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31/03/2000 | LUXEMBOURG | N°11484C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 00 avril 2000, 11484C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 11484 C Inscrit le 20 août 1999

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AUDIENCE PUBLIQUE DU JEUDI 27 AVRIL 2000 Appel relevé par Monsieur Bruno CURCI contre le ministre des Classes moyennes en matière de révision d’un arrêt du Conseil d’Etat (jugement du 14 juillet 1999 / numéro 11130 du rôle) ————————————————————————————————— Vu la requête déposée au greffe de la Cour administrative le 20 août 1999

par laquelle Bruno CURCI, entrepreneur de construction, demeurant à L-8310 Capellen, 1c route d’Arlon, a relevé appel contre le ministre des ...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 11484 C Inscrit le 20 août 1999

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AUDIENCE PUBLIQUE DU JEUDI 27 AVRIL 2000 Appel relevé par Monsieur Bruno CURCI contre le ministre des Classes moyennes en matière de révision d’un arrêt du Conseil d’Etat (jugement du 14 juillet 1999 / numéro 11130 du rôle) ————————————————————————————————— Vu la requête déposée au greffe de la Cour administrative le 20 août 1999 par laquelle Bruno CURCI, entrepreneur de construction, demeurant à L-8310 Capellen, 1c route d’Arlon, a relevé appel contre le ministre des Classes moyennes d’un jugement rendu le 14 juillet 1999 par le tribunal administratif dans la cause inscrite sous le numéro 11130 du rôle;

vu le mémoire en réponse versé en cause le 8 décembre 1999 par la partie intimée, ainsi que le mémoire en réplique déposé le 18 janvier 2000 par la partie appelante;

vu le mémoire en duplique produit par le délégué du Gouvernement le 7 février 2000 et le mémoire qualifié de « supplétif » versé le 23 février 2000 au greffe par la partie CURCI;

vu les pièces régulièrement versées en cause et notamment la décision attaquée, l’arrêt dont la révision est demandée, ainsi que le jugement entrepris;

ouï le président en son rapport, Maître Arthur SCHUSTER, en remplacement de Maître Edmond DAUPHIN, et Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries.

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Par requête déposée le 20 août 1999 Bruno CURCI, entrepreneur de construction, demeurant à L-8310 Capellen, 1c route d’Arlon, a relevé appel contre le ministre des Classes moyennes d’un jugement rendu le 14 juillet 1999 par le tribunal administratif dans la cause inscrite sous le numéro 11130 du rôle.

Les antécédents du litige actuel se résument comme suit:

Par décision notifiée le 20 septembre 1989 le ministre des Classes moyennes refusa à Bruno CURCI l'autorisation d'exploiter une entreprise de construction, de terrassement et de voirie, un commerce de matériaux de construction, d'articles de carrelage, de marbre et d'articles sanitaires ainsi qu'une agence immobilière. Le refus était motivé par le fait que le requérant ne remplissait pas les garanties d'honorabilité légalement requises, ce qui résultait aux yeux du ministre de son implication, en tant que gérant, dans les faillites des sociétés "TRADICO" et "Entreprise CURCI".

Le Comité du contentieux du Conseil d'Etat rejeta par arrêt du 20 juin 1990 le recours de CURCI contre la prédite décision, en relevant notamment que le requérant avait été impliqué dans trois faillites, et en insistant plus particulièrement sur le fait gravement significatif que le tribunal d'arrondissement de Luxembourg l’avait condamné par jugement commercial du 9 juin 1989 au paiement intégral du passif non couvert de la faillite TRADICO au motif qu’il s’était enrichi au détriment de la société faillie qu'il avait, suivant les termes du jugement, vidée de sa substance.

Le 17 février 1999, Bruno CURCI a introduit une requête en recours contre le prédit arrêt du Conseil d'Etat en demandant, par application de l'article 35 de l'arrêté royal grand-ducal modifié du 21 août 1866 portant règlement de procédure en matière de contentieux devant le Conseil d'Etat, la révision de l'arrêt du 20 juin 1990 et, par réformation de la décision de refus ministérielle du 20 septembre 1989, la délivrance de l'autorisation sollicitée. La demande en révision s’appuie en fait sur l’affirmation que le Conseil d’Etat aurait statué sur base de pièces fausses, prenant argument de ce que son dossier aurait contenu un document faisant état des faillites des trois sociétés "TRADICO", "Entreprise CURCI" et "MANERA & CURCI", alors que la dernière de ces sociétés n’aurait jamais été déclarée en état de faillite. Au cours des plaidoiries il s’est d’ailleurs avéré que la société « MANERA & CURCI », sur le sort de laquelle l’appelant s’est montré très discret dans ses mémoires, n’a effectivement pas été déclarée en faillite, mais qu’elle a par contre fait l’objet d’une liquidation judiciaire.

Par son jugement actuellement entrepris du 14 juillet 1999 le Tribunal administratif a rejeté la requête en recours dirigée par CURCI contre l'arrêt du Comité du contentieux du Conseil d'Etat du 20 juin 1990 et a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer à nouveau sur la demande d'autorisation de faire le commerce ayant fait l'objet d'une décision de rejet du ministre des Classes moyennes du 20 septembre 1989.

Dans sa requête d’appel Bruno CURCI fait plaider que l’article 3 de la loi du 28 décembre 1988 réglementant l’accès aux professions d’artisan, de commerçant, d’industriel ainsi qu’à certaines professions libérales serait contraire à l’article - 2 -

11.6 de la Constitution garantissant la liberté du commerce. En omettant de fixer des critères précis pour l’appréciation de l’honorabilité professionnelle ledit article ouvrirait la voie à l’arbitraire et priverait le citoyen de la protection de l’article précité de la Constitution. Pour voir trancher la question Bruno CURCI formule une question préjudicielle qu’il demande à voir soumettre à la Cour Constitu-

tionnelle.

