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26/06/2001 | LUXEMBOURG | N°12777C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 26 juin 2001, 12777C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° 12777C du rôle Inscrit le 15 janvier 2001 Audience publique du 26 juin 2001 Recours formé par la société civile ELOS contre 1) l’administration communale de la Ville de Luxembourg et 2) le ministre de l’Intérieur en matière d’aménagement des agglomérations - Appel et appels incidents – -

(jugement entrepris n° du rôle 10019 du 6 décembre 2000)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour ad

ministrative le 15 janvier 2001 par Maître Marc Elvinger, avocat à la Cour, au nom de la so...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° 12777C du rôle Inscrit le 15 janvier 2001 Audience publique du 26 juin 2001 Recours formé par la société civile ELOS contre 1) l’administration communale de la Ville de Luxembourg et 2) le ministre de l’Intérieur en matière d’aménagement des agglomérations - Appel et appels incidents – -

(jugement entrepris n° du rôle 10019 du 6 décembre 2000)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 15 janvier 2001 par Maître Marc Elvinger, avocat à la Cour, au nom de la société civile Elos, établie à …, représentée par ses associés …, … et … contre un jugement rendu en matière d’aménagement des agglomérations par le tribunal administratif à la date du 6 décembre 2000, à la requête de la société civile Elos contre trois décisions du conseil communal de la Ville de Luxembourg et une décision du ministre de l’Intérieur.

Vu la signification dudit acte d’appel par acte d’huissier Jean-Claude Steffen à la date du 17 janvier 2001.

Vu le mémoire en réponse contenant appel incident déposé au greffe de la Cour administrative le 7 février 2001 par le délégué du Gouvernement Guy Schleder au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, représenté par son ministre de l’Intérieur.

Vu le mémoire en réponse contenant appel incident déposé au greffe de la Cour administrative le 7 février 2001 par Maître Jean Medernach, avocat à la Cour, au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg, représentée par son collège des bourgmestre et échevins, établie à Luxembourg, 42, place Guillaume.

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 5 mars 2001 par Maître Marc Elvinger, au nom de la société civile Elos.

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 29 mars 2001 par le délégué du Gouvernement Guy Schleder.

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 4 avril 2001 par Maître Jean Medernach au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï la vice-présidente en son rapport, Maîtres Marc Elvinger et Gilles Dauphin, en remplacement de Maître Jean Medernach ainsi que le délégué du Gouvernement Marc Mathekowitsch en leurs observations orales.

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Par requête déposée au greffe de la Cour administrative en date du 26 mai 1997, la société civile ELOS, établie à L-…, représentée par ses associés …, … et …, a fait introduire un recours en annulation à l’encontre 1. du projet d’aménagement général de la Ville de Luxembourg, tel qu’adopté définitivement quant à sa partie écrite par délibération du conseil communal du 25 avril 1994, en ce qui concerne plus particulièrement son article C.3.6., 2. de la délibération du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 12 juillet 1993 en tant, en particulier, qu’elle a rejeté une objection présentée par elle en date du 10 décembre 1991 à l’encontre de la partie écrite du plan d’aménagement provisoirement adopté le 4 novembre 1991, 3. de la délibération du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 25 avril 1994 en tant, en particulier, qu’elle a rejeté une objection présentée par elle en date du 12 octobre 1993 à l’encontre de la partie écrite modifiée telle que provisoirement approuvée par délibération du 12 juillet 1993 et 4. de la décision du ministre de l’Intérieur datée du 6 février 1997 de ne pas statuer sur, respectivement de rejeter les réclamations introduites en date des 23 septembre 1993 et 14 juin 1994 à l’encontre de l’article C.3.6. et des délibérations visées sub 2) et 3).

Conformément aux dispositions de l’article 71 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le recours a été transmis au tribunal administratif sans autre forme de procédure.

Par jugement rendu à la date du 6 décembre 2000, le tribunal administratif a reçu le recours en annulation en la forme, l’a déclaré non justifié et en a débouté la société Elos avec condamnation aux frais.

Maître Marc Elvinger, au nom de la société Elos, a déposé le 15 janvier 2001 une requête d’appel à l’encontre du jugement précité. Il invoque la nullité du jugement entrepris pour ne pas avoir répondu à toutes les conclusions de sa partie. Il reprend ensuite son moyen d’annulation développé en première instance et tiré de la violation du principe de l’égalité devant la loi en ce que l’article C.3.6. du règlement des bâtisses impose aux particuliers la création de logements, alors que l’Etat et la Ville de Luxembourg en sont dispensés avec faculté de substitution.

Il reprend en troisième lieu son moyen tiré de la violation du principe de proportionnalité en reprochant aux premiers juges d’avoir confondu ce moyen avec celui tiré de la violation du principe d’égalité.

2 Le délégué du Gouvernement Guy Schleder, au nom de l’Etat du Grand-Duché représenté par son ministre des Finances et Maître Jean Medernach, au nom de l’administration de la Ville de Luxembourg, ont déposé le 7 février 2001 des mémoires en réponse contenant appels incidents dans lesquels ils soulèvent l’irrecevabilité de la requête présentée par la société Elos, la décision ministérielle d’approbation du 6 février 1997 constituant un simple acte de tutelle administrative rétroagissant à la date de la décision communale approuvée du 25 avril 1994, soit à une décision antérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif et instaurant pour la première fois un recours en matière d’actes réglementaires.

