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21/12/2000 | LUXEMBOURG | N°12162C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 21 décembre 2000, 12162C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° 12162C du rôle Inscrit le 27 juillet 2000 AUDIENCE PUBLIQUE DU 21 DECEMBRE 2000 Requête d’appel formée par le ministre de l’Intérieur contre la société civile immobilière Domaine Paul-James BARTHELEMY - JUEGDSCHLASS et James BARTHELEMY en présence de la Ville de Luxembourg en matière d’aménagement des agglomérations (Jugement entrepris du 19 juin 2000, n° du rôle 10009) Vu la requête déposée au greffe de la Cour administrative le 27 juillet 2000 par laquelle le ministre de l’Intérieur a relevé appel contre la société

civile immobilière Domaine Paul-James Barthelemy – Juegdschlass et le sieur...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° 12162C du rôle Inscrit le 27 juillet 2000 AUDIENCE PUBLIQUE DU 21 DECEMBRE 2000 Requête d’appel formée par le ministre de l’Intérieur contre la société civile immobilière Domaine Paul-James BARTHELEMY - JUEGDSCHLASS et James BARTHELEMY en présence de la Ville de Luxembourg en matière d’aménagement des agglomérations (Jugement entrepris du 19 juin 2000, n° du rôle 10009) Vu la requête déposée au greffe de la Cour administrative le 27 juillet 2000 par laquelle le ministre de l’Intérieur a relevé appel contre la société civile immobilière Domaine Paul-James Barthelemy – Juegdschlass et le sieur James Barthelemy, en présence de la Ville de Luxembourg, d’un jugement rendu le 19 juin 2000 par le tribunal administratif dans la cause inscrite sous le numéro 10009 du rôle;

vu les mémoires en réponse versés en cause les 28 août 2000 et 12 septembre 2000 respectivement par les intimés société civile immobilière Domaine Paul-James Barthelemy – Juegdschlass et James Barthelemy et par la Ville de Luxembourg appelée en cause;

vu le mémoire en réplique versé en cause le 3 octobre 2000 par le délégué du Gouvernement ;

vu les pièces régulièrement versées en cause et notamment le jugement entrepris;

ouï Monsieur le premier conseiller en son rapport à l’audience du 23 novembre 2000, Monsieur le délégué du Gouvernement Guy Schleder en ses moyens, ainsi que Maître Michel Karp et Maître Luc Reding, en remplacement de Maître Jean Medernach en leurs plaidoiries.

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Par mémoire déposé au greffe de la Cour le 27 juillet 2000, l’Etat du Grand-Duché, sous la signature du délégué du Gouvernement Guy Schleder et en vertu d’un mandat du ministre de l’Intérieur du 26 juillet 2000 a déclaré relever appel contre un jugement du tribunal administratif du 19 juin 2000 rendu sur recours de la société civile immobilière Domaine Paul-James Barthelemy – Juegdschlass et du sieur James Barthelemy en matière d’actes administratifs à caractère réglementaire en l’espèce relativement à la procédure d’adoption du plan d’aménagement général de la Ville de Luxembourg.

Le jugement entrepris a déclaré la juridiction administrative compétente pour connaître du recours, l’a déclaré recevable en tant que dirigé contre la décision ministérielle déférée dans la mesure des réclamations des parties demanderesses toisées audit jugement et irrecevable pour le surplus ;

au fond, l’a dit partiellement justifié ;

a annulé la décision déférée en son article 4 alinéa second et renvoyé l’affaire dans cette mesure devant le ministre de l’Intérieur.

Quant à la compétence, le jugement dont appel a requalifié en moyen d’incompétence le moyen présenté comme tendant à l’irrecevabilité du recours alors que la procédure « d’adoption et d’approbation d’un plan d’aménagement général ne créerait pas de façon immédiate et directe de droit, ni de devoir subjectifs dans le chef des administrés, ni n’affecterait de manière certaine et actuelle leur intérêts privés ». Le jugement a retenu que la compétence « du tribunal est vérifiée si l’acte administratif à caractère réglementaire en question a un effet direct sur les intérêts privés, ne fût-ce d’une personne, dont il affecte immédiatement la situation, sans nécessiter pour autant la prise d’un acte individuel d’exécution ». Il a estimé que tel est bien le cas pour les délibérations relatives à l’adoption des règles d’un plan d’aménagement général.

