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02/09/2024 | FRANCE | N°24/00004

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Loyers commerciaux, 02 septembre 2024, 24/00004


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE

- LOYERS COMMERCIAUX -

JUGEMENT DU 02 Septembre 2024


N° RG 24/00004 - N° Portalis DBZS-W-B7I-YBY7



DEMANDEUR :

S.A.S. VIVASON GROUP, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège sis [Adresse 7]

Locataire de locaux commerciaux situés au rez-de-chaussée de l’immeuble du [Adresse 1]

représentée par Me Fabrice GRIMAULT, avocat plaidant au barreau de PARIS,
Me Alban POISSONNIER, avocat postulant au barreau de LILLE




DÉFENDEUR :

S.

A.S. FONCIA HAUTS DE FRANCE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège sis [Adresse 5]
représen...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE

- LOYERS COMMERCIAUX -

JUGEMENT DU 02 Septembre 2024

N° RG 24/00004 - N° Portalis DBZS-W-B7I-YBY7

DEMANDEUR :

S.A.S. VIVASON GROUP, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège sis [Adresse 7]

Locataire de locaux commerciaux situés au rez-de-chaussée de l’immeuble du [Adresse 1]

représentée par Me Fabrice GRIMAULT, avocat plaidant au barreau de PARIS,
Me Alban POISSONNIER, avocat postulant au barreau de LILLE

DÉFENDEUR :

S.A.S. FONCIA HAUTS DE FRANCE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège sis [Adresse 5]
représentée par Me Delphine CHAMBON, substituée par Me Peggy CARLIER, avocats au barreau de LILLE

DÉFENDEURS ET INTERVENANTS VOLONTAIRES :

M. [Z] [S], domicilié [Adresse 3]
représenté par Me Delphine CHAMBON, substituée par Me Peggy CARLIER, avocats au barreau de LILLE

M. [L] [S], domiciliée [Adresse 8]
représenté par Me Delphine CHAMBON, substituée par Me Peggy CARLIER, avocats au barreau de LILLE

Mme [T] [S] épouse [M], domiciliée [Adresse 6]
représentée par Me Delphine CHAMBON, substituée par Me Peggy CARLIER, avocats au barreau de LILLE

M. [U] [S], domiciliée [Adresse 4]
représenté par Me Delphine CHAMBON, substituée par Me Peggy CARLIER, avocats au barreau de LILLE

Mme [I] [F] veuve [S], domiciliée [Adresse 2]
représentée par Me Delphine CHAMBON, substituée par Me Peggy CARLIER, avocats au barreau de LILLE

MAGISTRAT TENANT L’AUDIENCE : Aurélie VERON

Juge des loyers commerciaux par délégation de Monsieur le Président du Tribunal judiciaire de LILLE

GREFFIER : Isabelle LASSELIN

DÉBATS : A l’audience publique du 01 Juillet 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 02 Septembre 2024

JUGEMENT : prononcé par décision CONTRADICTOIRE mise à disposition au greffe.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 28 juillet 2011, [N] [X] veuve [S] (pour l'usufruit), M. [L] [S] (pour 1/3 en nue-propriété), M. [Z] [S] (pour 1/3 en nue-propriété), M. [U] [S], Mme [T] [S] et Mme [I] [F]-[S] (chacun pour 1/9 en nue-propriété) ont donné à bail à l'EURL Viva'Son Gamma aux droits de laquelle vient désormais la S.A.S. Vivason Group, des locaux commerciaux au rez-de-chaussée d'un immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 10], pour une durée de neuf années à compter du 29 août 2011 et moyennant un loyer annuel hors taxes hors charges de 45 000 euros.

Le bail s'est poursuivi par tacite prolongation au-delà de son terme.

Par acte extrajudiciaire du 17 février 2023, la S.A.S. Vivason Group a demandé à la société Foncia en qualité de représentant des consorts [S], le renouvellement du bail commercial à compter du 1er avril 2023 moyennant un loyer annuel de 40 200 euros.

Par lettre recommandée avec avis de réception reçue le 25 juillet 2023, la société Vivason Group a notifié à la société Foncia Hauts-de-France un mémoire préalable à la saisine du juge des loyers commerciaux en vue de la fixation du loyer de renouvellement à la somme de 40 200 euros hors taxes hors charges à compter du 1er avril 2023.

