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19/02/2004 | LUXEMBOURG | N°17264C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 19 février 2004, 17264C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 17264 C Inscrit le 10 décembre 2003

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Audience publique du 19 février 2004 Recours formé par Monsieur … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 19 novembre 2003, n° 16443 du rôle)

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Vu la requête d’appel, in

scrite sous le numéro 17264C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 10 déc...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 17264 C Inscrit le 10 décembre 2003

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Audience publique du 19 février 2004 Recours formé par Monsieur … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 19 novembre 2003, n° 16443 du rôle)

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Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 17264C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 10 décembre 2003 par Maître Philippe Stroesser, avocat à la Cour, assisté de Maître Renaud Le Squeren, avocat, au nom de Monsieur …, né le … (Moldavie), de nationalité moldave, demeurant actuellement à L-…, dirigée contre un jugement rendu par le tribunal administratif le 19 novembre 2003 par lequel il a déclaré non fondé le recours en réformation dirigé contre une décision du ministre de la Justice du 13 mars 2003, ainsi que contre une décision confirmative du même ministre du 25 avril 2003 prise sur recours gracieux, les deux portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe de la Cour administrative le 23 décembre 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;

Ouï le conseiller en son rapport, Maître Renaud Le Squeren, ainsi que Madame le délégué du Gouvernement Claudine Konsbruck en leurs plaidoiries respectives.

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Par requête, inscrite sous le numéro 16443 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 16 mai 2003, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 13 mars 2003, ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 25 avril 2003 prise sur recours gracieux, les deux portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée.

Par jugement rendu le 19 novembre 2003, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, après avoir reçu le recours en réformation en la forme, l’a déclaré non justifié et en a débouté Monsieur …. Le tribunal a refusé de faire droit au recours présenté par Monsieur … en décidant que contrairement à ses conclusions, le ministre de la Justice n’était pas obligé de recourir à la consultation de la commission consultative pour les étrangers avant de refuser la reconnaissance de sa demande d’asile, étant donné que d’après l’article 3 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire, la saisine de ladite commission n’est en aucun cas obligatoire, de sorte que le défaut de soumettre l’avis d’un demandeur d’asile à ladite commission ne saurait entraîner l’annulation de la procédure d’élaboration ou de la décision ministérielle prise pour juger du bien-fondé de la demande d’asile. Le tribunal a encore rejeté le moyen tendant à voir constater l’imprécision de la motivation des décisions ministérielles litigieuses, en constatant que celles-ci indiquent de manière détaillée et circonstanciée les motifs en droit et en fait sur lesquels le ministre s’est basé pour refuser la demande d’asile. Quant au fond, le tribunal a retenu qu’il se dégage des éléments du dossier que Monsieur …, en omettant de signaler l’existence, d’une part, d’une demande d’asile antérieure dans un autre pays ainsi que, d’autre part, d’une décision de justice par laquelle il a été condamné en Allemagne à un emprisonnement de 9 mois du chef d’activités de passeur, tombe dans le cas d’ouverture prévu par l’article 6, alinéa 2 sub d) et f) du règlement grand-ducal du 22 avril 1996 portant application des articles 8 et 9 de la loi précitée du 3 avril 1996, de sorte que sa demande d’asile était à considérer comme manifestement infondée. En conclusion, le tribunal a retenu que dans la mesure où la demande d’asile de Monsieur … pouvait être considérée comme manifestement infondée, un refus quant au bien-fondé de sa demande d’asile peut a fortiori être basé sur le même motif.

En date du 10 décembre 2003, Maître Philippe Stroesser, avocat à la Cour, assisté de Maître Renaud Le Squeren, avocat, a déposé une requête d’appel en nom et pour compte de Monsieur …, inscrite sous le numéro 17264C du rôle, par laquelle la partie appelante sollicite la réformation du premier jugement.