En ce qui concerne la recevabilité, le jugement a déclaré le recours recevable en tant que dirigé contre la décision du ministre de l’Intérieur dans la mesure où elle a statué sur les réclamations des parties Société civile immobilière Domaine Paul-James Barthelemy – Juegdschlass et James Barthelemy et irrecevable en ce qu’il visait la décision du ministre portant approbation du plan d’aménagement général et contre les décisions du conseil communal de la Ville de Luxembourg. La distinction est fondée sur ce que l’effet rétroactif prêté par la jurisprudence et la doctrine aux décisions tutélaires d’approbation ne se concevraient pas en présence d’un refus d’approbation, la décision ministérielle portant refus partiel d’approbation se situant par ailleurs dans le temps après l’entrée en vigueur de la loi du 7 novembre 1996 qui a créé le recours direct en annulation des actes à caractère réglementaire.

En ce qui concerne le fond, le jugement a annulé la décision ministérielle au motif que, ayant, sur réclamation des parties intéressées, substitué un libellé nouveau au texte de la délibération du conseil communal, le ministre aurait enfreint la règle exigeant que l’acte d’approbation ou de non-

approbation soit pur et simple.

Le jugement dont appel est critiqué par l’Etat dans la mesure où il a déclaré le recours recevable alors que par l’effet du caractère rétroactif de l’approbation, celle-ci remonterait à la date de la décision approuvée, soit à une époque antérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 7 novembre 1996.

Le jugement est encore entrepris par l’Etat alors que ce serait à tort qu’il a annulé la décision ministérielle pour avoir changé le libellé du texte de la délibération municipale, cette manière de faire étant licite dans le chef du ministre dès lors qu’il statue dans le cadre d’une réclamation soumise au Gouvernement sur base de l’article 9, alinéa final de la loi du 12 juin 1937 sur l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes qui mettrait en place une règle particulière à laquelle le principe de l’approbation pure et simple ne s’appliquerait pas.

Sur base de ces considérations, il est demandé à la Cour de réformer le jugement entrepris et de déclarer le recours non fondé.

Dans leur mémoire en réponse du 28 août 2000 signifié à la Ville de Luxembourg le 24 août 2000, les intimés société civile immobilière Domaine Paul-James Barthelemy – Juegdschlass et James 2 Barthelemy se rapportent à prudence de justice en ce qui concerne la recevabilité de l’appel quant aux délais et à la question de savoir si un appel est possible en la matière.

Les intimés se rapportent encore à prudence de justice en ce qui concerne la qualité d’agir et l’intérêt à agir du délégué du Gouvernement, le recours ayant été essentiellement dirigé contre la Ville de Luxembourg et alors que le délégué du Gouvernement aurait, dans son mémoire en première instance, « mentionné qu’aucune expropriation ou restriction à l’exercice de leur droit ne sera apportée aux requérants ».

Pour le cas où l’appel devait être déclaré recevable, les intimés donnent à considérer que le délégué du Gouvernement ne demande pas dans le dispositif de son acte d’appel de déclarer le recours introduit par les parties de Maître Karp irrecevable, mais seulement non fondé ; or la Cour d’appel ne saurait statuer ultra ou extra petita et le dispositif primerait la motivation de l’acte d’appel.

En ordre subsidiaire, ils concluent à ce sujet à la confirmation du jugement.

Quant au fond les intimés déclarent maintenir leurs moyens de première instance.

Ils demandent acte de leur appel incident dans la mesure où le tribunal de première instance a annulé uniquement la décision ministérielle en son article 4 alinéa second et non les autres décisions attaquées.

En ordre subsidiaire, au fond, ils concluent à la confirmation du jugement.

Dans un mémoire en réponse du 12 septembre 2000 notifié le 6 septembre 2000, la Ville de Luxembourg déclare maintenir ses moyens de première instance et relever appel incident contre le jugement intervenu.