[N] [X] veuve [S] est décédée le 3 octobre 2023, laissant pour héritiers MM. [Z], [L], [U] [S] et Mme [T] [S].

Par acte de commissaire de justice signifié le 9 février 2024, la S.A.S. Vivason Group a assigné la société Foncia Hauts-de-France en qualité de représentant de [N] [X] veuve [S], M. [L] [S], M. [Z] [S], M. [U] [S], Mme [T] [S] et Mme [I] [F]-[S] devant le juge des loyers commerciaux aux mêmes fins.

Par acte de commissaire de justice du 29 avril 2024, la société Vivason Group a assigné Mme [I] [F]-[S] aux mêmes fins.

Par mémoire en réponse n°1 enregistré au greffe le 6 mai 2024, M. [L] [S], M. [Z] [S], M. [U] [S], Mme [T] [S] et Mme [I] [F] veuve [S] sont intervenus volontairement en la procédure aux côtés de la société Foncia Haut-de-France.

Dans son mémoire introductif d'instance, la SAS Vivason Group demande au juge des loyers commerciaux de :
La Déclarer recevable et fondée en ses demandes, y faisant droit ;Dire et juger que le bail en renouvellement prend effet au 1er avril 2023 ;Dire et juger que le loyer du bail commercial doit correspondre à la valeur locative déterminée dans les conditions de l'article L.145-33 du code de commerce et de la jurisprudence ;Fixer le loyer en renouvellement au 1er avril 2023 à la somme de 40 200 euros, hors charges, par an en principal ; Dire et Juger qu'il y a lieu de procéder au réajustement à la baisse du dépôt de garantie, au regard du prix du nouveau loyer; et ordonner la restitution du trop-versé au locataire ;Ordonner la restitution par les bailleurs, consorts [S] représentés par la société Foncia [Localité 10], du trop-perçu au titre des loyers réglés depuis le 1er avril 2023 ;Dire et juger que les intérêts moratoires attachés à la restitution du trop-perçu de loyers, charges locatives et dépôt de garantie, courent à compter de la date de notification du mémoire par avis de réception du 20 juillet 2023 ;Ordonner la capitalisation des intérêts ;Condamner les bailleurs, consorts [S] représentés par la société Foncia [Localité 10], à lui payer une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civil outre les dépens en ce compris, le cas échéant, les frais d'expertise, avec distraction au profit de Me Poissonnier ;Ordonner l'exécution provisoire .
La SAS Vivason Group fait valoir qu’elle a fait procéder à une expertise par la société Martel Expertise, qui a calculé une surface utile pondérée de 133,85 m² et qui a estimé la valeur locative du local commercial sis [Adresse 1] à [Localité 10] à une somme de 40 200 euros hors taxes hors charges par an. Elle rappelle que le loyer de renouvellement doit être fixé à la valeur locative lorsqu'elle est inférieure au loyer du bail expiré et au loyer plafonné. Elle souligne que par application de la méthode par comparaison, l'expert amiable a retenu un prix de 300€/m²P. Elle rappelle que les impôts fonciers sont transférés au preneur.

