La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/10/2002 | LUXEMBOURG | N°14845C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 08 octobre 2002, 14845C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 14845 C Inscrit le 29 avril 2002 Audience publique du 8 octobre 2002 Recours formé par … contre le Gouvernement en Conseil en matière de changement d’affectation Appel (Jugement entrepris du 18 mars 2002, numéros 12086 et 13012 du rôle) Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 29 avril 2002 par Maître Monique Watgen, avocate à la Cour, au nom de …, fonctionnaire de l’Etat, demeurant à L- … , contre un jugement rendu en matière de changement d’affectation par le tribunal administrat

if à la date du 18 mars 2002, à la requête de … contre des décisions du Gou...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 14845 C Inscrit le 29 avril 2002 Audience publique du 8 octobre 2002 Recours formé par … contre le Gouvernement en Conseil en matière de changement d’affectation Appel (Jugement entrepris du 18 mars 2002, numéros 12086 et 13012 du rôle) Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 29 avril 2002 par Maître Monique Watgen, avocate à la Cour, au nom de …, fonctionnaire de l’Etat, demeurant à L- … , contre un jugement rendu en matière de changement d’affectation par le tribunal administratif à la date du 18 mars 2002, à la requête de … contre des décisions du Gouvernement en Conseil.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 29 mai 2002 par le délégué du Gouvernement Guy Schleder pour compte du ministre de la Fonction Publique et de la Réforme Administrative.

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 1er juillet 2002 par Maître Monique Watgen, avocate à la Cour, au nom de …, préqualifié.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le conseiller en son rapport, ainsi que Maître Monique Watgen et le délégué du Gouvernement Guy Schleder en leurs observations orales.

-----------------------------------------------------------------------------------------------------------

I.

Par requête inscrite sous le numéro 12086 du rôle, déposée le 30 juin 2000 au greffe du tribunal administratif, Maître Roger Nothar, avocat à la Cour, au nom de …, fonctionnaire de l’Etat, demeurant à L- …, a demandé principalement la réformation et subsidiairement l’annulation d’un arrêté du Gouvernement en conseil du 17 décembre 1999 portant sa réaffectation au ministère des Affaires Etrangères, du Commerce Extérieur, de la Coopération et de la Défense, ainsi que d’une décision implicite du Gouvernement en conseil refusant d’annuler ledit arrêté du 17 décembre 1999 et de proposer, sur la base de l’article 6.4. alinéa 3 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, à l’autorité investie du pouvoir de nomination de procéder à un changement d’administration et de le nommer dans l’administration formée par les fonctionnaires du cadre supérieur du ministère des Affaires Etrangères, du Commerce Extérieur, de la Coopération et de la Défense.

II.

Par la requête inscrite sous le numéro 13012 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 6 mars 2001, Maître Jean-Paul Kill, au nom de …, préqualifié, a demandé principalement la réformation et subsidiairement l’annulation d’une décision du Gouvernement en conseil du 6 octobre 2000 concernant son maintien dans la carrière de l’attaché du Gouvernement au ministère des Affaires Etrangères, du Commerce Extérieur, de la Coopération et de la Défense et confirmant l’arrêté du Gouvernement en conseil du 17 décembre 1999 ayant opéré sa réaffectation audit ministère, ainsi que, en ordre subsidiaire, contre ledit arrêté du Gouvernement en conseil du 17 décembre 1999.

Par jugement rendu contradictoirement à la date du 18 mars 2002, le tribunal a joint les deux recours, a reçu les recours en annulation en la forme, au fond les a dits non justifiés et en a débouté le demandeur avec condamnation aux frais.

Par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 29 avril 2002, Maître Monique Watgen, avocate à la Cour, au nom de … préqualifié, a relevé appel du prédit jugement.

L’appelant reproche aux premiers juges d’avoir dit non fondé le moyen de nullité tiré de la violation des articles 6.5 de la loi modifiée du 16 avril 1979 portant statut général des fonctionnaires de l’Etat et 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes et d’avoir omis de statuer au fond sur les moyens de nullité tiré de la violation des principes d’égalité devant la loi, d’égalité de traitement, ainsi que du principe de non-

discrimination.

