TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
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Référés expertises
N° RG 24/00768 - N° Portalis DBZS-W-B7I-YEO7
SL/SH
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
DU 06 AOUT 2024
DEMANDERESSE :
Mme [U] [G]
[Adresse 3]
[Localité 8]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 2024/167 du 21/03/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de DUNKERQUE)
représentée par Me Caroline DEREME, avocat au barreau de LILLE
DÉFENDERESSES :
GROUPEMENT DES HOPITAUX DE L’INSTITUT CATHOLIQUE DE [Localité 15]
[Adresse 10]
[Localité 15]
représentée par Me Jean-françois SEGARD, avocat au barreau de LILLE
Société AIG EUROPE SA
[Adresse 7]
[Localité 11]
représentée par Me Véronique VITSE-BOEUF, avocat au barreau de LILLE
Société VERLINGUE
[Adresse 1]
[Localité 6]
représentée par Me Véronique VITSE-BOEUF, avocat au barreau de LILLE
CPAM des Flandres
[Adresse 4]
[Localité 9]
défaillante
JUGE DES RÉFÉRÉS : Sarah HOURTOULE, 1ere VP adjointe, suppléant le Président en vertu des articles R. 212-4 et R. 212-5 du Code de l’Organisation Judiciaire
GREFFIER : Martine FLAMENT lors des débats et Sébastien LESAGE lors de la mise à disposition
DÉBATS à l’audience publique du 25 Juin 2024
ORDONNANCE du 06 Août 2024
LA JUGE DES RÉFÉRÉS
Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil et avoir mis l’affaire en délibéré, a statué en ces termes :
Le 7 janvier 2022 Madame [U] [G] a été renversée par un bus [Adresse 13] à [Localité 15]. Elle explique que sa cheville gauche a été bloquée entre la bordure et le bus, puis le bus l’a percuté au niveau de la cuisse droite.
Les pompiers ont transporté Madame [U] [G] au Centre Hospitalier [16] de [Localité 15] où une fracture de l’orteil troisième rayon gauche, une entorse de cheville gauche, un oedème de taille importante de la hanche et de la cuisse droite étaient constatés.
Le 26 janvier 2022, Madame [U] [G] se rendait de nouveau au Centre Hospitalier de [16] afin d’y être hospitalisée en raison d’importantes douleurs.
Consulté en urgence après son retour à domicile, le Docteur [V], traumatologue à la clinique de [Localité 12] a opéré en urgence Madame [U] [G] le 1er février 2022 pour évacurer un volumineux hématome surinfecté de la fesse droite évoluant vers une forme de choc septique.
Une expertise amiable a été effectuée par le Docteur [F] le 23 janvier 2023.
Le Docteur [F] a missionné le Docteur [N] ès qualité de sapiteur psychiatre.
L’expertise psychiatrique avec le Docteur [N] a eu lieu le 11 septembre 2023 et le Docteur [N] n’a pas encore transmis son rapport.
Le 12 février 2022, la Compagnie VERLINGUE et Madame [U] [G] ont signé un protocole transactionnel allouant une indemnité provisionnelle de 800 euros au titre des souffrances endurées. Puis, le 8 mars 2022, un second protocole transactionnel est signé, allouant une provision de 210 euros à Madame [U] [G] en raison du dommage que l’accident a causé à son téléphone portable.
Le 15 septembre 2023, la Compagnie VERLINGUE a proposé une indemnité provisionnelle à hauteur de 1000 euros que Madame [U] [G] a refusée.
