La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/05/2001 | LUXEMBOURG | N°12657C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 15 mai 2001, 12657C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° du rôle 12657C Inscrit le 20 décembre 2000 Audience publique du 15 mai 2001 Recours formé par … Lemaître épouse … contre la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports en matière d’employé de l’Etat - Appel -

(Jugements entrepris nos° du rôle 11468 et 11880 du 14 novembre 2000)

_________________________________

Vu la requête déposée le 20 décembre 2000 au greffe de la Cour administrative et par laquelle … Lemaître, épouse …, chargée de cours, demeurant à L

-… a relevé appel contre la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° du rôle 12657C Inscrit le 20 décembre 2000 Audience publique du 15 mai 2001 Recours formé par … Lemaître épouse … contre la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports en matière d’employé de l’Etat - Appel -

(Jugements entrepris nos° du rôle 11468 et 11880 du 14 novembre 2000)

_________________________________

Vu la requête déposée le 20 décembre 2000 au greffe de la Cour administrative et par laquelle … Lemaître, épouse …, chargée de cours, demeurant à L-… a relevé appel contre la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports d’un jugement rendu le 14 novembre 2000 par le tribunal administratif dans les causes inscrites sous les numéros 11468a et 11880 du rôle;

vu le mémoire en réponse déposé le 19 janvier 2001 par le délégué du Gouvernement;

vu le mémoire déposé le 16 février 2001 par Maître Alain Rukavina, avocat-avoué, au nom de l’appelante ;

vu les pièces versées en cause ainsi que le jugement entrepris;

ouï le premier conseiller-rapporteur en son rapport à l’audience du 20 mars 2000 ainsi que Maître Annick Braun, en remplacement de Maître Alain Rukavina et le délégué du Gouvernement Guy Schleder en leurs observations respectives.

Par requête du 20 décembre 2000 … Lemaître, épouse …, a déclaré relever appel d’un jugement du tribunal administratif du 14 novembre 2000 intervenu sur deux recours de l’appelante contre des décisions de la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports, du directeur à la formation professionnelle, ainsi que du Centre de Formation Professionnelle Continue portant refus de reconnaître dans son chef l’existence d’un contrat de travail à durée indéterminée en qualité d’employée de l’Etat avec toutes les conséquences de droit à partir de son entrée en service pour compte de l’Etat, le 1er janvier 1997 et pour la période antérieure précédant le 1er janvier 2000.

Les décisions entreprises sont intervenues dans le cadre de revendications de l’appelante quant à la qualification des relations de travail la liant à l’Etat sinon au Centre de Formation Professionnelle Continue et en matière de frais de route.

Le jugement dont appel a annulé la décision déférée du Centre de Formation Professionnelle Continue le 13 mars 1999 en matière de frais de route pour cause d’incompétence de l’auteur de la décision.

Il a déclaré pour le surplus les recours non fondés.

Dans la requête d’appel, l’appelante déclare limiter l’appel aux chefs du jugement du 14 novembre 2000 qui ont déclaré non fondé les recours de … …-Lemaître contre les différentes décisions attaquées à l’exception de celle du 17 mars 1999 et qui ont imparti une partie des frais de l’instance à la requérante.

Il est demandé à la Cour de constater que la partie requérante bénéficie depuis le 1er janvier 1997, sinon depuis une date à déterminer par la Cour, d’une relation de travail à durée indéterminée en qualité d’employée de l’Etat au sens de la loi modifiée du 27 janvier 1972 fixant le régime des employés de l’Etat et aux conditions de travail inhérentes à ce statut; par réformation d’ordonner la reconstitution de carrière de la carrière de l’appelante en tant qu’employée de l’Etat et dire par conséquent qu’il y a lieu de vérifier son classement dans la hiérarchie des traitements et de procéder au recalcul de sa rémunération du 1er janvier 1997 jusqu’à la régularisation de sa situation en date du 31 décembre 1999, tout en affiliant rétroactivement l’appelante au Centre Commun de la Sécurité Sociale et en imposant de rémunérer l’appelante pendant les congés scolaires à partir de la date de son engagement et de lui reconnaître rétroactivement tous les autres avantages inhérents au statut des employés de l’Etat.

L’appelante conclut par ailleurs à voir ordonner une expertise avec mission de vérifier son classement dans la hiérarchie des traitements, de procéder au recalcul de la rémunération devant lui revenir et de procéder ainsi à une reconstitution de carrière à partir de la date de son engagement au 1er janvier 1997 jusqu’au 31 décembre 1999.

Elle reprend une offre de preuve tendant à établir qu’elle a réclamé auprès des responsables du Centre de Formation Professionnelle Continue en vue de se faire reconnaître la qualité d’employée de l’Etat bénéficiant d’un contrat de travail à durée indéterminée.

