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22/03/2001 | LUXEMBOURG | N°12253C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 22 mars 2001, 12253C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 12253C Inscrit le 18 août 2000 AUDIENCE PUBLIQUE DU 22 MARS 2001 Requête d’appel de Millicom Luxembourg SA contre la Ville de Luxembourg en présence de Legalid SCI en matière de permis de construire (jugement entrepris du 12 juillet 2000, n° du rôle 11314)  Vu la requête déposée au greffe de la Cour administrative le 18 août 2000 par laquelle Maître André Marc, avocat à la Cour, au nom de la société anonyme Millicom Luxembou

rg SA, établie et ayant son siège social à L-8077 Bertrange, 177, rue de Luxembourg, représentée par son conseil d’administrat...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 12253C Inscrit le 18 août 2000 AUDIENCE PUBLIQUE DU 22 MARS 2001 Requête d’appel de Millicom Luxembourg SA contre la Ville de Luxembourg en présence de Legalid SCI en matière de permis de construire (jugement entrepris du 12 juillet 2000, n° du rôle 11314)  Vu la requête déposée au greffe de la Cour administrative le 18 août 2000 par laquelle Maître André Marc, avocat à la Cour, au nom de la société anonyme Millicom Luxembourg SA, établie et ayant son siège social à L-8077 Bertrange, 177, rue de Luxembourg, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, a relevé appel contre la Ville de Luxembourg, en présence de la société civile immobilière Legalid SCI, d’un jugement rendu le 12 juillet 2000 par le tribunal administratif dans la cause inscrite sous le numéro 11314 du rôle ;

Vu le mémoire en réponse déposé en date du 3 octobre 2000 au greffe de la Cour administrative par Maître Jean Medernach, avocat à la Cour, au nom de la Ville de Luxembourg, représentée par son collège des bourgmestre et échevins, établie à Luxembourg, 42, place Guillaume :

Vu le mémoire en réponse déposé en date du 13 octobre 2000 au greffe de la Cour administrative par Maître Roland Assa, avocat à la Cour, au nom de la société civile immobilière Legalid SCI, établie et ayant son siège social à L-8024 Strassen, 3, rue Thomas Edison, représentée par son organe statutaire en fonctions, Madame Denise Reuter-Weis, administratrice de sociétés, demeurant à L-8036 Strassen, Cité Oricher-

Hoehl, prise en sa double qualité de gérante et associée de la société en question ;

Vu le mémoire en réplique déposé en date du 13 novembre 2000 au greffe de la Cour administrative par Maître André Marc ;

Vu le mémoire en duplique déposé en date du 13 décembre 2000 au greffe de la Cour administrative par Maître Roland Assa ;

Vu les pièces régulièrement versées en cause ainsi que le jugement entrepris;

Ouï le premier conseiller rapporteur en son rapport à l’audience du 15 février 2001, ainsi que Maître André Marc, Maître Nathalie Prum-Carré, en remplacement de Maître Roland Assa, et Maître Gilles Dauphin, en remplacement de Maître Jean Medernach, en leurs observations orales.

Par requête du 18 août 2000, la société anonyme Millicom déclare relever appel contre un jugement du tribunal administratif du 12 juillet 2000, n° 11314 du rôle qui a annulé une autorisation de construire lui décernée par le bourgmestre de la Ville de Luxembourg le 4 mars 1999 et l’a condamnée, ainsi que la Ville de Luxembourg, à payer une indemnité de procédure à la SCI Legalid, demanderesse en première instance.

Le jugement dont appel est critiqué en ce que ce serait à tort qu’il a reconnu un intérêt à agir à la SCI Legalid.

Il est soutenu au fond que ce serait à tort que le jugement a retenu le motif d’annulation tiré de ce que le permis de construire accordé serait contraire aux dispositions du plan d’aménagement général de la Ville de Luxembourg alors qu’ « aucune station GSM (ne serait) susceptible d’être construite sur un terrain réservé aux installations sportives et de récréation… . » Il est encore soulevé que la requérante originaire, personne morale ne souffrirait d’aucun préjudice de la construction autorisée et qu’aucune disposition du règlement des bâtisses n’autoriserait le bourgmestre à refuser le permis de construire accordé.

