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03/04/2001 | LUXEMBOURG | N°12878

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 03 avril 2001, 12878


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° 12878 du rôle Inscrit le 8 février 2001 Audience publique du 3 avril 2001 Recours formé par les époux … Mujanovic et … … contre le ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique - Appel -

(Jugement entrepris du 8 janvier 2001, n° 12292 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 8 février 2001 par Maître Guillaume Rauchs, avocat à la Cour, assist

é de Maître Isabelle Homo, avocat, au nom des époux … Mujanvovic et … … agissant tant en l...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° 12878 du rôle Inscrit le 8 février 2001 Audience publique du 3 avril 2001 Recours formé par les époux … Mujanovic et … … contre le ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique - Appel -

(Jugement entrepris du 8 janvier 2001, n° 12292 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 8 février 2001 par Maître Guillaume Rauchs, avocat à la Cour, assisté de Maître Isabelle Homo, avocat, au nom des époux … Mujanvovic et … … agissant tant en leur nom personnel qu’au nom et pour compte de leur enfant mineur … Mujanovic, de nationalité yougoslave, demeurant ensemble à L-…, contre un jugement rendu en matière de statut de réfugié politique par le tribunal administratif à la date du 8 janvier 2001, à la requête des époux … Mujanovic et … … contre le ministre de la Justice.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 20 février 2001 par le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter.

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 19 mars 2001 par Maître Guillaume Rauchs, assisté de Maître Isabelle Homo, pour compte des époux Mujanovic-….

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le conseiller rapporteur en son rapport et Maître Isabelle Homo, en remplacement de Maître Guillaume Rauchs ainsi que le délégué du Gouvernement Marc Mathekowitsch en leurs observations orales.

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Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 31 août 2000, Maître Guillaume Rauchs, avocat à la Cour, assisté de Maître Isabelle Homo, avocat, au nom des époux … Mujanovic et … …, agissant tant en leur nom personnel qu’en nom et pour compte de leur enfant mineur … Mujanovic, demeurant à L-…, de nationalité yougoslave, a demandé la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 31 mai 2000 par laquelle il n’a pas été fait droit à leur demande en reconnaissance du statut de réfugié politique, ainsi que d’une décision confirmative sur recours gracieux du même ministre datant du 31 juillet 2000.

Par jugement rendu à la date du 8 janvier 2001, le tribunal administratif a déclaré le recours en réformation au fond non justifié et en a débouté les requérants.

Par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 8 février 2001, Maître Guillaume Rauchs, assisté de Maître Isabelle Homo, a relevé appel du jugement précité.

Les appelants reprochent aux premiers juges d’avoir estimé qu’ils restaient en défaut de prouver l’existence dans leur chef d’une crainte actuelle justifiée de persécution, alors que leur situation subjective particulière est telle qu’elle présente toujours à l’heure actuelle un danger sérieux pour leur vie, leur liberté et leur intégrité physique, qu’ils font partie des minorités qui sont actuellement l’objet de menaces, qu’ils sont de confession musulmane, que les albanais respectivement la police militaire viennent très souvent chez les parents de … Mujanovic pour les questionner à propos de leur fils et que leur maison a été détruite en décembre 2000.

Enfin, … Mujanovic fait valoir qu’il a quitté sa ville natale pour aller vivre à Podgorica lorsqu’il a reçu sa première convocation pour la réserve le 1er avril 1999, et que les déserteurs, respectivement les refractaires peuvent se faire arrêter à tout moment et faire l’objet de poursuites s’ils retournent dans leur pays d’origine.

Ils concluent en demandant à la Cour de reformer les décisions prises par le ministre de la Justice en date des 31 mai 2000 et 31 juillet 2000.

Dans un mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 20 février 2001, le délégué du Gouvernement fait valoir, concernant l’insoumission de l’appelant, qu’une loi d’amnistie est en cours de préparation en République Fédérale Yougoslave où une nouvelle situation politique règne, et que même à supposer que l’appelant puisse encourir un danger en cas de retour au Kosovo, il est clairement établi qu’il aurait pu trouver une possibilité de fuite interne au Monténégro et que rien ne devrait l’empêcher d’y retourner.

