TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE NANTERRE
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PÔLE CIVIL
6ème Chambre
JUGEMENT RENDU LE
30 Août 2024
N° RG 21/01810 - N° Portalis DB3R-W-B7F-WOBH
N° Minute : 24/
AFFAIRE
LE FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET D’AUTRES INFRACTIONS
C/
Société AVANSSUR (exerçant sous le nom commercial de DIRECT ASSURANCE )
Copies délivrées le :
DEMANDERESSE
LE FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET D’AUTRES INFRACTIONS (FGTI)
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Denis LATREMOUILLE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0178
DEFENDERESSE
Société AVANSSUR (exerçant sous le nom commercial de DIRECT ASSURANCE )
[Adresse 1],
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Maître Anne-Sophie DUVERGER de la SCP C R T D ET ASSOCIES, avocats au barreau des HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : NAN 713
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 Mai 2024 en audience publique devant :
François BEYLS, Premier Vice-Président Adjoint, magistrat chargé du rapport, les avocats ne s’y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries au tribunal composé de :
François BEYLS, Premier Vice-Président Adjoint
Anne LECLERC, Juge
Quentin SIEGRIST, Vice-président
qui en ont délibéré.
Greffier lors du prononcé : Sylvie CHARRON, Greffier.
JUGEMENT
prononcé en premier ressort, par décision contradictoire et mise à disposition au greffe du tribunal conformément à l’avis donné à l’issue des débats au 12 juillet 2024 et prorogé au 30 août 2024.
EXPOSE DU LITIGE
Par un jugement définitif du 15 mars 2018, le tribunal pour enfants de Versailles a déclaré M. [T] [P], mineur, coupable des faits de corruption de mineure de quinze ans, corruption de mineure par une personne mise en contact avec la victime par un réseau de communications électroniques, chantage, appels téléphoniques malveillants réitérés, menace de crime, détention de l’image d’un mineur présentant un caractère pornographique au préjudice de Mmes [I] [C], [E] [B], [N] [O], [X] [G], [J] [H] et [Y] [V].
M. [T] [P], in solidum avec ses parents déclarés civilement responsables, a été condamné à verser :
- à Mme [I] [C] la somme de 3 000 euros au titre des souffrances endurées et la somme de 2 000 euros au titre du préjudice moral,
- à Mme [X] [G] la somme de 5 000 euros au titre du préjudice moral,
- à Mme [J] [H] la somme de 5 000 euros au titre du préjudice moral,
- à Mme [Y] [V] la somme de 5 000 euros au titre du préjudice moral,
ainsi qu’à la somme de 1 000 euros au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale à chaque partie civile.
Non éligibles à saisir la CIVI, Mmes [I] [C], [Y] [V], [X] [G], et [J] [H] ont saisi le service d'aide au recouvrement des victimes d'infractions (S.A.R.V.I.) en application de l'article 706-15-1 du code de procédure pénale.
Le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions (ci-après le « F.G.T.I. ») a versé la somme de 1 800 euros à chacune des parties civiles.
La société Direct Assurance ayant attesté que M. [R] [P], père de l’auteur, était assuré au titre d’un contrat d’assurance habitation n°172925967 pour sa responsabilité civile, le F.G.T.I. a fait valoir, par lettres des 10 mai, 24 juin, 26 juillet et 27 août 2019 une demande de garantie relative au préjudice de Mme [I] [C] pour la somme de 6 500 euros.
Par lettre du 20 août 2019, la société Direct Assurance a indiqué que la garantie n’avait pas vocation à s’appliquer en l’absence de blessures physiques de la victime.
Par lettres des 7 octobre et 15 novembre 2019, restées sans réponse, le F.G.T.I. a réitéré sa demande d’indemnisation de Mme [I] [C] à la société Direct Assurance.
Par lettre recommandée avec avis de réception du 27 janvier 2020, reçue le 31 janvier 2020 par la société Direct Assurance, le F.G.T.I. a mis en demeure l’assureur de lui verser la somme de 26 000 euros correspondant aux sommes allouées aux parties civiles par le jugement du 15 mars 2018.
Par lettre du 25 février 2020, la société Direct Assurance a maintenu sa position.
Par acte d'huissier du 1er mars 2021, le F.G.T.I. a fait assigner la société Direct Assurance devant le tribunal de céans afin d'obtenir le paiement de la somme de 29 988 euros.