Dans son mémoire en réponse du 3 octobre 2000, la Ville de Luxembourg se rallie aux développements de l’acte d’appel quant au problème de l’intérêt à agir de la demanderesse.

Au fond, la Ville de Luxembourg soutient que si le terrain qui doit recevoir la construction litigieuse est bien classé comme « terrain réservé aux installations sportives et de récréation » il ne serait pas exclusivement réservé à ces fins alors que la classification en question ne serait qu’une sous-catégorie des terrains réservés, qui seraient déférés au PAG comme étant « certaines parties du territoire de la ville…destinées à recevoir des équipements publics ou d’utilité générale ».

Il est soutenu encore que, les dispositions visées étant des règles de police, elles seraient d’interprétation stricte, de sorte que seule des restrictions prévues pourraient être opposées au propriétaire du terrain.

Il est dès lors conclu à voir déclarer le recours en annulation irrecevable sinon non fondé.

2 Par mémoire en réponse de la SCI Legalid du 13 octobre 2000, il est conclu à la confirmation du jugement entrepris et à l’augmentation de l’indemnité de procédure au montant de 120.000.- francs.

L’intimée développe plus amplement les éléments devant établir l’existence de son intérêt à agir.

Au fond, l’intimée se réfère plus particulièrement à la motivation du jugement qui retient que les terrains réservés seraient au PAG subdivisés en catégories différentes limitativement énumérées et non interchangeables entre elles.

A titre subsidiaire, la SCI Legalid reprend les autres moyens d’annulation de la décision non analysés comme jugés superfétatoires par le jugement dont appel.

En son mémoire en réplique du 13 novembre 2000, l’appelante Millicom SA développe plus amplement ses moyens quant à l’intérêt à agir et à la portée des dispositions des règlements d’urbanisme de la Ville de Luxembourg.

A titre subsidiaire, il est conclu à la non-opposabilité à Millicom des dispositions communales alors qu’elle tiendrait ses droits de la loi du 21 mars 1997 sur les télécommunications.

En son mémoire en duplique du 13 décembre 2000, Légalid reprend ses conclusions sur son intérêt à agir. Elle développe les moyens de fond tirés du PAG de la Ville de Luxembourg.

En ce qui concerne le moyen nouveau tiré de la loi précitée du 21 mars 1997, Legalid conclut à le voir déclarer irrecevable comme n’ayant été produit qu’au mémoire en réplique en instance d’appel. A titre plus subsidiaire, Legalid conteste les conclusions de l’appelante quant à la portée de la loi du 21 mars 1997.

A titre subsidiaire, Legalid déclare maintenir ses moyens de nullité produits en première instance quant à « l’inexistence de la prétendue demande sur base de laquelle l’autorisation a été accordée » et quant à ce que l’autorisation de construire « ne comporte pas d’accès autorisable à la construction litigieuse ».

Considérant que l’appel est régulier an la forme ;

Qu’il est partant recevable ;

Considérant que l’appelante, rejointe en ceci par la Ville de Luxembourg, reprend en instance d’appel le moyen produit en première instance tiré du défaut d’intérêt à agir de la SCI Legalid ;

Considérant que le jugement dont appel a rejeté le moyen en question au motif que si les voisins proches ont un intérêt évident à voir respecter les règles applicables en matière d’urbanisme, cette proximité de situation constitue un indice pour établir l’intérêt à agir, mais ne suffit pas à elle seule pour le fonder, qu’il faut de surcroît que l’inobservation 3 éventuelle de ces règles soit de nature à entraîner une aggravation concrète de leur situation de voisins ;