Dans son mémoire du 19 janvier 2001, le délégué du Gouvernement fait valoir que l’appel serait irrecevable dans la mesure où il viserait la décision du directeur du Centre de Formation Professionnelle Continue du 6 octobre 1998, alors que l’irrecevabilité du recours contre cette décision aurait été décidée par un jugement du 30 mai 2000 coulé en force de chose jugée.

Le délégué du Gouvernement conclut à la confirmation du jugement en ce qui concerne tant la question du statut de l’appelante que celle des frais de déplacement en se référant à ses mémoires de première instance.

2 En son mémoire en réplique du 16 février 2001, l’appelante se réfère à sa requête d’appel et à ses moyens produits en première instance.

Considérant que l’appel a été interjeté dans les formes et délai de la loi ;

Qu’il est partant recevable ;

En ce qui concerne la nature des relations entre l’appelante et l’Etat pendant la période précédant le 1er janvier 2000 :

Considérant que le litige porte sur le problème de la qualification de la relation professionnelle qui a existé entre l’appelante et l’Etat pendant la période allant du début des prestations, soit le 1er janvier 1997 jusqu’à la date du 1er janvier 2000 exclusivement, date à partir de laquelle un contrat de travail à durée indéterminée en tant qu’employée de l’Etat a été signé entre l’appelante et l’Etat comme employeur ;

Considérant que le jugement dont appel a rejeté la prétention de l’appelante à voir reconnaître entre elle et l’Etat l’existence d’un contrat de travail à durée indéterminée pour l’époque visée au motif qu’aucun engagement suivant la procédure tracée à l’article 4 de la loi du 27 janvier 1972 sur le régime des employés de l’Etat n’aurait été signé entre parties ;

Considérant qu’il est constant qu’aucun contrat de travail écrit n’a existé entre parties pour la période précédant la date du 1er janvier 2000 ;

Qu’il résulte toutefois du dossier que l’appelante a sollicité la conclusion d’un tel contrat au plus tard dans sa lettre du 23 avril 1998 alors qu’auparavant elle avait accepté à effectuer ses prestations sans disposer d’un contrat en bonne et due forme, en faisant valoir ses prétentions de rémunération envers l’employeur par la voie de déclarations mensuelles ;

Considérant que l’article 4 de la loi précitée du 27 janvier 1972 fixe les modalités à observer pour l’Etat en cas d’engagement d’un employé tout en renvoyant « aux dispositions portant règlement légal du louage de service des employés privés » ;

Considérant que le jugement dont appel se fonde sur le défaut, constant en cause, de la procédure interne à l’Etat définie à l’article 4 de la loi – un engagement effectué, sur avis du ministre de la Fonction publique, par le ministre qui a dans ses attributions le service dont relève l’employé – pour retenir qu’il n’y a pas existé d’engagement avant le contrat signé avec effet au 1er janvier 2000 ;

Considérant que les formalités visées doivent être analysées comme constituant les règles de prise de décision internes à l’Etat et que dès lors le défaut de leur accomplissement régulier ne saurait porter préjudice au partenaire contractuel ni être invoqué ou retenu à son encontre ;

Considérant qu’il y a lieu d’examiner la nature des relations ayant existé entre l’Etat et l’appelante au regard du droit du travail auquel renvoie l’article 4 de la loi de 1972 ;

Considérant que dans ses conclusions de première instance reprises en substance en instance d’appel, le délégué du Gouvernement conteste l’existence d’une relation de travail entre l’appelante et l’Etat, voulant faire admettre l’activité de l’appelante comme ayant été faite en 3 « free lance » – et rémunérée non pas par un salaire mais sur déclaration à titre d’honoraire, de cachet ou de défrayement ;

Considérant toutefois qu’il résulte des pièces du dossier que la relation litigieuse a comporté un lien de subordination à l’employeur qui a assigné à sa partenaire les lieux et l’horaire de travail et qui l’a rémunérée, sur déclaration, il est vrai, mais suivant des barèmes unilatéralement fixés par l’employeur, le tout faisant que la relation litigieuse est à analyser comme relation de travail, en l’espèce comme rapport d’employeur à employé ;

Considérant que la relation de travail est régie, quant aux aspects litigieux, par la loi modifiée du 24 mai 1989 sur le contrat de travail ;

Considérant, en ce qui concerne les modalités de la relation de travail quant à son existence et à son contenu, elle peut être établie par tous les moyens de preuve en vertu de l’article 4 (5) de ladite loi ;

Que la Cour est en possession des éléments d’information pour retenir que le contenu du contrat a comporté le nombre de cours et le tarif appliqués en fait pendant la durée de la relation de travail ;

Qu’en ce qui concerne la nature du contrat, aux termes de l’article 6 (2) de la loi, elle est à durée indéterminée, à défaut d’écrit ayant spécifié la nature de durée déterminée ;

Considérant en ce qui concerne la date de début de la relation de contrat à durée indéterminée, l’application de la loi veut qu’elle soit fixée au début de la relation de travail, soit au 1er janvier 1997 ;

