La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/11/2001 | LUXEMBOURG | N°13688C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 08 novembre 2001, 13688C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 13688C Inscrit le 2 juillet 2001 Audience publique du 8 novembre 2001 Recours formé par VladimirVILIEV et Svetlana VOEVODINA contre le ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique Appel (Jugement entrepris du 29 mai 2001, n° 12725 du rôle)

------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 2 juillet 2001 par Maître Louis Tinti, avocat à la Cour, au nom de Vladimi

r Viliev, né le 8 avril 1967 à Evpatorija/Ukraine, de nationalité russe et ...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 13688C Inscrit le 2 juillet 2001 Audience publique du 8 novembre 2001 Recours formé par VladimirVILIEV et Svetlana VOEVODINA contre le ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique Appel (Jugement entrepris du 29 mai 2001, n° 12725 du rôle)

------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 2 juillet 2001 par Maître Louis Tinti, avocat à la Cour, au nom de Vladimir Viliev, né le 8 avril 1967 à Evpatorija/Ukraine, de nationalité russe et de citoyenneté ukrainienne et de son épouse Svetlana Voevodina, née le 19 décembre 1969 à Petropavlosk/Kamtchatskij/Russie, de nationalité russe, les deux demeurant ensemble à L-1511 Luxembourg, 162B, avenue de la Faëncerie, agissant en leur nom personnel ainsi qu’en leur qualité d’administrateurs légaux de leurs enfants mineurs Maxime et Ekaterina contre un jugement rendu en matière de statut de réfugié politique par le tribunal administratif à la date du 29 mai 2001 dans la cause inscrite sous le numéro du rôle12725.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 26 juillet 2001 par la déléguée du Gouvernement Claudine Konsbruck au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, représenté par son ministre de la Justice.

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 28 septembre 2001 par Maître Louis Tinti.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le premier conseiller en son rapport et Maître Ardavan Fatholahzadeh, en remplacement de Maître Louis Tinti ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles Roth en leurs observations orales.

-----------------------------------------------------------------------------------------------------------

Par jugement du 29 mai 2001 le tribunal administratif a déclaré non justifié le recours dirigé par Vladimir VILIEV et Svetlana VOEVODINA, demeurant à L-1511 Luxembourg, 162B, avenue de la Faïencerie contre des décisions du ministre de la Justice des 20 septembre 2000 et 12 décembre 2000 portant refus de leur accorder le statut de réfugié politique.

La décision de rejet était motivée sur le fait que les requérants, ressortissants russes, ne faisaient valoir que des éléments d'ordre personnel, soit des pressions émanant, en Ukraine, de la part d'une famille qualifiée de " tatare" en vue de les obliger à leur vendre leur maison sur laquelle les "Tatares" prétendraient avoir des droits du chef de leurs ancêtres.

Le jugement dont appel, tout en reconnaissant la pertinence de l'argumentation des requérants en ce qui concerne l'application éventuelle de la Convention de Genève, a rejeté le recours au motif que, devant même quitter leur lieu d'implantation en raison des menaces de la part des Tatares de Crimée à l'égard desquels l'Etat aurait été en défaut d'accorder la protection recherchée, les requérants auraient pu profiter de la possibilité de fuite interne alors que l'Etat d'Ukraine comporterait des régions où les requérants auraient pu se mettre à l'abri des faits incriminés.

De ce jugement, appel a été relevé par requête déposée au greffe de la Cour le 2 juillet 2001.

Les appelants concluent à la réformation du jugement.

Le jugement est critiqué alors qu'il aurait recouru à une motivation relevant d'un recours en annulation contre une décision rejetant une demande d'asile comme manifestement infondée et qui serait étrangère au dossier sous examen.

La motivation du jugement est encore contestée en fait alors que, même dans d'autres parties de la République d'Ukraine, les appelants n'auraient pas été à l'abri de représailles de la part des membres de la communauté des musulmans tatares.

En son mémoire en réponse du 26 juillet 2001 le délégué du Gouvernement conclut à la confirmation du jugement tout en soutenant que les appelants n'auraient pas suffisamment établi le défaut de protection de la part des autorités ukrainiennes.

En leur mémoire en réplique du 28 septembre 2001 les requérants se réfèrent à leur développement en première instance et aux motifs du jugement dont appel en ce qui concerne le défaut de protection retenu par les premiers juges.

