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09/10/2001 | LUXEMBOURG | N°13376C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 09 octobre 2001, 13376C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 13376C Inscrit le 2 mai 2001 Audience publique du 9 octobre 2001 Recours formé par le ministre de l’Environnement contre … … en matière de discipline Appel (Jugement entrepris n° 11896 et 11899 du rôle du 21 mars 2001)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 2 mai 2001 par le délégué du Gouvernement Gilles Roth, en vertu du mandat du ministre de l’Environnement dé

livré le 13 avril 2001 contre un jugement rendu en matière de discipline par le tri...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 13376C Inscrit le 2 mai 2001 Audience publique du 9 octobre 2001 Recours formé par le ministre de l’Environnement contre … … en matière de discipline Appel (Jugement entrepris n° 11896 et 11899 du rôle du 21 mars 2001)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 2 mai 2001 par le délégué du Gouvernement Gilles Roth, en vertu du mandat du ministre de l’Environnement délivré le 13 avril 2001 contre un jugement rendu en matière de discipline par le tribunal administratif le 21 mars 2001, à la requête de … …, chef brigadier forestier auprès de l’administration des Eaux et Forêts, demeurant à …, contre une décision du ministre de l’Environnement du 22 février 2000.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 15 mai 2001 par Maître Gaston Vogel, avocat à la Cour, au nom de … …, préqualifié.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le conseiller en son rapport et le délégué du Gouvernement Gilles Roth ainsi que Maître Gaston Vogel en leurs observations orales.

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Par jugement rendu en date du 21 mars 2001, le tribunal administratif a, par réformation, annulé la décision du ministre de l’Environnement du 22 février 2000 par laquelle … … s’est vu infliger la sanction disciplinaire de la rétrogradation de la fonction de chef brigadier forestier auprès de l’administration des Eaux et Forêts à celle de garde forestier avec l’indication qu’il ne pourra bénéficier d’aucune promotion pendant une durée de cinq ans, au motif que la procédure d’instruction de l’affaire disciplinaire est viciée du fait de la violation de l’alinéa 3 du paragraphe 2 de l’article 56 de la loi du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat.

Le délégué du Gouvernement Gilles Roth, déclarant agir en vertu d’un mandat du 13 avril 2001 du ministre de l’Environnement, a relevé appel du jugement précité par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 2 mai 2001.

Le représentant étatique conteste toute violation de l’article 56 de la loi du 16 avril 1979 précitée, reproche aux premiers juges des motifs contradictoires sur la question de l’initiative de la procédure disciplinaire, déclenchée en fait par le ministre de l’Environnement et conteste toute partialité dans le chef de l’agent enquêteur.

Le caractère contradictoire de l’instruction ayant été respecté, il demande la réformation du jugement entrepris et la confirmation de la décision ministérielle du 22 février 2000.

Dans un mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 15 mai 2001, Maître Gaston Vogel, au nom de … …, après s’être rapporté à prudence de justice quant à la recevabilité de l’appel, relève qu’en tout état de cause, le directeur … a insisté sur le déclenchement d’une procédure disciplinaire et n’a pu, par la suite, instruire le dossier disciplinaire dans la neutralité requise par le législateur, mais bien au contraire a fait preuve de partialité tout au long de l’enquête.

Subsidiairement, si la Cour décidait qu’il y a lieu d’évoquer l’affaire, la partie de Maître Vogel reproduit tous les moyens présentés en première instance et rappelle qu’après avoir été inculpé du délit d’immixtion, elle a bénéficié d’un non-lieu le 8 février 1999.

Maître Vogel conclut en demandant acte qu’il ne peut renoncer à un premier degré de juridiction et demande la confirmation du jugement entrepris.

Très subsidiairement et quant à la sanction, il relève que le ministre a opté pour une peine bien inférieure à celle proposée par le conseil de discipline, mais qu’il y aurait lieu de relaxer … … sinon de le condamner à la plus faible des peines disciplinaires, et demande l’octroi d’une indemnité de procédure de 75.000.- francs au vœu de l’article 240 du nouveau Code de procédure civile.

L’acte d’appel est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’audience, les parties ont informé la Cour de leur accord de plaider seulement sur la contradiction des motifs du jugement entrepris concernant la question du déclenchement de l’instruction.

