..

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le premier conseiller en son rapport et Maître Florence Turk-Torquebiau, en remplacement de Maître Anne-Marie Schmit, Maître Annie Elfassi, en remplacement de Maître Guy Arendt, ainsi que Maître Thierry Reisch en leurs observations orales.

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Par la requête, inscrite sous le n° 15346 du rôle, déposée le 12 septembre 2002 au greffe du tribunal administratif, Maître Anne-Marie Schmit, avocate à la Cour, au nom de la société anonyme … s.a., établie et ayant son siège social à …, inscrite au registre du commerce et des sociétés sous le n° …, a demandé l’annulation d’une décision prise par l’administration communale de Hesperange en date du 20 mai 2002, par laquelle son offre de prix introduite dans le cadre de la soumission publique relative à la fourniture de mobilier médicalisé pour chambre pour le Centre intégré pour personnes âgées (Cipa) à Howald a été écartée et portant adjudication du marché à la société Mowo Collectivites s.à r.l..

Par jugement rendu en date du 23 octobre 2003, le tribunal administratif a déclaré la société à responsabilité limitée Mowo s.à r.l. hors cause, a reçu le recours en annulation en la forme, au fond l’a déclaré non justifié et en a débouté la requérante avec condamnation aux frais.

Par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 1er décembre 2003 et signifiée en date du 17 décembre 2003 à la société à responsabilité limitée … et à l’administration communale de Hesperange, Maître Anne-Marie Schmit, au nom de la société anonyme … s.a., a relevé appel du prédit jugement.

La partie appelante soutient que les critères qualitatifs exigés par la commune ont été pris en violation de la législation sur les marchés publics, que l’examen de l’offre économiquement plus avantageuse exclurait l’offre de … et elle verse des pièces afin de prouver le caractère discriminatoire des critères de choix techniques posés par l’administration communale qui rompent l’égalité des soumissionnaires.

Dans un mémoire en réponse, intitulé mémoire en réplique, déposé au greffe de la Cour administrative le 14 janvier 2004, Maître Guy Arendt, avocat à la Cour, pour compte de la société à responsabilité limitée … s. à r. l. relève appel incident en ce qui concerne différents moyens d’irrecevabilité et un moyen de caducité du recours en annulation rejetés par les juges de première instance, à titre subsidiaire et quant au fond il fait valoir que la décision d’adjudication du 23 avril 2002 a été prise en considération d’une situation de droit et de fait conformes avec les dispositions du règlement grand-ducal du 10 janvier 1989 portant exécution du chapitre 2 de la loi du 4 avril 1974 concernant le régime des marchés publics de travaux et de fournitures.

Maître Anne-Marie Schmit, pour compte de la société anonyme … s.a., a répliqué en date du 13 février 2004 pour constater que la commune est défaillante et prendre positon par rapport aux moyens invoqués par la partie adverse dans son mémoire en réponse.

Dans un mémoire en réponse, intitulé mémoire en duplique et déposé au greffe de la Cour administrative le 9 mars 2004, Maître Thierry Reisch, pour compte de l’administration communale de Hesperange, se rallie au mémoire en réponse de la société à responsabilité 2 limitée … s. à r.l. quant au moyen d’irrecevabilité du recours pour ne pas avoir été dirigé contre une décision susceptible de recours, respectivement pour ne pas avoir exercé de recours contre le cahier des charges, et à titre subsidiaire, quant au fond, il demande la confirmation du jugement entrepris.

Aux termes de l’article 46(I) de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, la partie intimée et le tiers intéressé sont tenus de fournir leur réponse dans le délai d’un mois à dater de la signification de la requête d’appel.

En l’espèce, l’acte d’appel a été signifié par exploit d’huissier Guy Engel en date du 17 décembre 2003 à l’administration communale de Hesperange. Il s’ensuit que Maître Thierry Reisch aurait dû déposer un mémoire en réponse avant le 17 janvier 2004, et que le mémoire « en duplique », déposé au greffe de la Cour administrative le 9 mars 2004, est à écarter pour tardiveté.

Les actes d’appel principal et incident sont recevables pour avoir été introduits dans les formes et délai de la loi.

