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18/03/1999 | LUXEMBOURG | N°10944C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 18 mars 1999, 10944C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 10944 C Inscrit le 9 octobre 1998 —————————————————————————————————— —— AUDIENCE PUBLIQUE DU JEUDI, 18 MARS 1999 Recours de … MISCHEL c/ la Commune de Vichten en matière de marchés publics (art. 7 de la loi du 7 novembre 1996) ————————————————————————————— ———— Vu la requête déposée le 9 octobre 1998 au greffe de la Cour administrative par laquelle … MISCHEL a exercé un recours en ann

ulation contre le cahier des charges relatif à la fourniture d’un tracteur adopté par le collège des bourgmestre et échevins de la Commune de Vichten en date du 24.08.1998 et contre la décision dud...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 10944 C Inscrit le 9 octobre 1998 —————————————————————————————————— —— AUDIENCE PUBLIQUE DU JEUDI, 18 MARS 1999 Recours de … MISCHEL c/ la Commune de Vichten en matière de marchés publics (art. 7 de la loi du 7 novembre 1996) ————————————————————————————— ———— Vu la requête déposée le 9 octobre 1998 au greffe de la Cour administrative par laquelle … MISCHEL a exercé un recours en annulation contre le cahier des charges relatif à la fourniture d’un tracteur adopté par le collège des bourgmestre et échevins de la Commune de Vichten en date du 24.08.1998 et contre la décision dudit collège des bourgmestre et échevins du 01.09.1998 de ne pas modifier ledit cahier des charges;

vu l’exploit de l’huissier Gilbert RUKAVINA du 13 octobre 1998 par lequel la requête a été signifiée à la Commune de Vichten;

vu le mémoire en réponse déposé par l’Administration communale de Vichten le 26 novembre 1998 et le mémoire en réplique déposé par Monsieur … Mischel en date du 7 janvier 1999;

vu les pièces régulièrement versées en cause et notamment les décisions attaquées;

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ouï le président-rapporteur en son rapport à l’audience du 14 janvier 1999 ainsi que Maîtres Serge MARX et Roger NOTHAR en leurs plaidoiries respectives.

————————————————————————————— ———— Par requête déposée le 9 octobre 1998 au greffe de la Cour administrative … MISCHEL a exercé un recours en annulation contre 1) le cahier des charges relatif à la fourniture d’un tracteur adopté par le collège des bourgmestre et échevins de la Commune de Vichten en date du 24.08.1998;

2) la décision du collège des bourgmestre et échevins du 01.09.1998 de ne pas modifier ledit cahier des charges.

Ladite requête a été signifiée le 13 octobre 1998 à la Commune de Vichten.

La partie MISCHEL base le recours introduit devant la Cour sur l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 en faisant valoir que tant le cahier des charges attaqué que les décisions afférentes du collège échevinal seraient à considérer comme actes à caractère réglementaire au sens du prédit article.

La partie recourante estime qu’en élaborant un cahier des charges dont les conditions techniques ne sont remplies, suivant son soutènement, que par un seul modèle de tracteur disponible sur le marché la Commune a méconnu les règles de la concurrence en organisant en réalité un marché de gré à gré sous le couvert d’une soumission publique. Ce faisant la Commune aurait violé la loi du 4 avril 1974 concernant le régime des marchés publics de travaux et de fournitures.

En tant que soumissionnaire défavorisé de ce fait … MISCHEL estime pouvoir justifier d’un intérêt personnel, direct, actuel et certain à attaquer les actes en question.

L’Administration communale de Vichten a versé le 26 novembre 1998 un mémoire en réponse dans lequel elle critique la recevabilité du recours en argumentant que le cahier des charges attaqué ne constituerait pas un acte administratif susceptible de faire l’objet d’un recours. La défenderesse conteste par ailleurs qu’un cahier des charges serait à considérer comme acte à caractère réglementaire.

Quant au fond l’Administration communale fait valoir que la fixation des critères de choix dans un cahier des charges serait une mesure d’opportunité politique soustraite au contrôle du juge d’annulation. Par - 2 -

ailleurs l’affirmation suivant laquelle les critères fixés ne s’appliqueraient qu’à un seul modèle de tracteur serait erronée. Cette même affirmation serait non pertinente en l’espèce, le point 4 du cahier des charges permettant la prise en considération d’offres spéciales et de variantes (Sonderangebote und Varianten).

Monsieur … Mischel a fait déposer en date du 7 janvier 1999 un mémoire en réplique précisant son argumentation suivant laquelle le cahier des charges serait un acte unilatéral détachable et partant attaquable. L’acte aurait par ailleurs un caractère réglementaire alors qu’il régirait en termes généraux une situation concernant tous les soumissionnaires potentiels.

Quant au fond de l’affaire le recourant maintient ses conclusions suivant lesquelles l’Administration communale a en réalité organisé un marché de gré à gré en fixant des conditions techniques dont il continue de soutenir qu’elles ne peuvent être remplies cumulativement que par un seul modèle de tracteur.

