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12/06/2001 | LUXEMBOURG | N°12968C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 12 juin 2001, 12968C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 12968 C Inscrit le 23 février 2001 Audience publique du 12 juin 2001 Recours formé par … Bernard contre la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports en matière d’employé de l’Etat Appel et appel incident (jugement entrepris du 15 janvier 2001, n° 11996 du rôle)

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Vu l'acte d'appel déposé au greffe de la Cour administrative le 23 février 2001

par Maître Roland Michel, avocat à la Cour, au nom de … Bernard, …, demeurant à L-…,...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 12968 C Inscrit le 23 février 2001 Audience publique du 12 juin 2001 Recours formé par … Bernard contre la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports en matière d’employé de l’Etat Appel et appel incident (jugement entrepris du 15 janvier 2001, n° 11996 du rôle)

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Vu l'acte d'appel déposé au greffe de la Cour administrative le 23 février 2001 par Maître Roland Michel, avocat à la Cour, au nom de … Bernard, …, demeurant à L-…, contre un jugement rendu en matière d’employé de l’Etat par le tribunal administratif à la date du 15 janvier 2001, à la requête de … Bernard contre la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 23 mars 2001 par Maître Marc Thewes, avocat à la Cour, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, représenté par son ministre d’Etat.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le conseiller en son rapport et Maître François Moyse, en remplacement de Maître Roland Michel, ainsi que Maître Marc Thewes en leurs observations orales.

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Par requête déposée le 12 mai 2000 au greffe du tribunal administratif, Maître Roland Michel, avocat à la Cour, au nom de … Bernard, …, demeurant à L-…, a demandé la réformation, sinon l’annulation de la décision de la ministre de l’Education nationale et de la Formation professionnelle du 9 mai 1996 en ce que le point de départ du calcul rétroactif de sa tâche d’enseignant concernant plus particulièrement le bénéfice de l’allégement par leçon (coefficient) a été fixé au 3 novembre 1994 et non pas, tel que par lui réclamé au début de son engagement en tant que chargé de cours à durée indéterminée au Lycée Technique Michel Lucius à la date du 16 septembre 1984, ainsi que de la décision confirmative de la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports du 9 février 2000 intervenue sur son itérative réclamation du 24 décembre 1999.

Par jugement rendu contradictoirement en date du 15 janvier 2001, le tribunal administratif s’est déclaré incompétent pour connaître du recours en réformation et pour connaître du recours en annulation pour autant qu’il concerne la constatation et l’évaluation du préjudice financier réclamé, ensemble la demande en condamnation de l’Etat y relative avec, au besoin, institution d’une expertise aux fins de calcul du montant indemnitaire à liquider, a déclaré le recours en annulation recevable pour le surplus mais au fond non justifié et en a débouté le requérant en déclarant les demandes en allocation d’une indemnité de procédure non fondées.

Par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 23 février 2001, Maître Roland Michel, pour compte de … Bernard, a relevé appel du prédit jugement.

Après avoir relevé que l’appel est limité en ce qu’il a débouté le requérant au fond, l’appelant reproche au tribunal d’avoir estimé qu’il n’existait pas de base légale habilitant la ministre à accorder à un chargé de cours de l’enseignement secondaire le bénéfice des coefficients et autres avantages sollicités, alors que par décision coulée en force de chose jugée du Comité du contentieux du Conseil d’Etat du 7 février 1996, ce dernier a statué sur la valeur de la réclamation de l’appelant et il est indiscutable que d’autres chargés de cours ont justement bénéficié de l’allégement par leçon (coefficient) qui devrait revenir à l’appelant actuel depuis le 16 septembre 1984.

Il conclut en demandant à la Cour, par réformation du jugement entrepris, de condamner l’Etat à lui payer la totalité du dommage lui accru par les décisions litigieuses du 3 novembre 1994, sinon à procéder au recalcul du préjudice lui subi du fait de l’attitude de l’Etat, ainsi que l’octroi d’une indemnité de procédure de 50.000.- francs, et en ordre subsidiaire de nommer un consultant afin d’évaluer le préjudice accru au requérant.

