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08/07/2003 | LUXEMBOURG | N°16041C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 08 juillet 2003, 16041C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° du rôle 16041C inscrit le 24 mars 2003

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 8 JUILLET 2003 Recours formé par l’administration communale de la Ville d’Echternach et 115 consorts contre I. une décision du ministre de l’Environnement et une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en matière d’établissements dangereux, insalubres ou incommodes et contre II. une décision du ministre de l’Environnement en matière

de prévention et de gestion des déchets en présence de la société … et fils S. à...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° du rôle 16041C inscrit le 24 mars 2003

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 8 JUILLET 2003 Recours formé par l’administration communale de la Ville d’Echternach et 115 consorts contre I. une décision du ministre de l’Environnement et une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en matière d’établissements dangereux, insalubres ou incommodes et contre II. une décision du ministre de l’Environnement en matière de prévention et de gestion des déchets en présence de la société … et fils S. à r.l., … Appel et appel incident (jugement entrepris du 16 janvier 2003, n° 14654 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 24 février 2003 par Maître Roy Reding, avocat à la Cour au nom de 1) l’administration communale de la Ville d’Echternach, établie à la Maison communale sise à L-6401 Echternach, 2, place du Marché, B.P.22, représentée par son collège des bourgmestre et échevins, sinon par son bourgmestre, 2) la société à responsabilité limitée …, avec siège social à …, représentée par son gérant actuellement en fonctions, (et 114 particuliers…)1 contre un jugement rendu par le tribunal administratif en date du 16 janvier 2003 en matière d’établissement dangereux, insalubres ou incommodes et en matière de prévention et de gestion des déchets, à la requête des actuels appelants, contre deux décisions du ministre de l’Environnement en date du 14 janvier 2002 et une décision du ministre du Travail et de l’Emploi en date du 23 janvier 2002, en présence de la société … et fils s. à r.l., établie à L-….

Vu la signification de ladite requête d’appel par acte d’huissier Alex Mertzig à la date du 5 mars 2003 à la société à responsabilité limitée … et fils.

1 Tous les noms figurant dans l’arrêt ont été retirés Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 21 mars 2003 par le délégué du Gouvernement Guy Schleder au nom du ministre de l’Environnement et du ministre du Travail et de l’Emploi.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 4 avril 2003 par Maître James Juncker, avocat à la Cour, au nom de la société … et fils s. à r.l., préqualifiée.

Vu la signification dudit mémoire en réponse par acte d’huissier Pierre Kremmer en date du 7 avril 2003 aux actuels appelants.

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 5 mai 2003 par Maître Roy Reding, au nom des appelants.

Vu la signification dudit mémoire en réplique par acte d’huissier Guy Engel à la date du 5 mai 2003 à la société à responsabilité limitée … et fils.

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 4 juin 2003 par Maître James Junker, pour compte de la société … et fils s. à r.l..

Vu la signification dudit mémoire en duplique par acte d’huissier Pierre Kremmer en date du 5 juin 2003 aux actuels appelants.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le conseiller en son rapport et Maîtres Roy Reding et James Junker ainsi que le délégué du Gouvernement Guy Schleder en leurs observations orales.

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Par requête déposée le 5 mars 2002 au greffe du tribunal administratif, Maître Roy Reding, avocat à la Cour, au nom des requérants sub 1) à 116) ci-avant plus amplement spécifiés,a demandé la réformation des « décisions administratives suivantes, prises en faveur de la société à responsabilité limitée … et Fils s. à r.l. , établie et ayant son siège social à …, décisions prises en matière d’établissements classés:

a) l’autorisation n° 99/PE/01 prise par M. le Ministre de l’Environnement en date du 14 janvier 2002 b) l’arrêté ministériel n° 1/99/0122 pris par Monsieur le ministre de l’Environnement en date du 14 janvier 2002 c) l’autorisation d’exploitation n° 1/99/0122/51072/107 prise par M. le Ministre du Travail et de l’Emploi en date du 23 janvier 2002 ».

Par jugement rendu à la date du 16 janvier 2003, le tribunal administratif a déclaré le recours en réformation dirigé contre la décision du ministre du Travail et de l’Emploi irrecevable dans la mesure où il émane de l’administration communale de la Ville d’Echternach, a déclaré les recours en réformation recevables pour le surplus, au fond non-justifiés, partant en a débouté les demandeurs avec condamnation aux frais.

Par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 24 février 2003, Maître Roy Reding, avocat à la Cour, au nom de l’administration communale de la Ville d’Echternach et de 115 consorts préqualifiés, a relevé appel du jugement précité, sauf pour ce qui est de la décision sur la recevabilité du recours initial.