Considérant que l’appel est régulier en la forme ;

Qu’il est partant recevable ;

Considérant que le jugement dont appel est critiqué en ce qu’il semble manifestement s’appuyer sur le principe consacré par l’article 4 du règlement grand-ducal du 22 avril 1996 portant création d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile qui dispose comme qu’ « une demande d’asile peut-être considérée comme manifestement infondée lorsque le demandeur d’asile, invoquant des persécutions qui sont limitées à une zone graphique déterminée, aurait pu trouver une protection efficace dans une autre partie de son propre pays, qui lui était accessible. » ;

Qu’il est soutenu que ce raisonnement du tribunal serait « à rejeter pour être étranger, respectivement contraire à l’égard de la Convention de Genève ;

2 Qu’en effet il (s’agirait) là d’une considération légale qui n’est d’application qu’en matière de recours en annulation pris dans le cadre d’une demande manifestement infondée », alors que la présente espèce se rapporterait à un recours en réformation contre une décision de rejet de la demande en obtention du statut prise par le ministre sur base de l’article 11 de la loi du 3 avril 1996 portant création d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile et d’un régime de protection temporaire ;

Considérant qu’il résulte de la formulation et de l’indication des voies de recours de la décision ministérielle du 20 août 2000 que celle-ci a été prise sur base de l’article 11 de la loi précitée, un recours en réformation ayant d’ailleurs été formé contre cette décision ;

Considérant que le tribunal administratif tout en admettant pertinents au sens des conditions d’octroi du statut de réfugié les actes de persécution émanant d’un groupe de la population, les intéressés s’étant dûment adressés aux autorités pour rechercher leur protection ce dont ces dernières se seraient montrées incapables ;

Que la demande en réformation de la décision ministérielle de refus a été rejetée pour la seule raison que « les demandeurs restent en défaut d’établir des raisons pertinentes pour lesquelles ils ne seraient pas en mesure de s’installer en une autre partie de l’Ukraine, … ».

Considérant que force est de constater que le texte auquel semble s’être reporté le jugement dont appel ne saurait être que celui de l’article 4 du règlement grand-ducal du 22 avril 1996 portant application des articles 8 et 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 qui définissent les cas où la demande d’asile peut être déclarée irrecevable ou manifestement infondée, donnant ouverture, aux termes de l’article 10 à un recours en annulation ;

Considérant que d’autre part, la possibilité voire l’obligation si faire se peut de la « fuite interne » n’est pas prévue à la Convention de Genève ;

Considérant toutefois que le recours en réformation saisit la juridiction administrative, donc la Cour en instance d’appel, de l’appréciation en opportunité comme en légalité de la décision administrative et des faits gisant à sa base ;

Que la juridiction d’appel peut substituer des motifs à ceux des premiers juges et à ceux de la décision administrative attaquée ;

Que dès lors dans le cadre du présent appel contre un jugement ayant refusé de faire droit à un recours en réformation contre une décision ministérielle, la Cour est amenée à apprécier les éléments produits à l’appui de la demande devant l’administration, soit la demande en octroi du statut de réfugié présentée devant le ministre de la Justice par Vladimir Viliev et Svetlana Voevodina ;

Considérant qu’il résulte du dossier de la demande en obtention du statut de réfugié, comme cela a été retenu à la décision ministérielle et au jugement dont appel, que les appelants ont quitté leur pays à la suite de différends qu’ils auraient eus avec des Tatares de Crimée qui auraient voulu leur imposer de leur vendre la maison de leurs ancêtres dont eux, les Tatares, auraient été dépossédés du temps du régime de Staline et que les appelants auraient acquise depuis, ces derniers n’ayant pu obtenir une protection appropriée de la part des autorités à l’égard des velléités et menaces des Tatares, ce qui les aurait obligés à vendre, à des tiers, leur maison et à quitter leurs pays ;

3 Considérant que la Cour se rallie aux considérations dûment motivées de la décision ministérielle que les raisons du départ des appelants de leur pays de résidence ont des origines d’ordre personnel et familial et qu’ils n’établissent ni même n’invoquent aucun des motifs qui, aux termes de l’article 1er A 2 de la Convention de Genève sont de nature à justifier l’octroi du statut de réfugié ;

Qu’en effet les faits mis en avant par les appelants ne visent en rien une crainte de persécution « du fait de la race, de la religion, de la nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques » ;

Qu’il en résulte que, bien que pour d’autres raisons que celles retenues au jugement dont appel, il y a lieu de déclarer le recours en réformation contre la décision ministérielle non fondé et de confirmer le jugement dont appel.

Par ces motifs, la Cour, statuant contradictoirement, reçoit l’appel en la forme ;

le déclare non fondé ;

partant confirme le jugement dont appel en ce qu’il a déclaré le recours non fondé ;

met les frais de l’instance d’appel à charge des appelants.

Ainsi jugé par Georges KILL, président Jean-Mathias GOERENS, premier conseiller, rapporteur Marc FEYEREISEN, conseiller et lu par le président Georges KILL en audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour.

le greffier en chef le président 4


Synthèse
Numéro d'arrêt : 13688C
Date de la décision : 08/11/2001

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2001-11-08;13688c ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award