Par acte du 7 juillet 2021, la société Avanssur, exerçant sous le nom de « Direct Assurance », a constitué avocat.
Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 6 janvier 2023, le F.G.T.I. demande au tribunal de :
« Vu l’article 706-11 du code de procédure pénale,
Vu les articles L.124-3 et L.422-7 et L. 422-9 du code des assurances,
Vu les articles 1231-6 et 1242 du code civil,
- Condamner la société Direct Assurance à verser au Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions la somme de 29 988 euros,
- Condamner la société Direct Assurance à verser au Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions la somme de 5 000 euros du fait de sa résistance abusive,
- Dire que ces sommes portent intérêts au taux légal à compter du 1er mars 2021, date à laquelle a été délivrée l’assignation,
- Débouter la société Direct Assurance de toutes prétentions contraires,
- Condamner la société Direct Assurance à verser au Fonds de Garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions la somme de 3 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
- Condamner la société Direct Assurance aux dépens de la présente procédure. »
Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 3 octobre 2022, la société Avanssur, société exerçant sous le nom commercial de Direct Assurance, demande au tribunal de :
« -Vu les conditions générales du contrat d’assurance,
Vu les articles 1188 et 1192 du code civil,
- Juger le Fonds de Garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions, mal fondé en ses demandes,
En conséquence,
- Débouter le Fonds de Garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions de l’ensemble des demandes qu’il formule à l’encontre de la société Avanssur,
- Condamner le Fonds de Garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions à payer à la société Avanssur la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de la présente instance ».
Pour un plus ample exposé des faits et moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément à l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 20 mars 2023 et l’affaire a été fixée pour être plaidée le 13 mai 2024 puis mise en délibéré le 12 juillet 2024, prorogé ce jour.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la garantie de la société Avanssur, exerçant sous le nom commercial de Direct Assurance
Le F.G.T.I. expose en substance qu’en application de l’article L.422-7 du code des assurances il dispose de plein droit au jour du paiement de la victime d’un mandat légal de recouvrement, outre le recours subrogatoire de l'article 706-11 du code de procédure pénale.
Il explique qu’en application de l’article L.121-2 du code des assurances, l’assureur ne peut opposer les dispositions contractuelles visant à limiter la garantie des accidents provoqués par les personnes dont le souscripteur est civilement responsable.
En réponse à la société Avanssur, le F.G.T.I. fait valoir que les termes « corporel » et « physique » sont synonymes, que le préjudice moral est inclus au titre des préjudices corporels qui n’incluent pas nécessairement un préjudice physique.
Il s’oppose au refus de garantie de la société Avanssur en précisant qu’aucun texte n’exige une lésion physique pour caractériser l’existence d’un préjudice corporel et que les conséquences des infractions commises par M. [T] [P] constituent incontestablement des dommages corporels.
Le F.G.T.I. relève que la garantie stipulée aux conditions générales doit couvrir les conséquences pécuniaires des dommages corporels matériels et immatériels causés par des personnes dont l’assuré est responsable et rappelle que le dommage immatériel est défini aux mêmes conditions générales comme « tout préjudice pécuniaire consécutif à un dommage corporel ou matériel ».
Il ajoute que la société Avanssur ne peut opposer l’exclusion de préjudices psychiques, l’interprétation du contrat devant se faire en faveur de l’assuré.
Il sollicite la condamnation de la société Avanssur à lui verser au titre de sa garantie la somme de 29 988 euros se décomposant comme suit :
- condamnations aux intérêts civils et à l’article 475-1 du code de procédure pénale prévues au jugement du 15 mars 2018 pour 24 000 euros,
- pénalité légale prévue à l’article L.422-9 du code des assurances pour 7 200 euros,
Sous total : 31 200 euros
- déduction des sommes versées par M. [T] [P] pour 1 212 euros,
Total : 29 988 euros.
En défense, la société Avanssur indique qu’elle ne conteste pas la responsabilité de son assuré sur le fondement de l’article 1242 alinéa 4 du code civil mais oppose une absence de garantie.
Elle se fonde sur l’article 12 des conditions générales du contrat pour affirmer dans ses conclusions que la définition du dommage « est limitée aux seules atteintes à l’intégrité physique, par opposition à l’atteinte à l’intégrité psychique non consécutive à une atteinte à l’intégrité physique ou non, n’ayant pas donné lieu à une lésion de nature psychique ».
Elle estime que les dommages immatériels qui ne sont pas directement consécutifs à un dommage corporel ou matériel garanti n’entrent pas dans le champ d’application des garanties.
