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18/03/1999 | LUXEMBOURG | N°10020C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 18 mars 1999, 10020C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 10020 C Inscrit le 26 mai 1997

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Audience publique du 18 mars 1999 Recours formé par … MASSARD, veuve … contre la Ville de Luxembourg et le ministre de l’Intérieur en matière d’aménagement des agglomérations

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Vu la requête déposée au greffe de la Cour admini

strative le 26 mai 1997 par Maître Jean Hoss, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 10020 C Inscrit le 26 mai 1997

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Audience publique du 18 mars 1999 Recours formé par … MASSARD, veuve … contre la Ville de Luxembourg et le ministre de l’Intérieur en matière d’aménagement des agglomérations

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Vu la requête déposée au greffe de la Cour administrative le 26 mai 1997 par Maître Jean Hoss, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de … Massard, veuve …, demeurant à Luxembourg, …, tendant à l’annulation d’une décision du ministre de l’Intérieur du 6 février 1997 et de la délibération du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 12 juillet 1993 approuvée par cette décision;

Vu l’acte de signification de ladite requête par exploit d’huissier Pierre Kremmer du 27 mai 1997;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 31 juillet 1998 par Maître Patrick Kinsch, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg;

Vu l’acte de signification dudit mémoire en réponse par acte d’huissier Georges Nickts du 31 juillet 1998;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe de la Cour administrative le 25 septembre 1998;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions attaquées;

Ouï le conseiller-rapporteur en son rapport, Maître Patrick Kinsch et le délégué du Gouvernement Marc Mathekowitsch en leur plaidoiries respectives.

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1 Par requête du 26 mai 1997, Maître Jean Hoss au nom de … Massard, veuve …, demeurant à Luxembourg, …, déclare exercer un recours en annulation sur base de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif contre 1. le projet d’aménagement général de la Ville de Luxembourg tel qu’adopté définitivement quant à sa partie graphique par délibération du conseil communal du 12 juillet 1993, mais uniquement pour autant qu’il concerne la requérante et contre cette délibération elle-même;

2. la décision du ministre de l’Intérieur en date du 6 février 1997 notifiée au mandataire soussigné par lettre du ministre de l’Intérieur datée du 24 février 1997 rejetant la réclamation introduite auprès du ministre par la requérante antécédente.

La requérante fait exposer qu’elle est propriétaire en indivis pour la moitié et usufruitière pour l’autre moitié d’un terrain situé à Luxembourg sur lequel se trouvent implantées deux habitations, classé sous l’ancien plan d’aménagement dit « VAGO » en secteur d’habitation à faible densité et reclassé le 12 juillet 1993 en zone dite « de verdure » réglée par le chapitre H1 de la partie écrite du projet général d’aménagement.

La requérante fonde son recours sur des arguments tirés de la violation de la loi et des formes destinées à protéger les intérêts de la vie privée en ce que le caractère contradictoire de la prise de décision n’aurait pas été respecté par le ministre et que les dispositions attaquées se heurteraient au principe de la non-rétroactivité de la loi et du règlement, et du maintien des droits valablement acquis.

Elle fonde de surplus son recours sur un excès, sinon un détournement de pouvoir, alors que la décision du ministre de l’Intérieur manquerait en fait de motivation et conclut à l’annulation des décisions attaquées de l’administration communale de la Ville de Luxembourg du 12 juillet 1993 et du ministre de l’Intérieur du 6 février 1997.

Dans son mémoire en réponse du 31 juillet 1998, la Ville de Luxembourg conclut à la compétence de la Cour pour connaître du litige.

En ce qui concerne la recevabilité du recours, la Ville de Luxembourg soulève qu’en ce qu’il est dirigé contre la décision du conseil communal, le recours n’a pas respecté le délai de trois mois porté par la loi. Elle se rapporte à prudence de justice quant à l’observation de ce délai en ce que le recours est dirigé contre la décision d’approbation.

La Ville soutient par ailleurs que le recours n’aurait pas été signifié par voie d’huissier aux parties adverses avant son dépôt au greffe.

La Ville conclut par ailleurs à l’irrecevabilité du recours, alors que la décision du conseil communal approuvée par le ministre de l’Intérieur serait antérieure à l’entrée en vigueur de la loi précitée du 6 novembre 1996.

Au fond, la Ville fait plaider que le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure administrative non contentieuse ne serait pas applicable en matière réglementaire, la procédure de la loi du 12 juin 1937 sur l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes ayant été régulièrement suivie.

La Ville entend par ailleurs écarter les moyens du recours quant à la violation de la loi et quant à l’excès ou au détournement de pouvoir et conclut au rejet du recours.

2 Par mémoire du 25 septembre 1998, le délégué du Gouvernement se rapporte à prudence de justice en ce qui concerne la recevabilité du recours quant à la forme et aux délais. Il conclut à l’irrecevabilité du recours alors que la décision du conseil communal serait antérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 7 novembre 1996.

Subsidiairement le délégué du Gouvernement soutient que les moyens de nullité produits au recours seraient non fondés.

Par lettre en date du 28 septembre 1998, Maître Jean Hoss a informé la Cour que … Massard aurait vendu sa part qu’elle détenait dans la maison et qu’il n’occupait plus dans ce dossier.

Quant à la recevabilité du recours Tant la Ville de Luxembourg que le délégué du Gouvernement se rapportent à prudence de justice concernant la recevabilité du recours quant à la forme et aux délai.

