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30/07/2024 | FRANCE | N°21/02608

France | France, Tribunal judiciaire de Nanterre, 2ème chambre, 30 juillet 2024, 21/02608


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE NANTERRE



PÔLE CIVIL

2ème Chambre

JUGEMENT RENDU LE
30 Juillet 2024


N° RG 21/02608 - N° Portalis DB3R-W-B7F-WPZ6

N° Minute :








AFFAIRE

[W] [J], [Z] [R] épouse [Y]

C/

[I] [M], Compagnie d’assurance MACSF Assurance,
OFFICE NATIONAL D’INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDI CAUX,
CPAM d’ILE ET VILAINE





Copies délivrées le :










DEMANDEURS

Monsieur [W] [J]
domicilié : chez Cabi

net DANTE Avocats
[Adresse 3]
[Localité 7]

Madame [Z] [R] épouse [Y]
domiciliée : chez
[Adresse 1]
[Localité 5]

représentés par Maître Charles JOSEPH-OUDIN de la SELARL DANTE, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : P01...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE NANTERRE

PÔLE CIVIL

2ème Chambre

JUGEMENT RENDU LE
30 Juillet 2024

N° RG 21/02608 - N° Portalis DB3R-W-B7F-WPZ6

N° Minute :

AFFAIRE

[W] [J], [Z] [R] épouse [Y]

C/

[I] [M], Compagnie d’assurance MACSF Assurance,
OFFICE NATIONAL D’INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDI CAUX,
CPAM d’ILE ET VILAINE

Copies délivrées le :

DEMANDEURS

Monsieur [W] [J]
domicilié : chez Cabinet DANTE Avocats
[Adresse 3]
[Localité 7]

Madame [Z] [R] épouse [Y]
domiciliée : chez
[Adresse 1]
[Localité 5]

représentés par Maître Charles JOSEPH-OUDIN de la SELARL DANTE, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : P0115

DEFENDEURS

Monsieur [I] [M]
[Adresse 6]
[Localité 4]

Compagnie d’assurance MACSF Assurance
[Adresse 2]
[Localité 8]

représentés par Me Anaïs FRANÇAIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R123

L’OFFICE NATIONAL D’INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDI CAUX
[Adresse 10]
[Localité 9]

représentée par Maître Olivier SAUMON de l’AARPI JASPER AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : P0082

CPAM d’ILE ET VILAINE
Service Recours Contre Tiers
[Localité 4]

défaillante, faute d’avoir constitué avocat

L’affaire a été débattue le 04 Avril 2024 en audience publique devant le tribunal composé de :

Julia VANONI, Vice-Présidente
Thomas CIGNONI, Vice-président
Laure CHASSAGNE, Juge

qui en ont délibéré.

Greffier lors du prononcé : Fabienne MOTTAIS, Greffier.

JUGEMENT

prononcé en premier ressort, par décision Réputée contradictoire et mise à disposition au greffe du tribunal conformément à l’avis donné à l’issue des débats.

EXPOSE DU LITIGE :

Le 27 mars 2015, M. [W] [J] a bénéficié d’une chirurgie réfractive au laser pratiquée par le docteur [I] [M], ophtalmologue, en vue de traiter une myopie bilatérale.

Au décours de cette intervention, il a présenté une nécrose stromale à l’origine d’une opacification de la cornée.

Par ordonnance du 1er décembre 2017, le juge des référés de Bobigny a ordonné une expertise médicale.

L’expert désigné a déposé son rapport le 5 novembre 2018.