Il reproche également aux premiers juges une limitation non justifiée du contrôle de la légalité des décisions déférées du Gouvernement en conseil, d’avoir omis de statuer sur le moyen d’excès de pouvoir consistant dans la violation du principe de proportionnalité et du droit de la confiance légitime en l’administration et conclut en demandant la réformation du jugement entrepris.

Dans un mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 29 mai 2002, le délégué du Gouvernement Guy Schleder a demandé la confirmation du jugement de première instance en faisant valoir que les droits du requérant n’ont pas été lésés et qu’il ne remplit pas les conditions pour être intégré au corps diplomatique.

Maître Monique Watgen, au nom de …, a répliqué en date du 1er juillet 2002 en répondant point par point à l’argumentation développée par le délégué du Gouvernement dans son mémoire en réponse ainsi que dans ses mémoires déposés en première instance, et en approfondissant les moyens présentés dans l’acte d’appel, et elle demande une indemnité de procédure de 2.000 euros.

Le délégué du Gouvernement Guy Schleder a dupliqué en date du 12 août 2002 pour contester toute violation de la procédure, en particulier de l’article 6 paragraphe 5 de la loi modifiée du 16 avril 1979 précitée et que l’appelant ait été réaffecté à un emploi inférieur en rang.

L’acte d’appel est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi. Les deux feuillets non datés et non signés, déposés en personne par … au greffe de la Cour administrative le 1er juillet 2002, sont à écarter, alors que seuls les avocats à la Cour ont le droit d’accomplir les actes d’instruction et de procédure devant la Cour administrative.

Les deux recours introduit en première instance portent à la base sur la même décision de réaffectation de l’appelant qui, après avoir été affecté à l’ancien ministère de la Force publique et à la suite de la constitution du nouveau Gouvernement en 1999, fut « réaffecté au ministère des Affaires Etrangères, du Commerce Extérieur, de la Coopération et de la Défense », ci-après appelé « le ministre des Affaires étrangères », par arrêté du Gouvernement en conseil du 17 décembre 1999, ceci au vu de l’arrêté grand-ducal du 11 août 1999 portant constitution des ministères, de l’article 6, alinéas 2 et 3 de la loi modifiée du 31 mars 1958 portant organisation des cadres de l’administration gouvernementale, ainsi que de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat.

L’appelant fait valoir un premier moyen de nullité tiré de la violation de l’article 6.5. de la loi modifiée du 16 avril 1979 portant statut général des fonctionnaires de l’Etat et de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, en ce qu’il n’aurait pas été entendu en ses observations préalablement à la prise de la décision déférée, au motif qu’il aurait à suffisance de droit pris position par rapport à la décision le visant au moyen d’une note de plusieurs pages, de sorte que ce fait dénote une connaissance de sa part de la décision envisagée, alors que cependant il n’a pas pu exposer contradictoirement ses contestations quant à la décision à prendre le concernant.

C’est à juste titre que les premiers juges ont relevé que les droits de l’appelant n’ont pas été lésés, que la finalité des garanties procédurales consacrées par l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 ont été respectées alors qu’il se dégage clairement de la note adressée au ministre Charles Goerens le 16 décembre 1999, signée conjointement par Fernand Kirch et …, que l’appelant avait connaissance du fait que le Gouvernement en conseil se proposait de décider le lendemain son changement d’affectation et qu’il a pu faire valoir de manière détaillée et circonstanciée son point de vue par écrit par rapport à la décision projetée.

De plus l’appelant savait, à partir du moment où l’arrêté grand-ducal du 11 août 1999 portant constitution des ministères est entrée en vigueur, que le ministère de la Force publique n’existait plus sous cette dénomination et que les compétences relatives à la défense et à l’armée avaient été transférées au ministère de la défense nouvellement créée, suite à une organisation par le Grand-Duc de son Gouvernement.

Le moyen de l’appelant basé sur le non-respect de ses droits de la défense est non fondé.

L’appelant fait valoir ensuite un moyen tendant à la violation du principe de l’égalité devant la loi, de l’égalité de traitement et de la non-discrimination, ainsi qu’à la violation de l’article 6.5 alinéa 1er du statut général en ce que le Gouvernement en Conseil par arrêté du 17 décembre 1999 lui aurait attribué un emploi inférieur en rang par rapport à celui qu’il occupait préalablement.