Dans son mémoire en réponse du 23 mars 2001, Maître Marc Thewes, pour compte de l’Etat, soulève en premier lieu les moyens d’incompétence de la juridiction administrative et d’irrecevabilité tenant à la tardiveté de l’action, à l’absence d’intérêt à agir, à l’autorité de la chose jugée et déclare relever appel incident en ce que les premiers juges ont déclaré le recours recevable et en ce qu’ils se sont déclarés compétents pour en connaître, alors qu’il s’agit d’une demande visant à modifier le contrat, que c’est à bon droit que la ministre de l’Education nationale a donné effet au jour de la décision annulée et que c’est à tort que l’arrêt du Conseil d’Etat du 7 février 1996 a considéré comme arbitraire la distinction faite entre … Bernard et quatre autres enseignants engagés sous contrat à durée indéterminée engagés en 1980 alors que les critères retenus par l’Etat étaient objectifs et pertinents, et qu’enfin l’autorité de la chose jugée de l’arrêt du Conseil d’Etat du 7 février 1996 ne se pose pas en l’espèce.

Il conclut en demandant la Cour de dire le recours irrecevable, sinon non fondé, subsidiairement de confirmer le jugement entrepris et de condamner … Bernard de payer à l’Etat une indemnité de procédure de 40.000.- francs.

L’acte d’appel ayant été interjeté dans les formes et délai de la loi est recevable; il en est de même de l’appel incident formulé dans le mémoire de l’intimé Etat du Grand-Duché de Luxembourg du 23 mars 2001 contre le jugement a quo en ce que les premiers juges ont déclaré le recours recevable et en ce qu’ils se sont déclarés compétents pour en connaître.

Comme l’appel incident met en cause des considérations tenant à la compétence de la juridiction administrative à connaître du litige et à la recevabilité à plus d’un titre de la demande originaire, il y a lieu d’examiner en premier lieu le mérite de l’appel incident.

L’Etat conclut en premier lieu à l’incompétence ratione materiae de la juridiction administrative. C’est à bon droit que le tribunal a décidé qu’il est sans compétence pour connaître de tous les aspects du recours ayant trait à la constatation et à l’évaluation du dommage allégué par le demandeur, ainsi qu’à la condamnation par l’Etat à sa réparation, y 2 compris l’instruction d’une expertise, tous ces aspects de la demande ayant trait à des droits civils échappant au champ de compétence du tribunal.

Dans son arrêt du 7 février 1996, le comité du contentieux du Conseil d’Etat a déclaré irrecevable le recours en réformation en estimant que les conditions d’ouverture prévues par l’article 11 de la loi modifiée du 27 janvier 1972 fixant le régime des employés de l’Etat n’étaient pas données, alors que « le litige ne touche pas directement à la rémunération du requérant, bien qu’il puisse y avoir une incidence ».

C’est à bon droit que le tribunal a estimé que par voie de conséquence, il est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre principal, mais que par identité des motifs tirés pour le moins implicitement de l’arrêt du Conseil d’Etat précité, il est compétent pour connaître du recours en annulation introduit en ordre subsidiaire dans la mesure des éléments résiduels déférés des décisions ministérielles critiquées concernant le point de départ de la prise en compte de l’allégement par leçon (coefficient) réclamé par … Bernard antérieurement au 3 novembre 1994.

Quant à la recevabilité du recours, la Cour fait siens par ailleurs les motifs du tribunal concernant le prétendu caractère tardif du recours, l’absence d’intérêt à agir et l’autorité de la chose jugée.

Quant au fond, l’appelant limite sa demande à l’annulation de la décision ministérielle incriminée, l’appel étant expressément limité à ce qu’il a été débouté de sa demande au fond.

L’appelant soutient l’argumentation d’après laquelle les juges du tribunal administratif aurait méconnu l’autorité de la chose jugée de l’arrêt rendu entre parties par le Conseil d’Etat, comité du contentieux, le 7 février 1996, ayant statué définitivement sur la valeur de la réclamation de … Bernard, en décidant qu’il n’y avait aucune raison objective pour lui refuser, en tant que chargé de cours à durée indéterminée depuis le 16 septembre 1984, une faveur accordée à d’autres personnes ayant le même statut et la même qualification.

