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25/04/2000 | LUXEMBOURG | N°11249C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 25 avril 2000, 11249C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° 11249C du rôle Inscrit le 16 avril 1999 Audience publique du 25 avril 2000 Recours formé par l’administration communale de Junglinster contre les époux Joseph et Margarete Weltermann en présence des époux Pavlos Kokiopoulos et Danièle Regenwetter, en matière de permis de construire - appel et appel incident -

(jugement entrepris n°10748 du 15 mars 1999) Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 16 avril 1999 par Maître Roger Nothar, avocat à la Cour, au nom de l’administration communale de Jungli

nster représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° 11249C du rôle Inscrit le 16 avril 1999 Audience publique du 25 avril 2000 Recours formé par l’administration communale de Junglinster contre les époux Joseph et Margarete Weltermann en présence des époux Pavlos Kokiopoulos et Danièle Regenwetter, en matière de permis de construire - appel et appel incident -

(jugement entrepris n°10748 du 15 mars 1999) Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 16 avril 1999 par Maître Roger Nothar, avocat à la Cour, au nom de l’administration communale de Junglinster représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions, contre un jugement rendu en matière de permis de construire par le tribunal administratif à la date du 15 mars 1999 à la requête des époux Weltermann-Bimberg contre une décision du collège échevinal de la commune de Junglinster, en présence des époux Kokiopoulos-Regenwetter.

Vu la signification dudit acte d’appel par exploit d’huissier Pierre Biel à la date du 14 avril 1999.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 4 octobre 1999 par Maître Jean Medernach, avocat à la Cour, au nom des époux Weltermann-Bimberg demeurant à Gonderange, 29 Op der Tonn.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 9 décembre 1999 par Maître Paul Trierweiler, avocat à la Cour, au nom des époux Kokiopoulos-Regenwetter, demeurant à Gonderange, 1 Op der Tonn.

Vu la signification dudit mémoire en réponse par exploit d’huissier Pierre Kremmer en date du 9 décembre 1999.

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 4 janvier 2000 par Maître Roger Nothar au nom de l’administration communale de Junglinster.

1 Vu la signification dudit mémoire en réplique par exploit d’huissier Pierre Biel à la date du 6 janvier 2000.

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 3 mars 2000 par Maître Jean Medernach au nom des époux Weltermann-Bimberg.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris du 15 mars 1999.

Ouï le conseiller rapporteur en son rapport et Maître Roger Nothar, Maître Paul Trierweiler ainsi que Maître Jean Medernach en leurs observations orales.

___________________________________________________________________________

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 11 juin 1998, Maître Jean Medernach, au nom de Joseph Weltermann, fonctionnaire BEI et de son épouse Margarete Weltermann, née Bimberg, sans état, demeurant ensemble à Gonderange, 29, op der Tonn, a demandé l’annulation d’une décision du collège échevinal de Junglinster datée du 1er août 1997 portant autorisation dans le chef des époux Pavlos Kokiopoulos et Danièle Regenwetter demeurant ensemble à L-1511 Luxembourg, 128, avenue de la Faïencerie, de construire une maison unifamiliale à Gonderange, 1, op der Tonn.

Par jugement en date du 15 mars 1999, le tribunal administratif a reçu le recours en annulation en la forme, l’a dit également fondé, partant a annulé la décision déférée du 1er août 1997 et a renvoyé l’affaire devant le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Junglinster avec condamnation des parties défenderesses aux frais.

Le tribunal administratif, après avoir rejeté un moyen d’irrecevabilité du recours pour cause de tardiveté et en second lieu pour absence d’intérêt à agir, ainsi qu’au fond un moyen tendant à l’annulation de la décision critiquée pour violation des dispositions de la loi du 1er décembre 1978 réglant la procédure administrative non contentieuse et du règlement grand-

ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, a décidé quant aux violations alléguées de la réglementation communale sur les bâtisses sur quatre séries de prescriptions réglementaires que la dernière concernant la hauteur de la corniche au pourtour de la maison qui remonte par l’emplacement des caissons à volet au-delà des 4,5 mètres réglementaires ne respectait pas la condition posée par l’article 4, alinéa 6 du projet d’aménagement particulier.

Par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 16 avril 1999 et préalablement signifiée le 14 avril 1999, l’administration communale de Junglinster a fait appel du jugement précité. La partie appelante reproche au tribunal administratif d’avoir admis l’existence d’un intérêt personnel né et actuel dans le chef des époux Weltermann et conteste formellement que la construction Kokiopoulos se trouve dans le champ visuel direct des requérants Weltermann ainsi que le fait que cette dernière, à cause de sa hauteur, réduirait de manière très sensible la vue à partir de la propriété Weltermann qui serait de toute manière très limitée sur une petite partie d’une seule façade de la maison Kokiopoulos qui se trouve en deuxième ligne par rapport à la leur, séparée par la construction Schintgen et ultérieurement par la construction sur l’ancienne propriété Ries qui ferait de toute manière écran.

