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25/03/1999 | LUXEMBOURG | N°10863C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 25 mars 1999, 10863C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 10863 C Inscrit le 1er septembre 1998

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Audience publique du 25 mars 1999 Recours formé par … contre l’Administration des Contributions Directes en matière de:

Impôts - Appel

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Vu la requête d’appel déposée au greffe de la Cour le 1er septembre

1998 par Maître Patrick Kinsch, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembo...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 10863 C Inscrit le 1er septembre 1998

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Audience publique du 25 mars 1999 Recours formé par … contre l’Administration des Contributions Directes en matière de:

Impôts - Appel

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Vu la requête d’appel déposée au greffe de la Cour le 1er septembre 1998 par Maître Patrick Kinsch, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de …, architecte diplômé, demeurant à Luxembourg, …, contre un jugement contradictoirement rendu par le tribunal administratif le 22 juillet 1998, ayant déclaré non justifié le recours par lui exercé contre les bulletins d’impôt sur le revenu et de l’impôt commercial communal pour l’année 1995;

Vu l’acte de signification de ladite requête d’appel à l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg en la personne de son Ministre d’Etat par exploit d’huissier Georges Nickts en date du 27 août 1998;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 16 décembre 1998 par le délégué du Gouvernement Jean-Marie Klein pour l’administration des contributions;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 11 janvier 1999 par Maître Patrick Kinsch, au nom de …;

Ouï le premier conseiller en son rapport ainsi que Maître Patrick Kinsch et le délégué du Gouvernement Jean-Marie Klein en leurs observations orales à l’audience publique du 21 janvier 1999;

Vu la rupture du délibéré ordonnée par la Cour administrative en date du 23 février 1999 ainsi que l’instruction supplémentaire de l’affaire en l’audience publique du 4 mars 1999.

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1 Par requête signifiée à l’Etat du Grand-Duché par exploit d’huissier du 27 août 1998 et déposée au greffe de la Cour le 1er septembre 1998, le sieur …, architecte diplômé, demeurant à Luxembourg, …, a déclaré interjeter appel contre un jugement contradictoirement rendu par le tribunal administratif le 22 juillet 1998 qui a déclaré non justifié le recours par lui exercé contre les bulletins d’impôt sur le revenu et de l’impôt commercial communal pour l’année 1995.

Le jugement dont appel a rejeté le recours de l’appelant en confirmant la décision de l’administration de qualifier d’entreprise commerciale les faits par l’appelant d’avoir vendu trois immeubles lui appartenant pour ensuite acquérir un terrain à bâtir et y construire un immeuble à appartements et de vendre par la suite deux de ces appartements et en donner le surplus en location.

L’appelant soutient que les faits décrits constituent de simples actes de gestion de son patrimoine privé et demande dès lors à la Cour de:

1) quant à l’impôt sur le revenu:

constater qu’aucun bénéfice commercial n’a été réalisé par M. … au titre de l’année 1995 (à l’exception de la somme de 12.997 francs perçue au titre du projet Aubépines Sàrl & Cie) et que la totalité de ses revenus nets s’élève dès lors à 2.797.822 francs;

ramener en conséquence, par réformation du bulletin de l’impôt sur le revenu, la cote d’impôt à la somme de 1.010.500 francs;

2) quant à l’impôt communal:

dire qu’aucun revenu soumis à l’impôt commercial communal n’a été réalisé par M. … au cours de l’année 1995;

partant ramener, par réformation de la base d’assiette de l’impôt commercial communal, à 0 franc la cote d’impôt commercial communal.

Dans son mémoire en réponse du 16 décembre 1998, le délégué du gouvernement conclut à voir dire irrecevables les conclusions qui visent, au-delà de la base d’assiette, la cote d’impôt commercial, parce que le tribunal n’a reçu le recours qu’en tant qu’il lui paraissait dirigé contre le bulletin de la base d’assiette et que ce chef du jugement est excepté de l’appel.

Au fond, le délégué du gouvernement s’en remet à l’appréciation de la Cour pour ce qui est de la qualification de l’activité litigieuse.

Dans son mémoire en réplique du 11 janvier 1999, l’appelant maintient les conclusions de l’acte d’appel tout en déclarant qu’il se borne à demander à la Cour, quant à l’impôt commercial communal, de ramener, par réformation de la base d’assiette de l’impôt commercial communal, à 0 franc ladite base d’assiette.

Considérant que l’appel est régulier quant à la forme et aux délais;

qu’il est partant recevable;

Considérant que les opérations litigieuses, au sujet desquelles la Cour a à se prononcer sur l’applicabilité de l’article 14 L.I.R. sont les suivantes:

En 1995, Monsieur … a procédé à la vente de trois immeubles, à savoir 1) un duplex dans un immeuble en copropriété sis à L-4178 Esch-sur-Alzette, 14, rue Pierre Goedert, acquis le 26 2 juillet 1991 et cédé suivant acte notarié du 16 mars 1995; 2) un studio et un bureau dans un immeuble en copropriété sis à L-4178 Esch-sur-Alzette, 4-6, rue Pierre Goedert, acquis le 14 août 1988 et cédé suivant acte notarié du 20 septembre 1995; 3) un studio dans un immeuble en copropriété sis à L-2714 Luxembourg, 6-12, rue du Fort Wallis, dénommé « Résidence Fort Wallis », acquis le 30 mars 1989 et cédé suivant acte notarié du 18 décembre 1995.

Il a ensuite acquis une place à bâtir sis à Luxembourg, 11, rue Charles Quint, ainsi que 677,35/1000 d’une place à bâtir sise à L-1225 Luxembourg, 7, rue Béatrix de Bourbon.

