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15/10/1998 | LUXEMBOURG | N°10704C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 15 octobre 1998, 10704C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° 10704C du rôle Inscrit le 18 mai 1998

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Audience publique du 15 octobre 1998 Recours formé par le sieur … ASSELBOURG contre le Syndicat des Tramways intercommunaux dans le canton d'Esch (TICE), en matière de sanction disciplinaire (nomination d’un commissaire spécial)

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Vu la requête déposée au greffe de la Cour administrative le 18 mai 1998 par Maître Jean-

Marie BAULER, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxemb...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° 10704C du rôle Inscrit le 18 mai 1998

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Audience publique du 15 octobre 1998 Recours formé par le sieur … ASSELBOURG contre le Syndicat des Tramways intercommunaux dans le canton d'Esch (TICE), en matière de sanction disciplinaire (nomination d’un commissaire spécial)

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Vu la requête déposée au greffe de la Cour administrative le 18 mai 1998 par Maître Jean-Marie BAULER, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom du sieur … ASSELBOURG en vue de charger un commissaire spécial de prendre une décision conforme à l’arrêt de la Cour administrative du 29 janvier 1998 pour compte de Monsieur … ASSELBOURG, directeur administratif du Syndicat des Tramways Intercommunaux dans le Canton d'Esch (en abrégé TICE), demeurant à …;

Vu l’exploit de signification de ladite requête au Syndicat des Tramways intercommunaux dans le canton d'Esch (TICE) à la date du 20 mai 1998;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 16 juin 1998 par Maître Roger NOTHAR , avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom du Syndicat des Tramways Intercommunaux dans le Canton d'Esch (en abrégé TICE);

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative en date du 13 juillet 1998 par Maître Jean-Marie BAULER;

Vu les pièces versées en cause;

Ouï le conseiller-rapporteur en son rapport, Maître Jean-Marie BAULER et Maître Roger NOTHAR en leurs plaidoiries respectives.

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Par requête déposée le 18 mai 1988 au greffe de la Cour administrative, Maître Jean-Marie BAULER, avocat inscrit à la liste 1 du tableau de l'Ordre des Avocats à Luxembourg, demeurant à Luxembourg , a formé un recours en vue de voir charger un commissaire spécial de prendre une décision conforme à l’arrêt de la Cour administrative du 29 janvier 1998 au profit de Monsieur … ASSELBOURG, directeur administratif du Syndicat des Tramways Intercommunaux dans le Canton d'Esch (en abrégé TICE), demeurant à … Il invoque comme base légale du recours les articles 2.4, 84 et 85.1 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l'ordre administratif.

D’après le requérant, les articles 84 et 85.1 de la loi du 7 novembre 1996 concernant l'exécution des arrêts et jugements en matière administrative prévoient un recours spécial pour excès de pouvoir résultant de la méconnaissance de l'autorité de la chose jugée, qui peut être porté devant la Cour administrative par le requérant qui, trois mois après le prononcé de l’arrêt en date du 29 janvier 1998, n'a pas obtenu du comité des TICE une nouvelle décision conforme aux dispositions dudit arrêt.

Après avoir détaillé les faits et préactes du dossier, il constate qu’en exécution de l’arrêt de la Cour administrative du 29 janvier 1998 les TICE ont remboursé en date du 12 mars 1998 à Monsieur ASSELBOURG l'amende d'un cinquième d'une mensualité brute du traitement de base.

Une lettre du 21 avril 1998 par laquelle le président … a convoqué le comité des TICE pour la séance du 28 avril 1998 contenait l'ordre du jour de ladite séance dont le premier point était de la teneur suivante:

"Acquittement du directeur administratif … ASSELBOURG en exécution de l’arrêt de la Cour administrative du 29 janvier 1998." Dans le préambule de la délibération du comité du 28 avril 1998 (pièce N°6) qui a été envoyée par lettre recommandée au requérant le 13 mai 1998, il est indiqué:

« Art. Ier ; OBJET: Acquittement du directeur administratif … ASSELBOURG en exécution de l’arrêt de la Cour administrative du 29 janvier 1998. » Contrairement au premier point de la convocation du 21 avril 1998 et contrairement à l'objet du préambule de la délibération du 28 avril 1998, le comité des TICE n'aurait pas acquitté le requérant, alors que dans le dispositif de ladite délibération il a été décidé de transmettre le dossier pour avis au Conseil de Discipline des fonctionnaires communaux.

