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02/12/2003 | LUXEMBOURG | N°16758C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 02 décembre 2003, 16758C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro 16758C du rôle Inscrit le 23 juillet 2003

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 2 DECEMBRE 2003 Recours formé par la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports contre … en matière d’homologation des titres et grades étrangers - Appel -

(jugement entrepris du 30 juin 2003, n° 15716 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour a...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro 16758C du rôle Inscrit le 23 juillet 2003

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 2 DECEMBRE 2003 Recours formé par la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports contre … en matière d’homologation des titres et grades étrangers - Appel -

(jugement entrepris du 30 juin 2003, n° 15716 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 23 juillet 2003 par le délégué du Gouvernement Guy Schleder, en vertu d’un mandat de la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports du 16 juillet 2003, contre un jugement rendu en matière d’équivalence d’homologation des titres et grades étrangers par le tribunal administratif en date du 30 juin 2003, à la requête de …, médecin-pédiatre, demeurant à L-…, contre la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 19 septembre 2003 par Maître François Moyse, avocat à la Cour, au nom de …, préqualifié.

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 14 octobre 2003 par le délégué du Gouvernement Marc Mathekowitsch.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le conseiller en son rapport, et la délégué du Gouvernement Claudine Konsbruck ainsi que Maître François Moyse en leurs observations orales.

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Par requête inscrite sous le numéro 15716 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 12 décembre 2002, Maître François Moyse, avocat à la Cour, au nom de …, médecin-pédiatre, demeurant à L-…, a demandé principalement la réformation et subsidiairement l’annulation d’une décision rendue par la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports en date du 24 juillet 2002 ayant, par annulation d’une décision précédente du 18 juillet 2002, refusé à … la reconnaissance de son diplôme de fin d’études secondaires, ainsi que d’une décision confirmative du 12 septembre 2002 de la même ministre intervenue sur recours gracieux.

Par jugement rendu en date du 30 juin 2003, le tribunal administratif a reçu le recours en annulation en la forme, au fond l’a dit justifié et a annulé les décisions déférées de la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports, en renvoyant le dossier devant elle en prosécution de cause.

Fort d’un mandat exprès d’interjeter appel délivré par la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports le 16 juillet 2003, et par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 23 juillet 2003, le délégué du Gouvernement Guy Schleder a relevé appel du prédit jugement au nom de la ministre précitée.

La partie appelante soutient qu’elle ne dispose d’aucune base légale ou réglementaire pour arrêter une reconnaissance d’équivalence d’un diplôme de fin d’études secondaires délivré par un pays qui n’a ratifié ni la Convention de Paris de 1953, ni la Convention de Lisbonne de 1997, et reproche aux premiers juges un revirement de jurisprudence par rapport à leur décision du 25 juillet 2001 dans l’espèce Maoujoud c/Ministre de l’Education Nationale.

Dans un mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 19 septembre 2003, Maître François Moyse, au nom de …, préqualifié, se rapporte à prudence de Justice quant à la recevabilité en la forme de l’acte d’appel, et rétorque que les faits des deux affaires ne sont pas identiques, que le tribunal a estimé à raison qu’au vu de l’absence de réglementation en la matière, la ministre devait procéder à la comparaison au cas par cas des compétences attestées par les titres dont la reconnaissance est réclamée, sous peine de se soustraire à l’exercice de l’une des attributions lui conférées par le législateur, et que la Convention de Paris ne saurait pas pour autant avoir pour effet d’anéantir toute possibilité de reconnaissance par rapport à des situations non couvertes par elle.

Il conclut en demandant la confirmation du jugement entrepris.

Le délégué du Gouvernement Marc Mathékowitsch a répliqué en date du 14 octobre 2003 pour réitérer que les cas … et Maoujoud sont identiques.

L’acte d’appel est recevable pour être introduit dans les formes et délai de la loi.

Le ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports a refusé, par décision en date du 24 juillet 2002, de faire droit à la demande de l’intimé, de nationalité luxembourgeoise, ayant accompli la majeure partie de ses études de médecin au Nigeria, d’obtenir la reconnaissance de son diplôme de fin d’études secondaires nigérian, ceci au vue d’obtenir la reconnaissance de ses diplômes de médecins obtenus finalement au Royaume-Uni où il a accompli sa spécialité au motif que :

« La décision de reconnaissance requise dans le cas présent est prise par le Ministre de l’Education nationale, de la Formation Professionnelle et des Sports sur la base de la Convention sur la reconnaissance des qualifications relatives à l’enseignement supérieur dans la région européenne, faite à Lisbonne, le 11 avril 1997 et ratifiée par la loi luxembourgeoise du 14 août 2000 et sur base de la Convention européenne relative à l’équivalence des diplômes donnant accès aux établissements universitaires, signée à Paris le 11 décembre 1953 et ratifiée par la loi luxembourgeoise du 13 décembre 1954. Le Nigeria n’ayant ratifié aucune de ces conventions, le Ministre de l’Education nationale, de la 2 Formation Professionnelle et des Sports ne dispose d’aucune base légale ni réglementaire pour arrêter la reconnaissance d’un diplôme délivré par le Nigeria ».