Elle relève que la construction Kokiopoulos n’affecte en rien l’usage de la propriété et la qualité de vie des voisins éloignés Weltermann et qu’il n’est pas établi que les irrégularités 2 invoquées par les époux Weltermann soient susceptibles d’entraîner une aggravation de leur situation de voisin.

En second lieu, elle fait valoir que les premiers juges ont retenu à tort une violation des dispositions de l’article 4, alinéa 6 du plan d’aménagement particulier visant la hauteur de la corniche au pourtour de la maison et que, pour ce faire, ils auraient appliqué d’office des arguments techniques non soulevés par les époux Weltermann, et auraient fait une application manifestement erronée de concepts architecturaux unanimement admis et appliqués de façon générale.

Elle maintient que le règlement communal sur les bâtisses a été appliqué de façon uniforme et conclut en demandant à la Cour de déclarer irrecevable le recours introduit par les époux Weltermann pour défaut d’intérêt à agir dans leur chef, subsidiairement et quant au fond, de déclarer le recours non fondé, et de dire qu’il n’y a pas lieu à annulation de la décision déférée du 1er août 1997 ni au renvoi de l’affaire devant le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Junglinster.

Dans un mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 4 octobre 1999, Maître Jean Medernach, au nom des époux Weltermann, après s’être rapporté à prudence de justice pour ce qui est de la recevabilité de l’appel, rétorque que l’appel laisse d’être fondé et demande la confirmation du jugement entrepris.

En ordre subsidiaire, il interjette à son tour appel incident et reproche aux premiers juges de ne pas avoir prononcé l’annulation de l’autorisation de bâtir déférée pour violation de la loi du 1er décembre 1978 et du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatifs à la procédure administrative non contentieuse, d’avoir admis que la voie principale desservante à partir de laquelle les niveaux de la construction Kokiopoulos doivent être calculés n’est pas la rue « op der Tonn », mais la rue latérale droite et enfin d’avoir jugé que les pièces du deuxième niveau constitueraient des « superstructures » s’analysant comme étages aménagés dans les combles.

Il conclut en demandant à la Cour de dire l’appel irrecevable sinon non justifié et de déclarer leur appel incident recevable et fondé.

Dans un mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 9 décembre 1999, Maître Paul Trierweiler, au nom de Pavlos Kokiopoulos et de son épouse Danièle Regen-

wetter, se rallie aux moyens développés dans la requête d’appel émanant de l’administration communale de Junglinster, et en ce qui concerne le défaut d’intérêt à agir, il relève appel incident en ce que le moyen d’irrecevabilité a été rejeté comme non fondé par les premiers juges, qui ont d’autre part retenu à tort une violation des dispositions de l’article 4 alinéa 6 du plan d’aménagement particulier de la commune de Junglinster.

Dans un mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 4 janvier 2000, la partie appelante réitère et maintient les moyens développés à l’appui de la requête d’appel, demande à titre subsidiaire à la Cour de procéder au besoin à une visite des lieux pour toiser la question de l’intérêt à agir, offre de prouver par expertise ou rapport de consultation que la position de l’axe de la façade principale est conforme aux règles de l’art et que la corniche prévue ne dépasse pas les 4,5 mètres réglementaires par rapport au niveau de l’axe de la voie desservante, et soulève l’illégalité respectivement l’inconstitutionnalité de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 précité.

3 Quant à l’appel incident des époux Weltermann, elle demande à la Cour de le déclarer irrecevable, sinon non fondé.

Dans un mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 3 mars 2000, Maître Jean Medernach au nom des époux Weltermann, demande à la Cour d’écarter comme ni pertinentes ni concluantes les offres de preuve adverses et fait valoir que son appel incident est parfaitement recevable, que le jugement de première instance doit être réformé et la décision déférée annulée pour violation des dispositions de l’article 5 du règlement grand-

ducal du 8 juin 1979.

L’appel principal interjeté par l’administration communale de Junglinster est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

La partie appelante estime, en ordre principal, que c’est à tort que le tribunal administratif a admis l’existence d’un intérêt à agir personnel, né et actuel dans le chef des époux Weltermann. Elle conteste formellement que la construction Kokiopoulos se trouve dans le champ visuel direct des intimés Weltermann, tout comme elle conteste que, du fait de sa hauteur, celle-ci réduirait de manière très sensible la vue à partir de la propriété Weltermann.

Il résulte des pièces versées en cause, en particulier des plans de situation, que le terrain n° 6 sur lequel la construction litigieuse a été érigée est situé dans un lotissement dit « Im Stockenfeld », couvert par un plan d’aménagement particulier, qui se trouve en très forte pente et comprend un nombre important d’habitations.

Il n’est pas contesté que le lot n° 8 appartenant aux époux Weltermann est distant de plus de 40 mètres par rapport au terrain du lot n° 6 des époux Kokiopoulos, le premier étant situé au point le plus élevé du lotissement, le second au point le plus bas, la dénivellation entre les deux propriétés étant estimée à 10 mètres.

