GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 10504C Inscrit le 14 janvier 1998
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Audience publique du 18 juin 1998 Recours formé par Monsieur … DA GRACA ALVES contre la commune d’Echternach en présence de EIFEL-HAUS LUXEMBOURG s.à r.l.
en matière de permis de construire - Appel
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Vu la requête d’appel déposée au greffe de la Cour administrative le 14 janvier 1998 par Maître Barbara KOOPS, avocat inscrit à la liste I du Barreau de Luxembourg, assistée de Maître João Nuno PEREIRA, avocat II, au nom du sieur … DA GRACA ALVES, contre un jugement rendu par le tribunal administratif à la date du 9 décembre 1997, numéro 9683 du rôle, en matière de permis de construire;
Vu l’exploit de signification de ladite requête d’appel par acte d’huissier Guy ENGEL du 9 janvier 1998;
Vu le mémoire en réponse de Maître Paul TRIERWEILER, avocat inscrit à la liste I du Barreau de Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée EIFEL-HAUS LUXEMBOURG, déposé au greffe de la Cour administrative le 12 mai 1998 et signifié le 13 mai 1998;
Vu le mémoire en réponse de Maître Jean-Luc GONNER, avocat inscrit à la liste I du Barreau de Diekirch, au nom de l’administration communale d’Echternach, signifié le 8 mai 1998 et déposé au greffe de la Cour administrative le 12 mai 1998;
Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris;
Ouï le premier conseiller en son rapport oral ainsi que Maîtres Barbara KOOPS, Jean-
Luc GONNER et Paul TRIERWEILER en leurs plaidoiries respectives.
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Par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 14 janvier 1998 après avoir été signifiée le 12 janvier 1998 à l’administration communale de la ville d’Echternach et le 9 janvier 1998 à la s.à r.l. Eifelhaus à Luxembourg, le sieur … DA GRACA ALVES, maçon, demeurant à …, à déclaré relever appel d’un jugement contradictoirement rendu entre parties par le tribunal administratif en date du 9 décembre 1997 par lequel l’appelant s’est vu débouter de sa demande en annulation d’une décision du bourgmestre de la commune d’Echternach du 2 août 1995 conférant à la s.à r.l. Eifelhaus un permis de construire d’un immeuble à appartements.
Les moyens d’appel sont tirés de ce que le tribunal aurait mal interprété les dispositions du réglement des bâtisses de la ville d’Echternach en ce qui concerne le nombre d’étages, l’angle d’inclinaison de la toiture, la hauteur des pièces dans l’étage d’habitation installé dans les combles, le recul de l’immeuble sur les limites postérieures du terrain, sa hauteur sur rue et le nombre de garages y installés. L’appelant invoque encore une prétendue rupture d’égalité entre lui-même et les autres habitants de la rue Neuve du fait de l’emplacement de l’immeuble litigieux.
Pour tous ces motifs, il demande la réformation du jugement intervenu et l’annulation du permis de construire délivré par le bourgmestre.
Les intimées Ville d’Echternach et s.à r.l. Eifelhaus ont déposé leurs mémoires en réponse le 12 mai 1998. Les deux parties concluent à l’irrecevabilité de l’appel pour un prétendu défaut de signification de la requête d’appel avant son dépôt au greffe de la Cour.
Au fond les intimées concluent à voir dire l’appel non fondé.