Quant à la compétence:

Aux termes de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 la Cour administrative statue sur les recours dirigés pour incompétence, excès et détournement de pouvoir ou pour violation de la loi ou des formes destinées à protéger les intérêts privés contre les actes administratifs à caractère réglementaire, quelle que soit l’autorité dont ils émanent.

Pour vérifier sa compétence la Cour est donc amenée à examiner si le cahier des charges spécial du 24 août 1998 constitue une décision visée par la définition in fine de l’article 7 précité, c’est à dire si, d’une part, elle a la nature d’un acte administratif, et si, d’autre part, elle a un caractère réglementaire.

Il est vrai que le cahier des charges spécial, une fois élaboré et publié, constitue dans le cadre de la procédure d’adjudication un document ayant un caractère contractuel conditionnant la validité de la passation du marché auquel il se rapporte et dont il précise les conditions d’exécution et les critères applicables pour déterminer l’offre la plus avantageuse. Néanmoins l’établissement unilatéral du cahier des charges spécial est un acte administratif détachable du contrat proprement dit. Cet acte, ayant ses règles propres, est susceptible de faire grief dès avant la phase de l’adjudication à des soumissionnaires potentiels. Il doit pouvoir être attaqué dès que ses stipulations sont connues par tout intéressé devant le juge normal de la légalité des actes administratifs auquel il appartient de vérifier si, déjà à ce stade de la procédure, il ne viole pas le principe de l’égalité devant les services publics par des discriminations de nature à favoriser certains soumissionnaires.

Quant au caractère réglementaire ou non de l’acte attaqué il s’impose de distinguer entre la spécialité des conditions fixées par le cahier des charges - 3 -

quant à l’objet du contrat et la généralité du cercle des personnes concernées par ces conditions. En fait les conditions fixées par le cahier des charges affectent la situation d’un nombre indéfini de soumissionnaires potentiels par des dispositions générales et impersonnelles s’appliquant à des personnes non individuellement désignées. Sous cet aspect l’acte rentre ainsi dans la définition de l’acte à caractère réglementaire.

L’établissement par la Commune de Vichten du cahier des charges du 24 août 1998 constitue donc un acte administratif à caractère réglementaire de sorte que la Cour administrative est compétente pour connaître d’un recours en annulation dirigé contre cet acte pour l’un des motifs visés à l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996.

Il en est de même du recours dirigé contre la décision du collège des bourgmestre et échevins de la Commune de Vichten du 1er septembre 1998, cette décision participant du caractère réglementaire de l’acte auquel elle se rapportait.

Quant à la recevabilité au fond:

Le recours en annulation contre un acte à caractère réglementaire n’est recevable au fond que dans la mesure où le recourant peut justifier d’un intérêt découlant du grief que l’acte est susceptible de lui faire.

Les reproches qui peuvent être formulés à l’égard des clauses d’un cahier spécial des charges dès avant l’adjudication ne sauraient viser que des éléments faisant en eux-mêmes grief par le caractère discriminatoire qui leur est inhérent.

En l’espèce la partie MISCHEL reproche au pouvoir adjudicateur d’avoir libellé la partie technique du cahier des charges de telle manière que le tracteur d’une seule marque répondrait cumulativement à toutes les exigences posées.

Or les données fixées par le cahier spécial des charges ne font qu’indiquer les critères entrant en ligne de compte pour déterminer l’offre économiquement la plus avantageuse (Règlement grand-ducal du 10 janvier 1989 portant exécution du chapitre 2 de la loi du 4 avril 1974 concernant le régime des marchés publics de travaux et de fournitures / Transposition des Directives CEE 71/304, 71/05, 77/62 et 88/295).

L’état de choses mis en avant par … MISCHEL, à le supposer correspondre à la réalité, n’est susceptible de faire grief qu’en fonction de la manière dont les critères du cahier spécial des charges sont pris en compte pour l’appréciation des avantages des diverses offres introduites par les différents soumissionnaires. Ceci est particulièrement vrai dans le cas sous examen, alors que le cahier des charges attaqué prend soin d’autoriser la proposition de variantes et leur prise en considération.

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Les clauses critiquées ne peuvent donc actuellement porter préjudice à la partie requérante, un préjudice ne pouvant accroître à cette dernière que par l’interprétation qui peut être faite le cas échéant desdites clauses au moment de l’adjudication.

Ni l’établissement du cahier des charges du 24 août 1998, ni la décision du 1er septembre 1998 de le maintenir en vigueur ne constituent pour le recourant des décisions de nature à causer grief, de sorte que ce dernier ne peut justifier d’un intérêt légitime pour agir.

Le défaut d’intérêt dans le chef de … MISCHEL rend son recours irrecevable.

par ces motifs la Cour administrative, statuant contradictoirement, se déclare compétente pour connaître du recours;

le déclare cependant irrecevable;

impose les frais à la partie recourante.

Ainsi jugé par Messieurs Georges KILL, président, rapporteur, Jean-Mathias GOERENS, premier conseiller, Marc FEYEREISEN, conseiller, et lu par le président en audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour.

Le greffier en chef Le président - 5 -


Synthèse
Numéro d'arrêt : 10944C
Date de la décision : 18/03/1999

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;1999-03-18;10944c ?

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