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22/06/2000 | LUXEMBOURG | N°11907C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 22 juin 2000, 11907C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 11907 C Inscrit le 03 avril 2000 ———————————————————————————————————— AUDIENCE PUBLIQUE DU 22 JUIN 2000 Requête d’appel de Zamir ALIU et Enkelaida KOKOSHARI contre le ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique (jugement entrepris du 24 février 2000)  Vu la requête déposée le 3 avril 2000 au greffe de la Cour administrative et par

laquelle 1) Zamir ALIU, de nationalité albanaise, demeurant à L-1511 Luxembourg, 162 b, avenue de la Faïencerie 2) Enkelaida KOKOSHARI, de nationalité albanaise, demeurant également à L-

1511 Luxe...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 11907 C Inscrit le 03 avril 2000 ———————————————————————————————————— AUDIENCE PUBLIQUE DU 22 JUIN 2000 Requête d’appel de Zamir ALIU et Enkelaida KOKOSHARI contre le ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique (jugement entrepris du 24 février 2000)  Vu la requête déposée le 3 avril 2000 au greffe de la Cour administrative et par laquelle 1) Zamir ALIU, de nationalité albanaise, demeurant à L-1511 Luxembourg, 162 b, avenue de la Faïencerie 2) Enkelaida KOKOSHARI, de nationalité albanaise, demeurant également à L-

1511 Luxembourg, 162 b, avenue de la Faïencerie ont relevé appel contre le ministre de la Justice d’un jugement rendu le 24 février 2000 par le tribunal administratif dans la cause inscrite sous le numéro 11430 du rôle;

vu le mémoire en réponse déposé au greffe le 10 avril 2000 par le délégué du Gouvernement, ainsi que le mémoire en réplique régulièrement versé en cause par les appelants en date du 5 mai 2000;

vu les pièces versées en cause, notamment la décision attaquée, ainsi que le jugement entrepris;

ouï le président-rapporteur en son rapport à l’audience du 18 mai 2000 ainsi que Maître Jaméla KHELILI, avocat inscrit au Barreau de Luxembourg, en remplace-

ment de Maître Marc MODERT, avocat à la Cour, et Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives.

————————————————————————————————— - 1 -

Par requête déposée le 3 avril 2000 les consorts ALIU-KOKOSHARI ont relevé appel contre le ministre de la Justice d’un jugement rendu le 24 février 2000 par le tribunal administratif dans la cause inscrite sous le numéro 11430 du rôle.

Ledit jugement a reçu en la forme le recours principal des consorts ALIU-

KOKOSHARI en annulation d’une décision du ministre de la Justice du 12 avril 1999 leur refusant la reconnaissance du statut de réfugié politique ainsi que de la décision confirmative intervenue sur recours gracieux en date du 12 juillet 1999.

Le recours a cependant été déclaré non justifié au fond et les époux ALIU-

KOKOSHARI en ont été déboutés avec charge des dépens. Le recours subsidiaire en annulation a été déclaré irrecevable.

Pour rejeter le recours des consorts ALIU-KOKOSHARI le tribunal a examiné en premier lieu et reconnu non fondées les critiques avancées à l’encontre de la procédure d’enquête diligentée par les services du ministre de la Justice dans le cadre de l’examen de la demande d’asile.

Quant au fond proprement dit le Tribunal administratif s’est vu amené à constater que les demandeurs restaient en défaut d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans leur chef une crainte justifiée de persécution au sens de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

Dans leur requête d’appel les consorts ALIU-KOKOSHARI reprochent aux juges de première instance d’avoir mal apprécié les circonstances de fait et d’en avoir tiré une conclusion erronée.

Le délégué du Gouvernement a déposé en date du 10 avril 2000 un mémoire en réponse dans lequel il conteste la recevabilité de l’appel qui n’aurait pas été relevé dans le délai de 30 jours fixé par l’article 13 de la loi modifiée du 3 avril 1996. En ordre subsidiaire il demande la confirmation du jugement entrepris en se rapportant à ses mémoires versés en première instance.

Les appelants, dans un mémoire en réplique du 5 mai 2000, contestent la pertinence de l’argumentation du délégué du Gouvernement quant au délai d’appel, alors qu’en l’espèce celui-ci ne serait pas fixé par l’article 13 de la loi modifiée du 3 avril 1996, mais par l’article 38 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.

Pour le surplus ils maintiennent leurs moyens quant au fond.

————————————————————————————————— Quant à la recevabilité de l’appel :

Le délégué du Gouvernement conteste la recevabilité du présent appel pour cause de tardiveté en faisant valoir qu’il n’aurait pas été interjeté dans le délai d’un mois à partir de la notification par les soins du greffe, délai qui serait imposé par l’article 13 (numérotation en vigueur au moment de l’appel) de la loi du 3 avril 1996 portant création d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, - 2 -

tel que cet article a été modifié et complété par l’article 104 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif.

Se basant sur la jurisprudence de la Cour administrative (CA 28 mars 2000 / N° 11772C du rôle / DRACA c/ ministre de la Justice) les consorts ALIU – KOKOSHARI résistent au moyen d’irrecevabilité soulevé en argumentant que leur appel aurait été relevé sous l’empire de l’article 38 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives et que le délai pour interjeter appel applicable en l’espèce aurait été de quarante jours.