Considérant qu’il en résulte qu’il y a lieu à réformation du jugement dont appel et de dire que l’appelante se trouve liée à l’Etat par un contrat à durée indéterminée en tant qu’employée de l’Etat depuis le 1er janvier 1997 avec toutes les conséquences de droit ;

Considérant toutefois que la demande d’expertise visée ci-dessus est superfétatoire, alors que l’administration est censée en mesure de donner au présent arrêt les conséquences voulues par la loi ;

En ce qui concerne la demande de restitution des frais de route Considérant que c’est pour de justes motifs que la Cour adopte que le jugement, d’ailleurs non attaqué sur ce fait, a annulé pour incompétence de l’auteur de la décision, la décision du 17 mars 1999 refusant l’allocation des frais de route à l’appelante ;

qu’il y a encore lieu de constater que le silence de l’administration pendant plus de trois mois suite à la demande du 21 mars 1999 donne ouverture à un recours comme constituant une décision implicite de refus ;

considérant que la demande en allocation de frais de route a été abjugée par le tribunal administratif dans la logique de son refus de reconnaître à l’appelante le statut d’employée de l’Etat pour la période de référence en question ;

4 considérant que sur base des considérations ci-dessus desquels il découle que le statut d’employée de l’Etat revient à l’appelante pour la période en question, il y a lieu d’examiner la prétention aux frais de route sur base de la législation applicable, soit l’article 16 de la loi modifiée du 22 juin 1963 fixant le régime des traitements des fonctionnaires de l’Etat et les règlements d’application afférents ;

considérant que le règlement grand-ducal du 5 août 1983 sur les frais de route et de séjour pris en exécution de l’article 16 de la loi précitée du 27 juin 1963 est applicable aux employés de l’Etat ;

considérant que ledit règlement grand-ducal dispose en son article 4 (3) que le déplacement effectué par le fonctionnaire ou l’employé pour se rendre de son domicile à sa résidence officielle et pour se rendre de celle-ci à son domicile ne donne pas lieu à indemnité ;

qu’au terme de l’article 2 qui retient comme principe que sont considérés comme voyage de service les déplacements hors du lieu de la résidence officielle, celle-ci est définie comme étant le lieu où le fonctionnaire ou l’employé est affecté ou détaché ;

considérant qu’il résulte des pièces du dossier que depuis son engagement, l’appelante a été affectée aux sites du Centre de Formation Professionnelle Continue de Walferdange, de Helfent et d’Esch-sur-Alzette où elle était chargée de donner des cours de français et de calcul ;

considérant qu’il en résulte que les déplacements effectués dont l’indemnisation est réclamée au titre des frais de route n’ont eu lieu qu’entre le domicile de l’appelante et les différents lieux de son affectation ;

que la structure du Centre de Formation Professionnelle Continue impliquant que les cours soient donnés aux différents sites du Centre, fait nécessairement connu par l’appelante, le déplacement vers les lieux de travail en l’occurrence multiples n’est pas de nature, au vœu des articles 2 et 4 (3) du règlement grand-ducal applicable, à générer des indemnités pour frais de route, la multiplicité des lieux d’affectation au sens de l’article 2 étant inhérente à la structure du CFPC et n’étant aucunement exclu ni par le texte ni par l’esprit du règlement grand-ducal afférent ;

que la nature du travail ne permet pas de déterminer un seul lieu d’affectation principal d’où des déplacements de service auraient été faits vers d’autres lieux secondaires, accessoires ou accidentels;

que par ailleurs il ne résulte pas du dossier qu’un quelconque déplacement de service aurait jamais été autorisé préalablement comme l’exige l’article 16 de la loi du 22 juin 1963 et l’article 3 (1) du règlement grand-ducal du 5 août 1993 ;

considérant qu’il en résulte que la demande en allocation des frais de route de l’appelante n’est pas fondée et qu’il échet de l’en débouter ;

considérant qu’en fonction de la décision sur l’appel de … …-Lemaître, il convient de faire masse des frais de l’instance d’appel et de les imposer à raison de moitié à chacune des parties ;

5 Par ces motifs, la Cour administrative, statuant contradictoirement ;

reçoit l’appel en la forme ;

le dit partiellement fondé ;

réformant, dit que … …-Lemaître bénéficie à l’égard de l’Etat d’un contrat d’employée de l’Etat à durée indéterminée avec effet au 1 janvier 1997 avec tous les effets de droit ;

dit non fondée la demande en allocation des frais de route et en déboute ;

fait masse des frais de l’instance d’appel et les impose pour moitié à chacune des parties.

Ainsi jugé par Marion Lanners, vice-présidente Jean-Mathias Goerens, premier conseiller, rapporteur Marc Feyereisen, conseiller, et lu par la vice-présidente Marion LANNERS en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie WILTZIUS.

Le greffier La vice-présidente 6


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12657C
Date de la décision : 15/05/2001

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2001-05-15;12657c ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award