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09/07/2024 | FRANCE | N°22/05427

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Chambre 01, 09 juillet 2024, 22/05427


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Chambre 01
N° RG 22/05427 - N° Portalis DBZS-W-B7G-WKSQ



ORDONNANCE D’INCIDENT

DU 09 JUILLET 2024




DEMANDERESSE AU PRINCIPAL :
(défenderesse à l’incident) :

Mme [B] [S] [E]
[Adresse 4]
[Localité 1]
représentée par Me Corinne THULIER-DESURMONT, avocat au barreau de LILLE



DÉFENDEURS AU PRINCIPAL :
(demandeurs à l’incident)

Mme [D] [E]
[Adresse 8]
[Localité 2]
représentée par Me Anthony BERTRAND, avocat au barreau de LILLE


M. [W] [E]
[Adresse 7]
[Localité 3]
représenté par Me Anthony BERTRAND, avocat au barreau de LILLE

M. [R] [E]
[Adresse 6]
[Localité 5]
représenté par Me Anthon...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Chambre 01
N° RG 22/05427 - N° Portalis DBZS-W-B7G-WKSQ

ORDONNANCE D’INCIDENT

DU 09 JUILLET 2024

DEMANDERESSE AU PRINCIPAL :
(défenderesse à l’incident) :

Mme [B] [S] [E]
[Adresse 4]
[Localité 1]
représentée par Me Corinne THULIER-DESURMONT, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDEURS AU PRINCIPAL :
(demandeurs à l’incident)

Mme [D] [E]
[Adresse 8]
[Localité 2]
représentée par Me Anthony BERTRAND, avocat au barreau de LILLE

M. [W] [E]
[Adresse 7]
[Localité 3]
représenté par Me Anthony BERTRAND, avocat au barreau de LILLE

M. [R] [E]
[Adresse 6]
[Localité 5]
représenté par Me Anthony BERTRAND, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION

Juge de la mise en État : Marie TERRIER,

Greffier : Benjamin LAPLUME,

DÉBATS :

A l’audience du 06 Mai 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré, les avocats ont été avisés que l’ordonnance serait rendue le 09 Juillet 2024.

Ordonnance : contradictoire, en premier ressort, mise à disposition au Greffe le 09 Juillet 2024, et signée par Marie TERRIER, Juge de la Mise en État, assistée de Benjamin LAPLUME, Greffier.

Expose du litige

Vu l’action engagée par Madame [B] [S] à l’encontre de Messieurs [R] et [W] [E] et Madame [D] [C] née [E] suivant assignations délivrées les 18 et 21 juillet 2022 devant le tribunal judiciaire de Lille aux fins de désignation d’un notaire pour l’établissement d’ un acte de partage complémentaire ;

Vu la constitution d’avocat au soutien des intérêts en défense ;

Vu les demandes faites le 11 janvier 2024 aux fins de clôture et fixation à plaider du dossier;

Vu le message RPVA du juge de la mise en état transmis aux parties le 12 janvier 2024 les invitant à se prononcer sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir relevée d’office, compte tenu de l’existence d’un partage amiable non remis en cause;

Vu les dernières conclusions d’incident notifiées par la voie électronique le 17 février 2024, par le conseil de Messieurs [R] et [W] [E] et Madame [D] [C] et soutenues oralement à l’audience, aux fins de voir :

Vu les articles 31, 122 et 789 du code de procédure civile,

Déclarer l’action de Madame [S] en complément de part irrecevable pour défaut d’intérêt à agir ;
Condamner Madame [S] à payer la somme de 10.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamner Madame [S] aux entiers frais et dépens ;
S’associant à la fin de non-recevoir , les consorts [E] remarquent que les demande ne portent que sur des indemnités de rapport qui ne sont pas des biens indivis au sens de l’article 892 du code civil et qu’il n’est au contraire revendiqué aucun bien dont l’omission devrait donner lieu à un partage complémentaire. Ils soulignent qu’en l’espèce l’opération dont il est désormais demandé la qualification comme donation était connue de tous.

Vu les dernières conclusions d’incident notifiées par la voie électronique le 7 mars 2024, par le conseil de Madame [B] [S] et soutenues oralement à l’audience, aux fins de voir :

Dire que Madame [S]-[E], en tant qu’héritière de Madame [F] [E] née [M], a un intérêt à agir en partage successoral complémentaire ;
Déclarer recevable et bien fondée l’action en partage complémentaire formée par Madame [S]-[E] ;
Condamner solidairement Monsieur [R] [E], Madame [D] [C]-[E], Monsieur [W] [E] à payer à Madame [S]-[E] la somme de 12.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Débouter Monsieur [R] [E], Madame [D] [C]-[E] et Monsieur [W] [E] de toutes autres demandes, fins et conclusions.
Madame [B] [S] sollicite un partage successoral complémentaire en faisant valoir que des avances ont été qualifiées de prêts alors qu’il s’agissait de donations et que dès lors une indemnité de rapport a été omise dans le partage et constitue un bien indivis au sens de l’article 892 du code civil.