Que quant à la situation concrète de l’espèce, le tribunal a estimé que même si le terrain de la société Legalid, voisin de celui appartenant à la Ville de Luxembourg sur lequel la station GSM critiquée est érigée se trouvant à la base de la décision déférée, est à l’heure actuelle non construit, il n’en reste pas moins que la partie demanderesse a justifié d’un intérêt personnel, distinct de l’intérêt général, né et actuel, dans la mesure où elle entend voir analyser la légalité de la décision de la bourgmestre de la Ville de Luxembourg du 4 mars 1999 par elle critiquée, en ce que sa situation patrimoniale est immédiatement touchée par la construction de la station à fleur de son terrain, les questions d'accès y relatives touchant également de façon directe la propriété Legalid;

Considérant que la Cour fait sienne cette appréciation du tribunal et qu’il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré non fondé le moyen d’irrecevabilité de la demande originaire pour défaut d’intérêt à agir ;

Considérant que dans son mémoire en réplique, l’appelante fait état, à titre subsidiaire, de la disposition de l’article 34 (1) de la loi du 21 mars 1997 sur les télécommunications, de laquelle il résulterait que le PAG de la Ville de Luxembourg ne lui serait pas opposable dans la mesure où il contiendrait des dispositions contraires à ce texte légal ;

Considérant que, bien que formulé en ordre subsidiaire, ce moyen doit être examiné en premier lieu par la Cour alors que son bien-fondé éventuel est de nature à emporter une solution péremptoire du litige, de sorte que l’examen des moyens tirés du PAG de la Ville de Luxembourg en deviendrait superflu ;

Considérant que l’intimée Legalid SCI conclut à voir déclarer le moyen nouveau irrecevable comme formulé pour la première fois au mémoire en réplique en instance d’appel, alors que, si les moyens nouveaux, aux termes de l’article 41 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives dispose que les moyens nouveaux sont recevables en appel, ces moyens n’en devraient pas moins être produits dans la requête d’appel elle-même qui, aux termes du même article, doit contenir l’exposé sommaire des faits et moyens exposés ;

Considérant qu’il y a lieu de suivre ce raisonnement sauf à examiner le cas échéant si le moyen nouveau n’est pas d’ordre public auquel cas il pourrait être produit en tout état de cause ;

Considérant que le texte invoqué disposant que le titulaire d’une licence pour l’exploitation d’une ligne de télécommunication est autorisé à faire usage du domaine public de l’Etat et des communes pour établir des câbles, lignes aériennes et équipements annexes, il y aurait lieu d’examiner si le droit ainsi concédé relève de l’ordre public, si les installations projetées sont de celles visées par la loi invoquée et si le terrain où l’installation est prévue fait partie du domaine public de la Ville de Luxembourg ;

Considérant toutefois qu’à supposer même qu’une réponse positive s’imposerait aux trois questions soulevées, il n’en serait pas moins que l’installation visée devrait être conforme aux dispositions du plan d’aménagement communal et au règlement sur les bâtisses ;

4 Qu’il convient dès lors d’examiner cette question en premier lieu ;

Considérant que le jugement dont appel a décidé que l’installation projetée n’est pas conforme au plan d’aménagement général et qu’il a annulé la décision du bourgmestre accordant le permis de construire au motif que les dispositions de la partie écrite du PAG réglementant l’usage de la parcelle dont s’agit ne permettraient pas l’installation prévue ;

Considérant qu’il est constant et non contesté en cause que le terrain dont s’agit est classé en zone dénommée « terrains réservés aux installations sportives et de la récréation » par la disposition F.1b du texte, le chapitre F étant intitulé « Les terrains réservés et les terrains à étude » et le texte générique F1 qui contient la subdivision F.1b visée portant que « certaines parties du territoire de la Ville sont destinées à recevoir des équipements publics ou privés de l’utilité générale », ce texte F1 énumérant, outre le point b) ci-

dessous cité, sept autres catégories de terrains « réservés » ;

Considérant que l’appelante Millicom SA et la Ville de Luxembourg concluent à la réformation du jugement, au motif cité ci-dessus que le terrain classé comme réservé aux installations sportives et de récréation ne serait pas exclusivement réservé à ces fins, mais pourrait recueillir, aux termes du texte général F1, des équipements publics ou d’utilité générale, et que le bourgmestre n’aurait pas été autorisé à refuser le permis de construire litigieux;