D’après le requérant, en transmettant le dossier pour avis au Conseil de Discipline, au lieu d'acquitter le requérant, le comité aurait omis de prendre dans les trois mois une décision conforme à l'arrêt de la Cour administrative du 29 janvier 1998 qui a constaté: "Que la procédure disciplinaire et la sanction qui s'en est suivie sont à considérer comme des manœuvres tendant à se séparer du directeur administratif par l'usure plutôt que de sanctionner des faits constituant un réel manquement aux devoirs du fonctionnaire." Il demande ainsi de voir charger un commissaire spécial à choisir parmi les fonctionnaires du Commissariat du District ou du Ministère de l’Intérieur de prendre, aux lieu et place du Comité du Syndicat et aux frais de celui-ci, la décision conforme à l’arrêt de la Cour administrative du 29 janvier 1998 et d’acquitter le requérant.

2 Dans un mémoire en réponse déposé le 16 juin 1998, Maître Roger NOTHAR, pour les TICE, conteste la recevabilité du recours.

En exécution du jugement du 14 juillet 1997 du Tribunal Administratif et de l’arrêt de la Cour administrative du 29 janvier 1998, le Comité des TICE aurait délibéré en prosécution de cause à la date du 28 avril 1998 sur base de l'article 68.5 de la loi modifiée du 24 décembre 1985 fixant le statut général des fonctionnaires communaux et il aurait admis que la décision de suspension de … ASSELBOURG aurait cessé de produire ses effets. De plus, le Comité des TICE aurait décidé de transmettre le dossier pour avis au conseil de discipline des fonctionnaires communaux.

Le Comité des TICE considérerait ainsi que l'annulation, mettant à néant la décision attaquée, aurait un effet rétroactif, la décision étant censée n'avoir jamais existé, sous réserve des droits légitimement acquis.

Aux fins de régulariser la situation juridique et administrative de … ASSELBOURG en l'adaptant aux circonstances actuelles de fait et de droit, le Comité, dans le respect de ce qui aurait été décidé au contentieux, aurait admis que la décision de suspension prise par le Président des TICE le 12 août 1994, confirmée par le Comité des TICE le 9 septembre 1994, aurait cessé de produire ses effets.

Au fond, le Comité des TICE aurait relevé que la Cour administrative aurait constaté que l'affaire disciplinaire, initialement considérée comme grave et ayant conduit à une suspension des fonctions du directeur des TICE pendant 14 mois, n'aurait même pas été transmise au conseil de discipline pour avis, ceci malgré une identité des faits initialement reprochés et finalement retenus à l'appui de la décision disciplinaire.

En exécution du prédit arrêt du 29 janvier 1998, le Comité aurait alors décidé de transmettre le dossier pour avis au conseil de discipline des fonctionnaires communaux.

D’après le défendeur, les juridictions administratives ne sauraient s'immiscer dans l'administration active.

Ainsi, dans son avis sur le projet de loi destiné à assurer l'exécution des arrêts, le Conseil d'Etat aurait fait remarquer qu'il n'est pas toujours possible de désigner un commissaire spécial dans tous les cas d'inexécution d'une décision d'annulation. Il existerait des actes administratifs individuels pour lesquels la désignation d'un commissaire spécial ne se concevrait pas: ce seraient ceux que la Constitution aurait réservé à un organe déterminé.

Subsidiairement, la demande en nomination d'un commissaire spécial devrait être déclarée irrecevable alors que le TICE aurait pris une décision avant l'introduction de l'instance en manquement.

Plus subsidiairement, pour qu'il puisse y avoir lieu à la nomination d'un commissaire spécial, l'administration devrait être trouvée en situation de méconnaître ce qui a été jugé en fait ou en droit.

3 Quant au fond de l’affaire, il résulterait de la délibération du Comité des TICE du 28 avril 1998 que l’arrêt de la Cour administrative du 29 janvier 1998 aurait été scrupuleusement respecté et suivi alors que face à la décision contentieuse d'annulation, le Comité des TICE devait délibérer à la fois sur la réintégration de … ASSELBOURG et sur les faits à la base du dossier disciplinaire.

Dans un mémoire en réplique le sieur ASSELBOURG reprend en fait son argumentation développée dans son acte introductif d’instance en faisant valoir qu’il aurait un intérêt moral et matériel à agir et qu’il subirait un dommage matériel considérable au cas où il ne serait pas acquitté conformément à l’arrêt de la Cour administrative du 29 janvier 1998.