Ensuite, moyennant réaffectation du produit des ventes réalisées, il a fait construire un immeuble comprenant deux appartements et un duplex sur le terrain sis 7, rue Béatrix de Bourbon. Enfin, il a vendu, en l’état futur d’achèvement deux des appartements ainsi érigés.

Considérant que les opérations ainsi décrites ont été analysées par l’administration des Contributions directes comme constituant un revenu provenant d’une entreprise commerciale au sens de l’article 14 L.I.R. précité et dès lors comme imposable à ce titre et comme assujetties à l’impôt commercial communal;

que cette façon de voir a été reprise par le tribunal administratif qui a rejeté le recours par le jugement dont appel;

Considérant que l’appelant fait plaider que les faits tels que décrits ci-dessus ne constituent pas d’entreprise commerciale au sens de la loi fiscale mais qu’ils devraient être analysés comme relevant de la gestion de son patrimoine privé;

Considérant que l’article 14 L.I.R. dispose qu’est à considérer comme bénéfice commercial, le revenu net provenant d’une entreprise commerciale, industrielle, minière ou artisanale;

que le même texte définit comme entreprise commerciale « toute activité indépendante à but de lucre exercée de manière permanente et constituant une participation à la vie économique générale… »;

que la Cour doit dès lors examiner l’ensemble des transactions immobilières ci-dessus décrites sous l’angle de vue de l’existence cumulative des quatre critères de la loi dont l’existence simultanée définit l’entreprise commerciale et exclut la thèse soutenue par l’appelant de la simple gestion de la fortune privée;

Considérant qu’il résulte des éléments de fait de la cause que parmi les critères de la loi, il convient d’examiner en premier lieu celui de la permanence de l’activité litigieuse;

Considérant qu’aucun élément de la cause ne permet de conclure que l’acquisition en 1988, 1989 et 1991, des trois objets immobiliers vendus en vue de la réalisation de l’opération litigieuse avait été à l’époque faite en vue d’une prochaine revente;

que dès lors les opérations entrant en ligne de compte pour apprécier le caractère « permanent » de l’activité litigieuse ne sont que celles de la vente des trois éléments de patrimoine, de l’achat des terrains et de la cession subséquente de deux appartements de l’immeuble y construit;

3 Considérant que l’appelant qualifie ces opérations de gestion de patrimoine privé alors que les transactions auraient eu pour but de « simplifier la gestion de son patrimoine privé et d’augmenter ainsi ses revenus nets de location »;

Considérant qu’à l’appui de sa thèse, l’appelant se réfère aux travaux préparatoires de la loi, à la jurisprudence luxembourgeoise du Comité du Contentieux du Conseil d’Etat, dont la considération est aussi préconisée par le délégué du Gouvernement et à des décisions de jurisprudence allemande en la matière;

Considérant que suivant le commentaire du projet de loi, « le caractère de permanence n’implique pas nécessairement que l’activité se répète. Pour qu’il y ait permanence, il suffit que l’activité ait lieu avec l’intention de la répéter si l’occasion s’en présente et de constituer de la sorte une source de revenu sur la base d’opérations répétées. A défaut de pareille intention, une opération isolée ne revêt pas le caractère requis de permanence… »;

que ce même commentaire de l’article 14 dit que « le caractère de permanence sépare l’activité commerciale … d’actes similaires isolés qui ont lieu dans le cadre de l’administration du patrimoine privé du contribuable »;

Considérant que des opérations telles que celles soumises à l’examen de la Cour sont considérées par la jurisprudence allemande comme pouvant rentrer dans l’administration du patrimoine privé;

que notamment le nombre limité des opérations d’achat et de vente, donné en l’espèce, est à retenir comme critère du caractère non commercial d’une activité;

Considérant, que pareillement, la jurisprudence luxembourgeoise considère une réalisation immobilière isolée comme rentrant dans la gestion du patrimoine privé, ceci du moins lorsque l’envergure en est de l’ordre de celle soumise à l’examen de la Cour;

Considérant que le caractère isolé de l’activité litigieuse n’est contredit par aucun élément du dossier, de sorte que ni une répétition effective ni l’intention de répéter à l’occasion des opérations analogues n’est établie en cause;

que dès lors, par réformation de la décision entrepise, il y a lieu de dire que l’activité sous examen ne présente pas le caractère de permanence requis pour la faire qualifier d’entreprise commerciale;

que l’existence cumulative des quatre critères d’appréciation ci-dessus cités étant exigée par la loi, il n’est pas nécessaire, à défaut d’existence de l’un des critères, d’examiner celle des trois autres.

P A R C E S M O T I F S:

la Cour, statuant contradictoirement, reçoit l’appel en la forme;

4 au fond le dit justifié;

partant dit que le bénéfice réalisé par l’appelant sur les opérations sous examen n’est pas à qualifier de bénéfice commercial et que, pour l’exercice 1995, l’impôt dû par l’appelant s’établit en faisant abstraction du caractère d’entreprise commerciale de l’opération litigieuse relative à la réalisation immobilière effectuée rue Béatrix de Bourbon;

renvoie l’affaire devant l’administration des Contributions;

laisse les frais des deux instances à charge de l’Etat.

Ainsi jugé par Georges KILL, président Jean-Mathias GOERENS, premier conseiller Marc FEYEREISEN, conseiller et lu par le président Georges KILL en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour.

Le greffier en chef Le président 5


Synthèse
Numéro d'arrêt : 10863C
Date de la décision : 25/03/1999

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;1999-03-25;10863c ?

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