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21/10/2003 | LUXEMBOURG | N°16672C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 21 octobre 2003, 16672C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro 16672C du rôle Inscrit le 4 juillet 2003

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Audience publique du 21 octobre 2003 Recours formé par … contre le ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique - Appel -

(jugement entrepris du 2 juin 2003, n° 15795 du rôle)

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Vu

l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 4 juillet 2003 par Maître Louis ...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro 16672C du rôle Inscrit le 4 juillet 2003

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Audience publique du 21 octobre 2003 Recours formé par … contre le ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique - Appel -

(jugement entrepris du 2 juin 2003, n° 15795 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 4 juillet 2003 par Maître Louis Tinti, avocat à la Cour, au nom de …, de nationalité yougoslave, demeurant à L-…, contre un jugement rendu en matière de statut de réfugié politique par le tribunal administratif à la date du 2 juin 2003, à la requête de l’actuel appelant contre deux décisions du ministre de la Justice.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 18 juillet 2003 par le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le conseiller en son rapport et Maître Ardavan Fatholahzadeh, en remplacement de Maître Louis Tinti, ainsi que le délégué du Gouvernement Guy Schleder en leurs observations orales.

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Par jugement rendu à la date du 2 juin 2003, le tribunal administratif a débouté …, de nationalité yougoslave, demeurant à L-…, de son recours en réformation d’une décision du ministre de la Justice du 10 septembre 2002 portant refus suite à une demande en bénéfice du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève, refus confirmé sur recours gracieux par décision ministérielle du 18 novembre 2002.

Maître Louis Tinti, avocat à la Cour, a déposé le 4 juillet 2003 une requête d’appel au nom de la partie préqualifiée.

L’appelant reproche aux juges de première instance d’avoir motivé leur décision de rejet notamment sur la base du rapport de l’UNHCR déposé en janvier 2003, alors qu’il n’est nullement établi qu’une amélioration de la situation des « boschniaques » dans la région dont il est originaire aurait été constatée, et qu’une telle preuve aurait dû être rapportée par l’autorité administrative.

Pour le surplus, il se réfère aux écrits déposés par lui en première instance qui établissent que ses problèmes à la base de son départ du Kosovo sont constitutifs d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève.

Dans un mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 18 juillet 2003, le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter demande la confirmation du jugement entrepris.

La Cour estime, sur le vu des faits de la cause qui sont les mêmes que ceux soumis aux premiers juges, que ceux-ci ont, dans un examen complet et minutieux de tous les éléments recueillis, apprécié ces derniers à leur juste valeur et en ont tiré des conclusions juridiques exactes.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

C’est à juste titre que les premiers juges ont estimé que l’examen des déclarations faites par le demandeur lors de son audition du 20 août 2002, telles que celles-ci ont été relatées dans les comptes rendus figurant au dossier, ensemble les moyens et arguments développés au cours des procédures gracieuse et contentieuse ainsi que les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que le demandeur ne fait pas état à suffisance de droit de raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de leurs convictions et activités politiques, ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2.

de la Convention de Genève.

Les premiers juges sont encore à confirmer dans leur argumentation lorsqu’ils rappellent que, saisie d’un recours en réformation, la juridiction administrative est appelée à examiner le bien-fondé et l’opportunité des décisions querellées à la lumière de la situation telle qu’elle se présente à l’heure actuelle dans le pays de provenance du demandeur d’asile.

En ce qui concerne cette situation actuelle, il est constant en cause que suite au départ de l’armée fédérale yougoslave et des forces de police dépendant des autorités serbes du Kosovo, une force armée internationale, agissant sous l’égide des Nations Unies, s’est installée sur ce territoire, de même qu’une administration civile, placée sous l’autorité des Nations Unies y a été mise en place.

La notion de protection de la part du pays d’origine n’implique par ailleurs pas une sécurité physique absolue des habitants contre la commission de toute acte de violence et une 2 persécution ne saurait être admise dès la commission matérielle d’un acte criminel ; il ne saurait en être autrement qu’en cas de défaut de protection, dont l’existence doit être mise suffisamment en évidence par le demandeur d’asile.

En ce qui concerne la situation des membres des minorités au Kosovo, notamment de celles des « bochniaques », s’il est vrai que leur situation générale est difficile et qu’ils sont particulièrement exposés à subir des insultes, voire d’autres discrimination ou agressions par des groupes de la population, notamment du groupe majoritaire des Albanais, elle n’est cependant pas telle que tout membre de la minorité ethnique visée serait de ce seul fait exposé à des persécutions au sens de la Convention de Genève, étant entendu qu’une crainte de persécution afférente doit reposer nécessairement sur des éléments suffisants desquels il se dégage que, considérés individuellement et concrètement, les demandeurs d’asile risquent de subir des traitements discriminatoires.

A cet égard, les premiers juges se sont référés à juste titre à une version actualisée du rapport de l’UNHCR datant de janvier 2003 sur la situation des minorités au Kosovo d’après laquelle la situation de sécurité générale des Bosniaques du Kosovo est restée stable et n’a pas été marquée par des incidents d’une violence sérieuse (« the general security situation of Kosovo Bosniaques remains stable with non incidents of serious violence »), de même qu’il est relevé dans ledit rapport que dans la période entre avril et octobre 2002 la situation des minorités au Kosovo au regard de leur sécurité a continué à s’améliorer, certes non pas de manière uniforme sur tout le territoire du Kosovo, mais de manière plus ou moins accélérée suivant les différentes régions passées sous revue, de sorte que les considérations avancées dans ledit rapport au sujet de l’organisation de retours forcés au Kosovo ne permettent pas pour autant de conclure que la situation générale des Bosniaques au Kosovo serait à l’heure actuelle grave au point que la seule appartenance à ladite minorité justifierait l’octroi du statut de réfugié.

Il suit de ce qui précède que l’appelant n’a pas fait état d’une persécution ou d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève, susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef, et que le jugement du 2 juin 2003 est à confirmer, l’acte d’appel n’étant pas fondé.

Par ces motifs, la Cour, statuant contradictoirement ;

reçoit l’acte d’appel du 4 juillet 2003 ;

le dit non fondé et en déboute ;

partant confirme le jugement entrepris du 2 juin 2003 dans toute sa teneur ;

condamne l’appelant aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé par Marion Lanners, vice-présidente Christiane Diederich-Tournay, conseiller, rapporteur 3 Marc Feyereisen, conseiller, et lu par la vice-présidente Marion Lanners en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier la vice-présidente 4


Synthèse
Numéro d'arrêt : 16672C
Date de la décision : 21/10/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2003-10-21;16672c ?

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