A l’appui de sa requête d’appel, l’appelant reproche aux premiers juges d’avoir fait application de l’article 11 de la loi précitée du 3 avril 1996, comme l’avait déjà fait le ministre de la Justice dans les décisions querellées, en déclarant sa demande d’asile comme étant non fondée, alors qu’ils auraient dû faire application de l’article 9 de la même loi en déclarant sa demande d’asile manifestement infondée au vu du constat auquel ils ont procédé, rendant applicable l’article 6, alinéa 1er du règlement grand-

ducal précité du 22 avril 1996. Il soutient que le défaut de faire application de l’article 9 de la loi de 1996 le priverait d’une « décision rapide », étant donné qu’en application de ladite disposition légale, les juges administratifs auraient dû rendre une décision dans le mois de l’introduction de la requête. Il estime partant que non seulement le ministre de la Justice mais également les juges de première instance auraient fait une fausse interprétation de la loi, devant encourir la réformation de leur jugement. Pour le surplus, il fait état de ce qu’il aurait participé, dans son pays d’origine, à savoir la Moldavie, à des manifestations organisées en faveur de la défense des droits des étudiants au sein de son université, à travers l’association publique Republika, dont il aurait été le vice-président depuis novembre 2001 et de ce que dans le cadre de grèves qui auraient éclaté en février 2000, il serait devenu le porte parole de son association. A la suite de ces événements, sa sécurité n’aurait plus été assurée dans son pays d’origine, de sorte qu’il aurait été obligé de le quitter afin de trouver refuge au Luxembourg.

Dans son mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour le 23 décembre 2003, le délégué du Gouvernement conclut à la confirmation du jugement entrepris. Il fait plus particulièrement valoir que le ministre de la Justice n’aurait pas été en mesure de prendre une décision dans les deux mois de la demande d’asile, tel qu’exigé par l’article 9 de la loi précitée du 3 avril 1996, de sorte qu’il aurait fait bénéficier Monsieur … de la procédure de droit commun prévue par l’article 11 de la même loi, qui de toute façon lui serait plus favorable, de sorte qu’il serait malvenu de se plaindre d’avoir été « frustré » d’une procédure expéditive au profit d’une procédure classique.

La requête d’appel est recevable pour avoir été introduite dans les formes et délai prévus par la loi.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

En ce qui concerne tout d’abord le reproche suivant lequel tant le ministre de la Justice que les juges de première instance n’auraient pas été en droit de faire application de l’article 11 de la loi précitée du 3 avril 1996, en ce qu’ils auraient au contraire dû déclarer sa demande d’asile manifestement infondée en application de l’article 9 de la même loi, il échet de retenir que toute demande d’asile remplissant les conditions fixées par l’article 9 de la loi précitée du 3 avril 1996, de sorte à pouvoir être rejetée comme étant manifestement infondée, peut également, et a fortiori, être considérée comme simplement non fondée au sens de l’article 11 de la même loi. En effet, un demandeur d’asile ne saurait se plaindre de se voir appliquer une procédure tant administrative que contentieuse plus favorable, en ce que la procédure prévue par les articles 11 et 12 de la loi précitée du 3 avril 1996 prévoit non seulement des délais d’instruction plus étendus, mais également la possibilité d’introduire un recours au fond devant les juridictions administratives. Il s’ensuit qu’aucun reproche ne saurait être fait aux juges de première instance du fait d’avoir rejeté le moyen afférent présenté par l’appelant dans sa requête introductive d’instance introduite devant le tribunal administratif.

Enfin, en ce qui concerne les craintes de persécution mises en avant par l’appelant dans sa requête d’appel, il échet de retenir que le tribunal administratif n’avait pas à y prendre position dans la mesure où il a pu considérer, au vu des fausses déclarations fournies par lui à l’appui de sa demande d’asile, se dégageant non seulement du fait qu’il n’avait révélé ni sa condamnation en Allemagne pour des activités de passeur ni l’existence d’une demande d’asile introduite en République tchèque, malgré la question afférente clairement formulée par l’agent du ministère de la Justice lors de son audition, que les conditions de l’article 6, alinéa 2 sub d) et f) du règlement grand-ducal précité du 22 avril 1996 étaient remplies, de sorte à pouvoir rejeter la demande d’asile comme étant manifestement infondée.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il y a lieu de déclarer la requête d’appel non fondée et de confirmer le jugement entrepris du 19 novembre 2003.

Par ces motifs, La Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties à l’instance ;

reçoit la requête d’appel du 10 décembre 2003 en la forme ;

la dit cependant non fondée et en déboute ;

partant confirme le jugement entrepris du 19 novembre 2003 dans toute sa teneur;

condamne l’appelant aux frais et dépens de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par :

Marion Lanners, présidente, Christiane Diederich-Tournay, premier conseiller, Carlo Schockweiler, conseiller, rapporteur, et lu par la présidente en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en-tête, en présence du greffier en chef de la Cour Erny May.

le greffier en chef la présidente 5


Synthèse
Numéro d'arrêt : 17264C
Date de la décision : 19/02/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2004-02-19;17264c ?

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