Le représentant de l’Etat expose son opinion suivant laquelle la loi du 21 juin 1999, en fixant en son article 38 le délai pour interjeter appel à quarante jours, n’aurait visé que le délai d’appel tel qu’il était fixé précédemment par l’article 99 (1) de la loi du 7 novembre 1996. Suivant l’argumentation du délégué du Gouvernement le délai spécial de l’article 13 de la loi du 3 avril 1996 portant création d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, tel qu’il a été modifié et complété par la loi du 7 novembre 1996 itérativement mentionnée qui, dans son article 104, a stipulé pour cette procédure un délai d’appel d’un mois à partir de la notification par les soins du greffe, ne serait ni visé, ni affecté par l’article 38 de la loi du 21 juin 1999. Le délai d’appel dans la procédure relative à l’examen d’une demande d’asile continuerait donc, sans interruption depuis l’entrée en vigueur de la loi du 7 novembre 1996, d’être fixé à un mois à partir de la notification par les soins du greffe.

La Cour ne saurait partager cette façon de voir, compte tenu de la terminologie particulièrement extensive de l’article 38 du règlement de procédure.

D’une part le législateur a appliqué le délai d’appel dudit article aux appels contre les jugements du Tribunal administratif ainsi qu’aux jugements des autres juridictions administratives. Cette énumération ne laisse intouchée aucune catégorie de jugements administratifs.

Cette constatation est corroborée d’autre part par le soin pris par le législateur de prévoir, comme unique exception au principe de la fixation du délai à quarante jours, l’application des dispositions de la loi du 22 décembre 1986 relative au relevé de la déchéance résultant de l’expiration d’un délai imparti pour agir en justice.

Il importe de relever par ailleurs que la fixation du délai d’appel à quarante jours a pu paraître au législateur conforme aux tendances d’unification des délais qui existent et qui ont largement trouvé leur reflet dans la législation, notamment dans le code de procédure civile.

Finalement il reste à mentionner que le législateur a cru devoir, par l’article 14 de la loi du 18 mars 2000 portant création d’un régime de protection temporaire et portant modification de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, fixer de nouveau le délai de l’article 12 (ancien article 13 renuméroté en vertu de l’article 18 de la prédite loi du 18 mars 2000) actuellement en cause à la durée d’un mois.

- 3 -

La Cour en conclut que le délai d’appel applicable au moment où le jugement est intervenu en l’espèce ne peut être que celui de 40 jours fixé par l’article 38 de la loi du 21 juin 1999.

Ledit délai a commencé à courir à partir de la notification par le greffe de la juridiction de première instance, cette notification s’étant faite par lettre recommandée à la poste avec avis de réception en date du 28 février 2000.

L’appel interjeté le 3 avril 2000 est partant recevable en la forme.

Quant au fondement de l’appel :

C’est à bon droit et pour des motifs que la Cour fait siens que le Tribunal administratif a rejeté les critiques dirigées par les demandeurs en première instance contre les rapports d’audition en soutenant que certaines de leurs réponses auraient été reproduites d’une manière ambiguë ou incomplète.

Quant au fond du recours originaire les appelants ont réitéré, en les appuyant de considérations plus générales, les arguments exposés devant les premiers juges.

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine, mais aussi et surtout par la situation particulière des demandeurs d’asile qui doivent établir, concrètement, que leur situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour leur personne.

Il y a lieu de constater que les premiers juges ont apprécié à leur juste valeur les éléments de preuve et la crédibilité des déclarations des demandeurs d’asile.

Ils ont ainsi procédé à un examen des déclarations faites par les époux ALIU -

KOKOSHARI lors de leurs auditions respectives des 16 mai 1997, 25 septembre 1997 et 25 février 1998, telles que celles-ci ont été relatées dans les comptes rendus figurant au dossier, ainsi que des éléments y ajoutés dans leur recours gracieux et les ont rapprochés des arguments et précisions apportés au cours de la procédure contentieuse pour arriver à la conclusion que la partie intéressée reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans le chef de Zamir ALIU une crainte justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses convictions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

Le jugement dont appel est à confirmer quant à Zamir ALIU, alors que sa demande en obtention du statut de réfugié politique est infondée pour les motifs indiqués par le premier juge, motifs qui rencontrent tous les arguments présentés en appel.

C’est encore a juste titre que le Tribunal administratif a relevé que la demanderesse KOKOSHARI ne faisait pas valoir des motifs propres de persécution. Le sort de son appel ne saurait dès lors que suivre celui de l’appel interjeté par son époux.

- 4 -

Compte tenu de la décision à intervenir au fond, les frais de l’instance d’appel sont à supporter par les parties demanderesses.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant contradictoirement ;

reçoit les appels de Zamir ALIU et de Enkelaida KOKOSHARI en la forme ;

les dit non fondés et en déboute ;

partant confirme le jugement du 24 février 2000 dans toute sa teneur ;

condamne les appelants aux frais de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par Messieurs Georges Kill, président, rapporteur, Jean-Mathias GOERENS, premier conseiller, Marc FEYEREISEN, conseiller, et lu par le président en audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour.

Le greffier en chef Le président - 5 -


Synthèse
Numéro d'arrêt : 11907C
Date de la décision : 22/06/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2000-06-22;11907c ?

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