GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° du rôle 10982C Inscrit le 17 novembre 1998 Audience publique du 19 janvier 1999 Recours formé par Monsieur … SORG contre le ministre de la Justice en matière de carte d’identité d’étranger - Appel -
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Vu la requête d’appel déposée le 17 novembre 1998 au nom de … Sorg, …, demeurant à L-…, au greffe de la Cour administrative par Maître Mario Di Stefano, assisté de Maître François Moyse, tous deux avocats inscrits à la liste I du Barreau de Luxembourg, contre un jugement rendu en matière de carte d’identité d’étranger par le tribunal administratif à la date du 7 octobre 1998.
Vu l’acte de signification de ladite requête d’appel par exploit d’huissier Michelle Thill du 16 novembre 1998.
Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe de la Cour administrative le 8 décembre 1998.
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 23 décembre 1998 par Maître Mario Di Stefano au nom de … Sorg.
Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.
Ouï la vice-présidente en son rapport, Maître Mario Di Stefano et le délégué du Gouvernement Guy Schleder en leurs plaidoiries respectives à l’audience du 5 janvier 1999.
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Par jugement rendu à la date du 7 octobre 1998 par le tribunal administratif, … Sorg a été débouté de son recours contre une décision du ministre de la Justice, confirmée sur recours gracieux, en matière de carte d’identité d’étranger. Les juges de première instance ont appuyé leur décision sur le fait que le requérant ne séjourne au Luxembourg que d’une manière sporadique.
Par requête d’appel déposée au greffe de la Cour administrative le 17 novembre 1998 et signifiée la veille, Maître Mario Di Stefano, assisté de Maître François Moyse, au nom de … Sorg, a déclaré relever appel du jugement précité.
Il reproche au tribunal de ne pas avoir constaté l’illégalité de la décision ministérielle de refus pour violation de l’article 2 du règlement grand-ducal du 28 mars 1972, en vertu duquel l’avis de la commission consultative en matière de police des étrangers « sera également pris, à la demande de l’étranger intéressé, après décision portant 1° refus de la carte d’identité… ». Il conteste ensuite les constatations tant de la gendarmerie que du tribunal suivant lesquelles son mandant ne séjournerait que sporadiquement au Grand-Duché et insiste sur la violation du droit communautaire.
Le délégué du Gouvernement estime que le ministre n’avait pas à saisir la commission malgré la demande du requérant, alors que postérieurement à cette demande le ministre s’est déclaré disposé à réexaminer le dossier et que le requérant a envoyé des pièces au ministre sans demander que les pièces soient transmises à la commission.
Il renvoie aux procès-verbaux de la gendarmerie pour solliciter la confirmation du jugement entrepris.
L’article 2 du règlement grand-ducal du 28 mars 1972 relatif à la composition, l’organisation et le fonctionnement de la commission consultative en matière de police des étrangers dispose que « cet avis (de la commission consultative en matière de police des étrangers) sera également pris, à la demande de l’étranger intéressé, après décision portant 1° refus de la carte d’identité … Cette demande devra être présentée par écrit au Ministre de la Justice dans le mois dans lequel la décision a été portée à la connaissance du requérant. Elle ne suspend pas l’exécution de la décision … ».
La décision de refus du ministre date du 12 juin 1997.
Par lettre recommandée du 17 juin 1997 le mandataire du requérant a prié le ministre « de bien vouloir réviser votre décision et d’accorder à Monsieur SORG la carte d’identité sollicitée.
Aussi, je vous prie de soumettre la question à l’avis de la commission consultative en matière de police des étrangers ».
Par courrier du 12 août 1997, le ministère de la Justice, sous la signature d’un attaché de Gouvernement 1er en rang, accuse réception du « recours » et affirme « que la situation de votre client fera l’objet d’un réexamen de la part de mes services ».
Par courrier du 12 novembre 1997, le mandataire du requérant informe l’attaché de Gouvernement ayant signé l’accusé de réception du 12 août 1997 du changement d’adresse de son mandant et joint le contrat de bail.
Par décision du 20 février 1998, le ministre fait parvenir au mandataire du requérant l’information suivante: « je ne peux que confirmer ma décision du 12 juin 1998 de ne pas délivrer la carte de séjour à votre client ».
Il est incontestable et par ailleurs non contesté que le requérant a demandé la consultation de la commission en matière de police des étrangers et il est établi qu’un tel avis n’a pas été pris.
2 Le fait par le requérant de communiquer postérieurement à cette demande un changement d’adresse, pièces à l’appui, au ministère de la Justice sans autres observations, ne saurait être interprété comme une renonciation implicite à sa demande préalable de voir son dossier soumis à la commission consultative.
Aucune disposition légale ne prévoyant un recours en pleine juridiction en la matière, la Cour, qui rejoint à cet égard le tribunal, n’est pas compétente pour connaître du recours en réformation et se limite à toiser le recours en annulation.
La procédure prévue en matière de carte d’identité d’étranger n’ayant pas été respectée, les décisions ministérielles de refus des 12 juin 1997 et 20 février 1998 sont à annuler et le dossier administratif est à renvoyer devant le ministre de la Justice.
Par ces motifs, la Cour, statuant contradictoirement, sur le rapport de la vice-présidente, reçoit l’acte d’appel, le dit fondé, par réformation du jugement du 7 octobre 1998, annule les décisions de refus du ministre de la Justice des 12 juin 1997 et 20 février 1998;
renvoie le dossier administratif de … Sorg devant le ministre de la Justice;
condamne l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg aux frais des deux instances.
Ainsi jugé par:
Marion LANNERS, vice-présidente, rapporteur Christiane DIEDERICH-TOURNAY, conseiller, Marc FEYEREISEN, conseiller et lu par la vice-présidente Marion LANNERS en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie WILTZIUS.
le greffier la vice-présidente 3