C’est dans ce contexte que, par actes extrajudiciaires des 23, 24, 25 février et 5 mars 2021, M. [J] et Mme [Z] [R] épouse [Y], sa mère, ont fait assigner le docteur [M], la société d’assurance mutuelle MACSF, son assureur, et l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) devant la présente juridiction, en présence de la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) d’Ille-et-Vilaine, en vue d’obtenir réparation de leurs préjudices.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 30 août 2022, ils demandent au tribunal, au visa des articles 1240 du code civil, ensemble les articles L. 1111-2 et L. 1142-1 du code de la santé publique, de :
A titre principal,
- condamner solidairement le docteur [M] et la société MACSF à indemniser M. [J] de son entier préjudice, ainsi qu’il suit :
Dépenses de santé actuelles : 2 087 euros,Perte de gains professionnels actuels : non applicable,Assistance par tierce personne (avant consolidation) : 11 445 euros,Dépenses de santé futures : réservé,Assistance par tierce personne (après consolidation) : 670 573,26 euros,Incidence professionnelle : 40 000 euros,Pertes de gains professionnels futurs: réservé,Déficit fonctionnel temporaire total : non applicable,Déficit fonctionnel temporaire partiel : 1 569,60 euros,Souffrances endurées : 3 000 euros,Préjudice esthétique temporaire : 1 000 euros,Déficit fonctionnel permanent : 78 625 euros,Préjudice esthétique permanent : 1 000 euros,Préjudice d’agrément : 11 793,75 euros,Préjudice sexuel : non applicable,Total : 821 093,61 euros,
- condamner solidairement le docteur [M] et la société MACSF à payer à Mme [Y] la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice d’affection,
- condamner solidairement le docteur [M] et la société MACSF à payer à M. [J] la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice spécifique lié au défaut d’information,
- condamner solidairement le docteur [M] et la société MACSF aux dépens ainsi qu’au paiement d’une somme de 3 000 euros, à chacun d’eux, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
A titre subsidiaire,
- condamner l’ONIAM à indemniser M. [J] de son entier préjudice, ainsi qu’il suit :
Dépenses de santé actuelles : 2 087 euros,Perte de gains professionnels actuels : non applicable,Assistance par tierce personne (avant consolidation) : 11 445 euros,Dépenses de santé futures : réservé,Assistance par tierce personne (après consolidation) : 670 573,26 euros,Incidence professionnelle : 40 000 euros,Pertes de gains professionnels futurs: réservé,Déficit fonctionnel temporaire total : non applicable,Déficit fonctionnel temporaire partiel : 1 569,60 euros,Souffrances endurées : 3 000 euros,Préjudice esthétique temporaire : 1 000 euros,Déficit fonctionnel permanent : 78 625 euros,Préjudice esthétique permanent : 1 000 euros,Préjudice d’agrément : 11 793,75 euros,Préjudice sexuel : non applicable,Total : 821 093,61 euros,
- condamner l’ONIAM à payer à Mme [Y] la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice d’affection,
- condamner l’ONIAM à payer à M. [J] la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice spécifique lié au défaut d’information,
- condamner l’ONIAM aux dépens ainsi qu’au paiement d’une somme de 3 000 euros, à chacun d’eux, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
En toute hypothèse,
- ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir,
- déclarer le jugement à intervenir commun à la CPAM d’Ille-et-Vilaine.

Au soutien de leurs prétentions, ils font essentiellement valoir que le docteur [M] a réalisé une intervention chirurgicale au laser sur M. [J], visant à traiter une myopie bilatérale par photokératectomie réfractive transépithéliale ; qu’à la suite de cette intervention, ce dernier a présenté une nécrose stromale nécessitant le port de lentilles sclérales, lesquelles n’ont toutefois pas été supportées en ce qu’elles lui occasionnaient des démangeaisons ainsi que des douleurs oculaires.

Ils soutiennent que l’intervention de chirurgie réfractive est une opération de convenance qui peut s’assimiler à une opération de chirurgie esthétique ; qu’à ce titre, le praticien est soumis à une obligation de moyens renforcée de sorte que les séquelles opératoires ne doivent pas être plus graves que le trouble réfractif initial ; qu’au cas d’espèce, le docteur [M] a manqué à cette obligation dans la mesure où M. [J] souffrait initialement d’une faible myopie, alors qu’il présente désormais des troubles majeurs de la vision ; que par ailleurs, le médecin est tenu d’informer ses patients de l’ensemble des risques fréquents ou graves normalement prévisibles, même exceptionnels ; qu’à cet égard, il ressort du dossier que M. [J] a signé un document d’information qui lui a été remis le jour de l’intervention, ce qui ne lui a pas permis de bénéficier d’un temps de réflexion suffisant ; que si le patient ne conteste pas avoir été informé de la technique utilisée, de son prix ou encore des questions relatives à la prise de produits, il n’a reçu aucune information relative aux risques inhérents à l’opération, et aucune solution alternative à la chirurgie réfractive ne lui a été proposée ; qu’ainsi, le docteur [M] a engagé sa responsabilité.

