RÉPUBLIQUE
FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 24/00271 - N° Portalis DB3Z-W-B7I-GZG4
MINUTE N° :
Notification
Copie certifiée conforme
délivrée le :02/09/24
à :
M. [Z]
Copie exécutoire délivrée
le :02/09/24
à :
Me BOITARD
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE SAINT DENIS
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TRIBUNAL DE PROXIMITÉ DE SAINT BENOIT
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JUGEMENT
DU 29 AOUT 2024
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JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
PARTIES
DEMANDEUR :
Société SOFIDER
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Maître Henri BOITARD, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION substitué par Maître Pierre HOARAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉFENDEUR :
Monsieur [N] [Z]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
non comparant, ni représenté
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Président : Pascaline PILLET,
Assistée de : Maureen ETALE, Greffier,
DÉBATS :
À l’audience publique du 19 Août 2024
DÉCISION :
Prononcée par Pascaline PILLET, Juge du contentieux de la Protection, assistée de Maureen ETALE, Greffier,
FAITS ET PROCEDURE
Par acte sous seing privé en date du 19 janvier 2022, la SOFIDER a consenti à Monsieur [N] [Z] un crédit à la consommation affecté à l’achat d’un véhicule d’occasion, d'un montant de 16.500,00€, au taux de 4,92%, remboursable en 72 mensualités (prêt n°06831730).
Alléguant l'existence de mensualités impayées l'ayant conduit à prononcer la déchéance du terme, la SOFIDER, par acte de commissaire de justice en date du 2 juillet 2024, a fait assigner Monsieur [N] [Z] devant le Juge des contentieux de la protection du Tribunal de Proximité de Saint-Benoît aux fins de le voir condamner à lui payer
1.937,95€ au titre des échéances impayées, 11.735,09€ au titre du capital restant dû, 130,98€ au titre des intérêts, 938,80€ au titre de l'indemnité forfaitaire,soit un total de 14.742,82€ avec intérêts au taux contractuel sur la somme de 13.673,04€ au 15 mai 2024 et au taux légal pour le surplus ;1.200€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens.
L’affaire a été appelée à l’audience du 19 août 2024, lors de laquelle la SOFIDER a maintenu l’intégralité de sa demande en paiement. Le défendeur, cité à personne, n’a pas comparu.
Le Juge a soulevé d’office la déchéance du droit aux intérêts du fait de l’absence de preuve du suivi d’une formation par l’intermédiaire dispensateur de crédit et de l'insuffisance de l’avertissement prévu au contrat concernant les conséquences d’une défaillance de l’emprunteur.
La décision a été rendue par mise à disposition au greffe le 29 août 2024.
MOTIFS
Aux termes de l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s’il l’estime recevable, régulière et bien fondée.
La procédure a été régulièrement portée à la connaissance des défendeurs, qui n’ont pas contacté le tribunal pour solliciter le renvoi de l’affaire ou faire valoir leurs arguments. Le fond de l’affaire peut ainsi valablement être évoqué.
Le contrat de prêt liant les parties obéit aux dispositions d’ordre public des articles L 311-1 et suivants du code de la consommation.
Sur la demandes de paiement
Aux termes de l’article L314-25 du code de la consommation, les personnes chargées de fournir à l’emprunteur les explications sur les prêts mentionnés aux articles L312-1 à L312-3 et de recueillir les informations nécessaires à l’établissement de la fiche prévue à l’article L312-17 sont formées à la distribution du crédit à la consommation et à la prévention du surendettement.
En l'espèce, le contrat de crédit à été souscrit par un intermédiaire désigné comme « MULTI MARQUES AUTO ». Aucun élément du dossier ne permet de s'assurer que la personne chargée de fournir à l'emprunteur les explications sur le prêt a suivi la formation requise. La demanderesse produit en effet une attestation de formation qui ne permet pas d’établir le lien entre Madame [X] [E], employé de la BPCE, et l’intermédiaire dispensateur de crédit, alors que le nom figurant sur le contrat est MULTI MARQUES AUTO et la vendeuse [P] [F]. La demanderesse sera donc déchue du droit aux intérêts contractuels.
Conséquences sur les sommes demandées
En raison des manquements précités, et par application des dispositions de l'article L 311-48 devenu L 341-1 et suivants du Code de la consommation, le prêteur doit être déchu du droit aux intérêts et frais.
Au vu de ce qui précède, des stipulations contractuelles, du tableau d’amortissement, et du décompte produit par la banque, il apparaît que le total du financement s’élève à 16.500,00 euros, les sommes remboursées à 4.749,85 euros. Ainsi, déduction faite des frais et intérêts, le débiteur reste redevable d'une somme de 11.750,15 euros qu'il sera condamné à payer.
Sur les intérêts applicables
Le prêteur, bien que déchu de son droit aux intérêts, demeure fondé à solliciter le paiement des intérêts au taux légal, en vertu de l'article 1153 du Code Civil, devenu 1231-6, sur le capital restant dû à compter de la mise en demeure, majoré de plein-droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice.
Ces dispositions légales doivent cependant être écartées, si en résulte pour le prêteur la perception de montants équivalents ou proches de ceux qu'il aurait perçus si la déchéance du droit aux intérêts n'avait pas été prononcée, sauf à faire perdre à cette sanction ses caractères de dissuasion et d'efficacité.
L'arrêt rendu le 27 mars 2014 par la Cour de Justice de l'Union Européenne (affaire C-565/12, Le Crédit Lyonnais SA / Fesih Kalhan) a ainsi dit pour droit que l'article 23 de la directive 2008/48 s'oppose à l'application d'intérêts au taux légal lesquels sont en outre majorés de plein-droit deux mois après le caractère exécutoire d'une décision de justice prononçant la déchéance du droit aux intérêts si « les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur à la suite de l’application de la sanction de la déchéance des intérêts ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont celui-ci pourrait bénéficier s’il avait respecté » ses obligations découlant de ladite directive.
En l'espèce, le crédit personnel a été accordé pour un montant de 16.500,00 euros à un taux d'intérêt annuel fixe de 4,92 %.
Les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal (actuellement de 5,07%) ne sont pas significativement inférieurs à ce taux conventionnel.
Il convient en conséquence de dire que la somme restant due au titre de ce crédit ne portera pas intérêts au taux légal.
Sur les demandes accessoires
Ni l’équité ni la situation économique des parties ne justifie de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile dès lors que la partie défenderesse, qui succombe à l’instance, sera condamnée aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Le Juge des contentieux de la protection, statuant après audience publique par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire, et en premier ressort,
CONSTATE la déchéance du terme du crédit affecté n°06831730,
PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts contractuels et frais,
CONDAMNE Monsieur [N] [Z] à payer à la SOFIDER la somme de 11.750,15€ au titre du contrat de crédit affecté n°06831730,
DIT que cette somme ne produira pas intérêt au taux légal,
DEBOUTE la SOFIDER de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de plein droit par provision,
CONDAMNE Monsieur [N] [Z] aux entiers dépens.
Ainsi jugé et mis à disposition aux jour, mois et an susdits.
LE GREFFIER LE JUGE