Elle reprend le moyen tiré du prétendu défaut d’intérêt des requérants originaires, le plan d’aménagement général ne créant de façon directe ni de droit ni d’obligation dans le chef des administrés propriétaires et la légalité d’un plan d’aménagement général pouvant par ailleurs être vérifiée par voie incidente à l’occasion d’une contestation relative à l’octroi ou au refus d’un permis de construire.

Il est soutenu encore que ç’aurait été à tort que le tribunal n’a pas suivi la jurisprudence voulant que les actes d’approbation ou de désapprobation de l’autorité tutélaire rétroagissent à la date des décisions à approuver. L’application de ce principe aurait dû amener le tribunal à déclarer le recours irrecevable.

Il est ensuite soutenu que le juge de la légalité ne saurait se livrer à une appréciation de l’opportunité du classement d’un terrain dans une zone déterminée, classement qui d’ailleurs serait intervenu de manière parfaitement justifié en l’occurrence.

La Ville de Luxembourg conclut au rejet des moyens relevant de la Convention européenne des droits de l’homme et concernant la contestation de la constitutionnalité des dispositions légales applicables.

Il est conclu à l’irrecevabilité sinon au rejet de l’appel incident des intimés Société civile immobilière Domaine Paul-James Barthelemy – Juegdschlass et James Barthelemy.

En ordre subsidiaire la Ville de Luxembourg conclut à la confirmation du jugement.

3 En son mémoire en réplique du 3 octobre 2000, le délégué du Gouvernement motive la recevabilité de son appel par référence aux dispositions de l’article 61 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives. Il affirme sa qualité d’agir découlant du mandat ministériel et l’intérêt à agir de l’Etat alors qu’une décision ministérielle a été partiellement annulée par le jugement dont appel.

Le délégué du Gouvernement soutient encore, en ce qui concerne les conclusions des intimés Société civile immobilière Domaine Paul-James Barthelemy – Juegdschlass et James Barthelemy sur l’appel principal, qu’aucune disposition légale n’obligerait à répéter dans le dispositif les conclusions d’irrecevabilité développées dans les moyens d’appel, l’étendue de la dévolution étant déterminée par les termes de la requête d’appel.

Le délégué du Gouvernement conclut enfin à voir dire non fondé l’appel incident des intimés Société civile immobilière Domaine Paul-James Barthelemy – Juegdschlass et James Barthelemy.

En ce qui concerne la recevabilité de l’appel :

Considérant que l’appel a été interjeté dans les formes et délais de la loi ;

que le jugement est appelable aux termes de l’article 61 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;

que l’appel est interjeté par le délégué du Gouvernement Guy Schleder en vertu d’un mandat du ministre de l’Intérieur conformément à l’article 39 de la même loi ;

que l’Etat a qualité et intérêt à agir alors que le jugement entrepris a annulé une décision du ministre de l’Intérieur ;

que l’appel est dès lors recevable ;

Considérant que le moyen « donnant à considérer que le délégué du Gouvernement ne demande pas dans le dispositif de son acte d’appel de déclarer le recours irrecevable, mais seulement non fondé » ne saurait tirer à conséquence alors que, aucune prescription légale n’obligeant à répéter dans le dispositif les moyens développés dans les moyens d’appel, le litige est déféré à la Cour dans la mesure de tous les moyens d’appel, les parties en cause n’ayant pu d’ailleurs se méprendre sur la portée de l’appel ;

Considérant que l’appel incident des intimés Société civile immobilière Domaine Paul-James Barthelemy – Juegdschlass et James Barthelemy formulé contre le jugement dont appel dans la mesure où il n’a pas entièrement fait droit à leurs moyens de première instance est recevable ;

Considérant que, la Ville de Luxembourg n’étant pas intimée comme n’ayant pas, en première instance produit des moyens contraires à ceux de l’appelant principal, son appel incident n’est pas recevable ;

que les moyens de la Ville de Luxembourg ne sont dès lors à considérer que comme des moyens de défense à la demande originaire ;