Ils ajoutent, à titre subsidiaire, que si le tribunal ne retenait pas la responsabilité du praticien, ils seraient fondés à être indemnisés au titre de la solidarité nationale ; qu’en effet, l’opération de chirurgie réfractive a entraîné des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles M. [J] aurait été exposé s’il n’avait pas subi d’intervention ; qu’en outre, ce dernier présente une atteinte permanente à l’intégrité physique sui doit être évaluée à 25 %, de sorte que les critères d’anormalité et de gravité du dommage sont réunies.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 3 novembre 2021, le docteur [M] et la société MACSF sollicitent, au visa des articles L. 1111-2 et L. 1142-1, I, du code de la santé publique, de :
- débouter M. [J] et Mme [Y] de l’intégralité de leurs prétentions,
- les condamner au paiement d’une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens avec faculté de recouvrement direct au profit de Me Anaïs Français, avocat, conformément à l’article 699 du même code.

Ils soutiennent essentiellement que l’intervention de chirurgie réfractive, qui a vocation à traiter un état pathologique, à savoir une myopie, ne saurait être assimilée à une opération de chirurgie esthétique faisant peser sur le praticien une obligation de moyens renforcée ; qu’il ressort du rapport d’expertise que le docteur [M] a satisfait à son obligation d’information, notamment par la remise d’une fiche d’information signée par le patient ; que le risque survenu a d’ailleurs été qualifié d’exceptionnel par l’expert, de sorte qu’il ne peut être reproché au médecin de ne pas avoir informé M. [J] de ce risque spécifique ; que le rapport d’expertise retient, en outre, que le délai de réflexion entre le bilan et l’intervention est assez long ; qu’ainsi, aucune faute ne peut être reproché au docteur [M].

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 20 mai 2022, l’ONIAM demande, au visa des articles L. 1142-1 et suivants, et D. 1142-1 et suivants du code de la santé publique, de :
- débouter M. [J] et Mme [Y] de l’ensemble de leurs prétentions,
- condamner la partie succombant aux dépens.

Il soutient essentiellement que si le tribunal considère, comme le prétendent les demandeurs, que l’opération de chirugie réfractive constitue une intervention de convenance personnelle, elle n’a pas vocation à entrer dans le champ d’application du dispositif de réparation au titre de la solidarité nationale ; qu’en toute hypothèse, les critères visés à l’article L. 1142-1, II, du code de la santé publique ne sont pas réunis, dès lors notamment que l’expert a évalué le déficit fonctionnel permanent de M. [J] à 16 % et que ce dernier a pu reprendre complètement son activité professionnelle ; qu’ainsi, le seuil de gravité n’est pas atteint.

Régulièrement assignée (remise à personne morale), la CPAM d’Ille-et-Vilaine n’a pas constitué avocat.

La clôture de l’instruction a été ordonnée le 22 novembre 2022 et l’affaire a été évoquée à l’audience des plaidoiries du 4 avril 2024.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la responsabilité du docteur [M]

Aux termes de l’article L. 1142-1, I., du code de la santé publique, hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.

Selon l’article L. 1111-2 du code de la santé publique, l'information due à toute personne sur son état de santé porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent, ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus.

Selon l’article L. 6322-2 du code de la santé publique, pour toute prestation de chirurgie esthétique, la personne concernée doit être informés par le praticien responsable des conditions de l'intervention, des risques et des éventuelles conséquences et complications. Cette information est accompagnée de la remise d'un devis détaillé. Un délai minimum doit être respecté par le praticien entre la remise de ce devis et l'intervention éventuelle. Pendant cette période, il ne peut être exigé ou obtenu de la personne concernée une contrepartie quelconque ni aucun engagement à l'exception des honoraires afférents aux consultations préalables à l'intervention.