Expliquant que le préjudice moral indemnisé n’est pas rattachable à un dommage matériel ou corporel garanti, elle considère que la garantie des dommages immatériels ne peut être mobilisée.
En réponse au F.G.T.I., la société Avanssur indique que la définition du dommage corporel visée au contrat est claire et précise dès lors qu’elle ne vise que les atteintes à l’intégrité physique des personnes.
Elle affirme que l’auteur des faits n’a pas été condamné pour des violences mais que les faits relèvent d’une atteinte strictement psychique, indépendante de toute atteinte à l’intégrité physique. Elle expose ainsi que le dommage psychique pour être pris en compte doit consister en une « réelle atteinte » à l’intégrité physique et que le F.G.T.I. ne caractérisant pas l’existence de lésions de nature psychiques au préjudice des victimes, elle est bien fondée à opposer l’absence de garantie.
***
L’article 1242 du code civil dispose que « On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde.
Toutefois, celui qui détient, à un titre quelconque, tout ou partie de l'immeuble ou des biens mobiliers dans lesquels un incendie a pris naissance ne sera responsable, vis-à-vis des tiers, des dommages causés par cet incendie que s'il est prouvé qu'il doit être attribué à sa faute ou à la faute des personnes dont il est responsable.
Cette disposition ne s'applique pas aux rapports entre propriétaires et locataires, qui demeurent régis par les articles 1733 et 1734 du code civil.
Le père et la mère, en tant qu'ils exercent l'autorité parentale, sont solidairement responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux.
Les maîtres et les commettants, du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés ;
Les instituteurs et les artisans, du dommage causé par leurs élèves et apprentis pendant le temps qu'ils sont sous leur surveillance.
La responsabilité ci-dessus a lieu, à moins que les père et mère et les artisans ne prouvent qu'ils n'ont pu empêcher le fait qui donne lieu à cette responsabilité.
En ce qui concerne les instituteurs, les fautes, imprudences ou négligences invoquées contre eux comme ayant causé le fait dommageable, devront être prouvées, conformément au droit commun, par le demandeur, à l'instance. »
L’article L.121-2 du code des assurances dispose que « l'assureur est garant des pertes et dommages causés par des personnes dont l'assuré est civilement responsable en vertu de l'article 1242 du code civil, quelles que soient la nature et la gravité des fautes de ces personnes. »
En vertu de l’article L.121-2 du code des assurances, d'ordre public, une clause ne saurait exclure directement ou indirectement la garantie de l'assuré déclaré civilement responsable d'une faute intentionnelle de la personne dont il doit répondre.
L’article L.124-3 du code des assurances dispose que « le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.
L'assureur ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui, tant que ce tiers n'a pas été désintéressé, jusqu'à concurrence de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité de l'assuré. »
En l’espèce, la société Avanssur ne discute pas la recevabilité de l’action du F.G.T.I. ni la responsabilité de l’assuré. Elle n’oppose pas non plus d’exclusion de garantie mais estime que les condamnations prononcées par le jugement du tribunal pour enfants de Versailles le 15 mars 2018 n’entrent pas dans la définition de la garantie et ne permettent pas d’y faire droit.
La responsabilité de M. [R] [P] et de Mme [A] [L], assurés auprès de la société Avanssur, est établie en leur qualité de civilement responsable de M. [T] [P] ainsi qu’il ressort des termes du jugement de condamnation prononcé par le tribunal pour enfants de Versailles le 15 mars 2018.
L’article 12.2 en page 9 des conditions générales du contrat d’assurance produites par la société Avanssur dont l’application n’est pas contestée par le F.G.T.I. stipule, s’agissant de la responsabilité civile vie privée, que « dans le cadre de la vie privée, nous garantissons les conséquences pécuniaires dans les limites prévues aux conditions spéciales, de dommages corporels, matériels et immatériels causés à autrui par les personnes ayant la qualité d’assuré et celles dont elles sont responsables (…) dans la mesure où leur responsabilité est engagée ».
A l’article 1 intitulé « définitions » desdites conditions générales, le terme « dommage immatériel » est défini comme « tout préjudice pécuniaire consécutif à un dommage corporel ou matériel », le terme « dommage corporel » est défini comme « toute atteinte à l’intégrité physique des personnes » et le terme « dommage matériel » comme « toute détérioration d’un bien, toute atteinte physique à un animal ».