En ordre subsidiaire, les deux parties sollicitent la confirmation du jugement entrepris en réexposant leurs moyens développés en première instance.

Maître Marc Elvinger a répliqué le 5 mars 2001. Il développe ses moyens tendant à la recevabilité de la demande et ses moyens au fond antérieurement exposés.

Le délégué du Gouvernement et Maître Jean Medernach ont dupliqué respectivement les 29 mars 2001 et 4 avril 2001 pour rencontrer les moyens redéveloppés par Maître Elvinger.

La ville de Luxembourg et le délégué du Gouvernement opposent par appel incident l’irrecevabilité du recours, notamment au motif que la décision du ministre de l’Intérieur du 6 février 1997 serait à considérer comme acte de tutelle administrative qui rétroagirait à la date de l’acte approuvé, soit à la délibération du conseil communal du 25 avril 1994, donc à une date où le recours direct contre les actes à caractère réglementaire créé par l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif n’existait pas.

Le problème de recevabilité soumis à la Cour est une question que la Cour est amenée à examiner d’office.

Les décisions portant adoption des plans d’aménagement dans le cadre de la procédure définie dans la loi du 12 juin 1937 sur l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes sont de nature réglementaire, la décision d’approbation du ministre de l’Intérieur participant à ce caractère.

Il est de doctrine et de jurisprudence que la tutelle administrative, outre les actes d’approbation, d’improbation et d’annulation, comporte aussi, comme en l’espèce, des actes intervenant dans le cadre de recours à fin de réformation où l’autorité de tutelle n’intervient que sur saisine de la part du réclamant.

Les dernières interventions de l’autorité supérieure sont à considérer, non comme actes autonomes, mais comme simples actes de tutelle administrative.

Il y a donc lieu de qualifier la décision du ministre rendue en l’espèce d’acte de tutelle administrative et de l’examiner suivant le régime général des actes de tutelle.

Les actes de tutelle administrative rétroagissent à la date de la décision approuvée qui, une fois approuvée, est censée être valable dès son origine(Cour adm. Dauphin, n° 3 10011C ; Stoll, n°10013C ; Scholer, n°10016C, Republic National Bank of New York, n°10023C).

En effet, les approbations données par l’autorité de tutelle « ont le caractère de conditions suspensives posées à l’exécution des décisions prises par l’autorité décentralisée:

l’approbation valide rétroactivement la décision soumise à tutelle » (Odent, Contentieux administratif, fasicule V, p. 1756, et la jurisprudence citée ; P. Delvolvé, Rép. Dalloz, Contentieux administratif, v° Acte administratif, n° 521 : « lorsque l’approbation est donnée, elle rétroagit au jour de l’acte approuvé »).

Il s’agit en fait d’une application aux actes unilatéraux de l’administration du principe général du droit formulé à l’article 1179 du Code civil : « La condition accomplie a un effet rétroactif au jour auquel l’engagement a été contracté. » Ce mécanisme de rétroactivité n’est mis en échec qu’en cas de refus d’approbation ministériel, un tel refus ayant pour conséquence que la condition suspensive dont l’acte à approuver est affecté ne se réalise pas et que cet acte doit être considéré comme non avenu (Cour adm. Kremer, n° 11878C), situation qui n’est pas donnée en l’espèce.

La décision approuvée du 25 avril 1994 est antérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 7 novembre 1996 qui, en son article 7 a créé le recours direct devant la Cour administrative contre les décisions administratives à caractère réglementaire.

L’existence d’une voie de recours est une règle de fond du droit et non une règle de forme, et elle est régie, en l’absence de disposition transitoire, ce qui est le cas en l’espèce, par la loi sous l’empire de laquelle la décision attaquée a été rendue.

Du fait du caractère de simple acte de tutelle approbatif de la décision du ministre de l’Intérieur et de l’effet rétroactif de cette mesure de tutelle à la date de la décision approuvée, celle-ci étant antérieure à l’entrée en vigueur le 1er janvier 1997 de la loi du 7 novembre 1996, le recours en annulation contre la décision du ministre de l’Intérieur, acte de la procédure d’élaboration d’un texte à caractère réglementaire ayant sorti ses effets avant la création du recours direct, et contre les autres délibérations précitées, est irrecevable.

Le jugement entrepris est partant à réformer dans ce sens.

Par ces motifs, et ceux non contraires des premiers juges la Cour, statuant contradictoirement, reçoit l’acte d’appel et les appels incidents, par réformation du jugement entrepris, déclare irrecevable le recours en annulation contre la décision du ministre de l’Intérieur du 6 février 1997 portant approbation du PAG de la Ville de Luxembourg et rejet des réclamations de la partie appelante des 23 septembre 1993 et 14 juin 1994, et contre les autres délibérations précitées, 4 condamne la partie appelante aux frais de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par :

Marion Lanners, vice-présidente, rapporteur Christiane Diederich-Tournay, conseiller Marc Feyereisen, conseiller et lu par la vice-présidente Marion Lanners en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier la vice-présidente 5


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12777C
Date de la décision : 26/06/2001

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2001-06-26;12777c ?

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