Par actes séparés des 15, 19, 21 et 26 mars 2024, Madame [U] [G] a fait assigner devant le juge des référés de ce tribunal le Groupement des Hôpitaux de l’Institut Catholique de [Localité 15], pris en son établissement le CENTRE HOSPITALIER [16], la Société AIG EUROPE SA, la Société VERLINGUE, agissant pour le nom et pour le compte de la Société AIG EUROPE SA et la Caisse d’Assurance Maladie des FLANDRES, aux fins de voir :
Vu l’article 145 du Code de procédure civile,
Vu les articles 264 à 284-1 du Code de procédure civile,
Vu l’article L.1142-1 du Code de la santé publique,
Vu l’alinéa 2 de l’article 809 du Code de procédure civile,
Vu la loi n°85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation,
Vu l’article L.211-3 du Code des assurances,
Vu l’article 514 du Code de procédure civile,
Vu l’alinéa 3 de l’article 514-1 du Code de procédure civile,
Vu l’article 700 du Code de procédure civile,
Vu les pièces justificatives,
- RECEVOIR Madame [U] [G] en son assignation et la dire bien fondée,
- ORDONNER la désignation d’un expert médical en lui enjoignant les missions suivantes :
CONVOQUER les parties et leurs conseils en les informant de leur droit de se faire assister par un médecin conseil de leur choix ;
RECUEILLIR tous les documents utiles tant auprès de la victime que de tout tiers détenteurs ;
FOURNIR le maximum de renseignements sur l’identité de la victime, ses conditions d’activités professionnelles, son niveau scolaire, son statut exact ;
RECHERCHER l’état médical du demandeur avant l’acte critiqué ;
PROCEDER à l’examen clinique de la demanderesse et décrire les lésions et séquelles directement imputables aux soins et traitements critiqués
RECHERCHER si les actes médicaux étaient indiqués, si le diagnostic pouvait être établi avec certitude et si les soins ou actes médicaux ont été attentifs, diligents et conformes aux données acquises de la science médicale ;
ANALYSER, le cas échéant, de façon détaillée et motivée la nature des erreurs, imprudences, manques de précaution nécessaires, négligences, pré, per ou postopératoires, maladresses ou autres défaillances de nature à caractériser une faute en relation de cause à effet direct et certaine avec le préjudice allégué,
EVENTUELLEMENT dire si les lésions et séquelles sont imputables relèvent d'une infection ; dans cette hypothèse préciser si celle-ci est de nature nosocomiale ou relève d'une cause extérieure et étrangère à l'hospitalisation
DÉCRIRE de façon détaillée, à partir des déclarations de la victime imputable au fait dommageable et des documents médicaux fournis, les lésions initiales, les modalités du traitement, en précisant autant que possible les durées exactes d’hospitalisation et de rééducation et, pour chaque période d’hospitalisation ou de rééducation, la nature et le nom de l’établissement, le ou les services concernés et la nature des soins ;
INDIQUER la nature de tous les soins et traitements prescrits imputables à l’accident et, si possible, la date de la fin de ceux-ci ;
RETRANSCRIRE dans son intégralité le certificat médical initial et, si nécessaire, reproduire totalement ou partiellement les différents documents médicaux permettant de connaître les lésions initiales et les principales étapes de l’évolution ;
INTERPRÉTER les examens complémentaires produits ;
RECUEILLIR les doléances de la victime et au besoin de ses proches en l’interrogeant sur les conditions d’apparition, l’importance des douleurs et de la gêne fonctionnelle et leurs conséquences ;
DÉCRIRE un éventuel état antérieur en interrogeant la victime et en citant les seuls antécédents qui peuvent avoir une incidence sur les lésions ou leurs séquelles. Dans cette hypothèse :
- au cas où il aurait entraîné un déficit fonctionnel antérieur, fixer la part imputable à l’état antérieur et la part imputable au fait dommageable ;
- au cas où il n’y aurait pas de déficit fonctionnel antérieur, dire si le traumatisme a été la cause déclenchante du déficit fonctionnel actuel ou si celui-ci se serait de toute façon manifesté spontanément dans l’avenir ;
PROCEDER à un examen clinique détaillé (y compris taille et poids) en fonction des lésions initiales et des doléances exprimées par la victime, en assurant la protection de son intimité, et informer ensuite contradictoirement les parties et leurs conseils de façon circonstanciée de ses constatations et de leurs conséquences ;
ANALYSER dans une discussion précise et synthétique l’imputabilité entre l’accident, les lésions initiales et les séquelles invoquées en se prononçant sur :
- la réalité des lésions initiales,
- la réalité de l’état séquellaire en décrivant les actes, gestes et mouvements rendus difficiles ou impossibles en raison de l’accident,
- l’imputabilité directe et certaine des séquelles aux lésions initiales,
