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31/05/2003 | LUXEMBOURG | N°16030C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 00 juin 2003, 16030C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 16030 C Inscrit le 20 février 2003 ———————————————————————————————————— AUDIENCE PUBLIQUE DU JEUDI 5 JUIN 2003 Recours formé par … contre le ministre de la Justice en matière de révision (jugement entrepris du 15 janvier 2003)  Vu la requête déposée le 20 février 2003 par laquelle Maître Claude Derbal, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des

avocats à Luxembourg, a relevé appel au nom de …, né le … à Roeselare (Belgique), demeurant à L-…, contre le ministre de la Justice d’un jugement rendu le 15 janvier 2003 par le tribunal administra...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 16030 C Inscrit le 20 février 2003 ———————————————————————————————————— AUDIENCE PUBLIQUE DU JEUDI 5 JUIN 2003 Recours formé par … contre le ministre de la Justice en matière de révision (jugement entrepris du 15 janvier 2003)  Vu la requête déposée le 20 février 2003 par laquelle Maître Claude Derbal, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, a relevé appel au nom de …, né le … à Roeselare (Belgique), demeurant à L-…, contre le ministre de la Justice d’un jugement rendu le 15 janvier 2003 par le tribunal administratif dans la cause inscrite sous le numéro 15392 du rôle;

vu le mémoire en réponse déposé le 12 mars 2003 par le délégué du Gouvernement;

vu le mémoire en réplique déposé le 14 avril 2003 par Maître Claude Derbal ;

vu les pièces régulièrement versées et le jugement entrepris;

ouï le premier conseiller en son rapport ainsi que Maître Claude Derbal et le Délégué du gouvernement, Monsieur Jean-Paul Reiter, en leurs plaidoiries.

 Par requête déposée au greffe de la Cour le 20 février 2003, … a déclaré relever appel d’un jugement du tribunal administratif du 15 janvier 2003 qui a déclaré non justifié le recours en annulation par lui introduit à l’encontre d’une décision du ministre de la Justice en matière de procédure de révision.

La requête en révision soumise au ministre de la Justice sur base des articles 443 et suivants du code d’instruction criminelle tendait à voir considérer une analyse d’une prise de sang opérée à la demande de l’intéressé comme pièce inconnue lors des débats, de nature à établir l’innocence totale ou partielle du condamné.

Le ministre, suivant l’avis de la commission prévue à l’article 444, alinéa 3 du code d’instruction criminelle, a estimé que si la pièce invoquée était bien inconnue à la juridiction qui a prononcé la condamnation, elle n’était, en raison du grand laps de temps écoulé entre les faits et la prise de sang, pas de nature à établir l’innocence totale ou partielle de l’intéressé.

Le jugement dont appel, tout en écartant un moyen tiré de l’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme a rejeté le recours en annulation dirigé contre la décision du ministre rendu le 20 février 2002 et, sur recours gracieux, le 21 juin 2002.

L’appelant conclut à une erreur d’appréciation des faits gisant à la base de la décision attaquée alors que l’heure retenue comme étant celle du prélèvement de l’échantillon sanguin serait en réalité celle de son analyse.

L’appelant fait encore plaider qu’ au moment du fait, il aurait été dans un état d’altération de ses facultés mentales qui auraient nécessité son internement à l’Hôpital Neuropsychiatrique de l’Etat, les pièces afférentes, non communiquées, constituant encore des éléments pertinents au niveau de la procédure de révision.

Le délégué du Gouvernement a déposé un mémoire en réponse le 12 mars.

Il est conclu à la confirmation du jugement.

Le délégué du Gouvernement soutient que l’écoulement d’un laps de temps entre l’examen de l’haleine et la prise de sang résulterait du rapport de la police. Il conclut à voir écarter des débats les moyens tirés de l’absence de discernement dans le chef de l’appelant au moment des faits, ces éléments n’ayant pas été invoqués ni soumis au ministre au moment où il a été appelé à prendre la décision litigieuse.

L’appelant a déposé un mémoire en réplique le 14 avril 2003.

L’appelant reproche au ministre de la Justice de ne pas avoir, au voeu de l’article 444 du code d’instruction criminelle, « fait procéder à toutes recherches et vérifications utiles » avant d’avoir pris l’avis de la commission et conclut à l’annulation de la décision de refus d’engager la procédure de révision avec renvoi devant le ministre pour qu’il procède de la manière prévue par la loi.

Considérant que l’appel est régulier quant à la forme et au délai ;

Qu’il est partant recevable ;

Considérant que le jugement dont appel est critiqué en premier lieu pour ne pas avoir accueilli le moyen d’annulation de la décision ministérielle déférée en ce qu’elle n’aurait pas reconnu le caractère pertinent à la pièce invoquée en ne la retenant pas comme étant « de nature à établir l’innocence totale ou partielle du condamné », comme l’exige le point 4 de l’article 443 du code d’instruction criminelle ;

Considérant que le jugement, tout en retenant que la pièce invoquée a été inconnue du tribunal correctionnel au moment des débats, a jugé qu’en raison de la distance dans le temps, plus de 6 heures s’étant écoulées entre les faits gisant à la base de la poursuite et la date de la prise de sang, qu’elle « n’est point de nature à établir l’innocence totale ou partielle du condamné, peu importe à cet égard que cette prise de sang eut été effectuée au titre de la contre-preuve légale réservée à l’intéressé ou dans le cadre de sa procédure d’internement » ;

Considérant qu’il résulte des éléments du dossier soumis à l’examen de la Cour que sur base du procès-verbal n° 7656 de la police de Luxembourg du 24 décembre 1999, l’appelant a fait l’objet d’une poursuite pénale et que par jugement du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg siégeant en matière correctionnelle, il a été condamné pour avoir circulé avec un taux d’alcoolémie de 0,82 mg/l d’air expiré ;