En ce qui concerne la recevabilité du recours originaire :

4 Considérant que, pour les motifs du jugement entrepris que la Cour adopte, il y a lieu d’écarter le moyen tiré du défaut d’intérêt à agir opposé par la Ville de Luxembourg quant à la recevabilité du recours originaire ;

Considérant que l’acte d’appel, que rejoignent les conclusions de la Ville de Luxembourg, critique le jugement en ce que ce serait à tort que le tribunal aurait écarté le moyen d’irrecevabilité tiré de ce que la décision ministérielle entreprise, décision de tutelle administrative, aurait rétroagi à la date des décisions communales portant approbation du plan d’aménagement général de la Ville de Luxembourg, soit à une date antérieure à celle de l’entrée en vigueur, au 1er janvier 1997, de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, cette loi ayant seulement créé le recours direct contre les décisions administratives à caractère réglementaire ;

Considérant que le jugement entrepris a déclaré le recours irrecevable pour les motifs repris à l’acte d’appel dans la mesure où il était dirigé contre des décisions du conseil communal et du ministre de l’Intérieur autres que celles de la page 6, alinéa 3 des considérants et de l’article 4, alinéa 2 du dispositif de la décision ministérielle du 6 février 1997, soit les dispositions se rapportant à la réclamation formulée par les requérants en vertu de l’article 9 de la loi du 12 juin 1937 sur l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes ;

que l’appel est dès lors sans objet au-delà de la portée de ces dispositions particulières ;

Considérant qu'après avoir accueilli les moyens d'irrecevabilité produits en première instance sur base des considérations de non-existence de la voie de recours au moment des décisions municipales auxquelles a rétroagi la décision ministérielle dans la mesure où elle les a approuvées, le jugement entrepris a déclaré recevable le recours dans la mesure où il est dirigé contre les dispositions précitées de la décision ministérielle;

que cette branche de la décision est fondée sur ce que un effet rétroactif ne se concevrait pas en matière de refus d'approbation, "étant donné qu'à travers un tel refus prononcé, la décision à approuver est appelée à disparaître, de sorte que seul l'acte de tutelle subsiste et peut rester sujet à critique";

que le jugement opine encore "que l'admissibilité d'un recours en annulation contre l'acte de tutelle seul subsistant doit s'apprécier au moment où l'autorité de tutelle a statué, soit en l'espèce le 6 février 1997, partant sous l'empire de la loi (précitée) du 7 novembre 1996, ..";

que sur base de ces considérations, le jugement entrepris a déclaré recevable le recours en tant que visé contre les volets de la décision ministérielle mis en exergue ci-dessus;

Considérant qu'il y a lieu d'adopter cette façon de voir des premiers juges et de confirmer le jugement sur ce point (cf. Ministre de l'Intérieur c/ Kremer du 16 novembre 2000, n° 11878C du rôle);

Quant au fond de l'appel principal:

Considérant que l'appel critique encore le jugement en ce qu'il a annulé la décision ministérielle pour ne pas avoir respecté le caractère d'acte d'approbation pur et simple que doit avoir la décision de l'autorité de tutelle;

Considérant que le jugement attaqué a fondé sa décision sur ce que l'approbation partielle par l'autorité de tutelle ne serait possible que si les points de la décision sur lesquels portent l'approbation ou le refus d'approbation partiel constituent des actes détachables et ne forment pas, avec les autres 5 éléments de la décision soumise à approbation, un ensemble indissociable, élément qui a été retenu comme existant en l'espèce;

Considérant que si la Cour partage ce point de vue en principe (cf. Commune de Berdorf c/ Ministre de l'Intérieur du 25 novembre 1997, n° 9497C du rôle), la règle visée ne saurait toutefois trouver application dans l'hypothèse particulière réglée par l'article 9 in fine de la loi précitée du 12 juin 1937;

Considérant que l'article en question, après avoir fixé la procédure à suivre obligatoirement pour l'adoption d'un plan d'aménagement général ou particulier, permet aux intéressés dont les objections n'ont pas été accueillies par l'autorité communale d'adresser des réclamations au Gouvernement sur lesquelles " le ministre statue, le conseil communal et la commission (d'aménagement) entendus";