- et en précisant l’incidence éventuelle d’un état antérieur ;
Evaluation médico-légale
INDIQUER dans le rapport d’expertise médicale les périodes pendant lesquelles la victime a été, du fait de son déficit fonctionnel temporaire, dans l’incapacité d’exercer totalement ou partiellement son activité professionnelle ; En cas d’incapacité partielle, préciser le taux et la durée ; Préciser la durée des arrêts de travail retenus par l’organisme social au vu des justificatifs produits et dire si ces arrêts de travail sont liés au fait dommageable ;
INDIQUER les périodes pendant lesquelles la victime a été, du fait de son déficit fonctionnel temporaire, dans l’incapacité totale ou partielle de poursuivre ses activités personnelles habituelles ; En cas d’incapacité partielle, préciser le taux et la durée ;
FIXER la date de consolidation et, en l’absence de consolidation, DIRE à quelle date il conviendra de revoir la victime, préciser, lorsque cela est possible, les dommages prévisibles pour l’évaluation d’une éventuelle provision ;
INDIQUER dans le rapport d’expertise médicale si, après la consolidation, la victime subit un déficit fonctionnel permanent défini comme une altération permanente d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles ou mentales, ainsi que des douleurs permanentes ou tout autre trouble de santé, entraînant une limitation d’activité ou une restriction de participation à la vie en société subie au quotidien par la victime dans son environnement ; En évaluer l’importance et en chiffrer le taux ; dans l’hypothèse d’un état antérieur, préciser en quoi l’accident a eu une incidence sur cet état antérieur et en décrire les conséquences ;
DÉCRIRE, en cas de difficultés éprouvées par la victime, les conditions de reprise de l’autonomie et, lorsque la nécessité d’une aide temporaire avant consolidation est alléguée, indiquer si l’assistance d’une tierce personne constante ou occasionnelle a été nécessaire, en décrivant avec précision les besoins (niveau de compétence technique, durée d’intervention quotidienne) ;
DÉCRIRE les soins futurs et les aides techniques compensatoires au handicap de la victime en précisant la fréquence de leur renouvellement ;
DONNER son avis sur d’éventuels aménagements nécessaires pour permettre, le cas échéant, à la victime d’adapter son logement et/ou son véhicule à son handicap ;
INDIQUER, notamment au vu des justificatifs produits, si le déficit fonctionnel permanent entraîne :
- l’obligation pour la victime de cesser totalement ou partiellement son activité professionnelle ou de changer d’activité professionnelle ;
- d’autres répercussions sur son activité professionnelle actuelle ou future.
DÉCRIRE les souffrances physiques, psychiques ou morales endurées pendant la maladie traumatique (avant consolidation) du fait de ses blessures subies. Les évaluer selon l’échelle habituelle de sept degrés ;
DONNER un avis sur l’existence, la nature et l’importance du préjudice esthétique temporaire (avant consolidation). Le décrire précisément et l’évaluer selon l’échelle habituelle de sept degrés ;
DONNER un avis sur l’existence, la nature et l’importance du préjudice esthétique permanent ; le décrire précisément et l’évaluer selon l’échelle habituelle de sept degrés, indépendamment de l’éventuelle atteinte fonctionnelle prise en compte au titre du déficit ;
INDIQUER s’il existe un préjudice sexuel ; le décrire en précisant s’il recouvre l’un ou plusieurs des trois aspects pouvant être altérés séparément ou cumulativement, partiellement ou totalement : la morphologie, l’acte sexuel (libido, impuissance ou frigidité) et la fertilité (fonction de reproduction) ;
? INDIQUER s’il existe un préjudice d’établissement et le décrire précisément le cas échéant ;
DONNER un avis médical sur l’impossibilité ou la limitation du préjudice d’agrément, s’il est allégué par la victime, ainsi que son caractère définitif, sans prendre position sur l’existence ou non d’un préjudice afférent à cette allégation ;
DIRE dans le rapport d’expertise médicale si l’état de la victime est susceptible de modifications en aggravation
ETABLIR un récapitulatif de l’évaluation de l’ensemble des postes énumérés dans la mission ;
- CONDAMNER solidairement la Société AIG EUROPE SA et la Compagnie d’assurances VERLINGUE, en qualité de mandataire de cette dernière, au paiement d’une provision indemnitaire de 8.000 euros au bénéfice de Madame [U] [G] ;
- CONDAMNER solidairement la Compagnie d’assurances VERLINGUE et la Société AIG EUROPE SA à payer les intérêts au double du taux légal échus sur la créance indemnitaire de la victime sur la période du 7 septembre 2022 jusqu’à la décision à venir
- CONDAMNER solidairement la Compagnie VERLINGUE et la Société AIG EUROPE à verser à Madame [U] [G] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens de l’instance.