En premier lieu, les souffrances endurées se définissent comme toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que les troubles associés, que doit endurer la victime. Le tribunal pour enfants, en retenant la responsabilité de l’auteur des faits au titre des intérêts civils et en le condamnant à verser à Mme [I] [C] la somme de 3 000 euros au titre des souffrances endurées, a ainsi caractérisé le dommage subi par la victime et le lien de causalité entre les faits pour lesquels l’auteur a été condamné et ledit dommage. L’atteinte à l’intégrité physique de la personne étant caractérisée par la définition même de ce poste de préjudice, à savoir des souffrances endurées, la garantie de la société Avanssur doit s’appliquer.
En second lieu, les circonstances de l’atteinte aux victimes, mineures, telles qu’elles ressortent de la prévention, à savoir les inciter à s’introduire des objets dans le vagin et/ou à se caresser sexuellement, leur adresser des messages tels que « tu es ma pute, je te doigterai avec une main, tu pourras sentir ma bite toute dure (…) » et les menacer de diffuser des photographies d’elles dénudées, permettent de caractériser l’existence d’un dommage, que ce soit sur les fonctions physiologiques mais aussi sur les fonctions psychologiques de la victime. Les circonstances de la prévention permettent ainsi de démontrer l’atteinte à l’intégrité physique des victimes par l’auteur du dommage, laquelle a eu des conséquences physiologiques et psychologiques que visent à réparer les dommages et intérêts alloués au titre du préjudice moral.
Dès lors, la garantie de la société Avanssur doit s’appliquer.
Sur le quantum
L’article L.422-7 du code des assurances dispose que « dans un délai de deux mois à compter de la réception de la demande d'aide au recouvrement formulée en application de l'article 706-15-1 du code de procédure pénale, le fonds de garantie accorde à la partie civile le paiement intégral des dommages et intérêts et des sommes allouées en application des articles 375 ou 475-1 du même code si leur montant total est inférieur ou égal à 1 000 euros.
Si le montant total des dommages et intérêts et des sommes allouées en application des articles 375 ou 475-1 du même code est supérieur à 1 000 euros, le fonds accorde dans le même délai une provision correspondant à 30 % du montant desdits dommages et intérêts et sommes dans la limite d'un plafond de 3 000 euros. Toutefois, le montant de cette provision ne peut pas être inférieur à 1 000 euros. »
L’article L.422-9 du même code ajoute que « les sommes à recouvrer par le fonds de garantie sont majorées d'une pénalité, au titre des frais de gestion, égale à un pourcentage des dommages et intérêts et des sommes allouées en application des articles 375 ou 475-1 du code de procédure pénale. Ce pourcentage est fixé par arrêté du ministre chargé des assurances.
Lorsque l'auteur de l'infraction a fait l'objet d'une obligation d'indemnisation de la victime dans le cadre d'une peine de sanction-réparation, d'un sursis probatoire ou d'une décision d'aménagement de peine ou de libération conditionnelle, la partie de la somme recouvrée sous le contrôle du procureur de la République ou du juge de l'application des peines et dans le respect des conditions fixées par ce dernier ou par son délégué ne sera assortie d'aucune pénalité au titre des frais de gestion.
Le fonds recouvre par ailleurs les frais d'exécution éventuellement exposés.
Le fonds de garantie est subrogé dans les droits de la victime dans les conditions prévues par le premier alinéa de l'article 706-11 du même code. Pour les sommes à recouvrer supérieures à la provision versée, le fonds de garantie dispose d'un mandat. »
Le taux de pénalité prévu à l’article L.422-9 du code des assurances est fixé à 30 % par l’arrêté du 28 novembre 2008.
Conformément aux dispositions de l’article L.121-2 du code des assurances, dont l’application est d’ordre public, l’assureur doit rester garant des pertes et dommages causés par les personnes dont l’assuré est civilement responsable quelles que soient la nature et la gravité des fautes de ces personnes.
En l’espèce, la société Avanssur ne conteste pas être l’assureur des personnes civilement responsable de M. [T] [P], à savoir ses père et mère, M. [R] [P] et Mme [A] [L].
Elle ne conteste pas non plus le quantum des sommes demandées par le F.G.T.I.
Le F.G.T.I. justifie avoir versé la somme de 1 800 euros à titre de provision à chacune de Mme [I] [C], Mme [X] [G], Mme [J] [H] et Mme [Y] [V], soit la somme totale de 7 200 euros dont elle est fondée à demander le paiement au titre de sa garantie à la société Avanssur en application de l’article 706-11 du code de procédure pénale.