Dans leur mémoire du bailleur n°1 notifié par lettre recommandée avec avis de réception reçue le 6 mai 2024, la société Foncia et les consorts [S] demandent au juge des loyers commerciaux de :
A titre liminaire,
Dire irrecevables les demandes formulées par la SAS Vivason Group à l'encontre de [N] [X] veuve [S] et de la société Foncia ,Prononcer la mise hors de cause de la SAS Foncia Hauts-de-France,A titre principal,
Juger MM. [Z], [L] et [U] [S], Mme [T] [S] et Mme [I] [F] veuve [S] recevables en leur intervention,Débouter la société Vivason Group de l’intégralité de ses demandes,Fixer le loyer du bail renouvelé entre la SAS Vivason Group d’une part et les consorts [S] d’autre part, à un montant plafonné annuel hors taxes et hors charges de 54 730,31 euros pour neuf ans à compter du 1er avril 2023 s’agissant de l’immeuble à usage de commerce situé [Adresse 1] à [Localité 10],Condamner la S.A.S. Vivason Group à payer aux consorts [S] la différence entre ce qu’elle a acquitté provisionnellement et le nouveau loyer fixé,A titre infiniment subsidiaire,
Désigner tel expert avec mission de rechercher la valeur locative aux frais avancés du preneur,Fixer pour la durée de l'instance le loyer au loyer indexé résultant de l'ancien bail,En tout état de cause,
Condamner la SAS Vivason Group à verser aux consorts [S] la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à Foncia Hauts-de-France une somme de 1 500 euros à ce titre,Condamner la SAS Vivason Group au paiement des dépens d’instance, ainsi que les frais visés aux articles A. 444-10 et suivants du code de commerce.
Les consorts [S] font valoir que le loyer indexé actuel est de 56 166,84 euros hors taxes hors charges par an. Ils soulignent que le rapport d’expertise produit par la SAS Vivason Group n’a pas été réalisé de façon contradictoire. Ils soutiennent que le secteur bénéficie d'une très bonne commercialité. Ils considèrent qu'il n'y a pas lieu de pondérer les surfaces, celles des valeurs de référence ne l'étant pas. Ils soutiennent que le transfert au preneur de 80 % de la taxe foncière ne saurait être considéré comme une clause exorbitante puisque cela est autorisé par la loi et est d'usage dans la région, et excluent ainsi toute minoration à ce titre. Ils critiquent les valeurs de référence retenues par l'expert qui seraient d'une commercialité différente. Ils retiennent une valeur locative de 276,50€/m²U qu'ils appliquent à la surface utile de 230,59 m² pour aboutir à une valeur de 70 409 euros hors taxes hors charges par an. Ils ajoutent que l'expertise amiable est partiale. Ils en concluent à l'application du loyer plafonné.

Après deux renvois à la demande des parties, l’affaire a été utilement appelée à l’audience du 1er juillet 2024, à l’issue de laquelle elle a été mise en délibéré au 2 septembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I- Sur les demandes liminaires

Il est acquis aux débats que [N] [X] Veuve [S] est décédée, de sorte que les demandes formulées à son encontre seront déclarées irrecevables.

Par ailleurs, la société Foncia Hauts-de-France est le gestionnaire immobilier mandaté par les propriétaires pour prendre en charge l'immeuble. Elle n'a pas la qualité de propriétaire et donc n'a pas qualité à défendre dans la procédure de fixation du loyer du bail renouvelé. Les demandes formulées à son encontre seront déclarées irrecevables et il convient de prononcer sa mise hors de cause.

MM. [Z], [L] et [U] [S], Mme [T] [S] et Mme [I] [F] veuve [S], propriétaires de l'immeuble loués, sont recevables en leur intervention.

II- Sur la demande d'expertise

Selon l’article L. 145-34 du code de commerce, à moins d’une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l’article L 145-33 de ce même code, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d’effet du bail à renouveler, si sa durée n’est pas supérieure à neuf ans, ne peut excéder la variation, intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré, de l'indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l'indice trimestriel des loyers des activités tertiaires mentionnés aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 112-2 du code monétaire et financier, publiés par l'Institut national de la statistique et des études économiques. A défaut de clause contractuelle fixant le trimestre de référence de cet indice, il y a lieu de prendre en compte la variation de l'indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l'indice trimestriel des loyers des activités tertiaires, calculée sur la période de neuf ans antérieure au dernier indice publié.

Ces dispositions ne sont plus applicables lorsque, par l'effet d'une tacite prolongation, la durée du bail excède douze ans.

En cas de modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l'article L. 145-33 ou s'il est fait exception aux règles de plafonnement par suite d'une clause du contrat relative à la durée du bail, la variation de loyer qui en découle ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10 % du loyer acquitté au cours de l'année précédente.

En application de l’article L 145-33 dudit code, le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative. A défaut d’accord cette valeur est déterminée d’après :
1° les caractéristiques du local considéré ;
2° la destination des lieux;
3° les obligations respectives des parties;
4° les facteurs locaux de commercialité ;
5° les prix couramment pratiqués dans le voisinage.

En l'espèce, si une expertise amiable est versée aux débats, celle-ci a été réalisée de manière non contradictoire. Les valeurs de référence retenues par l'expert sont critiquées par les propriétaires au regard d'une commercialité différente. Se pose également la question de la pondération des surfaces des valeurs de référence afin de permettre une comparaison utile et de l'usage du transfert de la charge de la taxe foncière au preneur dans la région en vue d'une éventuelle minoration de la valeur locative.