Ce moyen laisse d’être fondé, alors que l’appelant a conservé son titre d’attaché de Gouvernement premier en rang et tout en ayant été affecté à un autre département ministériel, il est resté nommé dans la même fonction au sein de l’administration gouvernementale. Son nouvel emploi ne peut être qualifié d’inférieur en rang ou en traitement.

Les premiers juges ont à bon droit relevé que l’arrêté du Gouvernement en Conseil entrepris n’ayant pas pour objet de refuser de faire droit à une demande en octroi du statut diplomatique, il n’y a pas lieu d’examiner la question de la justification d’un éventuel refus du statut diplomatique à l’appelant, ni la question d’une éventuelle inégalité de traitement.

Enfin, d’autres fonctionnaires de la carrière supérieure travaillent au ministère des Affaires Etrangères ou à la Représentation permanente auprès de l’UE sans pour autant faire partie du corps diplomatique.

Il se dégage du dossier versé en cause que le contrôle de légalité à effectuer en l’espèce par rapport à l’arrêté du Gouvernement en Conseil du 17 décembre 1999 est circonscrit à la vérification du respect des conditions légales applicables en matière de changement d’affectation d’un fonctionnaire de la carrière supérieure de l’administration gouvernementale à l’intérieur de cette même administration, le Gouvernement devant être considéré comme une seule administration.

L’appelant reproche aux premiers juges de n’avoir pas vérifié l’exactitude matérielle des faits pris en considération par l’arrêté du Gouvernement en conseil du 17 décembre 1999, ni le caractère légal et réel des motifs invoqués à l’appui de la décision administrative du 6 octobre 2000, cette dernière étant à qualifier de réponse à un recours gracieux exercé par le mandataire de l’appelant en date du 31 décembre 1999.

Même dans le cadre d’un recours en annulation il est vrai que lors de l’examen de l’exactitude des faits invoqués à l’appui d’une décision, de la pertinence des motifs dûment établis et du contrôle de cette décision sous l’aspect de la compétence, de l’excès ou du détournement de pouvoir, cette vérification peut s’étendre le cas échéant au caractère proportionnel de la mesure prise par rapport aux faits établis.

Cette faculté est cependant limitée aux cas exceptionnels où une flagrante disproportion des moyens laisse entrevoir un usage excessif du pouvoir par l’autorité qui a pris la décision, voire un détournement du même pouvoir par cette autorité.

Elle ne saurait avoir pour but de priver le ministre, ni l’autorité, qui doit assumer la responsabilité politique de la décision, de son pouvoir d’appréciation sur la nature et la gravité de la mesure qu’il lui incombe de prendre, si celle-ci est par ailleurs légale et n’est pas sujette à un recours en réformation.

Etant établi en l’espèce que le motif invoqué par le Gouvernement en Conseil est formellement légal, il lui appartient de peser en définitive la valeur des intérêts publics et privés en discussion et de prendre sa décision en conséquence en assumant à l’égard des intéressés, à l’égard des organes politiques qui ont pour mission de contrôler son activité et à l’égard de l’opinion publique la responsabilité de cette décision (cf. : C.A. 4 mars 1997 ; n° 9517 C du rôle).

L’appelant ne peut donc pas en l’espèce invoquer un moyen de nullité tiré de l’excès de pouvoir consistant en ce que le principe de la proportionnalité ait été violé.

Le jugement entrepris est partant à confirmer dans toute sa teneur.

La partie appelante demande l’allocation d’une indemnité de procédure de l’ordre de 2.000 € sur base de l’article 240 du nouveau code de procédure civile.

Cette demande, qui est recevable sur base de l’article 54 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives tel que cet article a été modifié par l’article V de la loi du 28 juillet 2000 est à écarter comme non fondée, compte tenu de l’issue du litige.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant contradictoirement, reçoit l’acte d’appel du 29 avril 2002, le dit cependant non fondé et en déboute, partant, confirme le jugement entrepris du 18 mars 2002, rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure sollicitée par l’appelant, condamne la partie appelante aux frais de l’instance d’appel.

Ainsi délibéré et jugé par Marion Lanners, vice-présidente Christiane Diederich-Tournay, conseiller, rapporteur Marc Feyereisen, conseiller et lu par la vice-présidente Marion Lanners en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier la vice-présidente 6


Synthèse
Numéro d'arrêt : 14845C
Date de la décision : 08/10/2002

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2002-10-08;14845c ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award