Les parties appelantes reprochent aux premiers juges d’avoir estimé que les ministres concernés peuvent délivrer des autorisations d’établissement, alors que les immeubles existants, pourtant situés en zone verte, sont construits en toute illégalité et à titre subsidiaire elles font valoir des moyens de réformation tirés de risques de nuisances sonores, d’émission de poussière, d’entreposage de moyens toxiques, et d’inondation.

Elles font valoir enfin que les mesures de contrôle prévues ne tiendraient pas compte de la meilleure technique possible tel que le requiert la loi du 10 juin 1999 et formulent, pour autant que de besoin, une offre de preuve par consultation technique.

Dans un mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 21 mars 2003, le délégué du Gouvernement Guy Schleder demande la confirmation du jugement entrepris en se référant par ailleurs à ses mémoires des 29 mai et 6 août 2002 déposés en première instance.

Dans un mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 4 avril 2003, Maître James Junker, avocat à la Cour, pour compte de la société … et Fils, relève appel incident, alors que le recours des appelants sub 4) à 116) aurait dû être déclaré irrecevable pour défaut d’intérêt, fait valoir que le moyen d’annulation n’est pas fondé puisque l’implantation des machines et immeubles visés par les autorisations litigieuses ont été autorisés suivant décision du ministère de l’Environnement du 4 janvier 2000, qui n’a jamais fait l’objet du moindre recours.

Il rencontre les différents moyens de réformation pour contester les nuisances par bruit et poussières, le risque de traitement et d’entreposage de matières toxiques et le risque d’inondation, et toute violation de la loi du 10 juin 1999, s’oppose à l’octroi d’une indemnité de procédure aux demandeurs et demande la condamnation des appelants solidairement à une indemnité de procédure aux demandeurs de 1.500.- € pour chaque instance.

Maître Roy Reding, pour compte des appelants, a répliqué en date du 5 mai 2003, pour réitérer leur requête initiale ainsi que leur mémoire en réplique pris en première instance et rétorquer que, même à supposer que toutes les constructions aient été construites en parfaite légalité -quod non – les autorisations ministérielles auraient dû être refusées, alors que l’établissement ne se situe pas dans une zone prévue à cette fin, et que la société … n’a actuellement aucunement réalisé les différentes conditions d’exploitation.

Il demande enfin de déclarer l’appel incident non fondé.

Maître James Junker, pour compte de la société … et Fils, a dupliqué en date du 4 juin 2003, pour réitérér que la décharge de matériaux inertes répond à un but d’utilité publique, de sorte que son implantation, même en zone verte, est légale, que les appelants font état de risques hypothétiques et que leur offre de preuve n’est pas pertinente.

L’acte d’appel est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Quant à l’appel incident La partie intimée soulève un moyen d’irrecevabilité basé sur le défaut d’un intérêt personnel direct à agir des appelants sub 4 à 116 et relève appel incident sur ce point.

Concernant la recevabilité du recours introduit par un certain nombre de personnes privées dont les biens immobiliers sont situés dans les environs de l’exploitation litigieuse, la condition d’un intérêt direct implique que la recevabilité d’un recours dirigé contre un permis pour l’installation et l’exploitation d’un établissement insalubre ou incommode est conditionnée par une proximité suffisante, laquelle doit être examinée au regard des circonstances du cas d’espèce. Il convient d’ajouter que la notion de « proximité suffisante » des propriétaires ou habitants par rapport à une installation insalubre ou incommode est, entre autres, fonction de l’envergure de l’installation en cause et de l’importance des nuisances ou risques de nuisances qui peuvent en émaner.

En l’espèce, les premiers juges ont justement apprécié, sur base des indications relatives au domicile de chaque requérant, et vu l’envergure certaine et incontestable de l’exploitation litigieuse, que la proximité de voisinage des requérants, voisins proches, voire habitants de la Ville d’Echternach, doit être considérée comme suffisante dans le chef de chacun d’eux pour qu’ils puissent légitimement craindre les inconvénients résultant pour eux de l’installation en cause, et avoir un intérêt personnel suffisant à voir respecter les règles applicables en matière d’établissements classés.

Le moyen d’irrecevabilité soulevé laissant d’être fondé, doit être écarté, et l’appel incident est à rejeter comme non fondé.