L’appelant fait ainsi grief à la décision ministérielle déférée du 9 décembre 1996, telle que confirmée par celle du 5 février 2000, de ne pas avoir tiré toutes les conséquences de l’arrêt d’annulation précité du Conseil d’Etat du 7 février 1996 en ne faisant rétroagir le bénéfice d’allégement par leçon (coefficient) qu’à la date du 3 novembre 1994 et non pas jusqu’au début de sa relation contractuelle à durée indéterminée avec l’Etat, soit jusqu’au 16 septembre 1984, tel que réclamé initialement à travers sa demande du 20 octobre 1994.

Si la question de l’allégement par leçon (coefficient) a déjà été tranchée par arrêt du comité du contentieux du Conseil d’Etat du 7 février 1996, la juridiction administrative est compétente pour connaître en tant que recours en annulation du volet du recours relatif à la date de l’effet de l’allégement d’une heure hebdomadaire de la tâche et il y a lieu d’apprécier le bien-fondé de la demande en justice en ce qui concerne ce point.

Il résulte de l’article 15 (3) de la loi budgétaire du 19 décembre 1983 et du règlement grand-

ducal afférent du 13 avril 1984 qu’en vertu de ces textes, l’appelant a pu bénéficier d’un contrat de travail à durée indéterminée sous le statut de l’employé de l’Etat.

Le comité du contentieux du Conseil d’Etat a, par son arrêt du 7 février 1996, annulé la décision du ministre refusant l’allégement par leçon (coefficient) au motif que le critère de non-

attribution du bénéfice tiré de la date de l’entrée en service aurait été arbitraire, la question de 3 la justification même de l’allocation du bénéfice et de sa base légale n’ayant pas été soumise à la haute juridiction.

L’appelant jouit du statut d’employé de l’Etat, au sens de la loi du 27 janvier 1972 fixant le régime de ces agents, qui n’opère pas une assimilation totale des employés aux fonctionnaires et, les points d’assimilation étant à considérer comme dispositions spéciales comportant une interprétation restrictive, il ne saurait être admis en l’occurrence que les chargés de cours employés de l’Etat bénéficieraient automatiquement des avantages créés, comme en l’espèce, au bénéfice des seuls fonctionnaires (Cour 14.07.99 Mailliet-Heisbourg et cinq autres arrêts).

C’est partant à juste titre que le jugement entrepris, après examen des dispositions en vertu desquelles les coefficients ont été créés et sont alloués, a estimé qu’il n’existe pas de base légale habilitant le ministre à allouer au requérant le bénéfice de l’allégement par leçon (coefficient) à partir de son premier engagement en tant qu’employé de l’Etat, chargé de cours à durée indéterminée.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris alors que … Bernard a bénéficié du même traitement que les autres chargés de cours bénéficiant d’un arrêt du Conseil d’Etat.

La partie appelante sollicite l’allocation d’une indemnité de procédure de 50.000.- francs, tandis que l’Etat réclame la liquidation dans son chef d’une indemnité de procédure de 40.000.-

francs.

Au vu de l’issue du litige, la demande en allocation présentée par l’appelant n’est pas fondée, tandis que l’Etat ne fait pas ressortir le caractère d’iniquité requis à la base de la liquidation utile d’une indemnité de procédure.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant contradictoirement ;

reçoit l’appel principal et l’appel incident en la forme ;

déclare l’appel incident non-fondé et en déboute ;

dit l’appel principal non-fondé et en déboute ;

partant confirme le jugement dont appel sur les points visés ;

déclare les demandes en allocation d’une indemnité de procédure non fondées et en déboute ;

fait masse des frais de l’instance d’appel et les impose par moitié à chacune des parties.

Ainsi jugé par :

Marion Lanners, vice-présidente Christiane Diederich-Tournay, conseiller, rapporteur Feyereisen, conseiller 4 et lu par la vice-présidente Marion Lanners en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier la vice-présidente 5


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12968C
Date de la décision : 12/06/2001

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2001-06-12;12968c ?

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