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30/04/2000 | LUXEMBOURG | N°11505C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 00 mai 2000, 11505C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° 11505 C du rôle Inscrit le 27 août 1999

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AUDIENCE PUBLIQUE DU JEUDI 18 MAI 2000 Requête d’appel formée par l’administration communale de Steinsel contre le ministre de l’Environnement et Madame Sylvie CLEES, épouse FLUHE en matière de protection de la nature et permis de construire (jugement entrepris du 21 juillet 1999, n° du rôle 11107)

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Vu l’acte d’

appel déposé au greffe de la Cour administrative le 27 août 1999 par Maître Jean MEDERNACH...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° 11505 C du rôle Inscrit le 27 août 1999

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AUDIENCE PUBLIQUE DU JEUDI 18 MAI 2000 Requête d’appel formée par l’administration communale de Steinsel contre le ministre de l’Environnement et Madame Sylvie CLEES, épouse FLUHE en matière de protection de la nature et permis de construire (jugement entrepris du 21 juillet 1999, n° du rôle 11107)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 27 août 1999 par Maître Jean MEDERNACH, avocat à la Cour, au nom de l’administration communale de Steinsel représentée par son collège des bourgmestre et échevins en fonctions, contre un jugement rendu en matière de protection de la nature par le tribunal administratif à la date du 21 juillet 1999 à la requête de l’administration communale de Steinsel contre une décision du ministre de l’Environnement, en présence de la dame Sylvie CLEES, épouse FLUHE.

Vu la signification dudit acte d’appel par exploit d’huissier Georges NICKTS aux dates des 21 et 23 août 1999.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 9 novembre 1999 par Maître André LUTGEN, avocat à la Cour, au nom de la dame Sylvie FLUHE-CLEES, demeurant à L-7307 Steinsel, 36, rue Basse.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 15 novembre 1999 par Monsieur le délégué du Gouvernement.

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 15 décembre 1999 par Maître Jean MEDERNACH au nom de l’administration communale de Steinsel.

Vu la signification dudit mémoire en réplique par exploit d’huissier Georges NICKTS à la date du 17 décembre 1999.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris du 21 juillet 1999.

Ouï le premier conseiller rapporteur en son rapport et Maître Luc REDING, en remplacement de Maître Jean MEDERNACH, Maître Nathalie PRUM-CARRE, en remplacement de Maître André LUTGEN ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs observations orales.

Par requête déposée au greffe de la Cour le 27 août 1999, l’administration communale de Steinsel a déclaré relever appel d’un jugement du tribunal administratif du 21 juillet 1999.

Le jugement entrepris a été rendu sur recours de la commune de Steinsel tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre de l’Environnement conférée à la dame Sylvie CLEES, épouse FLUHE en vue de transformer en porcherie l’immeuble sis à Steinsel et inscrit au cadastre de la commune de Steinsel, section B de Steinsel au lieu-dit « in den Pieschen » sous le n° 1339/1367.

Le jugement entrepris a déclaré le recours partiellement fondé et a ajouté aux conditions portées par l’autorisation litigieuse une condition tenant à la protection des eaux.

L’appelante maintient ses conclusions de première instance tendant à voir réformer la décision du ministre et dire qu’il n’y a pas lieu d’autoriser la transformation projetée, sinon à voir annuler la décision du ministre pour excès et détournement de pouvoir, violation de la loi ou violation des formes destinées à protéger les intérêts privés.

L’appelante reprend ses moyens tenant aux nuisances et aux risques pour l’environnement découlant de la transformation projetée des lieux en porcherie.

L’appelante fait valoir une contradiction entre les constatations du tribunal sur la nécessité des transformations extérieures au bâtiment alors que le ministre n’aurait autorisé des transformations qu’à l’intérieur.

Il est fait valoir en outre que le respect des conditions de l’autorisation de l’exploitation antérieurement conférée en cause serait de son côté contraire aux exigences d’une bonne politique de protection de l’environnement.

Le jugement est encore attaqué en ce que les conditions par lui imposées seraient insuffisantes par rapport à la loi concernant la protection et la gestion de l’eau.