- DIRE n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
- RENDRE OPPOSABLE la décision à intervenir à la CPAM des Flandres
L’affaire a été appelée à l’audience du 28 mai 2024 et renvoyée à la demande des parties, pour être plaidée le 25 juin 2024.
A cette date, Madame [U] [G] représentée, sollicite le bénéfice de don exploit introductif d’instance.
Le Groupement des Hôpitaux de l’Institut Catholique de [Localité 15], pris en son établissement le CENTRE HOSPITALIER [16], représenté par son avocat, sollicite le bénéfice de ses conclusions déposées et soutenues et demande de :
- Donner acte au GHICL de ce qu’il n’a cause d’opposition à ce qu’une mesure d’expertise soit diligentée sous les plus expresses réserves quant à son éventuelle responsabilité.
- Compléter et modifier la mission d’expertise
- Rejeter toute autre demande.
- Réserver les dépens.
La Société VERLINGUE et la Compagnie AIG EUROPE SA représentées par leur avocat sollicitent le bénéfice de leurs conclusions déposées et soutenues et demandent de :
Vu les articles 30 à 32 du Code de procédure civile,
Vu la Loi n°85-677 du 5 juillet 1985 ;
Vu l’article 1353 du Code civil ;
Vu les articles L211-9 et L211-13 du Code des assurances ;
- METTRE HORS DE CAUSE la Société VERLINGUE, courtier d’assurance n’ayant pas vocation à intervenir dans l’indemnisation des préjudices de Madame [G] ;
- ORDONNER une mesure d’expertise judiciaire et ce sous réserve de tous les droits de la Compagnie AIG EUROPE SA et sans aucune reconnaissance de responsabilité ;
- CONFIER la mesure d’expertise avec la mission précisée au sein des présentes, portant à la fois sur les conséquences de l’accident de la circulation du 7 janvier 2022 et sur la conformité des soins délivrés par le CENTRE HOSPITALIER DE [16], à un collège d’experts spécialisés en chirurgie orthopédique et en infectiologie ;
- ALLOUER la somme provisionnelle de 8.000 € à Madame [G] à valoir sur l’indemnisation définitive de ses préjudices ;
- REJETER la demande de condamnation au titre de la sanction prévue à l’article L211-13 du Code des assurances ;
- REJETER la demande formulée au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi que celle relative aux dépens de l’instance.
La CPAM DES FLANDRES régulièrement citée par remise de l’acte à personne habilitée n’a pas constitué avocat.
Conformément aux dispositions des articles 455 et 446-1 du code de procédure civile, il est fait référence à l’acte introductif d’instance et aux écritures des parties qui ont été soutenues oralement.
La présente décision susceptible d’appel est réputée contradictoire.
MOTIFS DE LA DECISION
En application des dispositions de l’article 472 du code de procédure civile, en l’absence d’au moins l’un des défendeurs, Il ne sera fait droit à la demande que si le juge l’estime régulière, recevable et bien fondée.
Sur la mise hors de cause de la société VERLINGUE
La Société VERLINGUE sollicite sa mise hors de cause.
L’article 30 du code de procédure civile dispose que l'action est le droit, pour l'auteur d'une prétention, d'être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée.
Pour l'adversaire, l'action est le droit de discuter le bien-fondé de cette prétention.
Les articles 31 et 32 du code de procédure civile prévoient que l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.
La Société VERLINGUE dont l’extrait Kbis démontre que c’est un courtier en assurances et non une société d’assurance n’a pas vocation à intervenir dans l’indemnisation de Madame [G].
L’assureur du bus est la Compagnie AIG EUROPE SA.
Dans ces conditions, la Société VERLINGUE sera mise hors de cause.
Sur la demande d’expertise
Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé. Justifie d’un motif légitime au sens de ce texte la partie qui démontre la probabilité de faits susceptibles d’être invoqués dans un litige éventuel.
Le Groupement des Hôpitaux de l’Institut Catholique de [Localité 15], pris en son établissement le CENTRE HOSPITALIER [16] et la Compagnie AIG EUROPE SA formulent protestations et réserves et ne s’opposent pas à la demande d’expertise.
