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13/01/1998 | LUXEMBOURG | N°10243C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 13 janvier 1998, 10243C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 10243C Inscrit le 20 août 1997

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Audience publique du 13 janvier 1998 Recours formé par le ministre du Travail contre Monsieur … DA ROCHA OLIVEIRA en matière de permis de travail - Appel

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Vu la requête d’appel déposée le 20 août 1997 au greffe de la Cour administrative par Maître Luc FRIEDEN, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordr

e des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, représenté pa...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 10243C Inscrit le 20 août 1997

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Audience publique du 13 janvier 1998 Recours formé par le ministre du Travail contre Monsieur … DA ROCHA OLIVEIRA en matière de permis de travail - Appel

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Vu la requête d’appel déposée le 20 août 1997 au greffe de la Cour administrative par Maître Luc FRIEDEN, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, représenté par son Ministre d’Etat, Ministre du Travail, tendant à la réformation d’un jugement rendu à la date du 14 juillet 1997 par le tribunal administratif en matière de permis de travail contre … DA ROCHA OLIVEIRA;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Jean-Lou THILL du 18 août 1997 portant signification dudit acte d’appel à … DA ROCHA OLIVEIRA;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 11 décembre 1997 par Maître Jean-Paul RIPPINGER, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de … DA ROCHA OLIVEIRA;

Vu les articles 2 et 99 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris;

Ouï la vice-présidente rapporteur en son rapport, Maître Guy ARENDT, en remplacement de Maître Luc FRIEDEN, et Maître Véronique ACHENNE, en remplacement de Maître Jean-

Paul RIPPINGER, en leurs plaidoiries respectives.

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Par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 20 août 1997 et signifiée à … DA ROCHA OLIVEIRA par acte d’huissier Jean-Lou THILL du 18 août 1997, Maître Luc FRIEDEN, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, représenté par son Ministre d’Etat, Ministre du Travail, a relevé appel d’un jugement rendu par le tribunal administratif, deuxième chambre, à 1 la date du 14 juillet 1997 ayant déclaré irrecevable le recours en réformation et subsidiairement en annulation contre l’avis négatif du 10 septembre 1996 de la commission consultative prévue par l’article 26 de la loi du 28 mars 1972, s’étant déclaré incompétent pour connaître du recours en réformation contre la décision ministérielle du 17 septembre 1996 et ayant finalement annulé l’arrêté ministériel précité et renvoyé l’affaire devant le ministre du Travail et de l’Emploi.

La partie appelante demande la réformation du jugement entrepris dans le sens du rétablissement des décisions du ministre du Travail et de l’Emploi des 15 mai et 17 septembre 1996 ayant refusé à la partie intimée le permis de travail.

Elle critique le jugement entrepris dans la mesure où la décision ministérielle a été déclarée ne pas répondre au critère de précision requis. Elle renvoie à la situation du marché de l’emploi invoquée par le ministre, aux dispositions légales applicables et développe le cas concret de la partie DA ROCHA.

Le mandataire de la partie intimée, dans un mémoire déposé le 11 décembre 1997, expose son moyen de défaut de motivation spécifique et concrète de la décision ministérielle pour conclure à la confirmation du jugement entrepris.

Les antécédents administratifs que comporte le présent litige et la situation de fait de la partie intimée se trouvant exhaustivement décrits dans la motivation du jugement entrepris, il y a lieu de s’y rapporter.

Les juges de première instance ont annulé l’arrêté ministériel du 17 septembre 1997 ayant définitivement refusé à l’intimé le permis de travail et ont renvoyé l’affaire devant le ministre du Travail et de l’Emploi au motif que la décision ministérielle ne correspond pas au critère de précision requis pour se limiter à des formules générales et abstraites prévues par la loi. Le Grand Hôtel Cravat, qui emploie l’intimé, ne s’étant pas vu assigner un quelconque demandeur d’emploi, les juges de première instance n’ont pas retenu la motivation complémentaire du refus ministériel présenté par le délégué du Gouvernement et portant sur l’inscription au bureau de placement de l’administration de l’Emploi de 1.975 ouvriers non qualifiés au mois de septembre 1996.

Il est constant en cause et non contesté que l’intimé est de nationalité capverdienne, sans formation professionnelle, qu’il a déjà fait l’objet de deux refus de permis de travail en 1990 et en 1993 et qu’il a été refoulé à plusieurs reprises du pays. L’arrêté ministériel initial de refus de permis de travail du 15 mai 1996 est motivé comme suit:

« - pour des raisons inhérentes à la situation du marché de l’emploi;

- priorité à l’emploi des ressortissants de l’Espace Economique Européen (E.E.E.);

- poste de travail non déclaré vacant par l’employeur;

- des demandes d’emploi appropriées sont disponibles sur place;

- occupation irrégulière depuis le 1er avril 1996 ».