L’appelant reproche aux premiers juges d’avoir annulé la décision du ministre de l’Environnement du 22 février 2000 en retenant notamment que dans la mesure où le fonctionnaire qui a déclenché l’affaire disciplinaire est le même que celui qui, par la suite, s’est vu confier l’instruction de ladite affaire, la procédure d’instruction de l’affaire est viciée du fait de la violation de l’alinéa 3 du paragraphe 2 de l’article 56 de la loi du 16 avril 1979 précitée, en ce que l’agent enquêteur ne disposait pas de l’impartialité objective légalement requise. Il relève les contradictions du raisonnement des premiers juges qui partent d’une prétendue « initiative » du directeur des Eaux et Forêts qui, selon leurs propres constatations n’en était pas une, et aboutissent à un déclenchement de la procédure disciplinaire par le directeur …, tout en affirmant d’autre part, que ce serait le ministre qui aurait déclenché l’instruction disciplinaire.

Après de longs développements devant les juges de première instance concernant l’autorité compétente pour déclencher l’instruction disciplinaire il n’est plus contesté, en instance d’appel, que … … relevait du ministère de l’Environnement et que le ministre de l’Environnement, en tant que chef hiérarchique de l’administration des Eaux et Forêts était compétent pour entamer une procédure disciplinaire contre l’un des fonctionnaires relevant de cette administration, comme en l’espèce ….

Il existe cependant une divergence de vue entre les parties pour savoir quelle autorité a effectivement pris l’initiative de déclencher l’instruction disciplinaire, à savoir le directeur des Eaux et Forêts pour l’intimé ou le ministre de l’Environnement pour l’appelant, ce dernier faisant valoir que les motifs du jugement seraient contradictoires sur ce point.

C’est à bon droit que les premiers juges ont décidé, sans que la Cour puisse relever des contradictions à cet égard, que …, en sa qualité de directeur de l’administration des Eaux et Forêts, a pris une initiative formelle en date du 28 avril 1993 en vue du déclenchement d’une instruction disciplinaire à diriger contre …, en alléguant des violations des articles 14.1 et 14.4 de la loi précitée du 16 avril 1979 et de l’article 23 de la loi du 7 avril 1909 concernant la réorganisation de l’administration des Eaux et Forêts.

Aux termes de l’article 56, paragraphe 2, alinéa 3 de la loi du 16 avril 1979, sur le statut du fonctionnaire, qui vise le fonctionnaire-instructeur, « l’instruction ne se fait jamais par le fonctionnaire qui a déclenché l’affaire ni par celui qui sera éventuellement amené à statuer ».

Cette disposition insérée dans la loi du 16 avril 1979 a pour objet d’assurer la « neutralité » de toute instruction judiciaire, l’agent enquêteur ne devant à aucun moment être soupçonné de partialité.

Or, en l’espèce il apparaît que …, avant d’être chargé de l’enquête disciplinaire en 1995, avait œuvré en vue du déclenchement d’une instruction disciplinaire. Il avait déjà accusé dans sa lettre du 28 avril 1993 le fonctionnaire faisant par la suite l’objet de ladite instruction d’avoir manqué à ses obligations découlant du statut général des fonctionnaires, en mentionnant même les articles qu’il aurait violés, et émettait ainsi un préjugé défavorable à son égard, et se trouvant plutôt dans le rôle d’accusateur, connotation reprise par l’ancien ministre … dans sa lettre adressée le 21 décembre 1995 au directeur des Eaux et Forêts.

C’est donc pour de justes motifs, auxquels la Cour se rallie, que les premiers juges ont estimé que ledit agent enquêteur ne disposait pas de l’impartialité objective légalement requise, et que la décision ministérielle litigieuse du 22 février 2000, dans la mesure où elle se base sur ladite procédure disciplinaire doit être annulée, pour être viciée du fait de vice affectant la procédure d’instruction disciplinaire.

Le jugement entrepris est partant à confirmer.

La partie intimée sollicite l’allocation d’une indemnité de procédure de 75.000.- francs qui pourrait trouver sa base légale dans l’application de la combinaison des articles V de la loi du 28 juillet 2000 portant modification de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives et de l’article 33 de la prédite loi ;

cependant cette demande en allocation n’est pas fondée, alors que l’intimé ne fait pas ressortir le caractère d’iniquité requis à la base de la liquidation utile d’une indemnité de procédure.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant contradictoirement ;

reçoit l’appel en la forme;

le dit non fondé et en déboute ;

partant confirme le jugement entrepris du 21 mars 2001 dans toute sa teneur ;

déclare la demande en allocation d’un indemnité de procédure non fondée et en déboute ;

condamne l’Etat aux frais et dépens de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par Marion Lanners, vice-présidente Christiane Diederich-Tournay, conseiller, rapporteur Marc Feyereisen, conseiller et lu par la vice-présidente Marion Lanners en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier la vice-présidente 4


Synthèse
Numéro d'arrêt : 13376C
Date de la décision : 09/10/2001

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2001-10-09;13376c ?

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