Les parcelles Kokiopoulos et Weltermann ne sont pas contiguës, mais séparées par les lots 7 et 9 ainsi que par une voie d’accès donnant directement sur la rue Op der Tonn. Pour le lot 7 une demande d’autorisation de construire est en voie d’instruction, alors que sur le lot 9 une construction a déjà été exécutée, maison dont le propriétaire Roland Schintgen a fait l’objet d’un recours devant le tribunal administratif introduit par les époux Weltermann.

La maison Schintgen, et ultérieurement la construction érigée sur l’ancienne propriété Ries font écran entre les constructions Weltermann et Kokiopoulos, même si un recul latéral de 6 mètres devra être observé entre les deux constructions, le toit de la construction Kokiopoulos ne dépassant guère celui de la maison Schintgen, d’après les constatations faites par le tribunal administratif lors d’une visite des lieux.

Toute partie demanderesse introduisant un recours contre une décision administrative doit justifier d’un intérêt certain, direct, légitime et personnel distinct de l’intérêt général, et si les voisins proches ont intérêt à voir respecter les règles applicables en matière d’urbanisme, cette proximité de situation constitue un indice pour établir l’intérêt à agir, mais ne suffit pas à elle seule à le fonder, il faut de surcroît que l’inobservation éventuelle de ces règles soit de nature à entraîner une aggravation concrète de leur situation de voisin.

La situation des époux Weltermann ne répond d’abord pas aux critères de voisins directs ainsi posés et en tant que deuxième voisin, la construction litigieuse ne se trouve pas dans leur 4 champ de vision direct, du fait de la forte déclivité et du fait que deux constructions font écran.

Les irrégularités invoquées par les intimés Weltermann ne sont pas susceptibles d’entraîner une aggravation concrète de leur situation de voisin, alors que ni l’implantation, ni les marges de reculs, ni le nombre de niveaux pleins de la construction Kokiopoulos n’ont été critiqués par les premiers juges, et qu’un abaissement de la corniche au niveau des adaptations triangulaires n’est pas de nature à entraîner un abaissement du niveau de la faîtière du toit et ne dégagerait pas la vue des époux Weltermann.

En définitive, la maison Kokiopoulos ne peut qu’être entraperçue et en contrebas à travers le corridor libre de 6 mètres relaissé dans la mesure du recul latéral à observer entre la maison Schintgen et celle à ériger sur le terrain n° 7.

Cependant la Cour relève que les intimés, ayant acheté un terrain dans un lotissement comportant 58 places à bâtir, c’est-à-dire dans le voisinage immédiat d’autres maisons devant avec certitude être construites, doivent supporter certains inconvénients dus à ce type d’habitat et la construction litigieuse n’obstrue pas de manière anormale ou irrégulière la vue à partir de l’immeuble des intimés.

N’ont donc qu’un intérêt trop diffus et trop lointain pour agir les intimés qui affirment que la construction litigieuse porte atteinte à leur qualité de vie, les inconvénients relevés ne dépassant pas les inconvénients de voisinage et ne sauraient de par leur caractère général, leur porter grief, compte tenu des circonstances de l’espèce.

Il en résulte que, par réformation du jugement entrepris, il y a lieu de conclure à l’absence d’intérêt juridiquement protégé des époux Weltermann pour agir en annulation et donc de déclarer irrecevable pour défaut d’intérêt à agir leur recours introduit devant le tribunal administratif.

L’appel incident quant au fond relevé par Maître Medernach au nom des époux Weltermann est à déclarer sans objet vu l’issue du litige.

Les prétentions formulées par la partie Kokiopoulos ne sont pas à qualifier d’appel incident, la partie Kokiopoulos ayant les mêmes intérêts que la partie appelante n’étant pas partie intimée, mais partie mise en intervention. Il y a lieu de relever que la partie Kokiopoulos se rallie aux demandes de la partie appelante.

Par ces motifs La Cour , statuant contradictoirement ;

reçoit en la forme l’appel principal et l’appel incident des époux Weltermann ;

donne acte à la partie Kokiopoulos qu’elle se rallie aux conclusions de la partie appelante ;

déclare l’appel principal fondé ;

5 au vu de l’issue du litige, déclare irrecevable l’appel incident au fond des époux Weltermann ;

partant, par réformation du jugement du 15 mars 1999, déclare irrecevable pour défaut d’intérêt à agir le recours en annulation introduit par les époux Weltermann devant le tribunal administratif ;

condamne les intimés Weltermann aux frais des deux instances.

Ainsi jugé par Marion Lanners, vice-présidente Christiane Diederich-Tournay, conseiller, rapporteur, Marc Feyereisen, conseiller et lu par la vice-présidente Marion Lanners en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie WILTZIUS.

le greffier la vice-présidente 6


Synthèse
Numéro d'arrêt : 11249C
Date de la décision : 25/04/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2000-04-25;11249c ?

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