Quant au fond Le 29 mars 1999, la société … et fils S. à r.l., ci-après dénommée la « société … », fit introduire auprès du ministre de l’Environnement une demande tendant à obtenir l’autorisation de pouvoir exploiter une « installation de recyclage de déchets inertes (sans déchets de chantier) non contaminés » sur des terrains inscrits au cadastre de la commune d’Echternach, section A, dite des Bois, au lieu-dit « In der Alf » sous le numéro cadastral 1777/5112, section B, dite d’Echternach, au lieu-dit « hinterste Alwerberge », sous les numéros cadastraux 2535/695, 2632/772, 2633, 2634, et section C, dite « de la Sainte Croix », au lieu-dit « in der Osweilerbach », sous les numéros cadastraux …, … et au cadastre de la commune de Rosport section F, dite « Osweiler-Est », au lieu-dit « am Kiesel », sous les numéros ….

Ladite demande porta sur les éléments suivants : «  entreposage de 35.000 m3, au maximum, de déchets inertes non contaminés en attente d’être recyclés, sur deux surfaces d’approximativement 1500 m2 (partie nord) et 2600 m2 (partie est) ;

- deux (2) pelles mécaniques ;

- un (1) camion ;

 entreposage de 20.000 m3, au maximum, de déchets recyclés, sur deux surfaces d’approximativement 1500 m2 (partie nord) et 2600 m2 (partie est) ;

 entreposage d’environ 75.000 m3, au maximum, de matières minérales (sable, graviers, pierres taillées, etc.) ;

 une installation mobile de concassage d’une capacité maximale de 250 Mg/h ;

 une installation mobile de criblage d’une capacité maximale de 150 Mg/h ;

 un bâtiment administratif comprenant les installations sanitaires et sociales ;

 diverses autres installations telles que :

- une bascule d’une capacité de 40.000 kg ;

- un atelier de réparation d’une superficie d’environ 300 m2 ;

- entreposage de 4.740 litres de matières dangereuses au maximum ;

- un transformateur, type sec, d’une puissance électrique de 100 kVA ;

- un parking pour visiteurs ».

Par courrier du 26 novembre 2001 à l’adresse du ministre de l’Environnement, la société … diminua l’envergure de sa prédite demande en ce sens qu’elle ne sollicita plus qu’une capacité totale des dépôts à ciel ouvert servant au stockage de déchets inertes de 20.000 m3 (au lieu d’une capacité de 35.000 m3 initialement sollicitée) et elle réduisit sa demande relativement à la capacité totale des dépôts à ciel ouvert servant au stockage de matériaux de construction (sable, gravier et pavés), de produits intermédiaires et produits finis provenant du recyclage de déchets inertes à 40.000 m3 (au lieu d’une capacité de 75.000 m3 initialement sollicitée).

Par arrêté du 14 janvier 2002, le ministre de l’Environnement, agissant dans le cadre de la loi modifiée du 17 juin 1994 relative à la prévention et à la gestion des déchets, délivra une autorisation assortie d’un certain nombre de conditions d’aménagement et d’exploitation, y plus amplement spécifiées.

Faisant suite à une demande afférente du 29 mars 1999, telle que modifiée par la suite, le même ministre, agissant dans le cadre de la loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés, par arrêté séparé du 14 janvier 2002, autorisa, sous les conditions y plus amplement spécifiées, les éléments repris dans ladite autorisation d’exploitation.

Par arrêté du 23 janvier 2002, le ministre du Travail et de l’Emploi, agissant dans le cadre de la loi précitée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés et faisant suite à une demande afférente du 29 mars 1999 autorisa, sous les conditions d’exploitation y plus amplement spécifiées, la construction, l’installation et l’exploitation d’un stockage intermédiaire et de recyclage de déchets inertes.

Les appelants soulèvent en premier lieu un moyen d’annulation des décisions entreprises, et se rattachant à la matière des établissements classés, décisions entreprises au motif que l’article 17 paragraphe 2 de la loi précitée du 10 juin 1999 n’aurait pas été respecté et reprochent aux premiers juges d’avoir interprété la loi dans un sens en totale contradiction avec son esprit et son but et d’avoir décidé que la deuxième condition posée par l’article 17.2 de la loi du 10 juin 1999 relative à des immeubles existants « dûment autorisés » n’étant pas établie, les autorités ministérielles n’étaient pas appelées à se prononcer sur la question de savoir si l’établissement projeté, en ce qui concerne son implantation, répond aux fins prévisées de la zone dont il relève.