Madame [U] [G] a été renversée par un bus [Adresse 13] à [Localité 15] le 7 janvier 2022.
Elle bénéficie, en application des dispositions de la loi du 05 juillet 1985, d’un droit à obtenir la réparation de son préjudice.
Madame [U] [G] justifie donc d’un intérêt légitime au vu des éléments médicaux qu’elle produit, à voir ordonner une mesure d’expertise afin d’évaluer l’étendue de son préjudice corporel, qui sera ordonnée, selon la mission figurant au dispositif de la présente décision, qu’il appartient au juge de déterminer en application des dispositions de l’article 265 du code de procédure civile.
Sur la demande de provision
Selon l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier. Le montant de la provision allouée en référé n’a d’autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée et en l’occurrence, la somme susceptible d’être allouée en réparation du préjudice de la victime. Le juge des référés fixe discrétionnairement à l’intérieur de cette limite la somme qu’il convient d’allouer au requérant.
Le préjudice de l’intéressée a été évalué par le docteur [F] qui a examiné Madame [U] [G], suivant rapport du 23 janvier 2023 (pièce Madame [U] [G] n°2), et qui a estimé que l’état de la victime n’était pas consolidé.
Ainsi, au vu des justificatifs médicaux produits, et notamment le rapport d’expertise médicale précité, qui démontrent les préjudices subis par Madame [U] [G] à la suite de l’accident, compte tenu des sommes pouvant être allouées à l’intéressée et des provisions de 1010 euros d’ores et déjà versées, il convient d’allouer à Madame [U] [G] une provision complémentaire non sérieusement contestable de 8000 euros, qui sera supportée par la Compagnie AIG EUROPE SA, dès lors que celle-ci ne conteste pas devoir sa garantie à son assuré.
Sur la demande d’intérêts de pénalité
Madame [U] [G] estime qu’au regard des postes de préjudices retenus par le Docteur [F] et de leurs évaluations, elle est en droit de solliciter une indemnisation, alors même que la consolidation n’est pas encore acquise, à hauteur de 8.483,75 euros.
Elle souligne que la Compagnie d’assurances a formulé trois propositions d’indemnité provisionnelle à hauteur de 2.010 euros en tout et considère que le caractère manifestement dérisoire des offres formulées doivent permettre de les considérer comme étant inexistantes.
Ainsi elle demande que le doublement des intérêts soit appliqué à compter du 07 septembre 2022 en application de l’article 12 de la Loi Badinter.
La Compagnie AIG EUROPE SA fait valoir que le caractère suffisant ou non d’une offre doit être apprécié au jour où elle est formulée, au vu des justificatifs alors connus et des séquelles alors établies. Elle rappelle que Madame [U] [G] a signé un protocole transactionnel relatif à une indemnité provisionnelle de 800 € dès le 12 février 2022, moins de deux mois après la survenue de l’accident puis le 8 mars 2022 suivant, deux mois après la survenue de l’accident, pour une indemnité provisionnelle complémentaire de 210 €.
Elle ajoute que l’obligation faite à la Compagnie AIG EUROPE de faire une offre d’indemnisation définitive ne commence à courir qu’à compter de la date à laquelle l’assureur est informé de la consolidation de la victime, ce qui n’est pas encore le cas.
Elle expose que cette demande ne relève pas de la compétence du juge des référés, juge de l’évidence.
L’article 12 de la loi du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes
d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation dispose que :
“L'assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d'un véhicule terrestre à moteur est tenu de présenter dans un délai maximum de huit mois à compter de l'accident une offre d'indemnité à la victime qui a subi une atteinte à sa personne. En cas de décès de la victime, l'offre est faite à ses héritiers et, s'il y a lieu, à son conjoint. Une offre doit aussi être faite aux autres victimes dans un délai de huit mois à compter de leur demande d'indemnisation.
L'offre comprend tous les éléments indemnisables du préjudice, y compris les éléments relatifs aux dommages aux biens lorsqu'ils n'ont pas fait l'objet d'un règlement préalable.
Elle peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime. L'offre définitive d'indemnisation doit alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation. [...]”
Il résulte également de l’article L.211-13 du code des assurances que lorsque l’offre n’a pas été faite dans les délais impartis par l’article précité, le montant de l’indemnité offerte par l’assureur ou alloué par le juge à la victime produit intérêt de plein droit au double du taux de l’intérêt légal à compter de l’expiration du délai et jusqu’au jour de l’offre ou du jugement devenu définitif.
