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11/06/1998 | LUXEMBOURG | N°10607C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 11 juin 1998, 10607C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 10607 C Inscrit le 11 mars 1998  AUDIENCE PUBLIQUE DU 11 juin 1998 Recours formé par … … contre le ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative en matière d'indemnités dues aux employés de l'Etat (appel)  Vu la requête d’appel déposée le 11 mars 1998 par Maître Patrick WEINACHT, avocat inscrit à la l

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GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 10607 C Inscrit le 11 mars 1998  AUDIENCE PUBLIQUE DU 11 juin 1998 Recours formé par … … contre le ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative en matière d'indemnités dues aux employés de l'Etat (appel)  Vu la requête d’appel déposée le 11 mars 1998 par Maître Patrick WEINACHT, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’ordre des avocats à Luxembourg, au nom du sieur … … contre un jugement rendu le 2 février 1998 par le tribunal administratif en matière d’indemnités dues aux employés de l’Etat;

Vu l’exploit NICKTS du 9 mars 1998 par lequel la requête d’appel a été signifiée à l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg et au ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative ;

Vu le mémoire en réponse du ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative déposé le 7 avril 1998 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision du ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative du 30 mai 1997 ainsi que le jugement entrepris;

Ouï le conseiller Marc FEYEREISEN en son rapport, Maître Patrick WEINACHT et Monsieur le délégué du Gouvernement Marc MATHEKOWITSCH en leurs plaidoiries respectives.

 Par requête d’appel déposée le 11 mars 1998 au greffe de la Cour Administrative le sieur … … a demandé la réformation du jugement du 2 février 1998 en invoquant principalement une violation de l’article 2277 al premier du Code Civil sinon une violation de l’article 2248 du même Code.

Suivant contrats de louage de services renouvelés annuellement, Monsieur … …, demeurant à L-…, était employé comme chargé de cours à titre temporaire, depuis 1978, au …, puis au ….

Ayant atteint l'âge de la retraite le 31 mars 1990, il continua à assurer ses cours moyennant des contrats de travail renouvelés annuellement.

L'administration du personnel de l'Etat, admettant erronément que Monsieur … était à la retraite, cessa dès le 1er avril 1990 ses paiements en sa faveur et le fit rayer des listes d'affiliés de la sécurité sociale.

Monsieur … s'étant rendu compte de la cessation des paiements de sa rémunération ainsi que du fait qu'il n'avait plus reçu de contrat de travail pour l'année 1994-95, son conseil adressa le 2 juin 1995 une lettre au ministère de l'Education nationale dans laquelle il se référa à un entretien téléphonique ayant eu lieu la veille et lors duquel le responsable du ministère lui aurait confirmé d'une part que la situation financière de Monsieur … ferait l'objet d'un redressement et d'autre part qu'il recevrait pour le 7 juin suivant la confirmation que sa situation pour l'année 1994-95 serait régulière, étant donné que son prochain cours était programmé pour le 8 juin 1995.

Par lettre du 7 juin 1995, signée par l'inspecteur principal premier en rang …, par délégation du ministre de l'Education nationale et de la Formation professionnelle, il fut confirmé que Monsieur … avait signé un contrat de louage de services pour l'année scolaire 1994-95 et qu'il pouvait poursuivre ses activités de chargé de cours à condition de se mettre en conformité avec la législation du travail. Dans la suite, Monsieur … entreprit les démarches nécessaires et obtint l'autorisation afférente le 10 octobre 1995.

Le 1er avril 1996, Monsieur … fit envoyer au ministère de l'Education nationale et de la Formation professionnelle un courrier dans lequel il réclama le calcul de ses arriérés de rémunération.

Le 30 mai suivant, le directeur de l'administration du personnel de l'Etat répondit que, par application de la prescription triennale des actions en paiement des rémunérations de toute nature dues aux salariés prévue par l'article 2277 du code civil, les arriérés de rémunération de Monsieur … seraient payés rétroactivement au 1er avril 1993 avec la rémunération du mois de juillet 1996.

Suite à une réclamation formulée par le mandataire de Monsieur … dans une lettre du 14 août 1996 et à un échange de courrier subséquent, le directeur de l'administration du personnel répondit le 3 mars 1997 que le ministre du ressort n'avait pas donné son accord à la demande de paiement de tous les arriérés de rémunération litigieux.