En cas de non-acquittement, sa suspension abusive de 14 mois précédant la décision définitive emporterait pour lui la suspension de ses biennales et de ses avancements en traitement pendant la période de suspension et l'obligerait à prolonger son temps de service en fonction de la durée de la période de suspension pour avoir droit à pension.

Quant à la recevabilité du recours, il fait valoir que l’arrêt de la Cour administrative du 29 janvier 1998 serait tellement clair qu'il ne donnerait pas lieu à interprétation de sorte que l'acquittement du requérant s'imposerait.

La décision administrative d'acquitter Monsieur ASSELBOURG ne serait pas réservée par la Constitution à un organe déterminé de sorte que le fait de transmettre le dossier au Conseil de discipline au lieu d'acquitter le requérant constituerait de la part des TICE un excès de pouvoir, une procédure vexatoire et abusive soit de nouveau une manœuvre tendant à se séparer du directeur administratif par l'usure.

Quant au fond, il en résulterait à l'exclusion de tout doute que Monsieur ASSELBOURG n'aurait pas manqué à ses devoirs de fonctionnaire et qu'il devrait partant être acquitté.

Le comité des TICE aurait dès lors commis un excès de pouvoir en méconnaissant l'autorité de la chose jugée de l’arrêt de la Cour administrative du 29 janvier 1998 passé en force de chose jugée.

La règle de l'autorité de la chose jugée aurait la nature d'une présomption irréfragable de vérité et de rectitude juridique attachée à la décision judiciaire définitive.

Il est constant en cause qu’un arrêt de la Cour administrative du 29 janvier 1998 a annulé une procédure disciplinaire engagée par le comité des TICE et la sanction subséquente du 9 octobre 1995 pour détournement de pouvoir alors qu’utilisées à d'autres fins que celles auxquelles elles sont destinées.

Conformément à un principe jurisprudentiel bien établi, (CE 5 avril 1977, Piré, Pas. 24,293 ;

CE 9 mai 1979, Bull. Doc. Comm. 19,81) cet arrêt n’a pas émis d’injonctions concernant le fond de l’affaire, le renvoi après annulation ne pouvant être que pur et simple.

Comme une décision administrative annulée est réputée n’être jamais intervenue (C.E., sect., 26 décembre 1930, Naudascher, Rec., p.1112), il en résulte que l’acte annulé ne peut plus être exécuté et qu’il disparaît rétroactivement depuis la date où il a été pris.

4 Cette considération oblige l’administration à remettre les choses dans l’état où elles se seraient trouvées si la décision annulée n’avait pas été prise.

Suite à l’arrêt de la Cour administrative du 29 janvier 1998, l'amende d'un cinquième d'une mensualité brute du traitement de base a été remboursée en date du 12 mars 1998 à Monsieur ASSELBOURG.

Suite à ce même arrêt, le Comité des TICE a admis que la décision de suspension de … ASSELBOURG a cessé de produire ses effets à la date du 28 avril 1998 sur base de l'article 68.5 de la loi modifiée du 24 décembre 1985 fixant le statut général des fonctionnaires communaux.

Pour le surplus, le Comité des TICE a décidé de transmettre le dossier pour avis au conseil de discipline des fonctionnaires communaux en argumentant, il est vrai à tort, que cette transmission se ferait en exécution de l’arrêt de la Cour du 29 janvier 1998 prémentionné.

Il se dégage des considérations qui précèdent que le Comité des TICE a pris plusieurs décisions dictées par l’arrêt de renvoi de la Cour du 29 janvier 1998.

La légalité de la décision de transmettre le dossier pour avis au conseil de discipline des fonctionnaires communaux, à tort appuyée sur l’arrêt de la Cour du 29 janvier 1998, et en l’absence d’un recours spécifique contre celle-ci, ne saurait néanmoins être analysée actuellement dans le cadre d’une demande en désignation d’un commissaire spécial, de sorte qu’elle doit être déclarée non fondée.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant contradictoirement, reçoit le recours en la forme;

le déclare cependant non fondé et en déboute;

met les frais à charge de la partie requérante.

Ainsi jugé par:

M. Georges KILL, président Mme Marion LANNERS, vice-présidente, M. Marc FEYEREISEN, conseiller, rapporteur et lu par le président en audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour.

5 le greffier en chef le président 6


Synthèse
Numéro d'arrêt : 10704C
Date de la décision : 15/10/1998

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;1998-10-15;10704c ?

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