Considérant qu'en présence de réclamations produites dans le cadre de la procédure de l'article 9 de la loi, contrairement à l'hypothèse où le ministre prend d'office une décision d'approbation partielle ou de reclassement (cf arrêt Commune de Berdorf précité) le ministre dispose, en vertu de la disposition citée ci-dessus, d'un pouvoir d'appréciation sur le bien-fondé de la réclamation, c'est-à-

dire sur la légalité et l'opportunité de la décision que le conseil communal a prise sur les objections des réclamants;

Considérant que cette interprétation de la loi découle du texte lui-même et qu'une interprétation différente viderait la disposition légale de toute portée;

que le sens de la disposition est de donner au ministre appelé par ailleurs à statuer, par approbation ou refus pur et simple, sur les dispositions de la délibération communale qui ne fait pas l'objet de réclamations, compétence pour vider les réclamations, c'est-à-dire, au cas où il les estime justifiées, de prendre une décision nécessairement modificative de la délibération communale qui a refusé de faire droit aux objections qui avaient le même objet que les réclamations adressées au Gouvernement;

Considérant qu'il s'ensuit qu'il y a lieu de réformer le jugement en ce qu'il a annulé la décision ministérielle dans la mesure visée au jugement;

En ce qui concerne l'appel incident de la société civile immobilière Domaine Paul-James Barthelemy - Juegdschlass et James Barthelemy Considérant que les intimés la société civile immobilière Domaine Paul-James Barthelemy – Juegdschlass et James Barthelemy formulent appel incident "dans la mesure où le tribunal de première instance a annulé uniquement la décision ministérielle en son article 4 et non les autres dispositions attaquées";

Considérant qu'au vu de la requête introductive d'instance, y "est principalement entreprise la décision libellée à la page 6/17, alinéa 3 et subsidiairement cette même décision ministérielle dans son article 4 alinéa 2, pour autant que de besoin est également entreprise la décision du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 12 juillet 1993 et du 25 avril 1994 portant approbation du plan d'aménagement général";

Considérant que dans le mémoire en appel il est encore déclaré que les intimés maintiennent tous leurs moyens de fait et de droit exposés en première instance;

Considérant que sur base de ce qui a été développé ci-dessus, l'appel visant les dispositions autres que celles de l'article 4 alinéa 2 de l'arrêté ministériel déféré n'est pas fondé, le recours étant irrecevable à cet égard, étant entendu que le recours et l'appel, en ce qu'ils concernent les décisions visées audit article de la décision ministérielle portent nécessairement aussi sur les décisions du 6 conseil communal dans la mesure où elles concernent le classement des parcelles visées et les dispositions y applicables;

Considérant que le recours sous examen, introduit sur base de l'article 7 de la loi du 7 novembre 1996 est un recours en annulation;

que la Ville de Luxembourg oppose à ce sujet que le juge de la légalité, fonction à laquelle la juridiction administrative est limitée à défaut de l'existence d'un recours en réformation, ne peut se livrer à une appréciation de l'opportunité du classement de terrains dans une zone déterminée du plan d'aménagement général;

Considérant toutefois que le juge administratif saisi d’un recours en annulation a le droit et le devoir de vérifier la réalité des faits matériels qui sont à la base de la décision et d’examiner si les motifs retenus à l’appui d’une décision de l’autorité administrative sont de nature à fonder légalement la décision attaquée et si cette dernière, en fait, n’est pas entachée de nullité pour excès ou détournement de pouvoir ou prise en violation de la loi ;

Considérant en l'espèce que la décision entreprise, soit la réformation partielle de la partie écrite du plan d'aménagement général sur les parcelles appartenant au requérant, est motivée par des considérations de l'ordre de l'aménagement du territoire de la Ville de Luxembourg;

qu'en estimant ne pas devoir faire entièrement droit à la réclamation lui adressée, le ministre n’a fait qu’exercer sa compétence légale de tutelle;

qu’il appartient au ministre de peser la valeur des intérêts publics et privés en discussion et qu’en mettant en avant des considérations d’urbanisme et d’aménagement du territoire, il est resté dans ses attributions;