Les appelants réitèrent que les constructions existantes sur le site litigieux, dans lesquelles l’établissement litigieux serait installé, n’auraient jamais fait l’objet d’une autorisation de construire, que toute ces constructions auraient été érigées dans l’illégalité et que la zone d’implantation, zone classée « zone verte », ne permettrait pas l’implantation de la décharge envisagée.

Il ne ressort pas des éléments du dossier que lesdits immeubles aient été construits sous le couvert d’un permis de construire, elles n’ont donc pas de caractère légal.

Ce préalable étant posé, la Cour en tire des conclusions divergentes de celles du tribunal et estime, qu’à cause de l’inexistence légale de ces bâtiments, on se trouve dans le cas d’espèce prévu à l’article 17.2 de loi du 10 juin 1999 d’un établissement projeté dans un immeuble à construire et qu’il y a lieu de vérifier si l’établissement projeté se situe dans une zone prévue à ces fins en conformité avec la loi du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes, ou avec un plan d’aménagement établi en exécution de la loi du 20 mars 1974 concernant l’aménagement général du territoire ou avec la loi modifiée du 11 août 1982 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles.

Il n’est pas contesté que le terrain destiné à recevoir l’établissement contesté est situé, d’après le plan d’aménagement général de la Ville d’Echternach (article 10/1) en zone extérieure au périmètre d’agglomération, principalement affectée aux exploitations agricoles.

Les parties appelantes font valoir que les dispositions restrictives du plan d’aménagement général stipulant en ses articles 10/2 que, dans la zone extérieure au périmètre d’agglomération sont interdites toutes les constructions à l’exception de celles qui sont destinées à l’exploitation agricole, sauf des constructions isolées sur des fonds de 15 ares au moins, ne portant pas atteinte au caractère du paysage et à la condition expresse de l’existence d’un plan d’aménagement particulier dûment approuvé, s’opposent à ce que des activités visées par l’article 2 alinéa 2 de la loi du 11 août 1982 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, définissant les zones vertes, pourraient y être autorisées.

En application de l’article 2, alinéa 2 de la loi du 11 août 1982 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, les parties du territoire d’une commune classées par un plan d’aménagement général établi sur base de la loi du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes en dehors des zones constructibles telles que définies à l’article 1ier de cette loi peuvent recevoir « des constructions servant à l’exploitation agricole, jardinière, maraîchère, sylvicole, apicole ou cynégétique, ou à un but d’utilité publique ».

Les dispositions de la loi de 1982 qui confèrent un pouvoir d’appréciation et de décision au ministre de l’Environnement ne sauraient empêcher en principe que le pouvoir communal puisse être investi, sur base de textes régissant la matière communale, de pouvoirs propres et distincts.

En effet, les pouvoirs gouvernemental et communal sont distincts et autonomes et aucun principe n’empêche que telle initiative ou activité puisse être sujette à des décisions des deux autorités qui statuent chacune dans le cadre des lois et règlements qui lui confèrent compétence.

Il s’ensuit que la décision que le ministre de l’Environnement a été amenée à prendre par rapport à la décharge litigieuse dans le cadre de l’application de la loi sur la protection de la nature et des ressources naturelles est indépendante par rapport à la partie écrite d’un plan d’aménagement général dressé en application de la loi du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes dont l’applicabilité couvre la totalité des communes du pays. (Cour administrative, 2 juillet 2002, n° 14623C du rôle, Administration communale de Strassen c/ministre de l’Environnement et du Travail et de l’Emploi, en présence de la société anonyme Recyma) Il n’est par ailleurs exclu par aucun texte que le conseil communal qui définit la délimitation en zones de l’ensemble du territoire communal sous l’approbation des ministres de l’Intérieur et de l’Environnement, ne prévoie une zone rurale qui est destinée à l’exploitation agricole, forestière, touristique ou sportive ainsi que des dispositions permettant des exceptions au principe de non-constructibilité des terrains situés dans cette zone et d’en fixer les critères auxquels le bourgmestre doit se conformer lors de la décision sur une demande de permis de construire. (Cour administrative, 29 juin 2000, N° 11802C du rôle, administration communale de Mertzig/ Rausch), en agissant dans la sphère de sa compétence propre et concurrente et en application de ses lois et règlements spécifiques.

Au regard de ce qui précède, les ministres de l’Environnement et du Travail et de l’Emploi ont respecté l’article 17.2 de la loi du 10 juin 1999 précité et le moyen afférent soulevé en ordre principal par les parties appelantes est à écarter comme non fondé.