Le tribunal administratif, dans son jugement du 30 juin 2003, a estimé qu’au vu de l’absence de réglementation en la matière, la ministre précitée devait procéder à une comparaison au cas par cas des compétences attestées par les titres dont la reconnaissance est réclamée et les connaissances et qualifications exigées par la législation nationale, sous peine de se soustraire à l’exercice de l’une des attributions lui conférées par le législateur.

La partie appelante s’appuie sur l’argumentation retenue par le tribunal administratif dans un jugement antérieur de 25 juillet 2001, affaire Maoujoud c/ MEN et ministre de la Culture, pour reprocher aux premiers juges un revirement complet de jurisprudence, alors qu’ils auraient estimé, dans un espèce identique, mais en présence d’un bac marocain, que la Convention de Paris constituerait la seule base légale pour arrêter la reconnaissance d’équivalence d’un bac étranger à un bac luxembourgeois, et que les demandes de titulaires d’un certificat de fin d’études secondaires émis par un pays n’ayant pas adhéré à cette Convention étaient irrecevables.

La Convention de Paris pose dans son article 1er, paragraphe premier, l’obligation pour chaque partie contractante de reconnaître aux diplômes délivrés sur le territoire des autres parties contractantes la même qualification que celle qui y est attachée dans le pays d’origine.

Néanmoins, il convient de constater que le Nigeria n’a pas adhéré à la Convention de Paris, de sorte que les diplômes délivrés par le Nigeria ne tombent pas dans le champ d’application de la dite Convention.

Par conséquent l’autonomie du Grand-Duché de Luxembourg quant à la faculté de reconnaissance sur son territoire des diplômes qui sont délivrés dans un Etat tiers reste complète, et le Grand-Duché ne saurait être obligé de reconnaître un diplôme délivré dans un Etat tiers, en raison du seul fait qu’un autre pays signataire ou pays ayant adhéré à la Convention de Paris, usant de la même faculté, a volontairement et unilatéralement reconnu ledit diplôme.

Il s’ensuit que la Convention de Paris constitue la base légale sur laquelle se fonde la ministre de l’Education nationale pour reconnaître l’équivalence d’un diplôme étranger au diplôme de fin d’études secondaires luxembourgeois et que le Luxembourg n’est pas fautif de ne pas avoir pris de réglementation complétant la Convention précitée, étant donné qu’aucune disposition légale de droit international ne force un Etat signataire de la Convention de Paris à prendre, à l’encontre d’un Etat non signataire, des dispositions légales « spéciales » permettant de procéder à la reconnaissance de ses diplômes, alors que l’Etat non signataire a pris la volonté délibérée de ne pas adhérer à cette Convention.

S’il est vrai que le législateur à travers l’alinéa final de l’article 4 de la loi modifiée du 18 juin 1969 sur l’homologation des titres étrangers d’enseignement supérieur prévoit qu’un règlement grand-ducal peut déterminer la procédure et les conditions d’une reconnaissance d’équivalence au certificat luxembourgeois de fin d’études secondaires des diplômes étrangers correspondant délivrés par des pays qui n’ont pas adhéré à la Convention de Paris de 1953, le pouvoir politique n’a jamais exercé la possibilité de prendre ce règlement, ce qui est son droit, et on ne peut en tirer la conclusion que le législateur a conféré au ministre compétent la charge d’examiner quant au fond une demande afférente en se livrant à un exercice de comparaison au fond des titres présentés.

3 La ministre, en refusant la reconnaissance sollicitée au motif que le Nigeria n’a ratifié aucune des conventions internationales applicables en la matière et qu’elle ne disposerait d’aucune autre base légale ou réglementaire pour arrêter la reconnaissance d’un diplôme délivré par le Nigeria, n’a pas méconnu la portée de l’article 4 de la loi modifiée du 18 juin 1969 précitée, de sorte que ses décisions déférées n’encourent pas l’annulation.

Il s’ensuit que le jugement entrepris est à réformer, l’acte d’appel étant fondé.

Par ces motifs la Cour, statuant contradictoirement, reçoit l’acte d’appel du 23 juillet 2003, le dit fondé, partant, par réformation du jugement du 30 juin 2003, dit que la requête en annulation des décisions ministérielles des 24 juillet 2002 et 12 septembre 2002 déposée devant le tribunal administratif est non fondée, et que l’actuel intimé en est à débouter, condamne l’intimé aux frais des deux instances.

Ainsi délibéré et jugé par Marion Lanners, vice-présidente Christiane Diederich-Tournay, conseiller, rapporteur Marc Feyereisen, conseiller, et lu par la vice-présidente Marion Lanners en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier la vice-présidente 4


Synthèse
Numéro d'arrêt : 16758C
Date de la décision : 02/12/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2003-12-02;16758c ?

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