Par mémoire du 9 novembre 1999 la dame FLUHE-CLEES conclut à l’irrecevabilité de la demande en annulation et à la confirmation du jugement et conclut à l’allocation d'une indemnité de procédure.

Par mémoire du 15 novembre 1999, le délégué du Gouvernement déclare que le Gouvernement accepte le jugement intervenu et qu’il se rallie aux développements de l’intimée FLUHE-CLEES.

Dans son mémoire en réplique, la commune de Steinsel prend attitude quant aux conclusions des parties adverses et conclut au rejet de la demande d’indemnité de procédure.

Considérant que l’appel a été interjeté dans les formes et délai de la loi;

qu’il est partant recevable ;

Considérant que l’administration communale de Steinsel demande la réformation de la décision entreprise et à voir, en ordre principal, révoquer la décision du ministre de l’Environnement qui a autorisé les travaux de transformation projetés par l’intimée Sylvie 2 CLEES, épouse FLUHE et, à titre subsidiaire, annuler la décision du ministre et renvoyer le dossier devant lui pour être statué à nouveau ;

Considérant que le recours originaire a été dirigé contre une décision du ministre de l’Environnement intervenue dans le cadre de la loi du 11 août 1982 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, texte qui prévoit un recours en pleine juridiction devant le tribunal administratif ;

que ce recours en pleine juridiction est dévolu à la Cour par le fait de l’appel ;

Considérant que le ministre de l’Environnement, dans la décision attaquée, a accordé à la dame Sylvie CLEES, épouse FLUHE, l’autorisation de transformer la construction litigieuse en assortissant l’autorisation de plusieurs conditions propres à assurer les objectifs de la loi ;

que dans le jugement attaqué, sur base de la compétence lui attribuée en tant que juge du fond, le tribunal administratif a ajouté aux conditions du ministre des conditions supplémentaires tenant plus particulièrement à la protection des eaux, conditions d’ailleurs déjà contenues dans l’autorisation délivrée, sans faire l’objet d’un recours, par le même ministre dans la procédure d’autorisation lui soumise dans le cadre de la législation sur les établissements dangereux, insalubres ou incommodes ;

Considérant que le jugement qui a partiellement fait droit à l’objectif du recours en assortissant la décision ministérielle d'une condition tenant à la protection des eaux, a été accepté tant par la dame Sylvie CLEES, épouse FLUHE que par l’Etat ;

Considérant que l’appel saisit la Cour de la réformation du jugement entrepris et qu’il lui défère, dans le cadre du recours au fond, l’appréciation du dossier d’autorisation soumis au ministre de l’Environnement dans le cadre de l’application de la loi précitée du 11 août 1982 ;

Considérant que la décision ministérielle, tout en se référant aux plans et autres éléments du dossier soumis à l’examen de la Cour a accordé l’autorisation sollicitée en la subordonnant aux conditions suivantes :

« 1. la construction existante, se trouvant sur un terrain inscrit au cadastre de la commune de Steinsel, sous le numéro 1339/1367, au lieu-dit "In den Pieschen", ne sera pas agrandie, mais uniquement transformée à l'intérieur;

2. lors de la remise en état, il sera fait recours, dans la mesure du possible, à l'usage du bois (par exemple pour la mise en place de nouvelles portes et la fermeture des ouvertures non indispensables);

3. le nombre des porcs ne dépassera pas celui de 31;

4. les animaux seront tenus sur de la paille et auront accès au pâturage;

5. le chemin d'accès restera dans son état actuel;

6. autour du bâtiment, une haie sera mise en place d'après les directives du préposé forestier. Les travaux de plantation seront terminés dans un délai d'un an à compter de la date de la présente»;

que le jugement entrepris a ajouté aux conditions fixées par le ministre les conditions de :

« 7. Il est interdit de laisser s'écouler des déjections liquides directement ou indirecte-

ment dans la canalisation locale ou dans un cours d'eau.

3 8. Tous les sols de la porcherie (couloirs de circulation, aires de repos des animaux, etc.), toutes les installations d'évacuation (canalisations, etc.) ou de stockage seront imperméables et maintenus en parfait état d'étanchéité.