Il conclut en demandant la confirmation du jugement entrepris.

Dans un mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour le 19 mars 2001, les appelants font réexposer leurs moyens, en estimant qu’il est prématuré de se prévaloir de la loi d’amnistie et qu’ils n’auraient plus la possibilité de retourner au Monténégro.

La requête d’appel ayant été introduite dans les formes et délai de la loi est recevable.

Est qualifié réfugié politique au sens de la Convention de Genève toute personne craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques (paragraphe 2° de la section A de l’article premier de la Convention de Genève).

Une crainte « avec raison » inclut à la fois un élément subjectif et un élément objectif et, pour déterminer l’existence d’une crainte raisonnable, les deux éléments doivent être pris en considération par les autorités auxquelles une demande de réfugié politique est soumise.

2 La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine, mais aussi et surtout par la situation particulière des demandeurs d’asile qui doivent établir, concrètement, que leur situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour leur personne.

Il appartient aux demandeurs d’asile d’établir avec la précision requise qu’ils remplissent les conditions prévues pour obtenir le statut de réfugié politique.

Or, les époux Mujanovic-… n’ont pas pu établir des raisons personnelles suffisamment précises de nature à justifier dans leur chef une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève.

En effet, il ressort du dossier administratif que les appelants basent leur crainte de persécution sur la situation générale existant dans leur pays et sur leur peur de l’insécurité, sans préciser les persécutions qu’ils risqueraient personnellement de subir en cas de retour.

L’insoumission n’est pas en elle-même un motif valable de reconnaissance du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève, de même que la destruction de la maison des appelants, et les insultes verbales, à les supposer établis, proférées à l’encontre de … Mujanovic sur son lieu de travail.

Les appelants n’établissent pas un état de persécution vécu ou une crainte qui serait telle que la vie leur serait à raison intolérable dans leur pays d’origine, et même à supposer que les appelants estiment encourir un danger en cas de retour au Kosovo, il a été établi que la famille a déjà pu trouver une possibilité de fuite interne au Monténégro à partir du 1er avril 1999 et qu’elle devrait pouvoir y retourner.

D’autre part la loi d’amnistie a été votée le 26 février 2001 et il est de jurisprudence qu’une persécution émanant non pas de l’Etat mais de groupes de population ne peut être reconnue comme motif d’octroi du statut de réfugié politique que si la personne en cause ne bénéficie pas de la protection des autorités de son pays d’origine pour l’une des cinq causes visées à l’article 1er de la Convention de Genève. La notion de protection de la part du pays d’origine n’implique pas une sécurité physique absolue des habitants contre la commission de tout acte de violences, mais suppose des démarches de la part des autorités en place en vue de la poursuite et de la répression des actes de violence commis, d’une efficacité suffisante pour maintenir un certain niveau de dissuasion. Une persécution ne saurait être admise dès la commission matérielle d’un acte criminel, mais seulement dans l’hypothèse où les agressions commises par un groupe de population seraient encouragées par les autorités en place, voire où celles-ci seraient incapables d’offrir une protection appropriée. Or, il ne résulte nullement du dossier que les forces onusiennes seraient dans l’incapacité d’offrir une protection appropriée aux minorités du Kosovo, voire qu’elles encourageraient d’éventuelles exactions de la part d’extrémistes albanais.

Le jugement dont appel est partant à confirmer, le ministre de la Justice ayant à bon droit rejeté les demandes en obtention du statut de réfugiés politiques présentées par les appelants comme non fondées.

3 Par ces motifs, la Cour administrative, statuant contradictoirement;

reçoit l’appel en la forme;

le dit non fondé et en déboute;

partant confirme le jugement du 8 janvier 2001 dans toute sa teneur;

condamne l’appelant aux frais et dépens de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par :

Marion LANNERS, vice-présidente, Christiane DIEDERICH-TOURNAY, conseiller, rapporteur Marc FEYEREISEN, conseiller, et lu par la vice-présidente Marion LANNERS en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie WILTZIUS.

le greffier la vice-présidente 4


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12878
Date de la décision : 03/04/2001

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2001-04-03;12878 ?

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