En ce qui concerne la recevabilité de l’appel:
Considérant que les deux parties intimées concluent à l’irrecevabilité de l’appel au motif que l’acte d’appel n’aurait pas, comme l’exige l’article 99.3 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, été signifié, préalablement à son dépôt au greffe de la Cour, à toutes les parties à l’instance;
Considérant qu’il résulte des pièces versées en cause que l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour le 14 janvier 1998 avait été signifié à la s.à r.l. Eifelhaus par exploit de l’huissier Guy Engel du 9 janvier 1998 et à l’administration communale d’Echternach par exploit de l’huissier Gilbert Rukavina du 12 janvier 1998, de sorte que la formalité exigée par la loi a été observée;
que l’appel, étant par ailleurs intervenu dans les formes et délais de la loi, est dès lors recevable;
Quant au fond:
Considérant qu’il n’est pas contesté en cause que l’immeuble litigieux se trouve situé dans la zone A, telle que définie à l’article 1/1 du règlement général sur les bâtisses de la Ville 2 d’Echternach, fait implicitement reconnu par l’appelant au vu du libellé de ses arguments et duquel il résulte que les dispositions du chapitre II du règlement sur lers bâtisses sont applicables;
Considérant que, dans la mesure où un immeuble est conforme aux dispositions du règlement sur les bâtisses, sa construction est licite dans la zone concernée du plan d’aménagement;
que les riverains de la parcelle devant recevoir la construction n’ont aucun droit acquis à l’immuabilité d’une situation, leur fût-elle agréable;
considérant que l’argument tiré d’une prétendue rupture d’égalité entre les habitants de la rue Neuve et au détriment de l’appelant n’est pas fondé dans la mesure où, ce qui sera analysé ci-
dessous, la construction et notamment le nombre de garages est conforme au règlement et que d’ailleurs l’argument manque en fait alors qu’il est reconnu qu’avant la mise en place de la construction, le terrain non construit a servi d’emplacement de parking au public des commerces environnants;
que sur ce point l’appel n’est pas fondé;
Considérant que le jugement est encore critiqué en ce qu’il aurait sur plusieurs points techniques tirés de l’emplacement et des aspects de la construction litigieuse, fait une fausse application du règlement des bâtisses;
Considérant qu’en présence de ces contestations, le tribunal a procédé à une visite des lieux dont les enseignements ont été retenus dans la décision entreprise;
En ce qui concerne le nombre des étages:
Considérant que le permis de construire tout comme le jugement sont critiqués en ce qu’ils ont déclaré conforme à la disposition de l’article 2/5 du règlement des bâtisses le nombre d’étages, soit trois étages droits et un étage dans les combles:
que toutefois ces décisions sont conformes à l’article 2/5 du règlement des bâtisses qui permet en une première phrase la construction de trois étages dits « droits », puis « en outre », dans une deuxième phrase, dispose qu’il ne peut être aménagé plus d’un étage dans les combles, ce qui implique la licéité de l’aménagement d’un seul étage dans la toiture du bâtiment;
qu’il y a lieu de confirmer le jugement sur ce point;
En ce qui concerne l’angle d’inclinaison de la toiture et le recul de l’étage aménagé dans les combles:
Considérant que l’appelant reprend ses contestations sur la conformité de la configuration de la toiture avec les dispositions de l’article 2/5 du règlement des bâtisses qui porte que « aucune superstructure ne peut dépasser l’angle de 60° partant de l’alignement de la façade à hauteur de la corniche principale »;
3 Considérant que s’il résulte des plans autorisés que l’angle de la pente du toit proprement dit est manifestement inférieur à 60°, tel n’est pas nécessairement le cas pour les fenêtres mansardées y installéés;
que l’offre de preuve par expertise formulée par l’appelant est pertinente dans le contexte de l’application de cette disposition de l’article 2/5 du règlement des bâtisses et qu’il échet de l’accueillir;
En ce qui concerne le recul des limites postérieures et la hauteur sur rue:
Considérant que les parties sont contraires en fait sur la question de la conformité des plans autorisés en ce qui concerne l’application des articles 2/4 (marges de reculement) et 2/6 (hauteur sur rue des constructions);
que l’administration communale étant partie en cause, les indications de ses services techniques ne sauraient valoir comme preuve d’éléments techniques contestés;