9. Le fumier de la porcherie doit être stocké soit dans la porcherie, soit sur une dalle en béton aménagée en cuve telle à ce que toutes les eaux de suintement puissent être collectées en un point bas à raccorder à une fosse étanche sans trop-plein; la capacité de cette fosse doit être suffisante pour permettre une durée de stockage d'au moins 3 mois, en tenant compte d'un espace libre d'au moins 20 cm au-dessus du niveau de remplissage; les eaux pluviales externes à l'aire de stockage du fumier ne doivent pas être recueillies dans la fosse étanche. Toutefois une capacité totale de stockage d'au moins 5 mois pour le purin ou le lisier doit être assurée dans l'exploitation agricole.

10. Le cas échéant le lisier et/ou purin de la porcherie doit être recueilli dans une (des) citerne(s) étanche(s) sans trop-plein et d'une (de) capacité(s) suffisante(s) pour permettre une durée de stockage d'au moins 5 mois, en tenant compte d'un espace libre d'au moins 20 cm au-dessus du niveau de remplissage.

11. Le transport des déjections liquides doit se faire en containers étanches.»;

Considérant que le premier moyen d’appel tend à la réformation du jugement en ce que l’autorisation n’aurait pas pris les mesures propres à garantir la protection des eaux du ruisseau « Klengelbach » et de la plaine alluviale y relative ;

qu’il est relevé notamment que toute infrastructure pour la collecte et l’évacuation des purins et eaux usées ferait défaut ;

Considérant que si ce reproche pouvait être adressé à la décision ministérielle prise sur base de la loi de 1982 sur la protection de la nature et des ressources naturelles, encore que des conditions ad hoc étaient fixées par le ministre de l’Environnement dans sa décision, non attaquée, du 29 juin 1998 prise dans le cadre de la législation sur les établissements dangereux, insalubres ou incommodes, tel n’est pas le cas à l’encontre de la décision du tribunal qui, en ajoutant à l’autorisation ministérielle les conditions ci-dessus citées, a conféré à l’autorisation toutes les garanties relevant de la protection des eaux ;

que le tribunal, en ajoutant des conditions à l’autorisation, a agi dans le cadre des compétences lui conférées dans le recours comme juge du fond et qu’il échet de confirmer ce point de la décision ;

que le premier moyen n’est dès lors pas fondé ;

Considérant qu’en deuxième lieu l’appelant soutient que « le premier jugement renferme une contradiction dans la mesure où le tribunal a constaté que l’immeuble subira des modifications extérieures tout en ayant maintenu la première condition posée par le ministre, à savoir celle que l’immeuble en question ne peut être transformé qu’à l’intérieur »;

Considérant que le tribunal administratif, dans le jugement dont appel, n’a examiné la question de l’aspect extérieur de l’immeuble à transformer que dans le cadre de l’examen de la compétence du ministre pour intervenir dans le projet au titre de la loi sur la protection de la nature, le moyen n’ayant pas figuré parmi ceux produits par la commune en première instance ;

4 que, saisie du fond de la question par l’appel, la Cour, faisant siennes les constatations du tribunal administratif lors de la visite des lieux, estime que les modifications de détail ne comportant qu’un très léger rehaussement des éléments de couverture faîtière ainsi que la fermeture, par des ouvrages en bois, de certaines ouvertures actuellement existantes, n’affectent pas l’aspect extérieur général de la construction dans une mesure où la finalité de la loi sur la protection de la nature et des ressources naturelles exigerait une mesure d’autorisation spéciale, ces légères modifications étant par ailleurs implicitement contenues dans l’autorisation des travaux intérieurs figurant aux numéros 1 et 2 de l’autorisation ministérielle qui se trouvent être justifiés en l’occurrence ;

que le moyen n'est dès lors pas fondé;

Considérant qu'en troisième lieu, le jugement est entrepris en ce que le tribunal ne se serait « pas non plus prononcé sur le point de savoir si les conditions imposées peuvent être réalisées tout en respectant les dispositions sur la protection de la nature »;

que le moyen est développé sur le point des eaux usées et autres déjections liquides qui a été plus amplement examiné au premier moyen;

Considérant que la commune estime que la mise en place des dispositifs exigés dans la décision du tribunal serait en elle-même incompatible avec les exigences de la protection de la nature, la construction dont question se situant en zone verte;