Que le tribunal a retenu que dans le chef du prévenu, il n’y a pas eu de cause d’irresponsabilité pénale, le fait que l’intéressé aurait pu constituer, le jour des faits, un danger pour soi-même et pour autrui n’ayant pas été retenu pour valoir cause de non-responsabilité au regard du droit pénal ;

Considérant qu’il résulte du procès-verbal précité que l’appelant, après que le résultat de l’analyse de l’air expiré lui avait été communiqué, a été informé de son droit de se soumettre à un prélèvement sanguin à titre de contre-preuve ;

Considérant que l’appelant se réfère, à l’appui de sa demande en révision à une pièce établie par le laboratoire de la clinique Ste Thérèse à Luxembourg de laquelle il résulte qu’une analyse par « screening » en vue de déceler la présence de médicaments et d’alcool a révélé une présence d’alcool de 114 mg %, ladite analyse précisant que la demande en a été faite le 24 décembre 1999 à 21.58 heures ;

Considérant que les modalités de la prise de sang destinée à constituer la contre-preuve dans les cas de contrôle d’alcoolémie à l’occasion de la conduite d’un véhicule sur la voie publique se trouvent réglés par le point C de l’article 88 du règlement grand-ducal modifié du 23 novembre 1955 portant réglementation de la circulation sur toutes les voies publiques ;

Considérant qu’il ne résulte ni du procès-verbal, ni d’aucune autre pièce du dossier que la prise de sang a été effectuée suivant les modalités prévues dans ce texte et que par ailleurs son analyse a été faite au laboratoire d’une clinique privée et non, comme l’exige le texte du règlement, au Laboratoire de l’Etat ;

Considérant que dans ces conditions, la prise de sang et le résultat de son analyse ne sauraient valoir de preuve comme contre-preuve du résultat obtenu par l’éthylomètre ;

Considérant néanmoins, la preuve étant libre en droit pénal, le résultat de l’examen sanguin tel qu’il a été effectué aurait pu être susceptible de retenir l’attention de la juridiction ;

Considérant que les textes réglant la matière de la révision ne permettant pas d’écarter une pièce nouvelle au motif qu’il aurait appartenu à la personne condamnée de la soumettre en temps utile à la juridiction, la Cour est amenée à suivre l’avis de la commission instituée par l’article 444 du code d’instruction criminelle et à sa suite la décision du ministre et le jugement dont appel en ce qu’ils ont reconnu à la pièce versée le caractère de « pièce inconnue lors des débats » propre à justifier la révision au cas où elle serait « de nature à établir l’innocence totale ou partielle du condamné » ;

Considérant que le jugement dont appel est critiqué en ce qu’il a dénié ce dernier caractère à la pièce visée au motif qu’un laps de temps trop important se serait écoulé entre le fait reconnu punissable et le prélèvement sanguin ;

Considérant qu’il résulte du procès-verbal de la police que l’examen de la haleine expirée a été effectuée à 15.39 heures alors que l’analyse sanguine est datée du même jour à 21.58 heures ;

Considérant que l’intimé soutient que la date indiquée sur la pièce par lui versée contiendrait l’heure, non de la prise de sang, mais de son analyse, ce en quoi le ministre et le tribunal auraient mal apprécié le dossier ;

Considérant que la procédure légale de prise de sang régie par le texte ci-

dessus cité ci-avant n’ayant pas été suivie, il appartient à l’appelant de rapporter la preuve de ses soutènements ;

Que l’analyse du sang produite en cause mentionnant comme seule référence :

« demande du 24 décembre 1999 – 21.58H » aucun élément du dossier ne permet de conclure à une heure autre quelconque pour situer la prise de sang, les assertions de l’appelant restant dès lors à défaut de preuve ou d’offre de preuve contraire, à l’état de simple allégation ;

Considérant que le moyen tiré d’une altération de ses facultés mentales au moment des faits desquelles il entend faire découler un moyen de révision ne saurait davantage être retenu, alors qu’il résulte du jugement intervenu que le tribunal a expressément rejeté un moyen afférent, ce qui implique que la circonstance était alléguée au moment des débats et qu’elle ne saurait, dans le cadre de la procédure de révision, être retenue comme fait nouveau au sens de l’article 443, 4° du CIC ;

Considérant que l’appelant reproche encore au ministre de ne pas avoir, comme l’exigerait l’article 444, 3°, 3ème alinéa du code « fait procéder à toutes recherches et vérifications utiles » avant d’avoir pris l’avis de la commission ;

Considérant que ce moyen est à rejeter alors qu’il résulte de l’examen du dossier que le ministre et la commission ont eu à leur disposition tous les éléments actuellement soumis à la Cour et que l’appelant lui-même reste en défaut de préciser quels éléments supplémentaires il y aurait eu lieu de rechercher ;

Considérant qu’il résulte des développements qui précèdent que l’appel n’est pas fondé et qu’il échet de confirmer le jugement intervenu.

Par ces motifs et ceux non contraires des premiers juges la Cour, statuant contradictoirement ;

reçoit l’appel en la forme ;

le déclare non fondé ;

partant confirme le jugement dont appel ;

met les frais de l’instance d’appel à charge de l’appelant.

Ainsi jugé par Georges Kill, président Jean-Mathias Goerens, premier conseiller, rapporteur Marc Feyereisen, conseiller et lu par le président Georges Kill en audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour.

le greffier en chef le président 6


Synthèse
Numéro d'arrêt : 16030C
Date de la décision : 31/05/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 21/10/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2003-06-00;16030c ?

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