Dès lors, il apparaît que les divergences des parties sur le montant du loyer du bail renouvelé portent sur des points de fait qui ne peuvent être tranchés sans recourir à une mesure d’expertise judiciaire contradictoire qui sera en conséquence ordonnée et dont les termes seront précisés au dispositif de la présente décision.

Pendant le cours de l'instance, le loyer provisionnel sera fixé au montant du loyer actuel, sans qu’il y ait lieu de le diminuer à ce stade de la procédure.

II- Sur les autres demandes

Dans l'attente du rapport d'expertise, il y a lieu de surseoir à statuer sur l'ensemble des demandes et de réserver les dépens.

Conformément à l'article 514 du code de procédure civile, l'exécution provisoire est de droit. Il n'y a dès lors pas lieu de prévoir expressément l'exécution provisoire de la décision.

PAR CES MOTIFS

Le Juge des loyers commerciaux, statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe et rendu en premier ressort,

DECLARE irrecevables les demandes formées à l'encontre de [N] [X] veuve [S] et de la S.A.S. Foncia Hauts-de-France ;

PRONONCE la mise hors de cause de la S.A.S. Foncia Hauts-de-France ;

DECLARE MM. [Z], [L] et [U] [S], Mme [T] [S] et Mme [I] [F] veuve [S] recevables en leur intervention ;

ORDONNE avant dire droit une expertise et commet pour y procéder :

Monsieur [Y] [H],
[Adresse 9]
[Localité 10]
avec mission de :
Visiter et décrire les lieux loués ;Indiquer s’il s’est produit une évolution des éléments constitutifs de la valeur locative de nature à écarter l’indexation prévue à l’article L.145-34 du code de commerce ;Déterminer et apprécier notamment pour ce faire :→ les caractéristiques propres du local et notamment la surface pondérée dont le calcul sera détaillé ;
→ l'état d’entretien, de vétusté ou de salubrité voire, en tant que de besoin, la nature et l’état des équipements et des moyens d’exploitation mis à la disposition du locataire ;
→ la destination et/ou les modalités de jouissance des lieux prévus au bail ;
→ les obligations respectives des parties s’agissant notamment des obligations et restrictions imposées au bailleur et/ou au preneur, les améliorations apportées dont l’auteur, l’époque et le coût seront précisés ;
→ les facteurs locaux de commercialité et notamment :
° l’importance de la ville, du quartier, de la rue
° l’intérêt de l’emplacement du point de vue de l’exercice des activités commerciales et de l’activité considérée en particulier
° l’attrait et les sujétions particuliers que peut présenter l’emplacement ;
Préciser les prix couramment pratiqués dans le voisinage ;Donner son avis sur la valeur locative des lieux loués au sens de l’article L.145-33 du code de commerce et sur le loyer applicable à compter du renouvellement du bail ;
FIXE à 2 000 euros la provision à valoir sur la rémunération de l’expert que la S.A.S. Vivason Group devra verser au plus tard le 2 NOVEMBRE 2024 au régisseur du tribunal judiciaire de Lille, sous peine de caducité de la mesure ;

INVITE l’expert à faire connaître, dès l’acceptation de sa mission et au plus tard dès la première réunion d’expertise, le coût prévisible de sa mission ;

DIT que l’expert devra adresser en temps voulu aux parties un pré-rapport et répondre aux dires que celles-ci lui auront, le cas échéant, fait parvenir dans le délai qu’il leur aura imparti pour ce faire ;

DIT que l’expert devra déposer son rapport au greffe au plus tard le 2 MARS 2025, sauf prorogation de délai dûment accordée par le juge chargé du contrôle des expertises;

FIXE le montant du loyer provisionnel au montant du loyer actuel ;

SURSOIT à statuer sur les autres demandes ;

DIT que l'affaire sera retirée du rôle et qu'il appartiendra à la partie la plus diligente de saisir le juge des loyers commerciaux après réalisation de l'expertise ;

RESERVE les dépens ;

RAPPELLE que l'exécution provisoire de la présente décision est de droit.

Le greffier Le juge des loyers commerciaux


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Loyers commerciaux
Numéro d'arrêt : 24/00004
Date de la décision : 02/09/2024
Sens de l'arrêt : Expertise

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-09-02;24.00004 ?
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