Considérant que cette façon de voir, déjà présentée en première instance a été rejetée par le jugement dont appel sur base de la motivation suivante « Considérant que la définition fournie par un projet général d’aménagement, texte réglementaire, est destinée à se suffire à elle-même, sans qu’il ne faille, en règle générale, avoir recours à des définitions extérieures, lesquelles n’entrent en ligne de compte que si le texte n’est pas clair et précis, de sorte à nécessiter une interprétation ;

Considérant qu’en l’espèce l’article F.1. alinéa premier du PGA définit de façon précise les parties du territoire de la Ville classées comme terrains réservés dans la mesure où ce sont celles destinées à recevoir des équipements publics ou privés d’utilité générale ;

Considérant qu’il est patent qu’une station GSM range parmi les équipements d’utilité générale, celle actuellement critiquée de la société MILLICOM LUXEMBOURG étant pour le surplus à qualifier de privée en raison de sa gestion commerciale de droit privé ;

Que partant la station GSM en question est en principe éligible en vue d’être installée sur une des parties du territoire de la Ville désignée par ledit alinéa premier de l’article F.1 PGA qui, d’après son alinéa second, sont appelées globalement terrains réservés ;

Considérant que s’il résulte de la disposition de l’article F.1 PGA que les terrains réservés et les parties du territoire de la Ville qu’ils représentent constituent dans leur globalité un ensemble, il n’en reste pas moins que cet ensemble est subdivisé en huit catégories différentes énumérées limitativement par l’alinéa second dudit article F.1.

PGA, et non interchangeables en tant que telles ;

5 Qu’il résulte en effet de l’énumération successive des huit catégories en question que chacune comporte une destination spécifique et qu’elles sont chacune renseignées sur la partie graphique du plan général d’aménagement par une couleur à part ;

Considérant qu’il est constant que le fonds immobilier accueillant actuellement le stade Prince Jean, comprenant le terrain de football du Red Star de Merl, ainsi que suivant les projets MILLICOM la station GSM critiquée, revêt sur la partie graphique du plan général d’aménagement de la Ville de Luxembourg la couleur vert bleuâtre le rangeant ainsi sous la catégorie de l’article F.1. alinéa second sub b) parmi les terrains réservés aux installations sportives et de récréation ;

Considérant qu’il est patent que la station GSM en question ne relève pas des installations sportives et de récréation ;

Considérant que ce n’est pas parce que globalement considérée la station GSM constitue un équipement d’utilité générale susceptible d’être installé sur un terrain réservé au sens de l’article F.1, que nécessairement elle est éligible d’être placée dans n’importe laquelle des huit catégories énumérées audit article ;

Que ces catégories n’étant point interchangeables, au vu des différences à la base de leurs destinations particulières retenues par le texte réglementaire prérelaté, aucune station GSM n’est susceptible d’être construite sur un terrain réservé aux installations sportives et de récréation, dont justement elle ne relève pas ; » Considérant que cette motivation rencontre de manière appropriée les arguments opposés à la demande et gisant, en ce qui concerne l’application de la réglementation communale, à la base de l’appel ;

Que la Cour fait sienne la motivation du jugement dont appel qui a abouti à l’annulation de la décision du bourgmestre alors que la parcelle visée ne saurait recueillir l’installation projetée ;

Considérant que ceci étant, l’examen du moyen tiré de l’article 34 de la loi du 21 mars 1997 sur les télécommunications s’avère inutile ;

Qu’il y a lieu de confirmer le jugement dont appel ;

Par ces motifs la Cour statuant contradictoirement ;

reçoit l’appel en la forme ;

le déclare non fondé ;

confirme le jugement dont appel en toute ses forme et teneur ;

laisse les frais de l’instance d’appel à l’appelante.

6 Ainsi jugé par:

Georges KILL, président Jean-Mathias GOERENS, premier conseiller, rapporteur Marc FEYEREISEN, conseiller, et lu par le président Georges KILL en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour.

le greffier en chef le président 7


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12253C
Date de la décision : 22/03/2001

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2001-03-22;12253c ?

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