Une itérative réclamation du 21 avril 1997 fit l'objet d'une nouvelle décision de refus du 9 mai 1997.

Le 30 mai 1997, Monsieur … a introduit un recours devant le tribunal administratif tendant principalement à la réformation, et subsidiairement à l'annulation des décisions précitées des 30 mai 1996, 3 mars 1997 et 9 mai 1997, avec attribution des arriérés de rémunération de la période allant du 1er juin 1990 au 31 mars 1993.

L'objet du litige étant constitué par les arriérés de rémunération que le demandeur réclame en sa qualité d'ancien chargé de cours, c’est à bon droit que les premiers juges se sont déclarés compétents pour connaître du recours en réformation introduit en ordre principal.

L’appelant reproche aux premiers juges d’avoir retenu à tort une prescription triennale de ses rémunérations en se basant sur l’article 2277, alinéa 1er du code civil.

D’après son argumentation, les premiers juges auraient dû se baser sur l’article 2277, alinéa 5 du code civil, qui prévoit une prescription de cinq ans.

A l'appui de sa thèse, il invoque un arrêt de la Cour d’appel du 6 janvier 1969 (Pas. 21, 91), qui a retenu que "le paiement des traitements des fonctionnaires et agents des organismes de droit public est régi par la prescription de cinq ans de l'article 2277 du code civil, applicable à tout ce qui est payable par année ou à des termes périodiques plus courts." Il est exact que cet arrêt a été rendu à une époque où l'article 2277 du code civil disposait que "se prescrivent par cinq ans les actions en payement … généralement de tout ce qui est payable par année ou à des termes périodiques plus courts.".

Il ne faut néanmoins pas perdre de vue que l’article 2271 du même code a prévu, à cette même époque, une prescription semestrielle pour les ouvriers et gens de travail, tout comme les lois modifiées du 9 décembre 1970 sur la durée du travail des ouvriers et du 12 novembre 1971 portant réforme du règlement légal du louage de service des employés privés prévoyaient une prescription annale à partir du premier décompte suivant la prestation d’heures supplémentaires.

Par ailleurs, les dispositions légales sur le payement des majorations de rémunération pour travail de dimanche et pour travail des jours fériés légaux se prescrivaient par un an.

L’amalgame de ces différentes prescriptions a amené le législateur, en 1989, de procéder à une unification des délais de prescription par l’adjonction d’un nouvel alinéa 1er libellé comme suit: "Se prescrivent par trois ans les actions en paiement des rémunérations de toute nature dues au salarié." L’article premier de la loi modifiée du 24 mai 1989 définit le terme de salarié comme visant à la fois l’ouvrier et l’employé privé, notion excluant les personnes visées par la loi modifiée du 27 janvier 1972 fixant le régime des employés de l’Etat et bénéficiant, en vertu de l’article 2 du règlement du Gouvernement modifié du premier mars 1974, « d’indemnités fixées par référence à la législation sur les traitements des fonctionnaires de l’Etat. » Il y a lieu constater que le nouvel alinéa premier de l’article 2277 du Code Civil n’a pas apporté de changement à l'applicabilité du dernier alinéa du même article selon lequel les traitements et indemnités des fonctionnaires et agents des organismes de droit public se prescrivent par cinq ans, affirmée par l'arrêt précité de la Cour d'appel ainsi que par un arrêt du Conseil d’Etat. (C.E. 21 novembre 1984, 26, 174) Il suit des considérations qui précèdent que le premier jugement est à réformer.

Par ces motifs la Cour administrative, statuant contradictoirement, reçoit l’appel en la forme ;

le dit fondé ;

par conséquent, par réformation des décisions ministérielles en cause et du jugement du 2 février 1998, dit que les indemnités fixées par référence à la législation sur les traitements des fonctionnaires de l’Etat se prescrivent par cinq ans ;

refixe l’affaire à l’audience du 25 juin 1998 aux fins de permettre aux parties de conclure sur le point de départ de ce délai de prescription ;

réserve les frais.

Ainsi jugé par:

Marion LANNERS, vice-présidente, Christiane DIEDERICH-TOURNAY, conseiller, Marc FEYEREISEN, conseiller, rapporteur et lu par la vice-présidente Marion LANNERS en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie WILTZIUS.

Le greffier La vice-présidente


Synthèse
Numéro d'arrêt : 10607C
Date de la décision : 11/06/1998

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;1998-06-11;10607c ?

Source

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