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22/03/2001 | LUXEMBOURG | N°12761C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 22 mars 2001, 12761C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° 12761C du rôle Inscrit le 11 janvier 2001 Audience publique du 22 mars 2001 Recours formé par Sefket Rastoder et consort contre le ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique - Appel -

(Jugement entrepris n° du rôle 12287 du 11 décembre 2000)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 11 janvier 2001 par Maître Jean-Georges Gremling, avocat à la Cour, assité de Maître Moniq

ue Clement, avocat, au nom de Sefket Rastoder et consort, de nationalité yougoslave,...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° 12761C du rôle Inscrit le 11 janvier 2001 Audience publique du 22 mars 2001 Recours formé par Sefket Rastoder et consort contre le ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique - Appel -

(Jugement entrepris n° du rôle 12287 du 11 décembre 2000)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 11 janvier 2001 par Maître Jean-Georges Gremling, avocat à la Cour, assité de Maître Monique Clement, avocat, au nom de Sefket Rastoder et consort, de nationalité yougoslave, demeurant à L-

8436 Steinfort, 3C, rue du Cimetière contre un jugement rendu en matière de statut de réfugié politique par le tribunal administratif à la date du 11 décembre 2000, à la requête de Sefket Rastoder et consort contre le ministre de la Justice.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 23 janvier 2001 par le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le premier conseiller en son rapport et Maître Monique Clement, en remplacement de Maître Jean-Georges Gremling ainsi que le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter en leurs observations orales.

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Par jugement du 11 décembre 2000, le tribunal administratif a déclaré recevable mais non fondé le recours en réformation dirigé par Sefket Rastoder et son épouse Elifa Dzogovic tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 15 juin 2000, par laquelle il n’a pas été fait droit à leur demande en reconnaissance du statut de réfugié politique.

La décision ministérielle attaquée porte que la demande en obtention du statut de refugié a été « refusée comme non fondée au sens de l’article 11 de la loi du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire, de sorte que vous ne saurez bénéficier de la protection accordée par la Convention de Genève.(…) ».

Le ministre a plus particulièrement estimé que notamment dans le chef de Sefket Rastoder la qualité de sympathisant du SDA ou de membre du SDA et la peur d’une mobilisation générale ne constituent pas au sens de la Convention « un risque actuel de persécution pour des motifs tenant à votre race, à vos opinions politiques, à votre religion, à votre nationalité ou à votre appartenance à un groupe social, que vous courriez si vous deviez retourner dans votre territoire d’origine ».

En ce qui concerne Elifa Dzogovic, le ministre a estimé à l’appui de sa décision de refus qu’elle n’invoque pas d’éléments de persécution personnelle et que l’armée fédérale yougoslave et les forces de police dépendant des autorités serbes, à l’origine des répressions et exactions commises au Kosovo, ayant quitté ce territoire, une force armée internationale, agissant sous l’égide des Nations Unies, s’est installée au Kosovo et une administration civile, placée sous l’autorité des Nations Unies, a été mise en place.

Le jugement dont appel s’est référé aux dispositions de l’article 1er, section A,2. de la Convention de Genève selon lesquelles le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

Il a estimé que la reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière des demandeurs d’asile qui doivent établir, concrètement, que leur situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour leur personne. Il a encore précisé que le tribunal est appelé, dans le cadre d’un recours en réformation, à apprécier le bien-fondé et l’opportunité d’une décision entreprise en tenant compte de la situation existant au moment où il statue.

Le tribunal a retenu qu’en l’espèce, les demandeurs font état de leur crainte de voir commettre des actes de violence à leur encontre, mais ne démontrent point que les autorités administratives en place chargées du maintient de la sécurité et de l’ordre publics ne soient pas capables d’assurer un niveau de protection suffisant aux habitants du Kosovo.

Il a conclu que les arguments et déclarations, dans leur ensemble, constituent l’expression d’un sentiment général de peur, sans qu’ils ont fait état d’un état de persécution vécu ou d’une crainte qui serait elle que le vie leur serait, à raison, intolérable dans leur pays d’origine, étant relevé dans ce contexte que ni lors de leurs auditions ni par la suite ils n’ont aucunement établi des raisons personnelles suffisamment précises de nature à justifier dans leur chef une crainte justifiée d’être persécutés dans leur pays d’origine du fait de leur religion musulmane, des participations à des manifestations du parti « SDA », voire de la prétendue insoumission de Monsieur Rastoder.

Le jugement a dès lors rejeté le recours comme non fondé et donné acte aux demandeurs qu’ils bénéficient de l’assistance judiciaire.

De ce jugement, les époux Sefket Rastoder et Elifa Dzogovic ont relevé appel par requête déposée au greffe de la Cour le 11 janvier 2001.

2 Les appelants font valoir que la notion de « crainte avec raison » contenue à la Convention de Genève du 28 juillet 1951 d’être persécuté implique la réunion de deux éléments, notamment un élément objectif relatif à la situation générale du pays d’origine et un élément subjectif quant à la situation concrète et individuelle de demandeur d’asile.

Ils soutiennent que la situation d’insécurité est toujours très intense au Kosovo faisant que dès lors les requérants sont exposés à un danger de persécution dans leur pays d’origine.

Il est encore fait état par Sefket Rastoder qu’il a fui la réserve et que de ce fait il risque actuellement en cas de retour dans son pays une peine d’emprisonnement de maximum 20 ans.

Les appelants concluent dès lors à la réformation du jugement dont appel.

En son mémoire en réponse du 23 janvier 2001, le délégué du Gouvernement se rallie aux développements et conclusions du tribunal administratif dans le jugement dont appel. En ce qui concerne l’insoumission de l’appelant, il soutient qu’une loi d’amnistie est à l’heure actuelle en cours de préparation en République Fédérale Yougoslave et qu’une telle loi devrait être votée sous peu. Par ailleurs, il ne saurait être passé outre la nouvelle situation politique qui règne en République Fédérale Yougoslave.

Considérant que l’appel est régulier en la forme ;

Qu’il est dès lors recevable ;

Considérant que les appelants ne font pas état d’éléments spécifiques nouveaux par rapport au recours présenté en première instance mais critiquent l’appréciation des faits faite par le tribunal ;

Considérant que la Cour après l’examen des faits de la cause et de leur appréciation au jugement dont appel fait siens les motifs de la décision entreprise qui n’a pas reconnu aux arguments produits à l’appui du recours les caractéristiques propres à justifier l’octroi du statut de réfugié politique au sens de la convention de Genève ;

Qu’il y a dès lors lieu de confirmer le jugement dont appel.

Par ces motifs la Cour administrative, statuant contradictoirement;

reçoit l’appel en la forme ;

le déclare non fondé ;

confirme le jugement dont appel en toutes ses forme et teneur ;

laisse les frais de l’instance d’appel à charge des appelants.

3 Ainsi jugé par:

Georges KILL, président Jean-Mathias GOERENS, premier conseiller, rapporteur Marc FEYEREISEN, conseiller, et lu par le président Georges KILL en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour.

le greffier en chef le président 4


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12761C
Date de la décision : 22/03/2001

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2001-03-22;12761c ?

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