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29/01/2004 | LUXEMBOURG | N°17168C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 29 janvier 2004, 17168C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 17168 C Inscrit le 14 novembre 2003

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Audience publique du 29 janvier 2004 Recours formé par … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 13 octobre 2003, n° 16313 du rôle)

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Vu la requête d’appel, insc

rite sous le numéro 17168C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 14 nov...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 17168 C Inscrit le 14 novembre 2003

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Audience publique du 29 janvier 2004 Recours formé par … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 13 octobre 2003, n° 16313 du rôle)

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Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 17168C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 14 novembre 2003 par Maître Louis Tinti, avocat à la Cour, au nom de …, né le …(Kosovo/Etat de Serbie et Monténégro), de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…, dirigée contre un jugement rendu par le tribunal administratif le 13 octobre 2003 par lequel il a déclaré non fondé le recours en réformation introduit contre une décision du ministre de la Justice du 5 février 2003 portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée et de celle confirmative, intervenue sur recours gracieux, du 18 mars 2003 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe de la Cour administrative le 28 novembre 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;

Ouï le conseiller en son rapport, Maître Ardavan Fatholahzadeh, en remplacement de Maître Louis Tinti et Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles Roth en leurs plaidoiries respectives.

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Par requête, inscrite sous le numéro 16313 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 22 avril 2003, … a fait introduire un recours tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 5 février 2003 portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée et de celle confirmative, intervenue sur recours gracieux, du 18 mars 2003.

Par jugement rendu le 13 octobre 2003, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, après avoir reçu le recours en réformation en la forme, l’a déclaré non justifié et en a débouté …. Le tribunal s’est notamment basé sur le fait que la situation des bochniaques vivant au Kosovo n’est pas telle que tout membre de cette minorité ethnique serait de ce seul fait exposé à des persécutions au sens de la Convention de Genève, ainsi que sur le fait que le demandeur n’a pas établi que les autorités administratives chargées du maintien de la sécurité et de l’ordre publics au Kosovo ne soient pas capables de lui assurer un niveau de protection suffisant, d’autant plus qu’il n’a pas fait état d’un quelconque fait concret qui serait de nature à établir un défaut caractérisé de protection de la part de ces autorités.

En date du 14 novembre 2003, Maître Louis Tinti, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel en nom et pour compte de …, inscrite sous le numéro 17168C du rôle, par laquelle la partie appelante sollicite la réformation du premier jugement.

A l’appui de sa requête d’appel, l’appelant estime que ce serait à tort que les juges de première instance n’ont pas fait droit à ses conclusions, en soutenant que le simple fait d’appartenir à la minorité des bochniaques résidant au Kosovo devrait suffire pour obtenir la reconnaissance du statut de réfugié. A cet effet, il se réfère à un rapport établi par Amnesty International en date du 29 avril 2003, ainsi qu’à une prise de position émanant de certains membres de l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe suivant lesquels les droits des minorités ne seraient toujours pas respectés au Kosovo, de sorte que les membres de celles-ci n’auraient d’autre alternative que de quitter leur pays d’origine.

Dans son mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour le 28 novembre 2003, le délégué du Gouvernement conclut à la confirmation du jugement entrepris.

La requête d’appel est recevable pour avoir été introduite dans les formes et délai prévus par la loi.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

Il échet tout d’abord de relever qu’en ce qui concerne la situation des membres des minorités au Kosovo, et notamment de celle des bochniaques, s’il est vrai que leur situation générale est difficile et qu’ils sont particulièrement exposés à subir des insultes, voire d’autres discriminations ou agressions par des groupes de la population, et notamment du groupe majoritaire des Albanais, elle n’est cependant pas telle que tout membre de la minorité ethnique visée serait de ce seul fait exposé à des persécutions au sens de la Convention de Genève, étant entendu qu’une crainte de persécution afférente doit reposer nécessairement sur des éléments suffisants desquels il se dégage que, considéré individuellement et concrètement, le demandeur d’asile risque de subir des traitements discriminatoires.

C’est à bon droit qu’à cet égard le tribunal administratif s’est référé au rapport de l’UNHCR sur la situation des minorités au Kosovo, datant du mois de janvier 2003, pour conclure que la situation de sécurité générale des bochniaques du Kosovo est restée stable et n’a pas été marquée par des incidents d’une violence sérieuse. Ainsi, ledit rapport ne permet pas de conclure que la situation générale des bochniaques du Kosovo serait à l’heure actuelle grave au point que la seule appartenance à ladite minorité justifierait l’octroi du statut de réfugié.

Cette conclusion ne saurait être énervée ni, d’une part, par un rapport établi par certains membres de l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe en date du 9 septembre 2003, non examiné ni approuvé par ladite assemblée parlementaire, qui, à part le fait qu’il n’a aucun caractère officiel, ne contient que des informations vagues et générales qui ne permettent pas de conforter l’argumentation présentée par l’appelant, ni, d’autre part, par des documents émanant d’Amnesty International, versés par l’appelant à l’appui de sa requête d’appel, qui ne contiennent que des informations partielles et vagues qui ne sauraient mettre en doute les informations très précises contenues dans le rapport précité de l’UNHCR.

Enfin, concernant les persécutions dont fait état l’appelant, qui émaneraient de tiers et non pas de l’Etat, il échet de constater que l’appelant n’a pas établi que les autorités administratives chargées du maintien de la sécurité et de l’ordre publics en place ne soient pas capables de lui assurer un niveau de protection suffisant, étant entendu qu’il n’a pas fait état d’un quelconque fait concret qui serait de nature à établir un défaut caractérisé de protection de la part de ces autorités.

En conclusion, il y a lieu de retenir que le tribunal administratif a décidé à bon droit que le ministre a valablement pu refuser la demande d’asile lui soumise par l’appelant, de sorte que la requête d’appel n’est pas fondée et que le jugement entrepris du 13 octobre 2003 est à confirmer.

Par ces motifs, La Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties à l’instance ;

reçoit la requête d’appel du 14 novembre 2003 en la forme ;

la dit cependant non fondée et en déboute ;

partant confirme le jugement entrepris du 13 octobre 2003 dans toute sa teneur;

condamne l’appelant aux frais et dépens de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par :

Jean-Mathias Goerens, vice-président, Marc Feyereisen, conseiller, Carlo Schockweiler, conseiller, rapporteur, et lu par le vice-président en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en-tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier le vice-président 4


Synthèse
Numéro d'arrêt : 17168C
Date de la décision : 29/01/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2004-01-29;17168c ?

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