Elle allègue qu’il importe peu que la donation ait été ou non connue lors du partage pour constater l’omission d’un bien indivis, que seul compte le fait qu’une valeur de rapport n’ait pas été reprise dans la masse partageable, qu’il s’agisse d’un oubli, d’une mauvaise qualification juridique de l’opération ou d’une erreur de calcul.

Elle explique que sa simple qualité d’héritière suffit à démontrer son intérêt à agir pour solliciter un partage complémentaire et qu’il n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l’action. Elle soutient que l’existence de biens indivis omis devrait s’apprécier dans le cadre du débat au fond puisqu’il s’agit de l’objet du débat lui-même.

L’incident a été mis en délibéré au 9 juillet 2024

Motifs

Sur l’irrecevabilité pour défaut d’intérêt à agir

Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Par ailleurs selon l’article 125 alinéa 2 du code de procédure civile, le juge peut relever d’office la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir.

L'article 789, 6°, du même code dispose que lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les fins de non-recevoir.

Aux termes des dispositions de l’article 892 du code civil, « la simple omission d’un bien indivis donne lieu à un partage complémentaire portant sur ce bien ».

Il est ainsi admis notamment que les demandes en rapport d’une donation déguisée dont aurait bénéficié un héritier et en application de la sanction du recel successoral ne peuvent être formées qu'à l'occasion d'une instance en partage successoral.

(1re civ., 30 janvier 2019, pourvoi n° 18-11.078 ; 1re civ., 6 novembre 2019, pourvoi n° 18-24.332 ; 1re civ., 2 septembre 2020, pourvoi n° 19-15.955)

Il en résulte que lorsque les parties ont procédé à un partage amiable de la succession, de sorte qu'elles ne sont plus en indivision, un héritier, qui n'a ni engagé une action en nullité de ce partage ni agi en complément de part ou en partage complémentaire, n'est plus recevable à former des demandes en rapport et en application de la sanction du recel successoral.

En effet, dès lors que le rapport est une institution préalable au partage, il n’a plus vocation à exister quand les parties ont cessé d’être en indivision, les parties demeurant toujours libre d’y renoncer.

En l’espèce, Madame [S] revendique uniquement former une demande en partage complémentaire sur l’indemnité de rapport qui selon elle aurait été omise du partage amiable auquel elle a souscrit, comme ses cohéritiers indivis le 7 février 2020.

Aucune demande portant annulation du partage amiable notamment pour vice du consentement ou complément de part tel que défini à l’article 889 du code civil n’a été introduite.

Il appartient alors à Madame [S] de justifier qu’un bien a été omis pour établir son intérêt à agir en partage complémentaire au sens de l’article 892 du code civil.


Or, elle n’invoque aucun bien subsistant puisqu’elle se contente de remettre en cause la qualification qui a été convenue entre les parties sur l’existence d’un prêt.

Le partage amiable n’étant pas remis en cause, les parties n’ont plus la qualité entre elle de cohéritiers indivis et Madame [S] se trouve privée de son intérêt à agir en complément de part pour l’intégration d’une indemnité de rapport.

Sur les demandes accessoires

L’article 696 du code de procédure civile énonce que la partie perdante est en principe condamnée aux dépens.

Il y a lieu en conséquence de condamner Madame [B] [S], qui succombe à l’instance, aux dépens.

L’article 700 du même code dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il doit à ce titre tenir compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée et peut écarter pour les mêmes considérations cette condamnation.

L’équité commande de débouter les parties de leur demande en application de l’article 700 du code de procédure civile.

L’exécutoire provisoire est de droit.

Il y a lieu de constater que l’incident met fin à l’instance.

PAR CES MOTIFS

Nous, juge de la mise en état, statuant publiquement, par ordonnance contradictoire, susceptible d’appel, et par mise à disposition au greffe,

Déclarons irrecevable l’action en complément de part introduite par Madame [B] [S] à l’encontre Messieurs [R] [E], Monsieur [W] [E] et Madame [D] [E] épouse [C] comme privée d’intérêt à agir ;

Déboutons Madame [B] [S] de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboutons Monsieur [R] [E], Monsieur [W] [E] et Madame [D] [E] épouse [C] de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons Madame [B] [S] au paiement des dépens ;

Rappelons que la présente ordonnance est exécutoire de droit par provision.

Constatons que l’incident met fin à l’instance.

LE GREFFIER LE JUGE DE LA MISE EN ÉTAT

Benjamin LAPLUME Marie TERRIER


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Chambre 01
Numéro d'arrêt : 22/05427
Date de la décision : 09/07/2024
Sens de l'arrêt : Déclare la demande ou le recours irrecevable

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-09;22.05427 ?
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