La Ville de Luxembourg soulève plus particulièrement l’irrecevabilité du recours en annulation pour cause de tardiveté.

En l’espèce la décision du ministre de l’Intérieur du 6 février 1997 a été notifiée à la requérante ainsi qu’à son mandataire le 24 février 1997. Le délai contentieux a donc expiré trois mois après la notification de la décision, soit le 24 mai 1997. En vertu de l’article 1033.4 du code de procédure civile, « tout délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche, un jour férié légal ou un jour férié de rechange est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant ». En conséquence, le recours déposé le lundi 26 mai 1997 est à déclarer recevable.

La Ville de Luxembourg se rapporte encore à prudence de justice quant à la recevabilité du recours en ce qu’il n’aurait pas été signifié aux parties par voie d’huissier préalablement avant son dépôt au greffe de la Cour administrative.

Le recours introductif d’instance a été signifié par exploit d’huissier Pierre Kremmer le 27 mai 1997, soit le lendemain du dépôt du recours au greffe de la Cour administrative.

Contrairement à la procédure d’appel régie spécifiquement par l’article 99 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif et dans laquelle la requête d’appel doit être déposée au greffe et signifiée préalablement aux parties ayant figuré en première instance ou y ayant été dûment appelées, il découle des articles 1er et 2 du règlement de procédure en matière de contentieux devant le Conseil d’Etat, maintenu en vigueur par l’article 98 de la loi du 7 novembre 1996 précitée, que dans le cas de recours en annulation contre les actes administratifs à caractère réglementaire fondés sur l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 précitée, la Cour est valablement saisie d’une affaire par le seul dépôt de la requête, la signification du recours au défendeur ne constituant pas, au regard du règlement de procédure, une formalité substantielle sanctionnée de nullité, mais une formalité complémentaire qui a pour objet de faire courir les délais pour la production des mémoires.

Comme il ne résulte d’aucune pièce du dossier que … Massard ait vendu une des maisons sises sur le terrain en question, alors que de toute manière la requête introductive d’instance se réfère expressément à deux maisons existant sur la propriété concernée, … Massard a qualité pour agir.

La procédure devant les juridictions administratives étant essentiellement écrite, le fait qu’une partie n’ait pas comparu à l’audience est sans conséquence sur le caractère contradictoire de la 3 décision rendue, dès lors que toutes les parties ont déposé un mémoire, l’objet du recours et les moyens invoqués résultant à suffisance de droit des actes de procédure.

La requête est partant recevable en la pure forme.

La Ville de Luxembourg et le délégué du Gouvernement opposent l’irrecevabilité du recours, notamment au motif que la décision du ministre de l’Intérieur du 6 février 1997 serait à considérer comme acte de tutelle administrative qui rétroagirait à la date de l’acte approuvé, soit à la délibération du conseil communal du 12 juillet 1993, donc à une date où le recours direct contre les actes à caractère réglementaire créé par l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif n’existait pas.

Il est de doctrine et de jurisprudence que la tutelle administrative, outre les actes d’approbation, d’improbation et d’annulation, comporte aussi, comme en l’espèce, des actes intervenant dans le cadre de recours à fin de réformation où l’autorité de tutelle n’intervient que sur saisine de la part du réclamant.

Les dernières interventions de l’autorité supérieure sont à considérer, non comme actes autonomes, mais comme simples actes de tutelle administrative.

Il y a donc lieu de qualifier la décision du ministre rendue en l’espèce d’acte de tutelle administrative et de l’examiner suivant le régime général des actes de tutelle.

Les actes de tutelle administrative rétroagissent à la date de la décision approuvée qui, une fois approuvée, est censée être valable dès son origine.

La décision approuvée du 12 juillet 1993 est antérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 7 novembre 1996 qui, en son article 7, a créé le recours direct devant la Cour administrative contre les décisions administratives à caractère réglementaire.

Les décisions portant adoption des plans d’aménagement dans le cadre de la procédure définie dans la loi du 12 juin 1937 sur l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes sont de nature réglementaire, la décision d’approbation du ministre de l’Intérieur participant à ce caractère.

L’existence d’une voie de recours est une règle de fond du droit et non une règle de forme, et elle est régie, en l’absence de disposition transitoire, ce qui est le cas en l’espèce, par la loi sous l’empire de laquelle la décision attaquée a été rendue.

Du fait du caractère de simple acte de tutelle de la décision du ministre de l’Intérieur et de l’effet rétroactif de cette mesure de tutelle à la date de la décision approuvée, celle-ci étant antérieure à l’entrée en vigueur le 1er janvier 1997 de la loi du 7 novembre 1996, le recours en annulation contre la décision du ministre de l’Intérieur, acte de la procédure d’élaboration d’un texte à caractère réglementaire ayant sorti ses effets avant la création du recours direct, est irrecevable.

Par ces motifs La Cour administrative, statuant contradictoirement, 4 déclare le recours introduit par requête du 26 mai 1997 contre une décision du ministre de l’Intérieur irrecevable;

condamne la requérante aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé par Georges KILL, président Marion LANNERS, vice-présidente Christiane DIEDERICH-TOURNAY, conseiller, rapporteur et lu par le président Georges KILL en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour.

Le greffier en chef Le président 5


Synthèse
Numéro d'arrêt : 10020C
Date de la décision : 18/03/1999

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;1999-03-18;10020c ?

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