Considérant que les arguments produits à la requête introductive en première instance se rapportent à des aspects d’opportunité et de fait et ne font pas valoir des moyens de droit propres à justifier une annulation de la décision ministérielle sur base de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996;

Qu’il en résulte que la décision ministérielle entreprise n’est pas entachée d’un vice devant entraîner son annulation sur base de l’article 7 de la loi précitée du 7 novembre 1996 et le recours n’est dès lors pas fondé sur cette base;

Considérant que le moyen tendant à dire que la décision du ministre serait à analyser en une expropriation cachée contraire à l’article 16 de la Constitution et à l’article 545 du Code civil est à rejeter alors que ladite disposition constitutionnelle ne fait pas obstacle à la réglementation de l’usage du droit de propriété;

que le législateur, en imposant aux communes d’établir un projet d’aménagement et d’édicter un règlement sur les bâtisses a nécessairement habilité le pouvoir communal à réglementer l’usage du droit de propriété lorsque sa réglementation est nécessaire à la réalisation des objectifs de la loi du 12 juin 1937 (C.E. 21 avril 1994 n° 8641 du rôle);

Considérant qu’au mémoire d’appel des requérants originaires, il est encore soutenu que « priver les parties de Maître Michel Karp, en l’espèce en raison de l’absence de loi antérieure à celle du 7 novembre 1996 de tout recours serait contraire à l’article 11, 2 de la Constitution et à l’article 6-1 de la Convention des droits de l’Homme, sinon à la Constitution »;

Considérant que le moyen tenant à la violation de la Constitution manque de précisions;

7 que la Cour ne voit pas en quelle mesure la décision du ministre violerait le principe sans doute visé de l’égalité devant la loi;

Considérant que le moyen tiré de la violation de l’article 6-1 de la Convention européenne des droits de l’homme n’est pas fondé;

qu’en effet dans la mesure où il vise une prétendue absence de recours contre les parties de délibérations acquises avant la création du recours juridictionnel direct contre les actes à caractère réglementaire, le moyen manque en droit alors que, sous l’empire de l’ancienne législation, la légalité d’un acte réglementaire pouvait être contestée par voie incidente sur base de l’article 95 de la Constitution, cette faculté demeurant d’ailleurs possible sous l’empire de la nouvelle législation (C.A.

9 décembre 1997, n° 10249C Stein);

Considérant qu’il en résulte que le recours en annulation tel que résultant de la requête du 23 mai 1997 n’est pas fondé;

Considérant qu’il y a lieu de mettre les frais et dépens des deux instances à charge des requérants société civile immobilière Domaine Paul-James Barthelemy – Juegdschlass et James Barthelemy.

Par ces motifs la Cour, statuant contradictoirement, reçoit l’appel principal de l’Etat et l’appel incident de la société civile immobilière Domaine Paul-

James Barthelemy – Juegdschlass et James Barthelemy en la forme;

déclare l’appel incident de la Ville de Luxembourg irrecevable;

confirme le jugement entrepris dans la mesure où il a déclaré le recours recevable en ce qu’il est dirigé contre les dispositions de l’arrêté ministériel se rapportant à la réclamation des parties de la société civile immobilière Domaine Paul-James Barthelemy – Juegdschlass et James Barthelemy;

réformant, dit qu’il n’y a pas lieu à annulation de la décision ministérielle;

au fond, déclare l’appel incident non fondé;

dit le recours originaire non fondé et le rejette ;

met les frais et dépens des deux instances à charge des requérants de la société civile immobilière Domaine Paul-James Barthelemy – Juegdschlass et James Barthelemy.

Ainsi jugé par :

Georges KILL, président Jean-Mathias GOERENS, premier conseiller, rapporteur Marc FEYEREISEN, conseiller, et lu par le président Georges KILL en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour Erny MAY.

8 le greffier en chef le président 9


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12162C
Date de la décision : 21/12/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2000-12-21;12162c ?

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