Selon l’article D. 6322-30 du même code, le délai de réflexion minimum visé à l’article L. 6322-2 est de quinze jours entre la remise du devis détaillé, date et signé et l’intervention de chirurgie esthétique.

Enfin, aux termes de l’article L. 124-3, alinéa 1er, du code des assurances, le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.

En l’espèce, il est constant que le 27 mars 2015, M. [J] a bénéficié d’une chirurgie oculaire au laser, consistant en une photokératectomie réfractive, pratiquée par le docteur [M] en vue de traiter une myopie bilatérale et qu’il a présenté, au décours de cette intervention, une “fonte stromale” à l’origine d’une irrégularité et d’une opacification de la cornée, entraînant une baisse de l’acuité visuelle et de la sensibilité aux contrastes.

Le demandeur soutient que le praticien a manqué à son obligation d’information dès lors qu’il ne lui a pas laissé un délai de réflexion suffisant, qu’il ne l’a pas informé des risques inhérents à l’intervention et qu’il ne lui a pas présenté les procédures alternatives à la chirurgie qu’il a subie.

Le tribunal observe à titre liminaire que la chirurgie réfractive pratiquée sur M. [J], qui demeure facultative et dont la nécessité médicale n’est pas démontrée, doit être regardée comme une opération esthétique de confort soumise à l’obligation d’information renforcée prévue à l’article L. 6233-2 susvisé, en ce qu’elle ne pourduit aucune visée thérapeutique.

Sur ce, aucune faute médicale technique n’est susceptible d’être imputée au docteur [M], que ce soit à l’occasion du diagnostic de la myopie, du choix de l’intervention ou encore de la réalisation de l’acte médical en lui-même. En ce sens, il n’est pas établi que M. [M] a manqué à son obligations de moyens dès lors que le fait que la chirurgie réalisée a manqué son but n’est pas dû à une faute du praticien, mais au développement d’une complication aléatoire au décours de l’intervention elle-même, dont elle n’est pas exempte, et à laquelle M. [J] a choisi de recourir.

Il n’est à cet égard pas davantage démontré que le praticien aurait manqué à son obligation d’information, ce que relève au demeurant l’expert dans son rapport en concluant que celui-ci “a satisfait à [cette obligation] par les explications données au cours de consultations et par la fourniture de la fiche d’information de la Société française d’ophtalmologie, signée par le patient”.

Il résulte en effet du dossier médical versé aux débats que M. [J] a consulté le docteur [M] pour un “bilan pre-excimer” dès le 16 janvier 2015, et que plusieurs consultations s’en sont suivies jusqu’au jour de l’intervention le 27 mars 2015, au cours desquelles il n’est pas contesté qu’une information relative à la technique utilisée, aux résultats d’examen, au prix ou encore à la contre-indication de certains produits a été dispensée au patient.

En outre, la fiche d’information signée par ce dernier le 27 mars 2015 évoque, d’une part, les différentes solutions alternatives à photokératectomie réfractive, qu’il s’agisse de la chirurgie au “laser intrastromal (Lasik)”, de la “technique d’incision cornéenne”, de la “technique des anneaux intra-cornéens” ou de la “technique des implants intra-oculaires” et, d’autre part, les risques de “complications allant des plus anodines aux plus graves”, en citant notamment pour exemple “la perception de halos, une tendance à l’éblouissement, une réduction de l’acuité visuelle même après correction, une gêne à la vision nocturne, une vision dédoublée, une déformation des images” ou encore, “dans des cas exceptionnels”, un risque de “perte de la vision voire [une] perte de l’oeil”.

Il ne peut être fait grief au docteur [M] de ne pas avoir informé spécifiquement le demandeur du risque de “fonte stromale” alors, comme le relève l’expert dans son rapport, que la fiche d’information mentionne “les possibilités de complications amenant à la situation observée et même à des évolutions encore plus défavorables, comme la cécité”.