En l’espèce, il n’apparaît pas avec l’évidence requise en référé que les offres provisionnelles formulées pas la Compagnie AIG EUROPE SA revêtent un caractère manifestement dérisoire pouvant s’interpréter comme une absence d’offre d’autant que la compagnie d’assurance a proposé un quart de la somme à laquelle la victime estime son droit à indemnisation à ce jour.
Il n’y aura donc pas lieu à référé sur cette demande.
Sur les autres demandes
En l'état de la procédure, les dépens seront laissés à la charge du demandeur et seront recouvrés, le cas échéant, conformément à la loi sur l’aide juridictionnelle.
Il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de Madame [U] [G] les frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
Elle sera donc déboutée de sa demande formulée au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.
La présente décision est exécutoire par provision, en application des dispositions de l’article 484, 514 et 514-1 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant par ordonnance de référé, par mise à disposition au greffe, après débats en audience publique, par décision réputée contradictoire et en premier ressort ;
Renvoyons les parties à se pourvoir sur le fond du litige ;
Par provision, tous moyens des parties étant réservés ;
Mettons hors de cause la Société VERLINGUE ;
Ordonnons une mesure d'expertise et désignons pour y procéder
[D] [I]
Centre hospitalier de [Localité 14] [Adresse 5]
[Localité 14]
Inscrit sur la liste des experts de la Cour d’appel de DOUAI lequel s’adjoindra si nécessaire tout spécialiste de son choix notamment en infectiologie mais exclusivement dans une spécialité distincte de la sienne ;
avec pour mission de :
- Convoquer les parties ou leur conseil en les informant de la faculté de se faire assister par le médecin-conseil de leur choix ;
- Déterminer l'état de la victime avant l'accident (anomalies, maladies, séquelles d'accidents antérieurs) ;
- Relater les constatations médicales faites après l'accident ainsi que l'ensemble des interventions et soins, y compris la rééducation ;
- Examiner la victime, enregistrer ses doléances et décrire les constatations ainsi faites
- Analyser les soins prodigués dans les suites de l’accident du 7 janvier 2022 et dire s’ils ont été conformes aux règles de l’art ; dans la négative, déterminer les préjudices imputables aux manquements commis ; Déterminer les lésions strictement imputables à l’accident de la circulation litigieux d’une part, et les lésions strictement imputables aux manquements relevés d’autre part ;
- Dire si un manquement aux règles de l’art peut être reproché au GHICL ou si au contraire les soins ont été dispensés conformément aux bonnes pratiques médicales
- Le cas échéant, déterminer la part des postes de préjudice et des séquelles présentant un lien de causalité direct et certain avec ce manquement, en excluant les conséquences normalement prévisibles de la pathologie, en excluant encore tout état antérieur et toute cause étrangère ;
- Si une infection imputable au GHICL était relevée, préciser si les mesures d’asepsie ont été correctement respectées, si l’infection peut être qualifiée de nosocomiale et si elle pouvait raisonnablement être évitée ;
- Distinguer dans l’évaluation des postes de préjudice ceux en rapport exclusif avec l’infection, en excluant les séquelles imputables au traumatisme et à l’état initial du patient, ou à d’autres causes ou pathologies ;
- Préciser si cette éventuelle infection a pu être à l’origine d’une perte de chance d’éviter les séquelles et dans cette hypothèse la chiffrer ;
- En cas de retard de diagnostic, préciser si celui-ci a été difficile à établir et dans la négative, déterminer si ce retard de diagnostic a été à l’origine d’une perte de chance réelle et sérieuse pour le patient d’éviter les séquelles ;
- Déterminer les débours et frais médicaux en relation directe et exclusive avec le manquement éventuellement retrouvé, en les distinguant expressément de ceux imputables à l’état initial ;
- Evaluer les préjudices de Madame [U] [G] en précisant, pour chacun d’entre eux, leur imputabilité à l’accident initial et/ou à la qualité des soins prodigués par les établissements de soins en cause ;
- Déterminer compte tenu des lésions initiales et de leur évolution la durée de l'incapacité
temporaire en indiquant si elle a été totale ou partielle, en ce cas en préciser le taux, et proposer la date de consolidation de ces lésions ;
