TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
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Chambre 01
N° RG 22/01478 - N° Portalis DBZS-W-B7G-V53Q
JUGEMENT DU 09 JUILLET 2024
DEMANDEUR:
M. [P] [N]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Me Claire TITRAN, avocat au barreau de LILLE
DÉFENDEUR:
M. [E] [V]
[Adresse 1]
[Localité 4]
représenté par Me Laurent CALONNE, avocat au barreau de LILLE
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Président : Marie TERRIER,
Assesseur : Juliette BEUSCHAERT,
Assesseur : Nicolas VERMEULEN,
Greffier : Benjamin LAPLUME,
DÉBATS
Vu l’ordonnance de clôture en date du 13 Octobre 2023.
A l’audience publique du 06 Mai 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré, les avocats ont été avisés que le jugement serait rendu le 09 Juillet 2024.
Vu l’article 804 du Code de procédure civile, Marie TERRIER, Présidente de chambre, entendu en son rapport oral, et qui, ayant entendu la plaidoirie, en a rendu compte au Tribunal.
JUGEMENT : contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 09 Juillet 2024 par Marie TERRIER, Présidente, assistée de Benjamin LAPLUME, Greffier.
EXPOSÉ DES FAITS
Par acte de commissaire de justice du 1er mars 2022, Monsieur [P] [N] a fait assigner Monsieur [E] [V] devant le tribunal judiciaire de Lille en remboursement d’une somme de 20.000€ remise à titre de prêt.
Sur cette assignation régulièrement délivrée selon les modalités des articles 656 et 658 du code de procédure civile, le défendeur a constitué avocat.
Les parties ont échangé leurs conclusions de sorte que la clôture est intervenue le 13 octobre 2023 et l’affaire fixée à l’audience de plaidoiries prise à juge rapporteur du 6 mai 2024.
Aux termes de ses conclusions signifiées par voie électronique le 7 juillet 2022, Monsieur [P] [N] sollicite du tribunal ;
Vu les dispositions des articles 1104 et 1892 du code civil,
Vu les dispositions des articles 1902 et 1903 du code civil,
Vu les dispositions de l’article 1343-2 du code civil,
Vu le constat d’huissier en date du 18 novembre 2021,
RECEVOIR Monsieur [P] [N] en son action et dire le bien fondé,
CONDAMNER Monsieur [E] [V] au paiement de la somme de 20.000€ en remboursement du prêt accordé,
MAJORER le montant des condamnations des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2022, date de mise en demeure,
ORDONNER la capitalisation des intérêts par année échue,
CONDAMNER Monsieur [E] [V] au paiement de la somme de 4.000€ sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNER Monsieur [E] [V] aux entiers dépens en ce compris les frais de constat d’Huissier de Justice.
Au soutien de son action, il expose qu’il a consenti à Monsieur [E] [V] un chèque de d’une valeur de 20.000 € qu’il lui a remis le 22 juin 2020 et qui a été encaissé le 25 juin 2020. Il explique que la déchéance du terme a été fixée au 5 juillet 2021.
Il considère qu’au regard des échanges intervenus entre les parties, l’existence du prêt n’est pas contestable.
Il ajoute que deux prêts ont été consenti à Monsieur [V] l’un en sa qualité de gérant de la société Urban’s Group et l’autre fait en son nom personnel, du même montant de 20.000€.
Il indique que même en l’absence de documents écrits seulement nécessaire à la comptabilité de la société, il n’a jamais eu d’intention libérale.
Il souligne que le prêt fait par sa société n’a été remboursé qu’après délivrance d’une ordonnance portant injonction de payer.
Par conclusions récapitulatives signifiées par la voie électronique le 8 août 2023, Monsieur [E] [V] sollicite du tribunal ;
DÉBOUTER Monsieur [P] [N] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
CONDAMNER Monsieur [P] [N] au paiement de la somme de 2.000€ sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
CONDAMNER Monsieur [P] [N] aux entiers frais et dépens
Monsieur [E] [V] rappelle l’existence des deux prêts et souligne que seul le prêt consenti par la société Urban’s Group a donné lieu à la rédaction d’un écrit de sorte qu’il en ad déduit que le deuxième prêt était une donation pour laquelle il n’a pas hésité à remercier Monsieur [N].
La décision a été mise en délibéré au 9 juillet 2024.
SUR CE,
Aux termes de l’article 1353 alinéa 1 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit prouver le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de l’obligation.