Au fond l’appelant reproche à la juridiction de première instance de s’être appuyée sur une doctrine française dépassée en subordonnant l’application de l'article 35 de l'arrêté royal grand-ducal modifié du 21 août 1866 à la preuve par les moyens légaux d’un faux en écritures.

CURCI conteste par ailleurs l’appréciation du Tribunal administratif quant à l’incidence des renseignements qualifiés d’inexacts soumis au Conseil d’Etat sur son arrêt du 20 juin 1990 pour en conclure que le Tribunal administratif l’aurait spolié du droit à un procès équitable qui lui est assuré par l’article 6 de la Convention européenne des Droits de l’homme.

Dans son mémoire en réponse déposé le 8 décembre 1999 le délégué du Gouvernement oppose l’irrecevabilité de la demande tendant à voir soumettre une question préjudicielle à la Cour Constitutionnelle au motif que la demande serait présentée une première fois en appel (article 41 de la loi du 21 juin 1999). On ordre subsidiaire il conteste l’inconstitutionnalité alléguée en faisant remarquer que l’article 11 de la Constitution habiliterait le législateur à édicter des restrictions à la liberté du commerce.

Quant à la demande en révision proprement dite le délégué du Gouvernement expose son argumentation tendant à établir que les conditions d’application de l'article 35 de l'arrêté royal grand-ducal modifié du 21 août 1866 ne sont pas réunies.

Le 18 janvier 2000 Bruno CURCI a fait déposer un mémoire en réplique soumettant à la Cour son argumentation suivant laquelle le texte de l’article 3 in fine de la loi modifiée du 28 décembre 1988 serait contraire à l’article 11.6 de la Constitution. L’affirmation de l’appelant suivant laquelle son droit à être jugé dans un procès équitable aurait été violé par le Tribunal administratif fait l’objet d’explications détaillées dans le même mémoire. Quant au fond CURCI insiste sur le fait qu’aucune faute ne serait établie dans son chef et estime pouvoir en déduire que tant le jugement du 14 juillet 1999 du Tribunal administratif, que l’arrêt du Conseil d’Etat doivent être réformés.

Dans un mémoire déposé le 7 février 2000 le délégué du Gouvernement exprime son profond désaccord quant aux arguments consignés par l’appelant dans son mémoire en réplique.

Le 23 février 2000 la partie appelante a encore déposé un mémoire qualifié de supplétif dans lequel elle met en doute l’impartialité structurelle du Comité du contentieux du Conseil d’Etat ayant siégé le 20 juin 1990. Elle réitère son reproche à l’égard du Tribunal administratif qui lui aurait refusé un procès équitable. Elle estime finalement que la subordination, par la loi du 28 décembre - 3 -

1988, de l’autorisation d’établissement à la preuve d’une certaine honorabilité professionnelle constitue une spoliation contraire au premier protocole additionnel de la Convention européenne des Droits de l’homme.

Recevabilité de l’acte d’appel:

L’appel de Bruno CURCI ayant été interjeté le 20 août 1999, la procédure applicable à l’introduction du présent recours est réglée incontestablement par la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif.

S’il est vrai que ladite loi a maintenu provisoirement dans son ensemble la procédure instituée par l’arrêté royal grand-ducal du 21 août 1866, le législateur de 1996 a cependant dû innover en introduisant par l’article 99 de la susdite loi une procédure relative à l’appel, cette voie de recours n’ayant pas existé devant le Conseil d’Etat et n’étant partant pas réglée, quant à sa procédure, par l’arrêté royal grand-ducal du 21 août 1866.

L’article 99 prévoyant deux formalités pour introduire valablement appel, à savoir d’une part le dépôt de la requête d’appel au greffe de la Cour administrative et d’autre part la signification préalable aux parties ayant figuré en première instance ou y ayant été dûment appelées, la Cour doit vérifier l’accomplissement de ces deux formalités dans le délai prévu pour pouvoir recevoir en la forme un acte qualifié de requête d’appel.

En l’espèce il est établi que la signification à la partie intimée n’a pas été faite préalablement au dépôt de la requête, ni même postérieurement à ce dépôt pendant le délai d’appel. Cette omission doit entraîner le rejet de la requête d’appel conformément à la jurisprudence constante de la Cour.

S’il est vrai que la procédure instituée par la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives n’exige plus, pour les appels tombant sous son empire et dirigés contre l’Etat, que la requête soit signifiée à l’Etat intimé, la Cour ne saurait cependant y trouver argument en faveur d’une révision de sa jurisprudence relative à la législation antérieure.

Le texte élaboré par le législateur de 1996 pour régler la procédure d’appel jusqu’à l’entrée en vigueur d’une autre loi de procédure ne comporte aucune équivoque qui serait susceptible d’une interprétation nouvelle à la lumière du changement législatif intervenu entre-temps. La Cour violerait la loi applicable en l’espèce si elle statuait autrement que par une décision d’irrecevabilité.

La requête d’appel déposée le 20 août 1999 par Bruno CURCI doit partant être déclarée irrecevable et les frais doivent être imposés à l’appelant.

Par ces motifs la Cour administrative, statuant contradictoirement, - 4 -

déclare l’appel de Bruno CURCI irrecevable;

condamne Bruno CURCI aux frais et dépens de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par Messieurs Georges KILL, président, rapporteur, Jean-Mathias GOERENS, premier conseiller, Marc FEYEREISEN, conseiller, et lu par le président en audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour.

Le greffier en chef Le président - 5 -


Synthèse
Numéro d'arrêt : 11484C
Date de la décision : 31/03/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 21/10/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2000-04-00;11484c ?

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