- Dire si les anomalies constatées lors de l'examen sont la conséquence de l'accident ou d'un état ou d'un accident antérieur ou postérieur ;
Dans l'hypothèse d'un état antérieur, préciser :
- si cet état a été révélé ou aggravé par l'accident ;
- s'il entraînait un déficit fonctionnel avant l'accident ; dans l'affirmative, estimer le taux d'incapacité alors existant ;
si, en l'absence de l'accident, il aurait entraîné un déficit fonctionnel ; dans l'affirmative, préciser
dans quel délai et à concurrence de quel taux ;
- Décrire les gestes mouvements et actes rendus difficiles ou impossibles en raison de l'accident ;
Donner un avis sur le taux de déficit fonctionnel médicalement imputable à l'accident
Estimer le taux de déficit fonctionnel global actuel du blessée, tous éléments confondus (état antérieur inclus) ;
Si un barème a été utilisé préciser lequel, ainsi que les raisons de son choix ;
Préciser la nature et le coût des soins en moyenne annuelle susceptible de rester à la charge de la victime ;
- Dire si le blessé a perdu son autonomie personnelle. Dans l'affirmative, dire pour quels actes de la vie quotidienne, et pendant quelle durée, l'aide d'une tierce personne à domicile a été ou est indispensable, ou si son état nécessite le placement dans une structure spécialisée en précisant les conditions d’intervention de son personnel ( médecins, infirmiers, kinésithérapeutes...) ;
- Donner un avis détaillé sur la difficulté ou l'impossibilité pour le blessé de poursuivre l'exercice de sa scolarité ou de sa profession ou d'opérer une reconversion ;
Préciser la nature et le coût des travaux d’aménagement nécessaires à l’adaptation des lieux de vie de la victime son nouvel état, et du matériel approprié à son nouveau mode de vie et à son amélioration ;
- Donner un avis sur l'importance des souffrances physiques et des atteintes esthétiques et sur l'existence d'un préjudice sexuel ;
- Dire s’il existe un préjudice d’agrément, et notamment une atteinte aux conditions d’existence dans la vie quotidienne, en précisant la difficulté ou l'impossibilité du blessé de continuer à s'adonner aux sports et activités de loisirs ;
Disons que, pour exécuter la mission, l’expert sera saisi et procédera conformément aux dispositions des articles 232 à 248, 263 à 284-1 du code de procédure civile,
Disons que l’exécution de l’expertise est placée sous le contrôle du juge spécialement désigné à cette fin, en application des articles 155 et 155-1 de ce code ; que toute correspondance émanant des parties, de leurs conseils, de l’expert devra être adressée au juge chargé du contrôle de l’exécution de l’expertise, service du contrôle des expertises,
1. Les pièces
Enjoignons aux parties de remettre à l’expert :
-le demandeur, immédiatement toutes pièces médicales ou para-médicales utiles à l’accomplissement de la mission, en particulier les certificats médicaux, certificats de consolidation, documents d’imagerie médicale, compte-rendus opératoires et d’examen, expertises ;
-les défendeurs aussitôt que possible et au plus tard 8 jours avant la première réunion, les documents, renseignements, réclamations indispensables au bon déroulement des opérations, sans que les règles du secret médical ne puissent leur être opposées ;
Disons qu’à défaut d’obtenir la remise des pièces qui lui sont nécessaires l’expert pourra être autorisé par le juge charge du contrôle des expertises à déposer son rapport en l’état ; Que toutefois il pourra se faire communiquer directement, par tous tiers : médecins, personnels para-médicaux, établissements hospitaliers et de soins, toutes pièces médicales qui ne lui auraient pas été transmises par les parties et dont la production lui paraîtra nécessaire ;
Disons que l’expert s’assurera, à chaque réunion d’expertise, de la communication aux parties des pièces qui lui sont remises, dans un délai permettant leur étude, conformément au principe de la contradiction ; que les documents d’imagerie médicale pertinents seront analysées de façon contradictoire lors des réunions d’expertise ; Que les pièces seront numérotées en continu et accompagnées d’un bordereau récapitulatif ;
2. La convocation des parties
Disons que l’expert devra convoquer toutes les parties par lettre recommandée avec accusé de réception et leur avocat par lettre simple, les avisant de la faculté qu’elles ont de se faire assister par le médecin-conseil de leur choix ;
3. Le déroulement de l’examen clinique