Conformément à l’article L.422-7 du code de assurances, le F.G.T.I. a reçu mandat des victimes pour les sommes supplémentaires à recouvrer, à savoir 16 800 euros, correspondant à :
- 4 200 euros (3 000 euros au titre des souffrances endurées + 2 000 euros pour le préjudice moral + 1 000 euros au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale – 1 800 euros de provision) pour Mme [I] [C],
- 4 200 euros (5 000 euros au titre du préjudice moral + 1 000 euros au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale – 1 800 euros de provision) pour Mme [X] [G],
- 4 200 euros (5 000 euros au titre du préjudice moral + 1 000 euros au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale – 1 800 euros de provision) pour Mme [J] [H],
- 4 200 euros (5 000 euros au titre du préjudice moral + 1 000 euros au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale – 1 800 euros de provision) pour Mme [Y] [V].
En application des dispositions de l’article L.422-9 du code des assurances, le F.G.T.I. est également bien fondé à demander que lui soit allouée la pénalité prévue au titre des frais de gestion, soit la somme de 7 200 euros (24 000 euros x 30%).
En conséquence, la société Avanssur sera condamnée à verser au F.G.T.I. la somme de 29 988 euros, correspondant au total des sommes visées ci-dessus (7 200 + 16 800 + 7 200 euros) duquel doivent être déduites les sommes versées par l’auteur, soit 1 212 euros selon le décompte du 10 mars 2020 produit par le F.G.T.I. en pièce n°20.
Cette somme portera intérêts au taux égal à compter du 1er mars 2021, date de l’assignation, comme demandé par le F.G.T.I.
Sur la résistance abusive
Le F.G.T.I. sollicite la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la résistance de la société Avanssur à verser l’indemnité d’assurance.
Il estime que l'assureur a fait preuve de mauvaise foi, le contraignant à saisir le tribunal malgré plusieurs mises en demeure. Il ajoute que la résistance de la société Avanssur est particulièrement préjudiciable aux victimes qui n’ont perçu qu’une provision de 1 800 euros au titre des dommages et intérêts auxquels M. [T] [P] a été condamné.
La société Avanssur considère que le F.G.T.I. ne démontre pas de faute.
***
L’article 1240 du code civil dispose que « tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».
En l’espèce, la société Avanssur a fait l’objet de nombreuses mises en demeure du F.G.T.I. les 10 mai, 24 juin, 26 juillet et 27 août 2019 puis les 7 octobre, 15 novembre 2019 et 27 janvier 2020 auxquelles elle a néanmoins répondu les 20 août 2019 et 25 février 2020 en déniant sa garantie.
Chaque partie doit pouvoir faire valoir ses prétentions en justice et il ne saurait dès lors être considéré que le refus de garantie de la société Avanssur, exposant des moyens de droit en justice, est constitutif d’une faute.
En conséquence, le F.G.T.I. sera débouté de sa demande de dommages et intérêts au titre de la résistance abusive de l’assureur.
Sur les demandes accessoires
Partie succombante, la société Avanssur sera condamnée aux dépens de la présente instance, ainsi qu’à verser au F.G.T.I. la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
La société Avanssur sera déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles.
En application de l’article 514 du code de procédure civile modifié par le décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019, applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.
Il n’y a pas lieu en l’espèce d’écarter l’exécution provisoire de droit.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal statuant publiquement, par jugement contradictoire, en premier ressort et mis à disposition au greffe,
CONDAMNE la société Avanssur exerçant sous le nom commercial « Direct Assurance » à verser au Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions la somme de 29 988 euros,
DIT que ladite somme de 29 988 euros sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 1er mars 2021, date de l’assignation,
DÉBOUTE le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions de sa demande de dommages et intérêts au titre de la résistance abusive de la société Avanssur exerçant sous le nom commercial « Direct Assurance »,
CONDAMNE la société Avanssur exerçant sous le nom commercial « Direct Assurance » à verser au Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
DEBOUTE la société Avanssur exerçant sous le nom commercial « Direct Assurance » de sa demande au titre des frais irrépétibles,
CONDAMNE la société Avanssur exerçant sous le nom commercial « Direct Assurance » aux dépens de la présente instance,
RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit.
Signé par François BEYLS, Premier Vice-Président Adjoint et par Sylvie CHARRON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,