qu’à ce propos également l’appelant a offert en preuve par expertise les données par lui avancées;
que l’offre de preuve en tant qu’elle concerne le respect des dispositions des articles 2/4 et 2/6 du règlement des bâtisses est pertinente et concluante et qu’il y a lieu de l’admettre;
En ce qui concerne la hauteur des pièces de l’étage aménagé dans les combles:
Considérant que l’appelant querelle encore le permis de construire en ce que la hauteur des pièces installées dans les combles serait inférieure au minimum porté à l’article 14/6 du règlement des bâtisses;
Considérant que ce moyen est irrecevable pour défaut d’intérêt dans le chef de l’appelant alors que la disposition visée est une mesure de salubrité publique et non d’urbanisme et qu’un éventuel redressement du plan dans le sens voulu, loin de pouvoir apporter un élément de satisfaction à l’appelant, aggraverait au contraire sa situation;
En ce qui concerne le nombre des garages:
Considérant que les parties sont encore contraires sur le nombre des garages installés dans le pourtour de l’immeuble litigieux et sur leur appartenance à celui-ci, partant à la conformité de la construction à l’autorisation accordée par le ministre de l’Environnement;
que l’appelant soutient que le nombre des garages autorisés par la décision ministérielle aurait été dépassé;
Considérant que ce moyen est irrecevable alors que la compétence de la juridiction administrative se limite à l’examen de la régularité des décisions de l’administration, cette 4 dernière ne faisant d’ailleurs pas l’objet du présent recours, et que cette compétence ne s’étend pas au contrôle de la conformité des construction réalisées avec les autorisations;
Par ces motifs, la Cour, statuant contradictoirement;
reçoit l’appel en la forme;
le déclare non fondé en ce qui concerne les moyens tirés de la « rupture d’égalité » des citoyens au détriment de l’appelant et pour ce qui est de la question du nombre des étages de la construction litigieuse;
partant confirme le jugement sur ces points;
déclare irrecevables les moyens tirés de la hauteur des pièces installées dans les combles et du nombre des garages;
en ce qui concerne les moyens tirés de la conformité des plans autorisés avec le règlement des bâtisses de la Ville d’Echternach quant aux marges de reculement, à la hauteur sur rue et à l’aménagement des combles, avant de statuer sur le mérite de l’appel, nomme expert Monsieur Will ERPELDING, architecte-urbaniste, demeurant à L-2539 Luxembourg, 45, boulevard Simonis avec la mission de se prononcer dans un rapport écrit et motivé sur la conformité des plans autorisés par le permis de construire délivré le 2 août 1995 par le bourgmestre de la Ville d’Echternach avec les dispositions des articles 2/4, 2/5 et 2/6 du règlement des bâtisses en ce qui concerne:
- le recul de la construction sur la limite postérieure de la parcelle construisible, - la hauteur sur rue de la construction au niveau de l’égout des toitures, - la question du dépassement des superstructures de la toiture de l’angle de 60° partant de l’alignement de la façade à hauteur de la corniche principale;
ordonne à l’appelant de consigner, au plus tard le 15 juillet 1998, la somme de 10.000.- francs à titre de provision à valoir sur la rémunération de l’expert à un établissement de crédit à 5 convenir avec les autres parties au litige, et d’en justifier au greffe de la Cour, sous peine de poursuite de l’instance selon les dispositions de l’article 325 du Code de procédure civile;
charge le premier conseiller rapporteur du contrôle de cette mesure d’instruction;
dit que, si les honoraires de l’expert devaient dépasser le montant de la provision versée, il devra avertir ledit magistrat et ne continuer ses opérations qu’après consignation d’une provision supplémentaire;
dit que l’expert devra déposer son rapport au greffe de la Cour le 1er octobre 1998 au plus tard;
refixe l’affaire au 22 octobre 1998 à 9.00 heures pour reprise en délibéré, sauf en cas de non-
paiement de la provision endéans le délai imparti, auquel cas l’affaire pourra être réappelée d’office à une date antérieure;
réserve les frais.
Ainsi jugé par Georges KILL, président Marion LANNERS, vice-présidente Jean-Mathias GOERENS, premier conseiller, rapporteur et lu par le président Georges KILL, en audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour.
le greffier en chef le président 6