Disons que l’expert procédera à l’examen clinique, en assurant la protection de l’intimité de la vie privée de la personne examinée et le secret médical pour des constatations étrangères a l’expertise ; qu’à l’issue de cet examen, en application du principe du contradictoire il informera les parties et leurs conseils de façon circonstanciée de ses constatations et de leurs conséquences;
4. L’audition de tiers
Disons que l’expert pourra recueillir des informations orales, ou écrites, de toutes personnes susceptibles de l’éclairer ;
5. Le calendrier des opérations, les consignations complémentaires, la note de synthèse
Disons que l’expert devra :
- en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations à l’issue de la première réunion d’expertise ; l’actualiser ensuite dans le meilleur délai,
. en fixant aux parties un délai pour procéder aux interventions forcées ;
. en les informant de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse ou son projet de rapport ;
- adresser dans le même temps le montant prévisible de sa rémunération qu’il actualisera s’il y a lieu, procédant parallèlement aux demandes de provisions complémentaires ;
- adresser aux parties un document de synthèse, sauf exception (par exemple : réunion de synthèse, communication d’un projet de rapport) dont il s’expliquera dans son rapport, et arrêter le calendrier de la phase conclusive de ses opérations :
. fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse, lesquelles disposeront d’un délai de 4 à 5 semaines à compter de la transmission du rapport ;
. rappelant aux parties, au visa de l’article 276 alinéa 2 du code de procédure civile, qu’il n’est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au-delà du terme qu’il fixe ;
6. Le rapport
Disons que l’expert répondra de manière précise et circonstanciée à ces dernières observations ou réclamations qui devront être annexées au rapport définitif dans lequel devront figurer impérativement :
- la liste exhaustive des pièces par lui consultées ;
- le nom des personnes convoquées aux opérations d’expertise en précisant pour chacune d’elle la date d’envoi de la convocation la concernant et la forme de cette convocation ;
- le nom des personnes présentes à chacune des réunions d’expertise ;
- la date de chacune des réunions tenues ;
- les déclarations des tiers entendus par lui, en mentionnant leur identité complète, leur qualité et leurs liens éventuels avec les parties ;
- le cas échéant, l’identité du technicien dont il s’est adjoint le concours, ainsi que le document qu’il aura établi de ses constatations et avis (lequel devra également être joint à la note de synthèse ou au projet de rapport) ;
L’original du rapport définitif (un exemplaire) sera déposé au greffe du Tribunal Judiciaire de LILLE, service du contrôle des expertises, [Adresse 2], dans le délai de six mois à compter de l’avis de consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicité en temps utile auprès du juge du contrôle (en fonction d’un nouveau calendrier prévisionnel préalablement présenté aux parties. L’expert devra, dans le même temps, en adresser un exemplaire aux parties et à leur conseil.
7. La consignation
Disons que les frais d’expertise seront avancés par l’Etat, conformément aux dispositions de l’article 116 du décret du 28 décembre 2020 sur l’aide juridique,
Si la date de consolidation ne peut pas être fixée, l’expert établira un pré-rapport décrivant l’état provisoire de la partie demanderesse et indiquera dans quel délai celle-ci devra être réexaminée,
Condamnons la Société AIG EUROPE SA à payer à Madame [U] [G] la somme provisionnelle de 8.000 euros ;
Disons n’y avoir lieu à référé sur la demande de condamnation au titre de la sanction prévue à l’article L211-13 du Code des assurances ;
Rappelons que la présente décision est commune et opposable à la CPAM des FLANDRES ;
Déboutons Madame [U] [G] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Laissons à Madame [U] [G], bénéficiaire de l’aide juridictionnelle partielle à hauteur de 25%, la charge des dépens de la présente instance;
Disons que les frais d’expertise, à hauteur de 25% seront avancés par l’Etat, conformément aux dispositions de l’article 119 du décret du 19 décembre 1991 sur l’aide juridique ;
Rappelons que la présente décision est exécutoire par provision.
La présente ordonnance a été signée par la juge et le greffier.
LE GREFFIER LA JUGE DES RÉFÉRÉS
Sébastien LESAGE Sarah HOURTOULE