En ordre subsidiaire, les appelantes soulèvent deux moyens de réformation tirés des risques de nuisances acoustiques et de l’émission de poussières, l’installation et l’exploitation de l’établissement sous examen étant inconciliable avec leurs intérêts propres en leur qualité de voisins confrontés aux émanations de bruits et de poussières.

La Cour relève cependant que les autorisations ministérielles fixent de façon précise et détaillée un ensemble de conditions d’exploitation et des mesures contraignantes en vue de garantir la salubrité et la commodité par rapport au public et au voisinage, que l’article 18 de la loi précitée du 10 juin 1999 prévoit que l’autorisation d’exploitation peut être retirée par décision motivée de l’autorité qui l’a délivrée, si l’exploitant n’observe pas ces conditions ou s’il refuse de se soumettre à des conditions d’exploitation nouvelles que l’autorité compétente peut lui imposer en tout temps et qu’enfin, les autorisations ministérielles prévoient expressément, outre des mesures de contrôle, que les ministres compétents peuvent décider ultérieurement des restrictions supplémentaires, si nécessaire.

Il s’ensuit que les deux moyens de réformation sont à écarter.

Concernant les moyens de réformation basés sur le risque de traitement et d’entreposage de matières toxiques et le risque d’inondation, la Cour fait sienne la motivation des premiers juges pour estimer que les parties appelantes n’ont pas établi à suffisance de droit que les permis ministériels seraient insuffisants pour garantir tant les objectifs prévus en matière d’établissements classés que ceux prévus en matière de prévention et de gestion des déchets, et cela au vu des différentes mesures de contrôle prévues.

Quant aux risques d’inondation et de pollution, des mesures adéquates ont été prévues dans l’arrêté pris par le ministre de l’Environnement le 14 janvier 2002, en particulier le stockage intermédiaire des déchets inertes destinées au recyclage devra être fait dans une zone qui n’est pas susceptible d’être inondée en cas de débordement du ruisseau « Osweiler-Bach », ou en cas de fortes pluies.

Les susdits moyens de réformation laissent ainsi d’être fondés et sont à écarter.

Le dernier moyen de réformation est basé sur ce que les autorisations ne tiennent pas compte des meilleurs techniques possibles et violeraient la directive 96/61/CEE.

Cependant, l’établissement litigieux ne tombe pas dans le champ d’application de la prédite directive, et les études versées en cause prouvent à suffisance qu’il tient compte des meilleurs techniques disponibles à l’heure actuelle, et de ce fait l’offre de preuve par consultation technique, formulée d’ailleurs d’une manière imprécise par les appelants, est à écarter comme non pertinente.

Comme les appelants ne soulèvent aucun autre point spécifique concernant l’autorisation délivrée par le ministre du Travail et de l’Emploi, ni concernant celle délivrée par le ministre de l’Environnement dans le cadre de la loi du 17 juin 1994, l’appel dans la mesure où il est dirigé contre ces deux autorisations ministérielles est à rejeter, tout comme celui dirigé contre l’autorisation délivrée par le ministre de l’Environnement en matière d’établissements classés, les moyens invoqués n’étant pas pertinents, et le jugement entrepris est partant à confirmer, par substitution des motifs.

Au vu de l’issue du litige, il y a lieu de confirmer le refus d’allocation de deux indemnités de procédure sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, l’une à charge de l’Etat, l’autre à charge de la société …, chacune d’un montant de 2.500 €.

En ce qui concerne la demande reconventionnelle de la société … en allocation d’une indemnité de procédure de 1.500 € à l’encontre des parties appelantes pour chaque instance, elle est à rejeter également, les conditions légales n’étant pas remplies en l’espèce.

Par ces motifs et ceux non contraires des premiers juges la Cour, statuant contradictoirement ;

reçoit en la forme l’acte d’appel en date du 24 février 2003, ainsi que l’appel incident relevé par la société … ;

dit l’appel principal ainsi que l’appel incident non fondés et en déboute ;

partant confirme le jugement entrepris du 16 janvier 2003 par substitution partielle des motifs;

rejette l’offre de preuve par consultation technique formulée par les parties appelantes ;

dit qu’il n’y a pas lieu à allocation d’une indemnité de procédure ;

condamne les parties appelantes aux frais d’instance.

Ainsi délibéré et jugé par Marion Lanners, vice-présidente Christiane Diederich-Tournay, conseiller, rapporteur Marc Feyereisen, conseiller, et lu par la vice-présidente Marion Lanners en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier la vice-présidente 9


Synthèse
Numéro d'arrêt : 16041C
Date de la décision : 08/07/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2003-07-08;16041c ?

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