Quant à la recevabilité du recours en annulation :

La partie … s.àr.l. soulève en premier lieu un moyen tendant à l’irrecevabilité du recours comme tardif et irrégulier par le fait que la partie … lui a fait signifier son recours et les mémoires subséquents uniquement à la date du 7 juillet 2003 soit dix mois après l’introduction du recours principal, sans qu’… n’indique s’il s’agit d’une mise en intervention ou du recours proprement dit, et en dehors du délai légal de trois mois.

Ce moyen est à écarter comme non fondé, alors que les premiers juges ont estimé à juste titre que la recevabilité ratione temporis du recours dirigé contre des actes administratifs est fonction de son dépôt au greffe du tribunal dans le délai imparti, mais non pas de sa signification à l’autorité émettrice de l’acte ou aux tiers intéressés.

Le recours ne peut non plus être déclaré caduc, alors que si l’article 4 (2) de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives prévoit la signification du recours dans le délai du mois de son dépôt, cette signification doit être faite à la « partie défenderesse » », et non aux tiers intéressés.

Le moyen d’irrecevabilité du recours qui serait dirigé contre de simples courriers non susceptibles de recours, en particulier celui du 20 mai 2002 de la commune d’Hesperange, est à écarter comme non fondé, alors que les décisions de rejet de l’offre d’… s.a. ne sont matérialisées à son égard qu’à travers le prédit courrier de la commune, et celui du bureau d’architecture … du 12 juin 2002.

Le moyen d’irrecevabilité pour n’avoir pas exercé de recours contre le cahier des charges laisse enfin d’être fondé, alors que les dispositions de l’article 28 (11) du règlement grand-

ducal du 10 janvier 1989 portant exécution du chapitre 2 de la loi du 4 avril 1974 concernant le régime des marchés publics de travaux et de fournitures ne limitent pas la recevabilité des voies de recours entamées à l’encontre des décisions individuelles prises dans le cadre d’une soumission publique.

Quant au fond :

3 Ayant été informée de ce que l’offre par elle formulée, dans le cadre de la soumission publique lancée par l’administration communale de Hesperange pour la fourniture de mobilier médicalisé pour chambre pour le Centre intégré pour personnes âgées (Cipa) à Howald, avait été écartée et que le marché en question avait été adjugé à la société … s.à r.l., la société anonyme … s.a. a saisi le tribunal administratif le 12 septembre 2002 d’un recours tendant à l’annulation des décisions afférentes du 12 juin 2002 et du 20 mai 2002.

La partie appelante fait valoir en premier lieu que des critères qualitatifs trop rigides exigés par la commune, en ce que seule la marque « Völker » au Luxembourg pouvait être sélectionnée, ont été pris en violation des dispositions régissant la législation sur les marchés publics.

Elle verse en instance d’appel une deuxième farde de pièces afin de prouver le caractère discriminatoire des critères de choix techniques posés par l’administration communale de Hesperange, qui rompent l’égalité des soumissionnaires, qu’en particulier la spécification de la marque viole le contenu de l’article 30 de la loi du 4 avril 1974 concernant les marchés publics de travaux et de fournitures et n’est pas utile pour satisfaire aux impératifs de sécurité alors que les lits offerts par l’appelante présentent des protections tout à fait identiques et adéquates, et qu’enfin la mention du bordereau de soumission « ou similaire et équivalent » ne vaut ni en droit ni en fait en l’espèce.

Le bordereau de soumission établi par le bureau d’architecture … renseigne un lit médicalisé à ossature mobile pour pensionnaires de type Völker, modèle 3080 ST ou similaire ou équivalent. Suit alors une description détaillée des composants du lit requis, qui doit assurer à la fois le confort et la sécurité des pensionnaires.

Le moyen d’annulation proposé par l’appelante est à écarter, étant donné que l’argumentation développée n’est pas de matière à faire conclure que les spécifications techniques stipulées au cahier des charges relatifs à la soumission litigieuse aient été rédigées de façon discriminatoire, mais elles sont justifiées par l’objet spécifique du marché et les desirata légitimes du pouvoir adjudicateur, fondés sur des exigences de sécurité des usagers.