Enfin, il résulte de l’article 1362 du Code Civil, que constitue un commencement de preuve par écrit, tout écrit qui, émanant de celui qui conteste un acte ou de celui qu’il représente, rend vraisemblable ce qui est allégué, à la condition qu’il soit corroboré par un autre moyen de preuve.
En l’espèce, il n’est pas réellement contesté entre les parties que Monsieur [N] a remis une somme de 20.000€ au bénéfice de Monsieur [E] [V] puisque seule la motivation de cet acte est remise en cause. Si Monsieur [N] considère que la somme a été remise en contre partie d’un prêt, impliquant pour Monsieur [V] une obligation de remboursement, celui-ci oppose l’intention libérale de Monsieur [N].
Au soutien de sa demande, Monsieur [P] [N] produit non seulement la copie du chèque tirée sur son compte personnel, dont la réalité n’est pas contesté mais aussi des échanges SMS qui proviennent, là encore sans contestation élevée en défense de Monsieur [E] [V] par lequel il répond, notamment le mercredi 30 juin «en ce qui concerne mes intentions, elles sont les mêmes. Te rendre le plus vite possible ce que je dois»
Par ce message, l’obligation de remboursement est établie sous la forme d’un commencement de preuve par écrit qui est utilement complété par l’attestation de Monsieur [X] [L] (pièce n°7 en demande) qui confirme l’existence de deux prêts et donc de deux obligations de remboursement.
En défense, Monsieur [V] se contente de revendiquer une intention libérale mais ne produit aucun élément venant la conforter, la seule preuve du paiement du prêt employeur n’étant pas de nature à justifier de l’extinction de son obligation envers Monsieur [P] [N] à titre personnel.
Selon les dispositions de l’article 1899 du code civil le prêteur ne peut demander la restitution de la chose prêtée avant le terme convenu. Par ailleurs, selon l’article 1900 du Code Civil s’il n’a pas été fixé de terme pour la restitution, le juge peut accorder à l’emprunteur un délai suivant les circonstances.
En l’espèce, dès lors que l’existence du prêt a seulement été reconstituée compte tenu du faisceau d’indices produits, la date du terme n’est pas certaine entre les parties. Ainsi Monsieur [N] a simplement indiqué par un message daté du 30 juin 2021« Concernant le remboursement de ton prêt je te laisse jusqu’au 5 juillet pour procéder au règlement (qui aura lieu tous les mois je te rappelle) ».
S’il peut être estimé que la date du 5 juillet 2021 aurait dû constituer la première échéance de remboursement du prêt, dès lors que les parties ne se sont pas accordées sur un montant mensuel ou sur une date limite, la date du terme demeure inconnue.
Toutefois, dans la mesure où malgré l’envoi d’une lettre de mise en demeure reçue en mains propres le 27 janvier 2022 puis la délivrance d’une assignation le 1er mars 2022, aucun commencement d’exécution n’est intervenu, le débiteur se contentant de contester l’existence de son obligation, il y a lieu de fixer à la date de ce jour la déchéance du terme.
En conséquence, Monsieur [E] [V] sera condamné à payer à Monsieur [P] [N] la somme de 20.000€ assortie des intérêts au taux légal conformément à l’article 1231-6 du Code Civil.
Il y a lieu de prévoir que les intérêts échus au moins pour une année entière produiront intérêt conformément à l’article 1343-2 du Code Civil.
IV / Sur les autres demandes
Sur les dépens Succombant, il y a lieu de condamner Monsieur [E] [V] aux dépens, qui ne pourront comprendre les frais d’huissier en ce qu’ils ne sont pas visés à l’article 696 du Code de Procédure civile.
Sur les frais irrépétibles
Supportant les dépens, il sera condamné à payer à Monsieur [P] [N] une somme de 2.000€ au titre de l’article 700 du Code de Procédure civile et débouté de sa demande du même chef.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal statuant publiquement, par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et rendu en premier ressort:
CONDAMNE Monsieur [E] [V] à payer à Monsieur [P] [N] la somme de 20.000€ (vingt mille euros) assortie des intérêts au taux légal à compter de ce jour;
ORDONNE la capitalisation des intérêts;
CONDAMNE Monsieur [E] [V] à payer à Monsieur [P] [N] la somme de 2.000€ (deux mille euros) au titre de l’article 700 du Code de Procédure civile;
DÉBOUTE Monsieur [E] [V] de sa demande fondée sur l’article 700 du Code de Procédure civile;
CONDAMNE Monsieur [E] [V] aux dépens, en ce non compris le coût du constat d’huissier;
RAPPELLE que la présente décision est assortie de l’exécution provisoire.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE
Benjamin LAPLUME Marie TERRIER