2 La décision ministérielle définitive de refus du 17 septembre 1996 rendue sur recours gracieux de l’actuel intimé et faisant l’objet du présent litige énonce en outre que « les conclusions retenues par le comité de coordination tripartite en matière d’autorisations de travail de ressortissants non communautaires limitent l’octroi d’autorisations afférentes à des cas tout à fait exceptionnels.

Le principe de la priorité à l’embauche de ressortissants de l’Espace Economique Européen (E.E.E.) est à appliquer strictement et des autorisations de travail pour des ressortissants de pays tiers ne seront attribuées que si l’employeur a rapporté la preuve qu’il s’agit de salariés hautement spécialisés, introuvables sur les 18 marchés de travail de l’E.E.E.

En outre, des demandeurs d’emploi susceptibles d’occuper l’emploi vacant étaient et sont toujours inscrits aux bureaux de placement de l’administration de l’emploi ».

En première instance, le délégué du Gouvernement a valablement complété les deux derniers moyens de refus par des pièces émanant respectivement du ministère du Travail et de l’Emploi et de l’administration de l’Emploi, division de la main-d’oeuvre, attestant d’une part qu’au mois de mai 1.891 ouvriers non qualifiés étaient inscrits dans les bureaux de placement de l’administration de l’Emploi, que ce chiffre était de 1.975 unités au mois de septembre 1996 et d’autre part que la place vacante au Grand Hôtel Cravat n’avait pas été déclarée.

Une obligation de motivation expresse d’un arrêté ministériel de refus d’une autorisation de travail n’est imposée ni par la loi du 28 mars 1972 concernant, entre autres, l’emploi de la main d’oeuvre étrangère, telle que modifiée, ni par le règlement grand-ducal d’exécution du 12 mai 1972, tel que modifié.

En application de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes toute décision administrative doit baser sur des motifs légaux, une décision de refus doit formellement indiquer les motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui lui sert de fondement et des circonstances des faits à sa base et dans les cas où, tel qu’en l’espèce, la motivation expresse n’est pas imposée, l’administré a le droit d’exiger la communication des motifs.

Si la motivation expresse de l’acte de refus n’est pas imposée explicitement par le texte qui constitue sa base légale, tel qu’en l’espèce, il suffit en l’occurence, pour que l’acte de refus soit valable, que ces motifs aient existé au moment du refus, quitte à ce que l’administration concernée les fournisse à posteriori sur demande de l’administré, le cas échéant au cours d’une procédure contentieuse.

Dans le cas d’espèce, en présence d’une décision purement confirmative rendue sur une demande identique en l’absence de tout élément nouveau ou de changement survenu dans la situation juridique de l’administré, il y a lieu de prendre en considération aussi bien la motivation contenue dans la décision initiale de refus du 15 mai 1996 que celle contenue dans la décision purement confirmative du 17 septembre 1996 et les renseignements complémentaires développés en cours d’instance par le délégué du Gouvernement.

L’ensemble de la motivation fournie répond à suffisance de droit au critère de précision requis par les dispositions légales précitées et le jugement entrepris est à reformer.

3 En effet, la décision ministérielle initiale du 15 mai 1996 et la décision ministérielle confirmative de refus du 17 septembre 1996 renvoient d’une façon précise à la situation juridique de … DA ROCHA OLIVEIRA en tant que postulant non membre de l’Espace Economique Européen sur la place du marché de l’emploi.

Le requérant est ensuite confronté avec la présence d’autres candidats à un poste ne réclamant pas de qualification professionnelle. Les renseignements complémentaires fournis à l’audience sur l’importance du nombre de tels demandeurs d’emploi confortent ce moyen de refus.

L’administration de l’emploi n’était pas appelée à assigner un quelconque autre demandeur d’emploi au Grand Hôtel Cravat faute de déclaration préalable de vacance de poste et compte tenu de la limitation de la déclaration d’engagement du 3 avril 1996 au seul intimé.

L’omission par l’employeur de faire avant le commencement de la relation de travail avec un travailleur étranger (non-ressortissant d’un pays UE ou EEE) la déclaration de vacance de poste prévue à l’article 4 du règlement grand-ducal du 12 mai 1972 constitue un empêchement légal à la formation d’un contrat d’emploi entre ledit employeur et le travailleur étranger. C’est partant à juste titre que la décision de refus renvoie à la situation irrégulière de l’intimé.

Par ces motifs:

la Cour, statuant contradictoirement, reçoit l’appel;

le dit fondé;

partant, par réformation du jugement du tribunal administratif du 14 juillet 1997, déclare non fondé le recours en annulation contre la décision ministérielle du 17 septembre 1996 et en déboute;

condamne … DA ROCHA OLIVEIRA aux dépens des deux instances.

Ainsi jugé par Marion LANNERS, vice-présidente, rapporteur, Jean-Mathias GOERENS, premier conseiller et Christiane DIEDERICH-TOURNAY, conseiller et lu par la vice-présidente Marion LANNERS, en audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie WILTZIUS.

4 Le Greffier La Vice-Présidente 5


Synthèse
Numéro d'arrêt : 10243C
Date de la décision : 13/01/1998

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;1998-01-13;10243c ?

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