Considérant que, outre que le mérite du moyen au fond a déjà été examiné ci-dessus, le raisonnement de la commune est à écarter alors que le propre de la loi sur la protection de la nature est de subordonner les constructions et transformations des constructions situées en dehors du périmètre de constructibilité normale, donc en zone verte, à l'autorisation ministérielle, donc de les permettre le cas échéant, à condition qu'elles observent les conditions posées par l'autorité compétente pour le respect des impératifs de la protection de la nature et des ressources naturelles;

que les conditions posées par le tribunal répondant de manière satisfaisante à ces exigences, il y a lieu d'écarter le moyen, l'autorisation ainsi amendée garantissant à suffisance les objectifs de la loi;

que décider le contraire reviendrait implicitement mais nécessairement à interdire toute construction en dehors des périmètres d'agglomération et à vider entièrement de leur substance les articles 2, 36 et 37 de la loi du 11 août 1982 qui permettent l'autorisation en zone verte de constructions ou de transformations telles que celle sous examen tout en définissant les critères et conditions de ces autorisations;

Considérant que le quatrième moyen produit à la requête d'appel soutient que les conditions telles qu'imposées par le ministre et complétées par le tribunal seraient « insuffisantes et contradictoires à la loi du 29 juillet 1993 concernant la protection et la gestion de l'eau dont l'article 17 dispose qu'un permis de construire ne peut être délivré que pour la construction ou la transformation de bâtiments … que si le déversement des eaux dans la canalisation est assuré »;

Considérant que c'est à juste titre que l'intimée dame FLUHE-CLEES oppose l'inapplicabilité des textes visés alors spécialement que les conditions de l'autorisation posées par le tribunal 5 sont destinées à assurer la récupération de tous les rejets liquides qui sont à réutiliser dans l'agriculture;

que, sous ces conditions de protection du sous-sol et du ruisseau voisin, l'inapplicabilité de la loi du 29 juillet 1993 et notamment de son article 17 se dégage de la finalité même de la loi en question, le déversement des déjections animales dans la canalisation étant manifestement contraire à toutes les considérations de protection des eaux;

Considérant par ailleurs que l'autorisation telle qu'amendée par le tribunal ne contrevient pas aux dispositions combinées des articles 15 al 1, 16 al 2 et 17 de la loi;

qu'en effet, à même les considérer comme eaux usées aux termes de la dite loi, les déjections en question sont à ranger parmi celles qui « ne peuvent être évacuées ou épurées avec les eaux usées provenant des ménages » et que l'autorisation porte « des modes d'évacuation … adaptés aux circonstances »;

que dès lors ce moyen est à son tour à écarter;

Considérant qu'il y a dès lors lieu de confirmer le jugement entrepris;

Considérant que l'intimée FLUHE-CLEES conclut à l'allocation d'une indemnité de procédure;

Considérant qu'en ce qui concerne la loi de procédure applicable, le présent litige ayant été introduit en instance d'appel avant l'entrée en vigueur de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, la demande est recevable;

Considérant que la demanderesse de l'indemnité de procédure se borne toutefois, dans les dispositifs de ses mémoires en réponse en première instance comme en appel, à reproduire les termes de l'article 240 du nouveau code de procédure civile applicable en la matière, sans spécifier la nature exacte de la somme réclamée et qu'elle ne fournit à la Cour aucun élément établissant le caractère inéquitable de son obligation à des dépenses non comprises dans les dépens;

que la demande afférente ne saurait dès lors être accueillie et que le jugement est à confirmer sur ce point.

Par ces motifs la Cour administrative, statuant contradictoirement, reçoit l'appel en la forme, au fond le dit non fondé et en déboute, partant confirme le jugement entrepris en toutes ses forme et teneur, condamne la commune de Steinsel aux frais de l'instance d'appel.

6 Ainsi jugé par Jean-Mathias GOERENS, premier conseiller, rapporteur Christiane DIEDERICH-TOURNAY, conseiller Marc FEYEREISEN, conseiller et lu par le premier conseiller Jean-Mathias GOERENS en audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour.

le greffier en chef le premier conseiller 7


Synthèse
Numéro d'arrêt : 11505C
Date de la décision : 30/04/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 21/10/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2000-05-00;11505c ?

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