Le fait que le bordereau de soumission porte la mention « de type Völker » c’est-à-dire à titre indicatif, et la mention « similaire ou équivalent » autorisait les adjudicataires à offrir une autre marque sans se heurter à une exclusivité, ce qu’a fait en l’espèce la firme … qui a proposé un lit médicalisé d’une autre marque, et dont l’offre a été prise en considération et les différentes caractéristiques ont été analysées, ensemble avec les autres offres, sans référence à la marque du matériel mais uniquement du point de vue de la conformité au bordereau de soumission.

La partie appelante admet, dans son mémoire en réplique, que son offre n’est pas conforme aux prescriptions du cahier des charges parce que certains mécanismes et modèles du lit demandé sont brevetés, comme les barrières latérales, et reconnaît une différence de plusieurs centimètres de la hauteur minimale, et dans le poids du lit ce qui ne serait pas une « qualité substantielle, mais qu’il s’agirait tout juste d’une question de confort très relatif ».

Il se dégage du tableau comparatif dressé suite à l’examen de la conformité des offres que seule l’offre de … a été jugée conforme, à l’exclusion des quatre autres offres qui ont été écartées pour non-conformité, sur base de critères purement techniques posés dans le cahier des charges, et si le bordereau indiquait la marque de type Völker, c’était dans le but de circonscrire l’objet de la soumission, vu l’objet mobilier bien particulier qu’est un lit médicalisé, mais du fait que le bordereau portait à la suite la mention « ou similaire ou 4 équivalent », les critères fixés étaient fondés sur des exigences de sécurité des usagers et non sur une marque exclusive, et les soumissionnaires étaient traités sur un pied d’égalité, les spécifications techniques étant justifiées par l’objet du marché, et l’appelante reste en défaut de rapporter la preuve d’une quelconque « distorsion de concurrence » qui ne ressort pas des pièces versées en cause, et alors qu’elle n’a pas critiqué le cahier des charges lors de sa réception.

Enfin, certains critères techniques du bordereau qui étaient considérés comme déterminants dans le choix du soumissionnaire sont des éléments qui ne sont pas brevetés par la marque Völker.

Dans le cadre d’un recours en annulation, le juge administratif est appelé à respecter le pouvoir d’appréciation du commettant, son contrôle consistant à vérifier si les faits à la base de la décision sont établis et si la mesure prise est proportionnelle par rapport aux faits établis, seule une erreur manifeste d’appréciation de l’autorité ayant pris la décision déférée étant à sanctionner en conséquence.

Finalement, le lit médicalisé proposé par l’appelante était beaucoup plus lourd que le lit offert par la société Mowo (151 kilos par rapport à 96 kilos), les barrières de sécurité n’étaient pas conformes aux normes de sécurité posées par le bordereau de soumission et présentaient des difficultés d’utilisation pour les pensionnaires, et au lieu de réglage en hauteur de 39 à 80 centimètres demandé dans le bordereau de soumission pour que les pensionnaires n’aient pas de difficultés pour sortir du lit, le lit proposé par l’appelante a un réglage minimum de la hauteur de 43 centimètres.

Il s’ensuit que la non-conformité du lit médicalisé proposé par … au bordereau de soumission a motivé à juste titre la décision de l’administration communale de Hesperange et que le jugement entrepris est à confirmer, l’acte d’appel n’étant pas fondé.

Par ces motifs, la Cour, statuant contradictoirement, écarte le mémoire en réponse, intitulé mémoire en duplique, de Maître Thierry Reisch du 9 mars 2004, reçoit les actes d’appel principal et incident, les dit non fondés et en déboute, partant confirme le jugement entrepris du 23 octobre 2003 dans toute sa teneur, condamne l’appelante aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé par Marion Lanners, présidente, Christiane Diederich-Tournay, premier conseiller, rapporteur, Marc Feyereisen, conseiller, 5 et lu par la présidente Marion Lanners en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour Erny May.

le greffier en chef la présidente 6


Synthèse
Numéro d'arrêt : 17222C
Date de la décision : 30/03/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2004-03-30;17222c ?

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