La circonstance que cette fiche ait été remise à M. [J] le jour de l’intervention ne peut, à elle seule, caractériser un manquement du docteur [M] à son obligation d’information alors qu’il n’est pas contesté qu’elle a été délivrée au patient antérieurement à l’opération, que celui-ci, qui avait préalablement consulté le praticien à plusieurs reprises, a expressément déclaré avoir “disposé d’un délai de réflexion suffisant” avant de donner son accord, et qu’un délai minimum de quinze jours s’est encore écoulé entre la remise du devis le 28 février 2015 et l’intervention conformément à l’article D. 6322-30 du code de la santé publique.

Il s’évince de ces énonciations que la responsabilité du docteur [M] ne saurait être engagée.

En conséquence, il y a lieu de débouter les demandeurs de leurs prétentions en ce qu’elles sont dirigées contre le docteur [M].

Sur l’indemnisation au titre de la solidarité nationale

Aux termes de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique, II, lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire.

Selon l’article L. 1142-3-1, I, du code de la santé publique, le dispositif de réparation des préjudices subis par les patients au titre de la solidarité nationale mentionné au II de l'article L. 1142-1 n'est pas applicable aux demandes d'indemnisation de dommages imputables à des actes dépourvus de finalité contraceptive, abortive, préventive, diagnostique, thérapeutique ou reconstructrice, y compris dans leur phase préparatoire ou de suivi.

En l’espèce, et ainsi qu’il l’a été retenu plus avant, dans la mesure où la photokératectomie réfractive dont a bénéficié M. [J] n’était pas médicalement indispensable, il ne peut être considéré qu’elle poursuivait une finalité thérapeutique au sens de l’article 1142-3-1, I, du code de la santé publique.

Il en résulte que cette intervention de convenance personnelle est exclue du dispositif de réparation des préjudices institué par L. 1142-1, II, du même code.

Dès lors, les demandes indemnitaires formées à l’encontre de l’ONIAM ne peuvent qu’être rejetées.

Sur les demandes accessoires

En application de l’article 696 du code de procédure civile, les dépens de l’instance seront supportés par les demandeurs, qui succombent.

Il y a lieu d’autoriser Me Anaïs Français, avocat, à recouvrer contre la partie condamnée ceux des dépens dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision, conformément à l’article 699 du même code.

L’équité et les circonstances de l’espèce commandent de condamner M. [J] et Mme [Y] à payer la somme globale de 2 000 euros au docteur [M] et à la société MACSF sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et de rejeter le surplus des demandes formées à ce titre.

La demande tendant à déclarer le présent jugement commun à la CPAM d’Ille-et-Vilaine apparaît sans objet et sera comme telle rejetée, dès lors que cet organisme, régulièrement assigné, est déjà partie à l’instance.

Enfin, il n’y a lieu d’ordonner l’exécution provisoire dans la mesure où les décisions de première instance sont de droit exécutoire à titre provisoire en application de l’article 514 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019.

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal, statuant publiquement par décision réputée contradictoire et en premier ressort, par mise à disposition au greffe,

Déboute M. [W] [J] et Mme [Z] [R] épouse [Y] de l’ensemble de leurs demandes ;

Condamne M. [W] [J] et Mme [Z] [R] épouse [Y] aux dépens ;

Dit que Me Anaïs Français est autorisée à recouvrer contre la partie condamnée ceux des dépens dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision ;

Condamne M. [W] [J] et Mme [Z] [R] épouse [Y] à payer au docteur [I] [M] et à la société d’assurance mutuelle MACSF la somme globale de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ; 

Rejette le surplus des demandes ;

Rappelle que la présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire.

signé par Julia VANONI, Vice-Présidente et par Fabienne MOTTAIS, Greffier présent lors du prononcé .

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Nanterre
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/02608
Date de la décision : 30/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs en accordant des délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-30;21.02608 ?
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